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VENDRE - Paroles de consommateurs

Au Salon des Vignerons indépendants de Rennes (Ille-et-Vilaine), le 22 janvier « Le vin, on en parle entre nous... »

ÉMILIE-ANNE JODIER - La vigne - n°283 - février 2016 - page 52

Vin et médias ne font pas bon ménage, les consommateurs en ont bien conscience. Au salon des Vignerons indépendants de Rennes, ils reconnaissent que les informations en la matière sont rares. Sans trop s'en émouvoir.
Marie-Laure et Jacques « On parle du vin entre nous, puisqu'on ne peut pas en parler ailleurs ! » ÉMILIE-ANNE JODIER

Marie-Laure et Jacques « On parle du vin entre nous, puisqu'on ne peut pas en parler ailleurs ! » ÉMILIE-ANNE JODIER

Charles et Annabelle « Non, pourtant les médias auraient un rôle à jouer pour conseiller sur les accords mets-vins. » ÉMILIE-ANNE JODIER

Charles et Annabelle « Non, pourtant les médias auraient un rôle à jouer pour conseiller sur les accords mets-vins. » ÉMILIE-ANNE JODIER

Christophe et Daniel « Que le vin soit absent des médias ne nous gêne pas. Nous savons où aller pour nous renseigner. » ÉMILIE-ANNE JODIER

Christophe et Daniel « Que le vin soit absent des médias ne nous gêne pas. Nous savons où aller pour nous renseigner. » ÉMILIE-ANNE JODIER

Régine, Alain et Monique « Le vin est un peu partout, mine de rien. C'est plus adroit que de l'affichage, il faut lire entre les lignes. » ÉMILIE-ANNE JODIER

Régine, Alain et Monique « Le vin est un peu partout, mine de rien. C'est plus adroit que de l'affichage, il faut lire entre les lignes. » ÉMILIE-ANNE JODIER

Maxime et Xavier « Non, si on ne s'y connaît pas en vin, on peut être facilement perdu, l'information ne vient pas à vous. » ÉMILIE-ANNE JODIER

Maxime et Xavier « Non, si on ne s'y connaît pas en vin, on peut être facilement perdu, l'information ne vient pas à vous. » ÉMILIE-ANNE JODIER

Daniel et James « On parle suffisamment de vin, il n'en faudrait pas plus. L'alcool, c'est un vrai problème... » ÉMILIE-ANNE JODIER

Daniel et James « On parle suffisamment de vin, il n'en faudrait pas plus. L'alcool, c'est un vrai problème... » ÉMILIE-ANNE JODIER

Sokoum et Raphaël « La loi Évin complique les choses, mais il est devenu facile de se renseigner grâce à Internet. ÉMILIE-ANNE JODIER

Sokoum et Raphaël « La loi Évin complique les choses, mais il est devenu facile de se renseigner grâce à Internet. ÉMILIE-ANNE JODIER

« Est-ce qu'on entend assez parler du vin dans les médias ? Attendez que je réfléchisse... » Eugène, 59 ans, et sa femme Marie-Anne, 55 ans, sont pris au dépourvu par la question. Après quelques hésitations, ils reconnaissent que le vin est un grand absent des médias. « C'est vrai que les vignerons n'y sont pas représentés, concède Marie-Anne. D'ailleurs, si on ne nous avait pas conseillé de venir ici aujourd'hui, nous n'aurions pas su qu'il y avait un salon. »

« Le vin dans les médias ? Mais on n'en parle pas du tout ! », s'exclame, mi-interrogative, mi-péremptoire, Karine. Cette jeune femme de 34 ans est accompagnée de Charles. Ils discutent entre eux un instant des émissions culinaires qu'ils apprécient. Karine est catégorique : « Le vin n'y est quasiment jamais abordé. Ce serait pourtant intéressant que des sommeliers commentent ou expliquent les accords mets-vins. » Son ami acquiesce.

Les émissions culinaires reviennent beaucoup dans les conversations : que le vin en soit exclu en mine plus d'un. « On fait bien des émissions qui prônent la bonne bouffe, observe Annabelle, 33 ans. Pourquoi on ne pourrait pas parler du vin de la même manière ? Trop manger, ce n'est pas non plus bon pour la santé ! », glisse-t-elle avec un clin d'oeil.

Les visiteurs du salon sont lucides : « Si on n'ose pas traiter du vin, c'est à cause du tabou de l'alcool, assure Xavier, bientôt quadragénaire, venu avec son frère. Pour moi, c'est un problème. » La fratrie aime le vin et connaît les difficultés de la filière pour communiquer. « Mais les gens ne boiront pas moins parce qu'on ne parle pas du vin, estime-t-il. Ceux qui veulent boire beaucoup s'achètent de la piquette ou choisissent des alcools forts, ils ne vont certainement pas aller acheter chez les vignerons ou le caviste. » Un point de vue largement partagé par tous ceux croisés dans les allées de ce salon.

« L'alcool pose un vrai problème. On ne peut pas dire n'importe quoi non plus, tempère James. À la télévision, c'est très cadré, mais c'est vrai qu'on y parle moins de vin qu'il y a dix ans. Ainsi, on n'entend plus autant parler du beaujolais nouveau qu'auparavant. » Avec son ami Daniel, il considère que le vin devrait avoir sa place dans les magazines d'information « au même titre que la mode, le cinéma ou la gastronomie, dans les pages détente... »

Comment se tenir informé malgré tout ? « Nous faisons confiance à notre caviste », assurent Christophe et son père Daniel. Dans bien des cas, c'est vers cet intermédiaire que les amateurs se tournent. Charles et Annabelle confirment : « Nous allons beaucoup chez les cavistes pour découvrir de nouveaux vins, et nous avons aussi fait partie d'un club d'oenologie. » L'autre interlocuteur privilégié, c'est sans surprise le viticulteur. « Nous adorons venir les voir ici », déclarent en coeur Karine et Nicolas. Eugène et Marie-Anne sont d'accord : « Nous venons pour la première fois sur ce salon, mais nous profitons de nos vacances pour aller les rencontrer. C'est le meilleur moyen pour comprendre leur travail, et ils aiment en discuter. »

Les plus pointus arrivent à trouver des infos dans les médias. « Dans certaines émissions de gastronomie et de terroir, il y a toujours un petit clin d'oeil à la fin sur les vins de la région », observent Jacques et Marie-Laure, deux musiciens d'une quarantaine d'années qui n'allument leur téléviseur que pour regarder ce genre de programmes. « De temps en temps, des reportages sur les régions viticoles sont diffusés. Mais, en règle générale, pour en voir, il faut s'abonner aux revues spécialisées et lire des blogs », admet Raphaël. Il fait découvrir le salon à son collègue Sokoum, qui ne saurait pas s'y retrouver sans guide. Ce qui lui manque, ce sont des pistes pour explorer des petites appellations peu connues.

Alors, le vin devrait-il être plus présent dans les journaux, la publicité, à la télévision ? « Surtout pas ! », s'indigne Alain. Il engage une discussion animée avec ses deux amies, Monique et Régine. « Le vin, ce n'est pas une question de publicité. Ce genre de salon, c'est une com' d'enfer ! », affirme-t-il. Monique et Régine le prennent au mot : « Oui, mais nous, nous étions au courant qu'il avait lieu. Si tu ne le sais pas, comment tu fais ? » Leur ami leur oppose un argument imparable : « Si jamais on parle de ce salon dans les médias, il y aura encore plus de monde ! » Pas question de partager les bons plans ! Pour les trois compères, le vin ne souffre pas d'un manque de médiatisation. « Mine de rien, il est partout, assure Alain. On en parle en famille ou entre copains. C'est plus subtil que des panneaux d'affichage. » Et c'est très bien ainsi !

« Il faut bien qu'on en parle entre nous !, pourrait lui rétorquer Marie-Laure, puisqu'on ne peut pas en parler ailleurs ! Le vin, c'est un produit culturel, qui se transmet comme un patrimoine. » Christophe et son père réagissent de la même façon : « On entend parler du vin dans les médias qu'en certaines occasions, comme pour les foires aux vins, quand ça peut faire marcher le commerce... Mais, entre nous, c'est une histoire qui se transmet, qui se vit. » Sous-entendu : pas besoin des journalistes et des publicitaires pour nous en conter ! Nous entretenons nous-même la flamme !

Xavier et son frère vont plus loin : « Nous n'attendons pas forcément qu'on parle davantage du vin. Ce n'est pas gênant pour le consommateur. Ce qui est étrange, c'est qu'on est le pays du vin et qu'on peut en faire la publicité à l'étranger mais pas chez nous. »

« C'est surtout pour les gens qui ne s'y connaissent pas que c'est un problème », résume très bien Annabelle. « À la télé ou dans les journaux, ils pourraient effectivement apprendre plein de choses, admettent Karine et Nicolas. Nous, nous faisons la démarche d'aller chez les producteurs. Mais quand on ne connaît pas le vin, on s'imagine que c'est compliqué ou alors que c'est trop cher. » « Et, au final, les gens se retrouvent perdus dans les rayons au supermarché du coin... », déplore Raphaël.

« On n'a pas besoin de ça ! objecte Alain. La publicité, cela coûte cher. Je préfère que les vignerons se concentrent sur autre chose. La culture du vin existe, mais pas dans les médias, ça, c'est sûr. Le vin, c'est une affaire privée. On se fait conseiller par un frère, par une amie. Et ainsi, on n'est pas à la botte des grandes surfaces ! », conclut-il avec malice.

La loi Évin, vous connaissez ?

Dans ce salon où se croisent amateurs éclairés et curieux, la loi Évin n'a pas le même retentissement pour tous. « Je ne savais pas que c'était aussi contraignant de communiquer sur le vin, nous dit Charles après qu'on lui a expliqué de quoi il retournait. C'est dommage, c'est un produit au sujet duquel nous avons beaucoup à apprendre... » James est plus au fait : « Réglementer ce que l'on peut dire du vin dans les médias, c'est peut-être bien, mais je doute que cela fasse baisser l'alcoolisme. Parler de dégustation en excluant la notion de plaisir, c'est contre-productif. » Marie-Laure et Jacques estiment, eux, que cette loi ne concerne pas les jeunes qu'ils côtoient au travers de leur profession : « Ils sont en train de changer la façon de boire, ils sont curieux et se font plaisir avec une bonne bouteille qu'on leur a conseillée. Ceux qui s'alcoolisent à l'excès ne le font pas avec du vin. » Pour Xavier, c'est l'empathie qui prime : « Oui, je connais le problème que pose la loi Évin. Je me mets surtout à la place des vignerons qui ne peuvent pas communiquer comme ils le souhaitent sur leur propre travail. Je trouve que c'est un vrai problème. »

LES SUJETS QUI INTÉRESSENT

- Des émissions sur le vin ? « Pourquoi pas ! s'exclament Charles et Annabelle. Ce serait intéressant d'en savoir plus sur la façon dont les vignerons travaillent... »

- Daniel, lui, aimerait en savoir plus sur les vins bio et les sulfites. « Je pense faire une réaction aux sulfites, j'aimerais bien être mieux informé sur le sujet. »

- Jacques et Marie-Laure imaginent un « tour de France des régions viticoles, histoire de ne pas faire de jaloux ! »

- Daniel et Christophe seraient tentés par des documentaires sur les techniques de dégustation.

- Pour Xavier et Maxime, le grand sujet, c'est le terroir : « On s'est rendu compte que c'est ce qui fait le vin ! En plus, ça ferait de belles images ! »

- « Pour qu'il y ait un peu d'équité, il faudrait faire l'inverse de ce que l'on voit habituellement : des émissions sur le vin avec un petit clin d'oeil à la gastronomie ! », imagine Jacques.

- Mais, pour certains, le vin dans les médias reste une chimère : « Le vin, ça s'expérimente, ça se goûte, ça se vit ! », s'enthousiasme Eugène.

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