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VIN

Inserts Bain de jouvence pour vos barriques

MARION BAZIREAU - La vigne - n°281 - décembre 2015 - page 48

Solution bon marché, les inserts de bois de chêne permettent de prolonger la vie des barriques, pour 13 à 30 €/hl. Ils apportent à la fois des arômes et de la rondeur au vin. Le point sur cette offre.
LES INSERTS peuvent redonner vie aux vieilles barriques. ©  P. ROBIN

LES INSERTS peuvent redonner vie aux vieilles barriques. © P. ROBIN

Avant de vous débarrasser de vos vieilles barriques colmatées, vous pouvez y plonger des inserts. Ce sont des « baguettes » de chêne, reliées les unes aux autres, que l'on immerge dans des barriques d'au moins deux ou trois vins. Elles redonnent du boisé et apportent de l'oxygène et de la structure aux vins. Le tout pour 30 à 70 € par barrique, soit 13 à 30 € par hectolitre. C'est plus cher que les staves, mais beaucoup moins que les barriques neuves.

Benoît Verdier, directeur des développements oenologiques pour la tonnellerie Seguin-Moreau, explique que « les vignerons n'ont pas toujours les fonds pour renouveler leur parc de barriques ni assez de cuves pour faire vieillir leurs vins ». Les inserts sont alors une bonne solution. D'ailleurs, dans le monde des alternatifs à la barrique, les inserts sont aujourd'hui les deuxièmes produits les plus vendus, juste derrière les staves.

1. Quelles références ?

On trouve tous types d'inserts sur le marché : en chêne français, sessile ou pédonculé, en chêne américain, en segments plus ou moins longs et épais, de section carrée ou ronde. En général, ils sont issus des mêmes forêts et ont subi la même maturation que les merrains destinés aux barriques.

Les fournisseurs proposent différents types (brasero, convection...) et intensités (légère, moyenne, forte...) de chauffes. Chaque modalité apporte des caractéristiques différentes au vin. Par exemple, la gamme « Œnostick » de Seguin-Moreau se décline en trois références : la « V14 », correspondant à un apport de bois de 7,5 g/l, préserve le fruité du vin tout en lui faisant gagner en volume ; la « V18 » (9 g/l) apporte des arômes de fruits rouges et des notes épicées et vanillées, sans donner trop de tanins ; enfin, la « V22 » (12 g/l) reproduit le style barrique neuve, avec des notes de fruits mûrs, de vanille et de pain grillé, ainsi que du volume et de la sucrosité.

XtraChêne, marque du groupe Chêne et Cie, fait dans l'original. L'entreprise a développé une gamme de billes de bois d'un peu plus de 2 cm de diamètre, les XOakers. D'après Nicolas Rappeneau, responsable de la marque, ce format optimise la surface de contact entre le bois et le vin et permet un dosage très précis. « On conseille généralement 500 g par barrique, l'équivalent de 70 billes, mais le vinificateur peut en mettre plus ou moins. » En outre, les billes facilitent l'élevage des blancs vinifiés en fûts. « Il est plus aisé de remettre les lies en suspension avec ces billes qu'avec des inserts en zigzag qui s'emmêlent dans les cannes de bâtonnage. »

Mais les entreprises continuent d'innover. Ainsi, Nobile (Laffort) va étoffer sa gamme « Barrel Refresh », avec des inserts plus épais, qui donneront davantage de volume aux vins.

2. Pour quels vins ?

En théorie, tous. Dans la pratique, plus de 90 % des inserts sont utilisés sur des vins rouges, en sortie de FML.

Chantal Denis, responsable de la marque Nobile, constate néanmoins que « quelques vignerons font des essais sur des vins blancs, souvent du chardonnay vinifié en barriques. » Les inserts peuvent ensuite être rincés et réutilisés dans des barriques qui logent du rouge.

D'après Jean-Christophe Varron, PDG de Vinéa, les inserts conviennent bien aux petits volumes. « Dès que l'on a des quantités importantes, il est plus confortable d'utiliser des cuves avec des staves. » Et d'ajouter : « Les inserts permettent de réaliser des essais, de tester différentes intensités de boisé et modes de chauffe. »

3. Comment les utiliser ?

Les inserts s'accrochent sous la bonde des barriques à un petit oeillet en Inox. On les force ensuite à entrer par le trou de bonde. Benoît Verdier conseille de les maintenir dans le vin pendant au moins six mois, le bois ayant besoin de temps pour libérer ses composés. « Le bois libère d'abord les composés furaniques, apportant grillé et fumé, puis les aldéhydes-phénols, qui donnent des notes vanillées, et enfin les lactones, qui confèrent des arômes de noix de coco et enrobent le fumé et le grillé pour plus de stabilité et d'élégance. »

D'après Christophe Coupez, directeur de l'Œnocentre de Pauillac, qui a testé diverses références, les inserts doivent être utilisés au plus tôt et sur des vins assemblés. « Si on le fait trop tard, on a plus de risque de se tromper dans le dosage. On peut avoir une forte impression de boisé au moment de la dégustation, mais, souvent, elle s'estompe avec le temps. »

Sur le terrain, les vignerons mettent plus ou moins de chapelets dans leurs barriques, en fonction du profil de vin qu'ils recherchent. D'après Chantal Denis, « ils font souvent des essais avec différentes références et quantités d'inserts sur un même lot. Puis ils dégustent et font des assemblages afin de trouver la recette qui leur convient. »

Pour les aider, Vinéa a défini le « potentiel extractif », qui varie de 40 % à 100 % selon les inserts. Un potentiel de 40 % correspond à quatre chapelets de neuf baguettes. Le vin est alors en contact avec 0,46 m² de chêne. Un potentiel de 100 % correspond à dix chapelets et à 1,16 m² de bois en contact avec le vin. « Ce repère est utile pour les viticulteurs qui débutent. Il les aide à cibler le nombre de baguettes à mettre dans leur vin. Un potentiel de 100 % apporte la même intensité de boisé qu'une barrique neuve de 225 litres, après six à huit mois de contact », explique Jean-Christophe Varron.

Un suivi rigoureux

Quand on utilise des inserts, on doit d'abord veiller à l'hygiène des barriques pour se prémunir des contaminations microbiennes. Jean-Christophe Varron préconise ensuite de travailler de la même manière qu'avec des barriques neuves. « Si le vigneron est habitué à effectuer un nombre défini de soutirages, il doit conserver le même protocole. » Federica Carta, référente oenologie chez Soufflet Vigne, rappelle qu'il faut déguster régulièrement les vins pour suivre leur évolution. Enfin, d'après Benoît Verdier, il est important d'analyser les teneurs en SO2 libre après quinze jours de contact avec le bois et de continuer à le faire toutes les deux semaines pendant au moins trois mois car les alternatifs aux barriques libèrent de l'oxygène (voir La Vigne n° 280, p. 70).

L'Œnocentre de Pauillac évalue les inserts

Les oenologues de Pauillac ont testé dix-sept références d'inserts pour boiser le même vin dans de vieux fûts de huit vins. Le boisage a duré entre février et septembre 2015. À la fin, les vins ont été dégustés à l'aveugle par quatre oenologues et cinq fournisseurs. Ils ont jugé les apports grillé, vanillé, la sucrosité, le gras, la structure et la qualité des tanins. Par rapport au vin témoin, mis dans les mêmes barriques, sans inserts, et noté 100, les notes moyennes des dix-sept références varient de 92 à 120. Ces résultats resserrés semblent indiquer que les inserts sont de qualité assez homogènes et certains n'apportent a priori rien, ou très peu, au vin. Mais ils pourraient aussi résulter de la frilosité des fournisseurs présents dans le jury qui, ne voulant pas prendre le risque de mal noter leurs produits, n'auraient pas utilisé toute l'échelle d'évaluation. Ces essais permettront néanmoins aux oenologues de l'Œnocentre de mieux conseiller leurs clients.

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