Les viticulteurs sont-ils prêts à se passer du glyphosate ? « Ouh là là... sujet brûlant ! », réagit d'emblée une conseillère de Loire-Atlantique. Et pour cause : la question agite et divise la profession. Pour certains, la réponse est « oui ». Il faut supprimer l'herbicide. Et même, sans tarder. Une figure du bio, Xavier Planty, du Château Guiraud, à Sauternes, en Gironde, plaide ainsi pour une interdiction immédiate du désherbage chimique. « Il faut remettre en état nos sols, pas les matraquer avec une saleté. Que l'herbe explose cet hiver dans nos vignes ! Se passer du glyphosate, non seulement on peut le faire, mais on doit le faire », a-t-il déclaré à notre site Vitisphere dans une interview publiée le 6 novembre.
À l'inverse, pour beaucoup d'autres, la réponse est « non ». « C'est une matière active qu'il faut garder. Avec l'interdiction de l'aminotriazole, puis celle du glufosinate d'ammonium (Basta), c'est la seule qu'il nous reste pour éliminer chardon, liseron et autres vivaces. Si on doit s'en passer, il faudra s'attendre à être envahi par ces espèces. Je suis prêt à accepter des restrictions d'utilisation, mais pas sa suppression », insiste Jean-Fabiel Denize, viticulteur à Essômes-sur-Marne (Aisne), en Champagne, un vignoble étroit et en forte pente où le travail du sol sous les rangs est difficile.
Quasiment tous les viticulteurs appliquent du glyphosate une à deux fois par an en moyenne à l'Uvica - l'Union des vignerons des coteaux de l'Ardèche (6 000 ha, 1 500 adhérents). Alexandre Deborne, le responsable technique, n'imagine pas que la molécule soit interdite dans un proche délai. Si tel était le cas, les répercussions seraient dramatiques pour la coopérative. « 20 % à 30 % de nos surfaces pourraient disparaître. Les viticulteurs vont abandonner les parcelles en coteaux ou non mécanisables. De même, ceux qui sont proches de la retraite ou ceux qui ont des petites surfaces pourraient cesser leur activité. Le vignoble redescendra dans la plaine, là où les sols sont plus faciles à travailler. L'interdiction du glyphosate va entraîner inévitablement des conséquences importantes pour notre production sur le plan quantitatif et qualitatif », s'inquiète-t-il.
Stéphan Montariol, à Pennautier, dans l'Aude, gère plusieurs domaines dont celui de Lalande qui comprend 120 ha de vignes conduites selon la charte Terra Vitis. Il emploie du glyphosate de manière raisonnée. Il l'applique en sortie d'hiver uniquement sous le rang, en association avec un herbicide de prélevée à une dose comprise entre 1,7 et 2,3 l/ha selon le développement des adventices. Puis il l'utilise avec parcimonie l'été pour désherber les vivaces. « À cette période, on le pulvérise seulement sur les taches. Les quantités employées sont donc minimes », précise-t-il. Mais il n'est pas prêt à s'en passer.
« C'est le seul produit efficace sur le chiendent. Aujourd'hui, il n'y a pas de molécule de substitution. Et passer aux interceps sur des surfaces aussi importantes que les nôtres, c'est compliqué. » En cas d'interdiction, le viticulteur a calculé qu'il lui faudrait au moins deux outils rotatifs pour 40 ha, soit six au total. Pour contrôler les adventices, il estime qu'il devrait faire trois à quatre passages supplémentaires par an. Il lui faudrait donc embaucher du personnel. « Or, nous faisons face à une carence énorme en ouvriers qualifiés », déplore-t-il.
Le passage au travail du sol engendrerait un surcoût qu'il chiffre entre 100 et 120 €/ha/an. Et encore, dans ce calcul, il ne prend pas en compte les dégâts que les engins provoqueront les premières années. « On va blesser, voire casser des souches. Cela va amoindrir les rendements et occasionner des coûts de remplacement des pieds », explique-t-il.
Autre conséquence : il devra adapter son vignoble. Aujourd'hui, Stéphan Montariol est équipé de goutte-à-goutte au sol. S'il doit passer au travail mécanique, il devra rehausser son système d'irrigation. « Sur des surfaces comme les nôtres, dans lesquelles nous produisons des vins de pays avec de très faibles marges, un arrêt du glyphosate sans produit de substitution aurait des conséquences économiques énormes. Il faut laisser le temps aux entreprises de développer des produits de remplacement naturels et efficaces », insiste le vigneron.
Son confrère Christophe Ordonneau est du même avis. Celui-ci mène une exploitation familiale de 45 ha de vignes à Saint-Genès-de-Fronsac, en AOC Bordeaux et Bordeaux supérieur. Lui aussi ne désherbe chimiquement que la ligne des souches, soit seulement un tiers de ses surfaces. « J'effectue un premier passage en mars et un autre en juillet-août avec du glyphosate banalisé à des doses comprises entre 1 et 2 l/ha selon la densité de l'herbe. Je prends toutes les précautions nécessaires lors de l'application : port d'EPI adaptés, utilisation de buses antidérive... Certes, ce n'est pas un produit anodin. Mais, à mon sens, ce n'est pas le plus dangereux. J'ai vingt ans de métier et je n'ai jamais ressenti de troubles à la suite d'un désherbage », argumente-t-il.
L'arrêt du glyphosate pourrait mettre en péril son domaine. « Nous ne sommes pas dans des appellations rémunératrices. Passer au travail du sol nécessiterait un tracteur supplémentaire équipé d'interceps et d'une personne en plus pour le conduire de mars jusqu'aux vendanges. Nos coûts de production exploseraient et nous ne pourrions pas les répercuter sur nos prix de vente. » À cela s'ajoutent les aléas climatiques. Cette année, à cause du gel, il n'a rentré que 10 % d'une récolte normale. « Je n'aurais pas pu payer un employé supplémentaire », indique-t-il. Très inquiet, il nous avoue qu'en cas d'interdiction, il est prêt à se mobiliser.
Philippe Sauger, viticulteur sur 30 ha à Fresnes, dans le Loir-et-Cher, est lui aussi remonté. « Les autorités ont voulu une France qui produit, et c'est ce qu'on a fait. Aujourd'hui, elles veulent une France propre. Conclusion, elles nous retirent les produits au fur et à mesure, sans nous proposer de remèdes à la place. Elles nous mettent le couteau sous la gorge, mais ne font rien pour trouver des alternatives. C'est à nous de nous débrouiller », tempête-t-il.
Ce viticulteur n'est pas réfractaire au changement. Au contraire : « Je suis prêt à utiliser des produits écologiques, même si cela me coûte un peu plus cher. » Mais passer au travail du sol, c'est une autre histoire. « Ce n'est pas comme ça que l'on arrangera la planète car on va faire plus de passages, consommer davantage de carburant et émettre plus de gaz à effet de serre », déplore-t-il. Il envisage malgré tout cette option, mais pas dans l'immédiat. Confronté ces dernières années au gel de printemps, sa priorité est d'assurer sa récolte : « Aujourd'hui, j'investis d'abord dans des tours antigel. »
Bien qu'ils rouspètent, ces viticulteurs savent qu'ils n'auront pas d'autre choix que de se plier à une interdiction. Et, ils s'y préparent. Christophe Ordonneau envisage ainsi de faire des essais de travail du sol afin d'appréhender les coûts et temps de travaux. Il s'est ainsi rendu au Sitévi pour se faire une idée de l'offre. « Mais il aurait été préférable que le glyphosate soit renouvelé pour dix ans afin que l'on puisse s'adapter », regrette-t-il.
Benoît Sordet, viticulteur sur 12,7 ha, à Pommard, en Côte-d'Or, envisage lui aussi d'abandonner progressivement les herbicides et de passer au travail du sol. « Mais le coût est très lourd. Aujourd'hui, mes finances sont au plus bas après cinq petites récoltes. Je sauterai le pas quand mon exploitation ira mieux », justifie-t-il.
Un peu plus avancée, la coopérative Uvica teste déjà le travail du sol sous le rang dans le cadre de sa démarche agroenvironnementale Ardèche par Nature. Mais ses adhérents veulent du temps pour se former.
Fin septembre, les responsables professionnels ont relayé ces appels du terrain. Ils avaient rendez-vous avec le ministre de l'Agriculture pour faire le point sur différents sujets d'actualité. À cette occasion, ils lui ont rappelé que la viticulture avait besoin du glyphosate. « Tant qu'il n'y a pas d'alternative, on ne peut pas aller vers l'interdiction de cette substance », a souligné Jérôme Despey, président du conseil des vins de FranceAgriMer. Pour autant, il n'est pas question d'adopter une position intransigeante. « L'arrêt du glyphosate semble inéluctable. Il faut envisager un plan de sortie d'ici quatre ou cinq ans, le temps de trouver des alternatives crédibles : des produits de biocontrôle moins nocifs ou du matériel de travail du sol plus efficient », indique Stéphane Héraud, le président de l'Association générale de la production viticole (AGPV).
Dans ce contexte, les fabricants de matériel agricole sont très sollicités. « Nos ventes augmentent, constate Fabrice Dulor, directeur des relations clients chez Boisselet, l'un des leaders du travail du sol. Tous les ans, de nouveaux vignerons nous contactent car ils veulent sortir du désherbage chimique. » Ce fabricant répond à un nombre croissant de demandes de démonstrations personnalisées. Il dépêche ainsi quatre collaborateurs sur le terrain qui répondent aux questions des viticulteurs et qui les aident également à opérer les réglages.
L'une des dernières démonstrations d'interceps de la saison a eu lieu le 19 octobre au Pallet (Loire-Atlantique). Ses organisateurs - la chambre d'agriculture et les Cuma de Loire-Atlantique - ont attiré 220 viticulteurs, soit plus de la moitié des professionnels de la région nantaise. Un succès. Une des multiples preuves que les fabricants de matériel de travail du sol ne vont pas chômer
Une aide bienvenue en Gironde
Le département de la Gironde a lancé le dispositif « zéro herbicide » en début d'année. L'objectif : accompagner techniquement et financièrement les viticulteurs qui veulent abandonner le désherbage chimique ou qui l'ont déjà fait. Tout commence par un diagnostic (financé à 80 % dans la limite de 1 000 €) réalisé par la chambre d'agriculture ou Agrobio Gironde. Cet état des lieux détermine les investissements nécessaires pour qu'une exploitation se lance dans le désherbage mécanique ou l'améliore. Puis, le conseil départemental passe un contrat de trois ans avec le viticulteur précisant les efforts qu'il doit en mettre en oeuvre et les aides qu'il obtiendra. « Il n'y a pas de liste de matériel éligible pour rester au plus près des besoins de chacun », explique Dominique Fedieu, conseiller départemental et président de la commission agriculture, mer et forêt. Sont concernées par ce dispositif les exploitations dont le revenu est inférieur à 30 000 € par exploitant ou associé et qui sont aux normes vis-à-vis du traitement des effluents vinicoles. Ces exploitations bénéficient d'une aide à l'investissement entre 11 250 et 18 000 €, ainsi que des visites de conseillers, elles aussi subventionnées. L'enveloppe dédiée à ce dispositif s'élève à 300 000 €. Mais le département n'a reçu que dix dossiers dont neuf viticulteurs déjà en bio. « Au vu de l'actualité, nous allons sans doute être davantage sollicités dans les mois à venir. Mieux vaut changer de pratiques maintenant plutôt que de se retrouver devant le fait accompli », insiste Dominique Fedieu, lui-même viticulteur.
Une molécule indispensable pour 58 % des viticulteurs
58 % des viticulteurs estiment que le glyphosate est indispensable à la conduite de leur exploitation. C'est le résultat d'un sondage effectué en octobre par ADquation à la demande de nos confrères d'Agrodistribution auprès de 406 chefs d'exploitation. Ils sont même 67 % dans les vignobles de l'Est de la France à juger cet herbicide essentiel. Ces inconditionnels sont un peu moins nombreux dans le Sud-Est (51 %) et chez les plus jeunes (52 %). Si le glyphosate venait à être interdit, plus d'un tiers des viticulteurs interrogés (36 %) envisagent de combiner le désherbage chimique et mécanique, 22 % passeraient au travail du sol intégral et 17 % chercheraient une autre solution herbicide. À noter que 4 % des sondés cesseraient leur activité.
« Le grand public est mal informé »
Les viticulteurs sont unanimes. Les débats qui entourent la réhomologation européenne du glyphosate ne sont pas basés sur des vérités scientifiques. Et ne prennent pas en considération les réalités du terrain. « Les gens sont très mal informés. Ils ne connaissent pas le travail de la vigne. Ils reprennent ce qu'ils lisent dans les médias sans esprit critique », indique l'un d'eux. « Aujourd'hui, dès que je vais traiter une vigne où il y a des riverains, je suis montré du doigt. Il n'y a plus de tolérance entre les citadins et les agriculteurs », déplore un autre. « Il y a un matraquage médiatique qui créée une psychose. Si à la télévision, on dit que le glyphosate est cancérigène, les gens le croient. Le mot "cancer" fait peur. Personne n'a envie d'en choper un. La réaction du grand public est légitime », réagit un troisième.
Le glyphosate : l'herbicide n° 1 partout en France
Selon Éric Chantelot, directeur de l'IFV pôle Rhône-Méditerranée et expert national Écophyto, 80 % des parcelles reçoivent au moins une application de glyphosate par an. D'après les panels des sociétés phytosanitaires, 703 000 hectares ont été désherbés chimiquement en 2016, dont 282 000 avec du glyphosate (ha déployés). Cet herbicide est de loin le plus utilisé en viticulture puisque le flazasulfuron -la deuxième matière la plus employée - a été appliquée sur 77 000 ha. Et, son utilisation aurait progressé en 2017. Certaines régions y ont davantage recours que d'autres, comme le montre notre carte. Comme tous les herbicides, le glyphosate est appliqué majoritairement sous le rang, soit sur 30 à 50 % de la surface selon la densité de plantation et la configuration de la parcelle. « Le désherbage en plein est devenu marginal, sauf dans les vignobles à forte densité ou pentus », indique une entreprise. Le glyphosate est appliqué généralement en un ou deux passages selon les situations.
Le Point de vue de
AVIS D'EXPERT
« Nous sommes dans une impasse pour contrôlerles adventices en sortie d'hiver et les vivaces estivales »
«Désherber chimiquement sans glyphosate et sans glufosinate d'ammonium sera difficile. Ces deux produits détruisent le couvert végétal quand il est bien développé. En sortie d'hiver, ils permettent d'avoir un sol nu, condition indispensable pour positionner les herbicides de prélevée. Or, les autres herbicides de postlevée - carfentrazone-éthyl, pyraflufen-éthyl et l'acide nonanoïque (biocontrôle) - ne sont efficaces que sur les jeunes adventices et les nouvelles levées. Si les viticulteurs veulent continuer à désherber avec des prélevées en sortie d'hiver, ils devront au préalable travailler le sol pour détruire le couvert en place. Restera alors une impasse technique pour contrôler les vivaces estivales, comme le chiendent ou le liseron. Ces espèces se multiplient via leurs racines. Lorsqu'on travaille le sol, on disperse et propage leurs racines. Les herbicides foliaires qui restent autorisés, autres que le glyphosate, n'ont pas d'effet systémique. Ils ne font que griller les parties vertes des plantes qui repartent ensuite. Nous risquons de nous retrouver avec des vignes entachées de liseron et de chiendent en été, ce qui pourrait engendrer une concurrence hydrique et, à la longue, une baisse des rendements. Malgré tout, il devient indispensable de changer de pratiques. Il faut se mettre au travail du sol. C'est la seule alternative aux herbicides sous le rang. Le paillage a une durée de vie limitée et un coût prohibitif. L'enherbement est trop concurrentiel. Cependant, passer au désherbage mécanique n'est pas simple. Et il ne suffit pas d'acheter le matériel, il faut pouvoir intervenir au bon moment. Cela nécessite un savoir-faire et engendre des coûts supplémentaires et demande de la main-d'oeuvre qualifiée. Mais surtout, il faut s'attendre à des pertes de rendements de 15 à 20 % les cinq à six premières années. Les exploitations dont les vins sont peu valorisés risquent de faire face à de grandes difficultés économiques. C'est à prendre en considération. Sans compter les vignobles de coteaux non mécanisables où le travail du sol est impossible. »
Le Point de vue de
Jean-François Lespinasse, viticulteur sur 12,5 ha en bio, à La Brède, en Gironde
« Un coup de pouce financier est nécessaire »
«Mes vignes sont implantées sur des sols de graves sèches, très filtrants. J'ai donc décidé d'arrêter les herbicides en 2003. Mais ça n'a pas été simple. Lorsqu'on désherbe chimiquement, les ceps sont habitués à n'avoir aucune concurrence. Ils développent de grosses racines proches de la surface que les appareils aratoires accrochent. Au début, j'ai commencé à travailler à plat car je ne voulais pas faire de chaussage. Au fur et à mesure des passages, les pieds ont pris des chocs et j'en ai perdu. Le taux de mortalité est difficile à chiffrer mais dans certaines parcelles il a pu atteindre 5 à 10 %. Ce n'est pas négligeable. Depuis quatre à cinq ans, j'ai acheté une décavaillonneuse avec un collègue, et je pratique le chaussage-déchaussage. J'arrache encore des ceps, mais c'est beaucoup plus rare. Autre écueil du travail du sol : il n'y a pas de solution généralisable à toutes les exploitations. Chaque année, on doit s'adapter à la météo. Les fenêtres d'intervention sont beaucoup plus réduites qu'en désherbage chimique. Il faut être très réactif. Dès que l'on a des printemps et étés pluvieux, on se retrouve avec une multitude d'opérations à effectuer au même moment. Dans la mesure du possible, je couple mes interventions sous le rang avec celles sur les interrangs. Chaque année, je fais entre cinq et six passages sous le rang pour que l'herbe ne monte pas dans les pieds. Autre élément à prendre en considération : le coût des consommables. Comme mes sols sont sableux, l'usure des lames et des coutres est importante. Je dois en changer tous les deux ans. Se passer des herbicides ne peut pas se faire du jour au lendemain. Pour maîtriser le travail du sol, il faut du temps et de l'argent ! Heureusement, cela se traduit par une bonification du terroir. Mais, pour y arriver, il faut trouver les outils adéquats, intervenir aux bonnes périodes. Il faut bien s'entourer et échanger avec des viticulteurs qui ont de l'expérience. Un coup de pouce financier est également nécessaire. Le programme d'aide « zéro herbicide » mis en place par le département de la Gironde est une très bonne chose. Il faut que les organismes publics s'inspirent de cette démarche et aident les viticulteurs à se préparer à travailler autrement sans attendre l'interdiction des herbicides. »
Le Point de vue de
Damien Richou, viticulteur sur 35 ha en bio, à Mozé-sur-Louet, dans le Maine-et-Loire
« Il faut au moins cinq ans pour s'adapter »
«J'ai mis dix ans pour maîtriser le travail du sol. Aujourd'hui, je mettrais moins de temps car le matériel a évolué, il est plus précis, plus réactif. On va plus vite et plus près des ceps. Mais j'estime qu'il faut encore au minimum cinq ans pour s'adapter. Si le glyphosate devait disparaître du jour au lendemain, ce serait "rock'n'roll" pour tout le monde. Le passage au travail du sol sur des vignes en place les déstabilise pendant au moins trois ans. Il faut donc s'attendre à des pertes de récolte durant cette période. Pour travailler les sols sur 15 ha, un tracteur quatre roues motrices est nécessaire, équipé d'un cadre avec des interceps. Pour 35 ha, l'achat de matériel représente donc un investissement important. Chaque année, j'effectue au moins cinq passages sans compter mes heures. Un tel changement ne s'improvise pas. Ensuite, il faut valoriser le vin pour compenser les charges supplémentaires et la baisse des rendements. Le consommateur est à la recherche de produits du terroir élaborés naturellement. J'ai pu augmenter régulièrement mes prix de vente de 3 % par an pendant quinze ans. »