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VIGNE

Taille Passez vos consignes aux prestataires

FRÉDÉRIQUE EHRHARD - La vigne - n°280 - novembre 2015 - page 58

Lorsque l'on fait appel à un prestataire pour la taille, mieux vaut se déplacer au début du chantier pour expliquer sur place ce que l'on souhaite. Deux vignerons détaillent leur expérience...
LES PRESTATAIRES doivent recevoir des consignes claires pour chaque parcelle. © C. WATIER

LES PRESTATAIRES doivent recevoir des consignes claires pour chaque parcelle. © C. WATIER

« Pour chaque parcelle, je précise le nombre d'yeux à garder en fonction de l'objectif de rendement. » Franck Brossaud, responsable du vignoble de Langlois-Chateau

« Pour chaque parcelle, je précise le nombre d'yeux à garder en fonction de l'objectif de rendement. » Franck Brossaud, responsable du vignoble de Langlois-Chateau

Confrontés à la difficulté de recruter des saisonniers formés à la taille, de plus en plus de vignerons délèguent cette opération à des prestataires sur tout ou partie de leur vignoble. Ces derniers enchaînent les chantiers pour répondre à cette demande croissante. Mais pour finir dans les temps, ils vont parfois trop vite. « Le nombre d'yeux laissés par souche est parfois mal adapté à leur vigueur. Et, souvent, la taille est trop rase. Cela provoque des nécroses qui perturbent la circulation de la sève. Les bourgeons sont alors moins bien alimentés. Le rendement diminue. À moyen terme les ceps dépérissent », note Alexandra Lusson, de la chambre d'agriculture de Gironde. Pour éviter d'en arriver là, il faut bien choisir son prestataire, en ne regardant pas que le tarif, mais aussi la fidélité et la compétence de ses équipes. Puis, il faut prendre le temps de détailler les consignes à appliquer dans chaque parcelle. Deux vignerons nous expliquent comment ils procèdent.

Langlois-Chateau

Une vérification chaque semaine

« Sur nos 70 ha, nous déléguons la taille sur 35 ha. Cela nous évite d'avoir à recruter et à former des saisonniers chaque année », explique Franck Brossaud. Le responsable du vignoble de Langlois-Chateau, à Saint-Hilaire-Saint-Florent, en Maine-et-Loire, travaille depuis plus de dix ans avec le même prestataire.

Ce dernier emploie pendant huit mois par an des saisonniers fidélisés, qui connaissent bien leur travail. « Parmi ces tailleurs, il y a malgré tout des nouveaux venus chaque année. Au début de la saison, je leur explique donc toutes nos attentes. Nos parcelles sont conduites en guyot ou cordon. La taille ne doit pas être trop rase, sinon le cône de dessèchement vient perturber la circulation de la sève. Je demande également aux tailleurs de veiller à ne pas faire de grosses plaies, pour ne pas risquer de favoriser les maladies du bois. »

Pour les parcelles taillées en guyot, il leur précise aussi les règles de pliage des baguettes. Dans celles vendangées à la main, la baguette peut être étalée sur tout le fil. Dans celles vendangées à la machine, elle ne doit pas arriver au niveau du piquet.

Il leur demande également d'orienter le biseau de la coupe de façon à ce que les pleurs ne tombent pas sur le bourgeon voisin. « C'est important en cas de gel. »

Puis il remet au prestataire un calendrier de travail écrit avec les parcelles à tailler chaque semaine, établi en fonction du cépage et de la précocité du terroir. « Pour chaque parcelle, je précise le nombre d'yeux à garder en fonction de l'objectif de rendement. Celui-ci va de 55 hl/ha en cabernet-de-saumur jusqu'à 74 hl/ha en crémant-de-loire », précise-t-il. Pour l'appellation Saumur Champigny, un vin rouge, il leur demande d'enlever un ou deux bourgeons au milieu de la baguette, de façon à obtenir ensuite un bon étalement des grappes.

« Je passe chaque semaine pour vérifier que ces consignes sont bien respectées. Parfois, je dois rappeler de ne pas couper trop ras car certains tailleurs, formés dans les années 1980, ont pris cette habitude. Mais sinon, le travail est bien fait », note-t-il.

Lorsqu'une parcelle est finie, le prestataire lui renvoie la fiche d'intervention signée. Franck Brossaud suit ainsi l'avancement des travaux. « Il y a parfois un décalage lié aux intempéries. Mais les délais sont tenus. » La même équipe effectue ensuite l'ébourgeonnage. « Ainsi, le travail est plus soigné. Les tailleurs savent que s'ils ne nettoient pas finement les pieds lors de la taille, ils auront plus de travail à l'ébourgeonnage, et inversement. »

Domaine Saint-Pierre

Un bon encadrement

« Depuis quatre ans, je fais appel à une entreprise espagnole pour la taille », raconte Francis Torregrossa, du domaine Saint-Pierre, dans l'Hérault. Avec son fils, il cultive 50 ha de vignes à Béziers.

De novembre à février, leur prestataire leur envoie quatre personnes. « L'un d'eux encadre l'équipe. C'est à lui que j'explique ce que je veux à chaque changement de parcelle. Je parle espagnol, ce qui facilite la communication », précise-t-il. Les cordons sont déjà prétaillés. Dans les parcelles IGP, il leur demande de laisser quatre à cinq coursons taillés à deux yeux par souche, et en AOP, seulement trois à quatre coursons. Il repasse ensuite régulièrement pour s'assurer que tout va bien.

« Les mêmes tailleurs reviennent tous les ans. Ils connaissent leur travail. Ils savent sélectionner de nouveaux coursons quand c'est nécessaire ou encore refaire des cordons qui ont vieilli », constate-t-il. En moyenne, ils taillent cinq cents pieds par jour en tirant les bois qui restent au niveau des piquets. « Ils sont bien encadrés, il n'est donc pas nécessaire de les suivre au jour le jour ni de les motiver, ils tiennent le rythme. »

Cette même équipe reste pour la cueillette des asperges puis pour les travaux en vert de la vigne. « Je dois les loger, leur fournir l'eau et l'électricité. Cela me revient plus cher qu'avec des saisonniers locaux, mais le travail est bien mené. »

Des prestations entre coopérateurs champenois

Depuis 2009, la Coopérative vinicole de la vallée de la Marne (Covama) propose à ses adhérents de mettre en relation « ceux qui ont trop de surface avec ceux qui en manquent et qui ont du temps disponible. Ces derniers peuvent ainsi compléter leur revenu en réalisant des prestations chez d'autres », explique Rudy Mroz, responsable de ce service. Une vingtaine d'hectares sont ainsi taillés en prestation chaque année. « La coopérative signe un contrat avec les exploitants, qui précisent leurs attentes par écrit. Certains, par exemple, veulent qu'il y ait deux coursons de remplacement au lieu d'un, ou une baguette de 8 ou 9 yeux au lieu de 10, car ils estiment que c'est suffisant compte tenu de la vigueur de leurs parcelles », note le technicien. La coop sélectionne ensuite des tailleurs parmi les adhérents intéressés et leur transmet ces consignes oralement lorsqu'ils démarrent la parcelle. « Je passe tous les quinze jours pour voir si tout va bien. Je dois parfois rappeler les délais ou demander une finition plus soignée du pied pour éviter les repousses au cours du cycle. Mais, le plus souvent, la qualité du travail est excellente. Les adhérents qui font ces prestations pour d'autres ont à coeur de bien faire. »

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