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DOSSIER - VITICULTURE, NÉGOCEDES RELATIONS APAISÉES

BERGERAC Les coops se rebiffent

La vigne - n°304 - janvier 2018 - page 38

Pour valoriser les vins, les coops prennent leur commercialisation en main. Le négoce n'a pas dit son dernier mot.
BENOÎT BERGER, directeur de Producta Vignobles, veut créer de la valeur en développant la vente en bouteilles.  © R. CELLIER

BENOÎT BERGER, directeur de Producta Vignobles, veut créer de la valeur en développant la vente en bouteilles. © R. CELLIER

Un copié-collé. En 2014, l'IVBD, l'Interprofession des vins de Bergerac et de Duras, s'est dotée d'un contrat pluriannuel identique en tout point à celui de l'interprofession bordelaise. Il faut dire que ce sont les mêmes négociants qui opèrent à Bordeaux et à Bergerac. Un contrat qui a fait long feu.

« En réalité, la quinzaine de négociants qui représente 80 % du volume passe des contrats tacites et renouvelés tous les ans », observe Vincent Bergeon, directeur de l'IVBD.

À la Cave de Sigoules, les contrats non écrits sont légion. « On discute chaque année les prix et les volumes. C'est une façon de procéder à l'ancienne, mais qui a son efficacité », assure son président Philippe Allain.

Cette coopérative, forte de 93 adhérents pour 920 ha de vignes, produit 50 000 hl/an. Elle vend la moitié de sa récolte via Couleurs d'Aquitaine, un négoce qu'elle a créé avec trois autres coopératives. L'autre moitié est vendue en vrac au négoce traditionnel. Une part qui devrait baisser. « Nous voulons commercialiser en direct pour ramener de la valeur ajoutée à nos coopérateurs. Si nous ne portons pas l'image de Bergerac, personne ne le fera à notre place. Ici, il n'y a pas de négoce fort », souligne Philippe Allain.

Jean-Marc Fontaine, directeur d'Unidor, le centre d'embouteillage et de stockage des coopératives de Dordogne, nuance le propos : « Le négoce peut être un allié. Le problème, c'est qu'il se sert de Bergerac comme d'une entrée de gamme. »

Une réalité gravée dans le marbre ? Pas sûr. Le négociant Yvon Mau entend relancer sa marque Seigneurs de Bergerac. Unidor devrait lui fournir des vins. « Bergerac a fait beaucoup d'efforts en terme de qualité. C'est une AOC qui mérite que l'on s'y intéresse », explique Pierre Vieillefosse, directeur des achats d'Yvon Mau. Sa marque devrait être dans les linéaires des grandes surfaces en début d'année.

Producta Vignobles commercialise dix-sept coopératives de Bordeaux et Bergerac. Benoît Berger, le directeur, rappelle son objectif : « Créer de la valeur pour les adhérents en développant la vente en bouteilles. » Ce négoce vend 20 millions de cols par an dont 3 millions de bergerac. « Nous allons monter à 4 millions d'ici à cinq ans, tout en affirmant davantage l'identité de nos vins », indique-t-il.

Récemment, Producta Vignobles a lancé la marque Vendanges de Sidonie - une IGP Périgord - sur le marché belge. Dans les cartons, des bergeracs haut de gamme se peaufinent. Des vins de châteaux destinés aux amateurs.

De son côté, Julien Montfort, président de la société de négoce Julien de Savignac, se déclare « optimiste » pour Bergerac. Sa société réalise 60 % de son chiffre d'affaires avec les appellations de la région qu'elle écoule en CHR, chez les cavistes et auprès des particuliers. 80 % de ces vins sont embouteillés par les viticulteurs dans leurs propriétés. Entre eux, pas de contrat écrit. « Ce n'est pas nécessaire. Nous travaillons avec certains producteurs depuis des années », explique-t-il.

Malgré tout, la valorisation reste insuffisante. L'interprofession veut y remédier. Production et négoce se sont mis autour de la table pour engager une réflexion sur la segmentation. Un côtes-de-bergerac, cru d'excellence, serait dans les tuyaux.

Le Point de vue de

Éric Nicolas, Château Haute-Brande, à Saint-Avit-St-Nazaire. 1 800 hl/an dont 60 % vendus au négoce.

LES RAPPORTS ENTRE PRODUCTION ET NÉGOCE ONT-ILS CHANGÉ ?

«Depuis quinze ans, je travaille avec le même négociant qui achète 30 % de ma production en vrac avec mise à la propriété. Les relations restent basées sur la parole donnée. C'est un négoce de proximité, à quelques kilomètres de chez moi. J'ai un lien direct et franc avec lui. Cette année, ayant gelé à 80 %, j'ai obtenu une hausse de 10 à 15 % des prix. Pour les vins expédiés en vrac, j'ai traité avec quatre acheteurs via un courtier. Je n'ai alors pas de relation avec le négoce. »

Le Point de vue de

Philippe Ponty, domaine Le Mayne, 13 ha à Flaugeac. 710 hl, 100 % vendus au négoce.

LES RAPPORTS ENTRE PRODUCTION ET NÉGOCE ONT-ILS CHANGÉ ?

«Il y a dix ans, je bradais mes rouges. Puis, j'ai rencontré le négociant Julien de Savignac. Il m'a permis de sortir la tête de l'eau. Chaque année, il prend tout mon bergerac rouge. Rien n'est écrit mais je sais ce qu'il recherche : des vins ronds en bouche et aromatiques pour lesquels j'attends la maturité et pratique des macérations longues. Il respecte mon travail. Quant au blanc, je l'écoule auprès de deux ou trois négociants via un courtier. Dans ce cas, je ne vois que ce dernier. »

L'essentiel de l'offre

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