« Les élèves apprécient qu'un viticulteur se déplace pour venir les voir, témoigne Tarek Berrada, viticulteur à Mailly-en-Champagne, dans la Marne. Ils sont motivés et curieux. Le bilan est très positif. » Ce vigneron est intervenu en mars 2015 dans le lycée hôtelier Vauban d'Aire-sur-la-Lys, dans le Pas-de-Calais. « Quand j'ai constaté, en débutant mon intervention, que les lycéens ne savaient pas situer la Champagne et qu'ils ne connaissaient aucun nom de marque, je me suis dit qu'il y avait tout à faire... », poursuit-il.
Conscient de la sous-représentation du champagne dans la formation des lycées hôteliers, le pôle communication des Champagnes de Vignerons, au SGV (Syndicat général des vignerons), a décidé de réagir. Il propose depuis 2013 des interventions de deux à trois heures dédiées aux étudiants en sommellerie. Ce service fait appel à des vignerons volontaires qui jouent le rôle d'ambassadeur du champagne auprès de ces futurs professionnels. L'objectif est double : faire connaître l'appellation et montrer aux étudiants qu'à côté des grandes marques, il y a des champagnes de vignerons. Le SGV a ainsi organisé vingt interventions depuis la mise en place de cette action.
Dégustation commentée
Le module de formation comprend la présentation des terroirs de Champagne, des trois cépages (chardonnay, pinot noir, meunier) et un topo sur la vinification et le service. Il aborde aussi l'organisation de la filière. Il se termine par une dégustation commentée de plusieurs cuvées du viticulteur présent et de quelques bouteilles de la vinothèque des Champagnes de Vignerons.
Tarek Berrada a ainsi fait déguster à ses auditeurs un 100 % pinot noir, un 100 % pinot meunier, un blanc de blanc (uniquement à base de chardonnay), un champagne d'assemblage, un demi-sec et un rosé. « À 16 ans, ils aiment bien le goût sucré, donc certains préfèrent le demi-sec. Comme ils apprécient les cocktails, je leur ai donné quelques idées : le champagne se marie bien à la liqueur de sureau et à la mandarine impériale... » L'ouverture d'une bouteille et le service du champagne ont également fait l'objet d'une démonstration. « Le contact avec les élèves et leurs enseignants était très chaleureux, poursuit-il. On a construit quelque chose ensemble. C'est un travail important à mener pour l'appellation. »
Un module pour les enseignants
Maxime Harlin, viticulteur à Port-à-Binson (Marne), a lui aussi participé à ce programme, mais avec un public exclusivement composé d'enseignants. L'intervention s'est déroulée en avril 2015, dans le lycée hôtelier Paul-Augier de Nice. La formation durait une heure et a été renouvelée trois fois dans la matinée. Une trentaine d'enseignants a ainsi suivi ce module. Geoffrey Orban, directeur d'Educavin, à Reims, coanimait la formation. « Nous avons axé notre intervention sur le terroir et l'importance du sol et du cépage dans les sensations en bouche, commente Maxime Harlin. Les professeurs ont été surpris et ont apprécié cette approche concrète. Ils avaient en tête le côté festif du champagne, mais pas celui du terroir. »
Quel que soit le public, chaque participant repart avec des documents préparés par le SGV et avec un jeu de 7 familles présentant les accords mets-vins. « L'intérêt de ces formations repose sur le côté affectif et passionné de la présentation, conclut Maxime Harlin. Je pense qu'il y aura un avant et un après, pour eux, dans leur approche du champagne. »
CORINNE VALIÈRES, PROFESSEUR DE SOMMELLERIE AU LYCÉE CHÂTEAU DES COUDRAIES, À ÉTIOLLES (ESSONNE) « Les mots des viticulteurs portent davantage qu'un cours magistral »
« Je participe au partenariat entre l'Éducation nationale et le SGV depuis deux ans. La première année, l'intervention s'est déroulée dans la journée. Cette année, elle s'est passée en soirée. Le bilan est très positif. La présence des deux viticulteurs a apporté une dimension très professionnelle et très humaine. On est dans le concret. Leurs mots portent davantage qu'un cours magistral. Les étudiants retiennent davantage de connaissances. Ce qui les a également marqués, c'est la dégustation de vin clair. Ils n'avaient jamais eu l'opportunité de goûter à un champagne en cours d'élaboration, avant qu'il ne soit effervescent. Seulement dix étudiants ont participé à cette dégustation (avec l'obligation de recracher !), mais j'ai fait travailler 60 élèves autour du thème du champagne. À l'issue de l'intervention, nous avons en effet partagé un repas. C'était une manière de remercier les viticulteurs et de leur montrer le savoir-faire des étudiants. Les élèves cuisiniers et les pâtissiers avaient concocté des mets en accord avec le champagne. Les serveurs ont créé l'ambiance. Ils ont servi les vins et les sommeliers les ont présentés. »