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VIGNE

Potasse L'amie du 161-49 C

CHRISTELLE STEF - La vigne - n°294 - février 2017 - page 38

Le pépiniériste Pierre-Marie Guillaume est sûr que le 161-49 C dépérit sous l'effet de carences en potasse. Il conseille des apports massifs à l'automne.
LES VIGNES GREFFÉES sur le 161-49 C peuvent dépérir si elles ne sont pas suffisamment pourvues en potassium. © IFV

LES VIGNES GREFFÉES sur le 161-49 C peuvent dépérir si elles ne sont pas suffisamment pourvues en potassium. © IFV

Le dépérissement des vignes greffées sur le 161-49 C serait-il lié à des carences en potasse ? Pierre-Marie Guillaume, pépiniériste à Charcenne (Haute-Saône), en est convaincu. Et il ne manque pas d'arguments. C'est en observant il y a cinq ans une vigne de chardonnay à Beaune qu'il a eu la puce à l'oreille. « Cette parcelle greffée sur 161-49 C a bien démarré la première année, explique-t-il. Puis, en deuxième feuille, elle a présenté les premiers signes de rabougrissement. Le vigneron m'a alors expliqué que la vigne précédente était plantée sur SO4, un porte-greffe qui assimile bien la potasse. Or, elle montrait déjà des signes de carence. Et au moment de la nouvelle plantation, le vigneron n'a pas réalisé de fumure de fond. Je pense que le 161-49 C n'a pas supporté ce déficit. »

Le 161-49 C existe depuis plus de cent ans. Il s'est fortement implanté en Bourgogne car il confère une vigueur modérée au greffon et maintient une bonne acidité dans les vins. Il est très résistant au calcaire, de fertilité normale et apprécie les sols drainants. En Bourgogne, les sols sont plutôt calcaires et argilo-calcaires avec une forte capacité d'échange cationique. Dans ce cas, une grande partie de la potasse se fixe sur les argiles et n'est plus disponible pour la vigne.

« Autrefois, les vignerons apportaient beaucoup de potasse. Puis, dans les années 1970 est arrivé le SO4 qui assimile très bien cet élément. Des carences en magnésie sont apparues par effet d'antagonisme avec la potasse. Et le pH des vins est monté à cause d'un excès de potassium dans les moûts. On a alors conseillé d'arrêter les apports de potasse. Les vignes ont été mises au régime sec. Depuis, le garde-manger s'est vidé. Les porte-greffes qui absorbent facilement la potasse s'en sortent. Mais le 161-49 C accuse le coup », explique le pépiniériste. Et de rappeler qu'à Cognac, ce porte-greffe ne pose aucun problème. Or, « les Charentais apportent 150 unités de potassium chaque année », assure-t-il.

Fort de ce raisonnement, il conseille un traitement de choc contre le dépérissement des vignes greffées sur 161-49 C : soit 200 à 250 unités sous la forme de sulfate de potassium après les vendanges la première année ; l'année suivante, des compléments foliaires en mai, juin et juillet ; et après les vendanges, à nouveau 150 à 200 unités ; puis chaque année, en vitesse de croisière, 60 à 70 unités. « Il est indispensable de faire des apports massifs afin de le rendre disponible dans la solution du sol. »

Bruno Bourrié, d'OLEA, consultant en agronomie, fait la même analyse. En 2014 et 2015, il a suivi un essai à Orgnac-l'Aven (Ardèche), dans une parcelle de viognier greffée sur 161-49 C. En troisième feuille, cette vigne était gravement affectée par de la thyllose. Bruno Bourrié y a testé divers apports de potasse au sol et en foliaire. Le traitement le plus efficace : 200 kg/ha de K2O au sol associé à des apports de potasse en foliaire ou de biostimulants. « Nous avons remonté les niveaux de potassium dans la plante et limité la mortalité des ceps. »

Pour Pierre-Guillaume, après le 161-49 C, c'est désormais le 41 B qui montre des signes de faiblesse. « Depuis trois à quatre ans, des viticulteurs de Chablis lui reprochent de ne plus pousser et de mettre du temps à s'installer. Or, le 41 B a lui aussi des difficultés à assimiler le potassium et a besoin de sols bien pourvus en cet élément. Mais, comme ailleurs, les viticulteurs font l'impasse sur la potasse. »

JEAN-MARC VINCENT, VITICULTEUR À SANTENAY, EN CÔTE-D'OR, SUR 6 HA DE VIGNES « J'en ai apporté 300 unités cet automne »

« Mon vignoble est largement planté avec le 161-49 C. En 2015 et 2016, j'ai observé les premiers symptômes de dépérissement dans deux jeunes parcelles : l'une de chardonnay plantée il y a six ans et l'autre de pinot noir âgée de dix ans. Dans la première, 10 à 15 % des pieds sont touchés, dans la seconde, 2 à 3 %. Dans le chardonnay, j'observe des lunes de dépérissement. Au départ, je pensais que c'était lié à une mauvaise préparation des sols. Aujourd'hui, je pense que c'est dû à un manque de potasse. Il y a quinze ans, j'ai fait des apports de potasse dans mes pinots noirs pour corriger une carence. Ces vignes n'ont à présent aucun souci. J'ai arrêté par la suite ces apports. Or, le 161-49 C assimile mal cet élément. À l'automne 2016, j'ai donc apporté 300 unités de potasse dans les vignes qui dépérissaient. Je les ai positionnées en profondeur avec une sous-soleuse car le potassium migre difficilement dans le sol. Je verrai cette saison le résultat. »

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