On l'attendait au plus tard en juillet, date prévue par l'article 94 de la Loi Grenelle 2(1). Le décret sur les « agréments des entreprises » et les « certificats individuels » liés aux produits phytos a en fait été publié le 20 octobre(2).
Dans la foulée, cinq arrêtés, tous datés du 21, sont sortis le 22. Le premier concerne l'habilitation des organismes de formation des futurs certifiés. Les quatre autres organisent l'obtention de certificats individuels – pas tous.
Ce que le décret ne fait que confirmer
Le décret confirme d'abord ce que demandait la loi. Toute personne physique ou morale (entreprise, organisme, administration) qui, à titre professionnel, vend voire donne des produits phytos à leurs utilisateurs (y compris les groupements d'achat), ou en utilise pour des prestations de service ou conseille à leur sujet, doit être agréée. Pour certains, cet agrément remplace celui exigé par la Loi d'agrément de 1992(3), pour d'autres c'est nouveau.
Pour pouvoir être agréé, il faudra être assuré et certifié par un organisme certificateur accrédité. Et pour cela, il faudra que tous les membres du personnel exerçant une activité relative aux produits phytos (liste des activités dans le décret) soient titulaires d'un « certificat individuel ».
Par ailleurs, toute personne physique qui, à titre professionnel, utilise des produits phytos, en distribue aux utilisateurs ou à ceux qui les leur vendent, ou même conseille à leur sujet, doit être titulaire d'un « certificat individuel ». Que son employeur soit soumis à agrément ou non. Ce « certificat individuel » va remplacer les anciens certificats : les DAPA(5) existant depuis 1996 ainsi que les « Certiphytos 2009-2010 » obtenus entre fin 2009 et juillet 2011.
Travail réalisé reconnu
Bonne nouvelle, le décret (point III « dispositions transitoires » de l'article 3) précise que les DAPA et « Certiphyto 2009-2010 » obtenus à ce jour sont « considérés comme des certificats individuels ».
Les agriculteurs ayant leur certiphyto sont certifiés de plein droit pour dix ans, donc jusqu'à fin 2019 ou en 2020 voire 2021. Les autres certiphytos sont acquis pour cinq ans donc jusqu'en 2014, 2015 ou 2016 selon les cas.
De plus, les certificats DAPA vieux de moins de cinq ans sont reconnus « certificats individuels » et valables jusqu'à leur date de fin de validité prévue.
Ainsi, le travail déjà réalisé est reconnu de plein droit. C'était espéré, maintenant c'est garanti : c'est écrit. De même, les centres de formation ayant participé à l'expérimentation « certiphyto 2009- 2010 » sont considérés comme habilités jusqu'à la fin de 2011 pour les formations menant aux « certificats individuels » correspondant aux certiphytos testés. Ils doivent juste déclarer leur activité et les sessions programmées au DRAAF ou au DAF(6).
Les formations d'automne peuvent donc avoir lieu.
Formateurs, comment se faire habiliter
Par ailleurs, un arrêté spécifique donne les consignes aux organismes de formation pour se faire habiliter dès 2012. Il annonce que les dossiers types de demande d'habilitation sont disponibles à la DGER(7) du MAAPRAT. L'arrêté précise aussi la durée des habilitations – trois ans – et l'exigence d'activité minimum – au moins cinq sessions réalisées par an ou au moins 50 candidats préparés par an. Une note de service est parue au BO (Bulletin Officiel) du MAAPRAT du 28 octobre.
2013 avec ou sans étape en 2012
Autre point important, la durée de période transitoire avant application pleine du décret. Il y a trois cas, selon le type de public concerné :
• Celui des personnes (physiques ou morales) titulaires de l'ancien agrément exigé par la Loi de 1992 car utilisant des produits phytos en prestation de service ou distribuant des produits classés(8) aux utilisateurs ; elles ont jusqu'au 1er octobre 2013 pour faire obtenir le « certificat individuel » à tout leur personnel concerné ; d'ici là, elles sont reconnues agréées selon la nouvelle loi « dans les conditions prévues par (la réglementation) antérieure (à la Loi Grenelle 2)(9) »
• Celui des personnes qui n'étaient pas concernées par l'ancien agrément mais devront être titulaires du nouveau : conseillers et distributeurs de produits « doux » ; elles aussi ont jusqu'au 1er octobre 2013 pour avoir tout leur personnel concerné certifié, mais…
... Attention ! Au moins « un tiers du personnel exerçant des activités d'encadrement ou de conseil » devra être certifié le 1er octobre 2012. Un conseiller indépendant ne peut pas se couper en trois : il a moins d'un an pour se faire certifier...
Ou bien 2014
• Celui des personnes physiques dont l'employeur n'était pas concerné par l'ancien agrément et ne l'est pas davantage par le nouveau, mais qui devront être certifiées quand même ; ces utilisateurs agricoles (agriculteurs et salariés d'exploitation) et non agricoles non prestataires de service (jardiniers de ville, golf, parc de château, etc.) et ces vendeurs aux distributeurs (commerciaux de sociétés phytosanitaires) ont jusqu'au 1er octobre 2014 pour obtenir leur certificat individuel.
Quatre « arrêtés certificats » parus
Quatre arrêtés sur les certificats individuels sortis le 22 octobre donnent tous le choix entre quatre moyens d'obtenir ce papier, ou probablement cette carte (photo). Ces options sont :
– suivre une « formation seule », sans test d'évaluation mais avec certificat de présence ;
– suivre une formation plus courte, suivie d'un test d'évaluation ; si on ne le réussit pas, on suit une formation d'« approfondissement » d'une journée qui amène la durée totale de formation à celle de la formation seule ;
– commencer par passer un test, plus fouillé que dans l'option précédente ; si on ne le réussit pas on suit la formation seule ;
– être titulaire depuis moins de cinq ans d'un diplôme adapté.
Pour chaque catégorie de certificat, l'arrêté correspondant donne les thèmes et durées des formations à suivre pour les trois premières options, et la liste des diplômes pour la quatrième. Il précise aussi les conditions de renouvellement au bout des 5 ou 10 ans. Le tableau 1 p. 6 donne les durées en pratique pour l'option « formation seule ».
Précisions, ou non, pour les utilisateurs « en direct »
Ainsi, toutes les catégories concernées par l'agrément selon la loi Grenelle 2 savent ce qu'elles ont à faire et dans quels délais. Il en est de même pour les agriculteurs et leurs salariés avec leur arrêté sur l'utilisation « en exploitation agricole ».
Quant aux professionnels qui vendent à d'autres clients que les utilisateurs finaux (ex. technico-commerciaux vendant à des distributeurs, leur employeur échappe à l'agrément), ils sont concernés par les certificats individuels « mise en vente, vente ».
Reste le cas des utilisateurs à la fois non agricoles et non prestataires. Ils devront tous avoir obtenu un certificat individuel selon l'article 94 de la loi Grenelle 2 de 2010 avant le 1er octobre 2014, précise le décret du 18 octobre 2011(10). Mais on n'en sait guère plus.
Le 2 novembre, on attendait la publication de l'arrêté prévu par l'article 2 du décret pour préciser « les modalités d'application spécifiques pour les personnels des collectivités territoriales utilisant des produits phytopharmaceutiques pour le compte de celles-ci lorsqu'elles n'agissent pas en tant que prestataire de service »… et, espérons-le, pour les autres utilisateurs « non agricoles non prestataires ».
<p>(1) Loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 parue au JORF du 13 juillet 2010.</p> <p>(2) Décret n° 2011-1325 du 18 octobre 2011.</p> <p>(3) Loi n° 92-533 du 17 juin 1992, publiée au JORF le 18 juin 1992.</p> <p>(4) Service de la Prévention des risques sanitaires de la production primaire MAAPRAT).</p> <p>(5) Certificat de qualification pour les distributeurs et applicateurs de produits antiparasitaires à usage agricole et assimilés, exigé par la Loi n° 92-533 pour les applicateurs en prestation de service de tous les produits phytos et pour les distributeurs de produits phytos « classés » c'est-à-dire classés T (toxique), T + (très toxique), N (dangereux pour l'environnement) et CMR (cancérogène, mutagène ou reprotoxique).</p> <p>N.B. plus aucun produit C1 ni M1 (cancérogène ou mutagène avéré) n'a d'AMM comme produit phyto en France depuis le retrait en 2001 de l'arsenite de sodium qui était C1. Il reste un R1 (reprotoxique avéré), le rodenticide warfarine alias coumafène (c'est aussi par ailleurs un médicament). Les produits CMR2 (cancérogène, mutagène ou reprotoxique soupçonné) sont classés T ou T+. Les produits CMR3 (cancérogène, mutagène ou reprotoxique possible) sont classés Xn suivi de R40, R62, R63, R62/63 et/ou R68.</p> <p>(6) Direction de l'agriculture et de la forêt.</p> <p>(7) Direction générale de l'enseignement et de la recherche.</p> <p>(8) Signification de « classé », v. note 5.</p> <p>(9) Attention au renouvellement de certification des personnels dont le DAPA expire avant le 1er octobre 2013.</p> <p>(10) Si ! C'est le 4° du III de l'article 3.</p>