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VENDRE - Paroles de consommateurs

Au Salon des vins bio et HVE des vignerons indépendants, à Paris, le 20 mai. « Les vignerons doivent no us accorder du temps »

MARION BAZIREAU. - La vigne - n°299 - juillet 2017 - page 56

Les mordus de vin souhaitent que les vignerons les emmènent dans leurs vignes et leur parlent de leur métier lorsqu'ils passent leurs vacances dans un vignoble. Les simples amateurs se contentent d'être bien reçus.
Marie et Pascal « Lorsqu'on voit le vigneron dans son environnement, on en garde une image très forte. » PHOTO : B. BAZIREAU

Marie et Pascal « Lorsqu'on voit le vigneron dans son environnement, on en garde une image très forte. » PHOTO : B. BAZIREAU

« Aimeriez-vous partir en vacances dans un vignoble ? » C'est la question que nous avons posée aux visiteurs du Salon des vins bio et HVE des Vignerons indépendants de France, à Paris, le 20 mai dernier. « C'est mon rêve, a reconnu Catherine, une aide-soignante de 56 ans. J'adore le gewurztraminer et j'aimerais découvrir l'Alsace, mais je ne trouve pas d'accompagnateur. » C'est la première fois qu'elle se rend à un salon des vins, ayant convaincu son ami Philippe de se joindre à elle. « Je prends peu de vacances par manque de moyens. J'ai visité la Touraine, mais nous n'avions vu que les châteaux. Je ne suis jamais rentrée dans la cave d'un vigneron. »

Catherine fait exception. Hormis les plus jeunes (lire encadré), les consommateurs avec qui nous avons échangé ont déjà eu l'occasion de sillonner les vignobles. Souvent, ce n'était pas leur intention première, comme l'illustre Michel, 58 ans, pigiste pour une revue médicale : « Je me déplace beaucoup pour le travail. Si je passe dans une région viticole et que j'ai un peu de temps devant moi, je m'arrête au hasard dans une cave. » Mais s'il s'agit de partir en vacances, le vin ne compte plus pour Michel. « Je choisis ma destination en fonction du lieu de résidence de mes amis ou des loisirs, souvent sportifs, que je vais pouvoir partager en famille. »

D'autres essayent de concilier leur passion avec le vin. Didier est punk, impossible de ne pas le remarquer. Sa compagne, elle, préfère l'archéologie. Ces deux hobbies rythment leur temps libre. L'année dernière, l'été venu, ils ont pris leur tente et le train direction la Bourgogne pour faire le tour des sites remarquables : le MuséoParc Alésia, l'abbaye Saint-Germain à Auxerre... « Nous avons beaucoup marché. Lorsque nous apercevions des domaines, nous nous arrêtions pour déguster. Ce n'était pas le but principal de notre voyage, mais nous apprécions beaucoup le vin. Comme nous connaissons bien les sols et l'Histoire, le contact est toujours bien passé avec les vignerons. »

Même chose pour Jérôme, ingénieur informaticien de 37 ans, qui profite d'une percée du soleil pour faire une pause à l'extérieur du salon avec sa compagne. « Il y a quelques années, je faisais beaucoup de cyclotourisme. Tous les ans, nous partions en vélo avec une bande de six amis. Comme moi, ils sont tous amateurs de vin. Du coup, nous choisissions souvent des itinéraires recoupant des routes des vins. »

Jérôme a ainsi pu découvrir une bonne partie des régions viticoles françaises. Il ne lui manque que la vallée du Rhône. « C'est l'Alsace que j'ai préférée, tant pour les paysages que pour l'excellent accueil que nous avons reçu dans les domaines. » Jérôme a également eu l'occasion de courir le Marathon du Médoc, une perruque rose vissée sur la tête. « C'était vraiment très festif ! Et je connais très bien l'Entre-Deux-Mers. J'adore ses paysages très vallonnés et ses propriétés moins tape-à-l'oeil que dans le Médoc ou à Saint-Émilion. »

Comme ils étaient à pied ou à vélo, ni Didier ni Jérôme n'ont rapporté de vin chez eux. « Nous ne pouvions pas voyager chargés, mais nous achetions souvent une bouteille ou deux pour le repas du soir », se rappelle Didier.

Tout l'inverse de Marie et Pascal qui affirment prendre la route des vignobles dès que leur stock de vins se fait trop maigre. À voir leur chariot chargé de cartons, il semble que, cette fois, le couple de cinquantenaires n'ait pas pu attendre sa prochaine escapade. « Nous sommes des oenotouristes aguerris, nous avons visité Gaillac, la Côte-d'Or, la Dordogne, Bordeaux, l'Alsace et la Corse, liste Pascal, responsable des services généraux. Nous partons en voiture de Paris et revenons le coffre rempli. »

Marie et Pascal aiment découvrir les vignerons sur les salons parisiens et leur rendre visite sur leur exploitation. « Lorsqu'on voit le vigneron dans son environnement, on en garde une image très forte, à laquelle on repense lorsque l'on boit son vin dans notre appartement de Seine-et-Marne », nous explique Marie. Son meilleur souvenir ? « En Corse, notre visite au domaine de l'Enclos des Anges que nous avions repéré dans le Guide des meilleurs vins de France. Les propriétaires nous avaient invités à l'apéritif, c'était extraordinaire, nous sommes repartis à 21 heures. »

C'est cette convivialité que les consommateurs recherchent lorsqu'ils se rendent dans une cave. Ils veulent discuter et comprendre comment le vigneron travaille. Hélas, plusieurs ont été déçus. C'est le cas de Stéphane, level designer (jeux vidéo), qui, l'année dernière, a concocté pour son amie un week-end bucolique en Bourgogne. « Le but était de découvrir la région, profiter de bonnes tables et boire de bons vins. »

Le couple a visité plusieurs propriétés sur la route des grands crus, de Dijon à Beaune. « Nous avons souvent ressenti une petite barrière, comme si nous les dérangions. Nous aurions aimé découvrir les caves et aller faire un tour dans les vignes, mais nous n'avons tout au plus eu le droit qu'à des dégustations. Et, à plusieurs reprises, quand nous avons voulu acheter du vin, nous avons appris qu'il n'y avait pas de stock », regrette le jeune homme. Alors, Stéphane et sa compagne ont pris la direction de la Maison Patriarche, la plus grande cave de Beaune, et payé une dizaine d'euros pour une visite guidée. « Ça avait un côté Disneyland un peu déplaisant, mais au moins nous avons vu les caves, pu acheter une vingtaine de bouteilles et faire plaisir à nos amis. »

Stéphane est originaire du Sud-Ouest : la prochaine fois qu'il ira rendre visite à sa famille, il songe à faire escale à Bordeaux qu'il ne connaît pas encore. « J'espère que les vignerons nous réserveront un meilleur accueil. Récemment, nous sommes allés dans une petite brasserie en Belgique. Le propriétaire a pris le temps de nous faire visiter et de nous expliquer le processus de fabrication de la bière. C'était très intéressant. J'espère pouvoir vivre la même expérience dans le monde du vin. »

Justement, Guillaume et Clotilde, jeunes chefs d'entreprise de 32 et 30 ans, reviennent de Bordeaux. Ils sont allés passer quelques jours chez des amis. Pour être sûrs de ne pas être déçus, ils ont tout prévu à l'avance. « Nous avons réservé un cours de dégustation chez un caviste en ville, raconte Clotilde, et nous avons découvert la route des vins du Médoc en van, pendant toute une journée pour 150 €. Nous sommes passés devant les grands châteaux - Latour, Mouton Rothschild... -, nous avons déjeuné au Château Pomys et, l'après-midi, visité les châteaux Gruaud Larose et Siran. » Ils sont rentrés ravis de leur voyage et l'ont recommandé à leur entourage.

Question de génération

Sans grande surprise, les retraités sont ceux qui parcourent le plus les vignobles. Plusieurs dédient un voyage par an à l'oenotourisme. C'est le cas d'Alain, 66 ans, qui, chaque mois d'octobre part à la découverte d'une région viticole, avec trois amis. « Nous sommes fans des côtes du Rhône sud. Nous aimons aussi la Provence. Cette année, nous partons à Gaillac et à Cahors. Nous réservons un gîte au milieu du vignoble et essayons de repérer à l'avance les domaines qui offrent les meilleurs rapports qualité/prix. » Mêmes habitudes pour Denis et Bertrand. Ils partent au moment de l'Ascension avec leurs compagnes et un troisième couple épicurien. Ils ont déjà explorer la Champagne, Beaune, la Touraine et le Muscadet. « Nous essayons de concilier culture et vin. Sur cinq jours, nous en dédions au moins deux à la visite de caves, explique Bertrand. Nous partons en voiture pour pouvoir rapporter du vin. » Sur le salon, La Vigne a aussi pu discuter avec des jeunes. Le plus souvent, ils n'avaient jamais fait d'oenotourisme, ou avec leurs parents. Mais il semble que ce ne soit qu'une question de temps. Ainsi, Juan, cuisinier de 23 ans, songe à s'offrir un vieux combi pour parcourir les vignobles. « J'adorerais faire un road trip et m'arrêter quand bon me semble. Si j'en ai l'occasion, j'aimerais aussi faire les vendanges. »

NOS CONSEILS

- Beaucoup voyagent sans voiture. Ce n'est pas une raison pour les négliger. Ils peuvent acheter du vin à vos revendeurs une fois rentrés chez eux. Pensez aussi aux plateformes d'expédition de petits volumes, comme Chronoviti, qui permettent aux touristes de retrouver chez eux le vin qu'ils ont dégusté chez vous, à moindre coût.

- Les touristes veulent savoir comment vous travaillez. Emmenez-les dans vos vignes, ou au moins dans votre chai, et parlez-leur de votre métier. Plusieurs nous ont même déclaré qu'ils aimeraient participer aux vendanges.

- Les consommateurs passent souvent par un office de tourisme ou par les guides des vins pour choisir le domaine qu'ils vont visiter. Essayez de vous y faire référencer.

Le Point de vue de

AVEZ-VOUS DÉJÀ PASSÉ DES VACANCES DANS UN VIGNOBLE ?

Isabelle, 34 ans, chargée des ressources PHOTO : B. BAZIREAU

Isabelle, 34 ans, chargée des ressources PHOTO : B. BAZIREAU

Jérôme, 37 ans, ingénieur informaticien  PHOTO : B. BAZIREAU

Jérôme, 37 ans, ingénieur informaticien PHOTO : B. BAZIREAU

Catherine, 56 ans, aide-soignante  PHOTO : B. BAZIREAU

Catherine, 56 ans, aide-soignante PHOTO : B. BAZIREAU

Stéphane, 35 ans, level designer (jeux vidéo) PHOTO : B. BAZIREAU

Stéphane, 35 ans, level designer (jeux vidéo) PHOTO : B. BAZIREAU

Clotilde, 30 ans, chef d'entreprise PHOTO : B. BAZIREAU

Clotilde, 30 ans, chef d'entreprise PHOTO : B. BAZIREAU

Bertrand (à gauche), 64 ans, retraité  PHOTO : B. BAZIREAU

Bertrand (à gauche), 64 ans, retraité PHOTO : B. BAZIREAU

Isabelle, 34 ans, chargée des ressources « Oui, il y a deux ans, nous avons visité deux châteaux du Bordelais avec dégustation. J'ai adoré. »

Jérôme, 37 ans, ingénieur informaticien « Oui, je concilie le vin avec le cyclotourisme. J'ai visité nombre de régions et participé au Marathon du Médoc. »

Catherine, 56 ans, aide-soignante « Non, mais c'est mon rêve. Grande amatrice de gewurztraminer, j'ai très envie de découvrir l'Alsace. »

Stéphane, 35 ans, level designer (jeux vidéo) « Oui, le temps d'un week-end avec ma compagne. Nous avons fait la route des vins de Dijon à Beaune. »

Clotilde, 30 ans, chef d'entreprise « Oui, nous avons pris un cours de dégustation chez un caviste et découvert la route du Médoc. J'en parle aux amis. »

Bertrand, 64 ans, retraité « Oui, une fois par an depuis que je suis à la retraite, avec des amis oenophiles. Nous rapportons toujours du vin. »

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