dossier - Mauvaises herbes

Mauvaises herbes les gérer en culture

Marianne Decoin, Phytoma - Phytoma - n°639 - décembre 2010 - page 15

Une mauvaise herbe est une plante herbacée qui pousse au mauvais endroit et au mauvais moment. Dans ce cas-là, elle est nuisible et à gérer comme telle. Comment ? Cinq articles pour en savoir plus.
Tournesol sauvage. D'origine américaine et ancêtre probable du tournesol cultivé, c'est une mauvaise herbe dans les cultures. ph. BASF Agro

Tournesol sauvage. D'origine américaine et ancêtre probable du tournesol cultivé, c'est une mauvaise herbe dans les cultures. ph. BASF Agro

 Pensée tricolore

Pensée tricolore

La notion de mauvaise herbe est relative. On peut trouver des qualités à presque toutes les espèces herbacées, de l'ortie dont on fait la soupe jusqu'au coquelicot si gentil en ville, en passant par le ray-grass cultivé dans les prairies et le gazon. Un jour, qui sait, peut-être trouvera-t-on une utilité à l'ambroisie à feuilles d'armoise, redoutée aujourd'hui vu la concurrence qu'elle fait aux cultures et son pollen allergisant ?

À l'inverse, quasiment toutes les plantes herbacées peuvent être des mauvaises herbes quand elles poussent au mauvais endroit et au mauvais moment :

– si elles concurrencent les plantes cultivées dans les champs, vignes, vergers ou jardins ; ainsi les repousses d'une culture sont des mauvaises herbes de la culture suivante ;

– si elles causent des nuisances : allergies et toxicité directe, mais aussi problèmes de sécurité si elles masquent la signalisation routière et/ou causent des risques d'incendie par exemple.

Alors, même si la préservation de la biodiversité pousse à protéger les espèces des risques de disparition, il faut toujours maîtriser les populations dans les parcelles cultivées. Autrement dit, lutter contre les herbes si, quand et où elles sont mauvaises.

C'est le sujet de la 21e conférence du Columa(1), « Journées internationales de lutte contre les mauvaises herbes », qui se tient à Dijon les 8 et 9 de ce mois de décembre. Et de ce dossier.

De l'histoire et du blé

p. 18, cinquante ans d'histoire

Le premier texte est un historique de l'utilisation des herbicides en France depuis 50 ans. Travail d'une équipe Inra-AgroSup Dijon, il s'appuie sur une base de données elle-même alimentée par les parutions successives de l'Index phytosanitaire édité par l'ACTA(2) depuis 1961.

Cet Index cite les produits de protection des plantes autorisés et mis sur le marché, qu'ils soient d'origine chimique ou naturelle. Chez les herbicides, seule la première catégorie est présente y compris dans l'édition 2010. En effet jusqu'à maintenant, les moyens alternatifs à l'emploi d'herbicides chimiques n'étaient pas des produits alternatifs mais des méthodes physiques : désherbage mécanique voire thermique, paillage, mulch ou enherbement adapté.

Quoiqu'il en soit, cet article montre bien le développement des herbicides puis leur repli, en terme de variétés de substances, de modes d'action et d'associations.

Puis il analyse plus précisément le cas de la culture du blé, la première en termes d'hectares couverts en France. Éclairant.

Maïs

p. 24, le maïs face à ses adventices, un destin qui évolue

Place aux adventices du maïs maintenant, avec d'abord un rappel général sur l'évolution de cette flore depuis que l'atrazine a été interdite et un panorama de l'évolution du désherbage qui en résulte sur les dix dernières années.

Les quatre principaux types de stratégies de désherbage sont évoqués, dont trois ne faisant appel qu'à des herbicides et un utilisant le désherbage mécanique. Pour ce dernier, trois variantes sont passées en revue.

L'article est issu du travail d'Arvalis-Institut du végétal : entre 100 et 150 essais au champ tous les ans depuis dix ans. Ils nourrissent une solide base de données.

p. 28, le tiercé des dicots

Encore sur maïs et toujours par Arvalis, voici un article sur les principales dicotylédones émergentes du maïs. Nommées mercuriale annuelle, renouée liseron et renouée des oiseaux, ce ne sont pas des nouvelles venues dans nos champs : elles étaient déjà présentes avant l'interdiction de l'atrazine. À l'époque elles étaient maîtrisées sans problème. Mais pas éradiquées, la preuve : les voilà qui prospèrent à nouveau dans les maïs.

Et, sous peine de pertes de rendement du maïs et de salissement durable des parcelles, elles obligent à faire évoluer les pratiques de désherbage. Choix des herbicides, mais aussi prise en compte des conditions d'application. À découvrir d'urgence.

Tournesol et colza

p. 32, anticiper pour rendre durable une innovation

Voici maintenant la flore adventice des oléagineux avec le tournesol... Le tournesol, une adventice ? Mais il est cultivé ! En fait, il s'agit de tournesol sauvage, adventice du tournesol cultivé. Tous les deux appartiennent à la même espèce : Helianthus annuus. C'est probablement à partir du premier que le second, originaire d'Amérique comme lui, aurait été sélectionné. Mais on ne récolte pas les petits capitules du tournesol sauvage qui s'égrènent sur pied. Le tournesol sauvage concurrence la culture et est difficile à maîtriser.

En revanche, on a trouvé chez lui un caractère de résistance à des herbicides inhibiteurs de l'ALS qu'on a introgressé dans le tournesol (explications dans l'article). Des tournesols tolérants à ces herbicides sont désormais disponibles et les herbicides correspondants autorisés. Cela facilite le désherbage de la culture. Et puis le système sera bientôt proposé sur colza.

Oui, mais l'inhibition de l'ALS est un mode d'action déjà très répandu en grandes cultures. L'arrivée de cette innovation va fatalement augmenter la pression de sélection... Risque-t-elle d'aboutir rapidement à des résistances ?

Et donc comment l'éviter ? Autre risque, celui que la résistance du tournesol cultivé passe au sauvage, les deux pouvant s'hybrider. Et qu'elle passe aussi du colza à ses cousines les crucifères sauvages. Là aussi, comment l'éviter ?

Le Cetiom propose ici une analyse de cette innovation, son intérêt, ses risques et les moyens de les gérer, qui servira à assurer sa durabilité. Une démarche exemplaire présentée dans la session « Résistances » du Columa 2010.

Vigne

p. 38, des années pour comparer l'entretien des sols

Finissons par les cultures pérennes avec l'évocation de deux communications sur la vigne. Dans les deux cas :– il s'agit de comparer entre eux des systèmes d'entretien des sols de vigne utilisant plus ou moins voire pas du tout d'herbicides grâce au travail mécanique et/ou à l'enherbement permanent de l'inter-rang ;

– le travail est pluriannuel, car ce n'est pas en un an qu'on évalue l'impact d'un changement de pratiques de désherbage ;

– sont évalués les effets sur la flore adventice, sur la vigne et sa production, sur la qualité de la récolte (divers paramètres œnologiques) et sur les coûts de production.

Un des travaux dure depuis dix ans sur cépage blanc en Bourgogne, l'autre depuis cinq ans sur trois cépages noirs dans le Sud-Ouest. La comparaison entre itinéraires techniques interne à chaque travail et la comparaison entre les deux travaux est riche d'enseignements.

Merci aux spécialistes de l'INRA, d'Arvalis-Institut du végétal, du Cetiom, de l'IFV et des Chambres d'agriculture pour leur contribution et bonne lecture à tous !

<p>(1) Comité de lutte contre les mauvaises herbes, AFPP, Association franç. de protection des plantes.</p> <p>(2) Réseau des instituts des filières animales et végétales, anciennement Association de coordination technique agricole.</p>

Mauvaises herbes ou adventices ?

 Linaire batarde

Linaire batarde

 Véronique à feuille de lierre (photos V. Bibard)

Véronique à feuille de lierre (photos V. Bibard)

 Véronique de Perse

Véronique de Perse

 Geranium (photos B. Chauvel)

Geranium (photos B. Chauvel)

 Vulpin des champs

Vulpin des champs

Dans ces pages, le lecteur peut lire les mots <i>« mauvaises herbes »</i> et <i>« adventices »</i>. Le second terme serait-il le parfait synonyme du premier, signifiant la même chose et utilisé juste pour « faire scientifique » et/ou éviter des répétitions ? Pas tout à fait.

Une mauvaise herbe, répétons-le, est une herbe qui pousse au mauvais moment et au mauvais endroit. La grande majorité des mauvaises herbes appartiennent à des espèces adventices des cultures : elles poussent spontanément à côté des plantes cultivées.

Les adventices sont nuisibles par leur présence sur la parcelle cultivée, en concurrençant les cultures pour les éléments nutritifs et l'eau, voire la lumière.

Certaines adventices peuvent également avoir une nuisibilité indirecte Ainsi, plusieurs graminées adventices sont les hôtes et réservoirs du champignon Claviceps purpurea, agent de l'ergot du seigle qui peut s'attaquer au seigle et au blé. Une communication de Jacquin & al. évoque ce champignon dans la conférence du Columa 2010. Autre cas particulier, l'ambroisie à feuilles d'armoise déjà citée est à la fois une adventice des cultures de printemps (maïs, tournesol) et une plante envahissante des espaces non agricoles (sols perméables non végétalisés), au pollen nuisible

Par ailleurs certaines mauvaises herbes ne sont pas, ou pas seulement, des adventices mais des parasites se nourrissant directement des plantes cultivées. Citons l'orobanche cumana, parasite du tournesol, et la rameuse, parasite du colza, voir notre n° 630 de janvier dernier p. 32 et aussi la communication de N. Colbach & al. à la conférence du Columa 2010.

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