Plasmopara viticola est l'agent du mildiou de la vigne. On pensait qu'il était seul. En fait, non. Il existe cinq mildious de la vigne, du moins aux États-Unis, le berceau de la maladie. C'est ce qu'a découvert l'Inra de Bordeaux lors de prospections réalisées en Amérique du Nord sur des vignes sauvages et des vignes cultivées. L'institut travaille à la description de ces espèces avec Hermann Voglmayr, de l'Université de Vienne, en Autriche, le spécialiste mondial de la taxonomie des Oomycètes. En attendant, elles ont été baptisées : formes spéciales (f. sp.) aestivalis, vinifera, quinquefolia, vulpina et riparia.
« Il existe une diversité très importante du mildiou aux États-Unis. Mais, en Europe, une seule espèce a été introduite », note François Delmotte, généticien des populations à l'Inra de Bordeaux. Il s'agit de l'espèce que les spécialistes ont dénommé P. viticola f.sp. aestivalis et non pas, comme on aurait pu s'y attendre, de P. viticola vinifera.
En fait, ces deux espèces peuvent se développer sur les cépages cultivés. Ce qui les distingue, ce sont les espèces sauvages qu'elles parasitent. « En Amérique du Nord, le mildiou aestivalis est présent sur Vitis aestivalis et abonde sur Vitis vinifera, Concord et Niagara (V. labrusca). Quant au mildiou vinifera, il se rencontre sur plusieurs espèces de vignes sauvages (V. vulpina, V. cinerea et V. aestivalis) et, bien entendu, sur tous les cépages de V. vinifera », détaille François Delmotte.
Les autres mildious sont bien plus spécialisés. Le quinquefolia ne se développe que sur les vignes vierges (Parthenocissus). De même, le vulpina n'a été trouvé que sur Vitis vulpina. Et le mildiou riparia n'infecte que Vitis riparia et V. rupestris (à l'origine des porte-greffes) et quelques hybrides interspécifiques (Chancellor notamment). « Étonnamment, nos résultats montrent que la vigne cultivée est naturellement résistante au mildiou rupestris qui parasite les géniteurs de nos porte-greffes ! », précise François Delmotte.
Cette découverte permet de mieux comprendre l'origine du mildiou en Europe. Le parasite est né aux États-Unis où il s'est différencié sur les Vitis sauvages. À la fin du XIXe siècle (1878), quelques souches de mildiou aestivalis ont été introduites en Europe, probablement avec les vignes américaines importées pour lutter contre l'oïdium et le phylloxéra. Mais, jusqu'ici, le mildiou vinifera n'a pas été introduit en Europe. Or, il paraît tout aussi dangereux pour nos cépages cultivés...
« Il ne faut pas introduire de nouvelle espèce de mildiou en Europe, ni même de variant de l'espèce déjà présente », insiste François Delmotte.