Faut-il planter de nouvelles vignes ? Toutes les régions se sont emparées de la question en vue du changement radical qui interviendra le 1er janvier 2016. Après cette date, en effet, les États membres devront autoriser un droit à la croissance allant jusqu'à 1 % de leur superficie existante, soit 7 500 ha pour la France. Une perspective à l'opposé de l'érosion du vignoble qui a entraîné, en dix ans, la perte de 92 000 ha pour atteindre 755 000 ha en 2013.
Depuis un an, les pouvoirs publics poussent les régions à se projeter dans cette nouvelle optique et à analyser leurs besoins. Force est de constater qu'ils sont très divers. Un monde sépare Midi-Pyrénées, la Bourgogne ou la Provence, qui manquent de vin, du Beaujolais et du Pays nantais, qui peinent à écouler leur production. Les premiers ont besoin de croître et s'interrogent sur le bon rythme à adopter. Les seconds doivent reconquérir leurs marchés avant d'envisager des plantations nouvelles. Entre ces deux extrêmes, nombre de vignobles veulent avancer avec prudence pour ne pas déséquilibrer leurs marchés.
Outre la diversité des situations, notre enquête révèle une constante : partout le négoce semble plus pressé que la production de voir arriver des plantations nouvelles. C'est particulièrement net en Bourgogne, à Cognac et dans la vallée du Rhône, autant de régions où les acheteurs ont connu ou connaissent encore des difficultés d'approvisionnement. On dira que le négoce a beau jeu : il ne supporte pas le coût des plantations et il a tout intérêt à bénéficier d'une offre abondante pour faire de bonnes affaires. Mais il fait aussi valoir que la consommation mondiale de vin continue de croître et que la France serait bien mal avisée de ne pas chercher à en profiter.
Le négoce est également un défenseur bien plus ardent des plantations de vignes sans indication géographique que la production. Il fait valoir que la France est déficitaire sur ce segment bien adapté à la conquête de nouveaux consommateurs. Mais il peine à convaincre. Dans la quasi-totalité des régions - Midi-Pyrénées fait exception -, les producteurs sont hostiles à voir les vins sans IG se développer, redoutant qu'il n'y ait que des clopinettes à y gagner.
Reste que c'est un exercice très difficile, voire impossible, qui attend les responsables professionnels et les vignerons : se projeter dans l'avenir en visant juste. En la matière, les échecs sont nombreux. Réaliser une nouvelle plantation comportera toujours une part de risque qu'il faudra assumer.