En Gironde, les programmes Biobot et Alb's viennent de se terminer. Durant trois ans, l'IFV, la chambre d'agriculture et l'Inra ont testé une batterie de produits de biocontrôle contre le botrytis : des produits homologués - Armicarb (De Sangosse), Botector (Nufarm), Sérénade Max (Bayer), Amylo-X (Certis) et Mevalone (Sumi-Agro) - et d'autres non. Ils ont travaillé sur deux parcelles de merlot : l'une dans le Médoc et l'autre dans le Libournais, remplacée en 2017 par une parcelle de cabernet-sauvignon en Côtes-de-Bordeaux. Au total, seize modalités ont été testées selon deux stratégies. Dans celle dite « standard », les chercheurs ont appliqué, entre la floraison et la récolte, cinq ou six traitements selon les années. Dans la stratégie « modèle », ils ont commencé après la véraison et sont intervenus jusqu'à trois fois selon le niveau du risque de botrytis calculé par l'Inra (indice Ciliberti) en fonction de la température et de l'humidité.
Les résultats ? Pas très brillants. « L'Armicarb est le produit le plus régulier. Dans la stratégie standard, il a réduit les attaques de botrytis de 20 à 50 % par rapport aux témoins, sachant que ces derniers étaient modérément atteints. Cela confirme les résultats obtenus dans les essais Resaq Vitibio dans lesquels les viticulteurs ont obtenu 10 à 40 % d'efficacité après deux ou trois traitements à partir du stade début véraison, indique Nicolas Aveline, le coordinateur de ces essais à l'IFV de Bordeaux. Mais avec la stratégie modèle, les résultats sont moins bons. »
Le technicien avait fondé pas mal d'espoir dans Mévalone, un autre produit à base de substances naturelles. Mais la déception n'est pas loin. Lancé en 2017, ce produit se compose de trois terpènes (thymol, eugénol, géraniol) encapsulés dans des parois de levures. « C'est un curatif précoce. Il faut le positionner assez tôt au moment de la contamination par le botrytis, avant l'apparition des symptômes. Il a un effet direct sur le champignon mais aussi indirect car il assèche l'environnement des baies », précise Thierry Castel, de Sumi-Agro.
En 2016, les expérimentateurs l'ont testé selon la stratégie standard. En 2017, ils ont suivi les préconisations de Sumi-Agro, qui s'appuie sur le modèle Promété de calcul du risque botrytis, pour positionner les traitements. Ils ont alors effectué trois traitements au maximum. « En 2016, Mévalone a eu un peu moins de 50 % d'efficacité sur l'une des deux parcelles d'essai. Dans cette dernière, le témoin a subi 11 % d'intensité d'attaque [11 % des baies touchées, NDLR]. Mais dans la deuxième parcelle, le produit n'a pas eu d'effet. Et en 2017, nous n'avons vu aucun effet dans les deux parcelles. Il faut vraiment travailler le positionnement de ce produit », constate Nicolas Aveline.
Les produits à base de micro-organismes ont aussi eu desefficacités aléatoires. Les résultats fluctuent selon les sites et les millésimes. Par exemple, Sérénade Max (Bacillus subtilis) a eu une bonne efficacité sur un site en 2017 avec la stratégie standard, mais pas sur l'autre. Dans le témoin du premier site, 10 % des baies étaient attaquées. L'antibotrytis a réduit ce taux de moitié.
Même chose pour Amylo-X, un nouveau produit à base de Bacillus amyloliquefaciens que Certis a lancé l'an passé. « En 2017 sur notre plateforme d'essai - un cabernet-sauvignon très sensible au botrytis -, nous avons accusé une attaque en fin de saison avec des baies qui ont commencé à se fissurer. Avec cinq applications d'Amylo-X à partir de la floraison, nous avons réduit les symptômes de moitié par rapport au témoin non traité. Mais, sur la plateforme située dans le Médoc, l'efficacité n'a pas été au rendez-vous. Nous ne savons pas comment expliquer ces différences », détaille Séverine Dupin, de la chambre d'agriculture de Gironde.
Botector, à base de deux souches d'Aureobasidium pullulans, présente lui-aussi des efficacités très irrégulières, ce que Nicolas Aveline avait déjà remarqué dans le cadre du réseau Resaq Vitibio. « Les produits à base de micro-organismes sont très difficiles à appréhender. Nous n'avons pas identifié les périodes et conditions d'application optimales », explique-t-il. Pour y voir plus clair, cette année, l'IFV et la chambre d'agriculture de Gironde vont lancer une nouvelle série d'essais de produits de biocontrôle contre le mildiou, l'oïdium et la pourriture grise.
Qu'en est-il des produits non homologués testés dans le cadre des programmes Biobot et Alb's ? « Cinq applications d'argile ou de talc peuvent réduire un peu l'intensité des dégâts comparé au témoin. Avec les acides gras, les résultats sont similaires. Mais aucun de ces produits n'a la régularité et le niveau d'efficacité de l'Armicarb », précise Nicolas Aveline.