dossier - Végétaux d'ornement

Les cicadelles sèment la zizanie en cultures ornementales, épisode 2

Émilie Maugin* et René Sforza** - Phytoma - n°651 - février 2012 - page 17

En quatre mois d'étude préliminaire dans le Sud-Ouest, déjà 15 espèces identifiées
 Zyginidia scutellaris (ph. GIE Fleurs & Plantes du Sud-Ouest)

Zyginidia scutellaris (ph. GIE Fleurs & Plantes du Sud-Ouest)

1 Cicadelle italienne de la vigne Zygina rhamni. Lors de l'étude réalisée en 2011 dans le Sud-Ouest, on l'a trouvée sur laurier palme (alias lauriercerise,Prunus laurocerasus).

1 Cicadelle italienne de la vigne Zygina rhamni. Lors de l'étude réalisée en 2011 dans le Sud-Ouest, on l'a trouvée sur laurier palme (alias lauriercerise,Prunus laurocerasus).

2 - Eupteryx zelleri sur sauge Salvia officinalis, une lamiacée sur laquelle cette cicadelle est connue pour se nourrir. Elle y a fait des dégâts en 2011.      3 - Adulte d'Asymmetrasca decedens. Cette espèce a été trouvée sur laurier palme et fusain d'Europe.

2 - Eupteryx zelleri sur sauge Salvia officinalis, une lamiacée sur laquelle cette cicadelle est connue pour se nourrir. Elle y a fait des dégâts en 2011. 3 - Adulte d'Asymmetrasca decedens. Cette espèce a été trouvée sur laurier palme et fusain d'Europe.

4 - Cette décoloration épidermique sur feuillede primevère (Primula acauli) causée par des cicadellespeut déprécier les plantes (Sud-Ouest en 2011).

4 - Cette décoloration épidermique sur feuillede primevère (Primula acauli) causée par des cicadellespeut déprécier les plantes (Sud-Ouest en 2011).

5 - Décoloration prononcée observée sur lavande(Lavandula stœchas). Outre l'esthétique, la santé dela plante est affectée.

5 - Décoloration prononcée observée sur lavande(Lavandula stœchas). Outre l'esthétique, la santé dela plante est affectée.

6 - Grillure sur feuille de romarin (Rosmarinus officinalis) provoquée par une cicadelle (probablement E. zelleri) quise nourrit dans le mésophylle en injectant des toxines.

6 - Grillure sur feuille de romarin (Rosmarinus officinalis) provoquée par une cicadelle (probablement E. zelleri) quise nourrit dans le mésophylle en injectant des toxines.

7 - Déformations provoquées par des piqûres decidadelles sur jeunes pousses de photinia Photiniafraseri. à ne pas confondre avec des dégâts de pucerons.

7 - Déformations provoquées par des piqûres decidadelles sur jeunes pousses de photinia Photiniafraseri. à ne pas confondre avec des dégâts de pucerons.

Les cicadelles posent des problèmes croissants en cultures ornementales. Pour y faire face, encore faut-il savoir à quelles cicadelles on a affaire. En effet, les futurs décisions techniques (choix d'auxiliaires de lutte biologique, de plantes-pièges, d'insecticides, etc.) peuvent dépendre des espèces présentes. Il était utile d'en faire l'inventaire. En voici un, réalisé dans le Sud-Ouest en 2011. Préliminaire mais déjà riche : 8 espèces trouvées en un mois (c'était l'épisode 1) et 15 en quatre mois sur 11 cultures !

Aujourd'hui, le développement d'une agriculture plus raisonnée contribue à l'émergence de ravageurs jusqu'alors secondaires. La filière horticole ne fait pas exception. La diversité des espèces mises en culture et leur cœxistence au sein de certains sites de production font de ces sites des réservoirs potentiels pour de nouveaux organismes nuisibles. La multiplicité des échanges commerciaux a fait se développer certains problèmes phytosanitaires, même si les filières d'importations font l'objet de contrôles.

Pourquoi pister les cicadelles

Souvent vecteurs, toujours piqueurs

Le cas des cicadelles, hémiptères piqueurs suceurs de sève, entre typiquement dans ce schéma. Avec plus de 20 000 espèces répertoriées dans le monde, un intérêt croissant doit être porté à la super-famille des Cicadelloidea, communément dénommées cicadelles.

Par exemple, la cicadelle du rhododendron, Graphocephala fennahi Young, et celle de la vigne, Scaphoideus titanus Ball, deux espèces d'origine nord-américaine, se sont acclimatées avec succès en France. Elles sont vectrices de deux agents pathogènes, un champignon responsable du desséchement des boutons floraux sur rhododendron et un phytoplasme responsable de la maladie de la flavescence dorée sur vigne (Della Giustina, 1989).

Par ailleurs, comme pour d'autres hémiptères, en phase de pullulation, les piqûres nutritionnelles peuvent causer des dégâts considérables. Plusieurs études témoignent de symptômes parfois spectaculaires de grillures des tissus sur cultures de plantes aromatiques (Nusillard, 2001 ; Bouillant et al., 2004).

Mal connues sur plantes d'ornement, où l'esthétique est primordiale

Si les espèces sont bien connues sur vigne, maïs, pomme de terre ou betterave (Della Giustina, 2002a), il existe peu de références dans la littérature sur des cicadelles ravageurs des cultures ornementales.

Toutefois, on trouve quelques données sur des espèces polyphages comme la cicadelle du rosier, Edwardsiana rosae (L.), trouvée souvent sur rosier et plus largement sur de nombreuses espèces de la famille des Rosacées (Saringer, 1989). La bibliographie décrit plusieurs plantes ornementales (Alca rosae, Primula japonica et Primula vulgaris, Verbena spp., Veronica spp.) comme plantes-hôtes possibles mais rarement principales (Hœbeke et al., 1983).

Pourtant, toutes les cicadelles peuvent occasionner une dépréciation de l'aspect esthétique du produit final, critère majeur dans la filière ornementale (GIE FPSO, 2000). De ce fait, la profession horticole a pris en considération l'importance que pourrait prendre ce groupe de ravageurs en lançant une étude préliminaire. Afin de mesurer l'importance de ce taxon dans les productions ornementales du sud-ouest, un inventaire a ainsi été initié en 2011.

L'objectif est de collecter du matériel sur les principales cultures atteintes afin d'identifier les espèces dominantes. Certes, des cicadelles ont déjà été collectées lors d'inventaires faunistiques dans le Sud-Ouest. Mais rares ont été les identifications plus détaillées qu'à l'échelle de la famille. Le suivi et l'identification des populations à l'échelle de l'espèce devraient permettre de mieux comprendre les phénomènes de pullulation de ces ravageurs.

Une étude en 2011

Des parcelles du Sud-Ouest

Le suivi est majoritairement réalisé sur le site du GIE Fleurs et Plantes du Sud-Ouest, station pour le Sud-Ouest de l'Institut technique Astredhor située à Villenave-d'Ornon (Gironde, France). Elle est localisée en zone périurbaine, dans un environnement à dominante viticole.

Des parcelles flottantes ont également fait l'objet de prélèvements, en cas d'observation de pullulations avec dégâts, sur des sites de production ornementale du Sud-Ouest.

Prélèvement des échantillons

Comme les cicadelles adultes sont d'excellents voiliers très mobiles, les méthodes de suivi sont très difficiles à mettre en œuvre. Bien que la « chasse à vue » à l'aide d'un aspirateur à bouche reste la méthode la plus appropriée pour capturer les spécimens, elle est réservée aux espèces végétales supportant de fortes populations du ravageur.

Pour élargir l'inventaire, des panneaux englués jaunes ont été disposés au sein d'une culture de Prunus laurocerasus (dit laurier-cerise ou laurier palme bien qu'il s'agisse d'une rosacée) à Villenave-d'Ornon, et relevés chaque semaine de début mai à fin août 2011.

Identification

Le matériel entomologique a été prélevé à l'eau écarlate sur des panneaux jaunes englués, puis stocké dans l'alcool à 70 °. L'identification morphologique a été conduite à l'EBCL par l'observation de caractères externes (coloration, présence de ponctuations, nervures alaires) et internes (pièces génitales des mâles) selon des critères discriminants (Ribaut, 1936, 1952 ; Della Giustina, 1989).

Les femelles ne permettent que l'identification au genre. Aussi, pour obtenir l'identification à l'espèce, l'extrémité abdominale des mâles est prélevée et potassée à chaud durant 5 minutes, puis observée sous loupe binoculaire et sous microscope optique.

Les espèces trouvées et leurs plantes-hôtes

Quinze espèces et onze plantes-hôtes sur neuf sites

Les résultats obtenus à partir des captures réalisées de mi-mai à fin août 2011 permettent de dresser un inventaire des cicadelles régulièrement capturées (Tableau 1).

30 échantillons analysés ont fourni 15 espèces de cicadelles récoltées sur 11 espèces de plantes ornementales, sur 9 sites de production. Certaines espèces sont trouvées sur plusieurs sites et/ou plusieurs plantes-hôtes. Même si la majorité des espèces sont connues comme polyphages, elles ont été capturées surtout sur rosacées, notamment P. laurocerasus, et sur lamiacées, notamment Rosmarinus officinalis (romarin) et Salvia officinalis (sauge).

La sous-famille des Typhlocybinae suscite un intérêt particulier pour les cultures considérées, avec huit espèces trouvées. Parmi elles, Zyginidia scutellaris représente 15 % des captures et le genre Eupterix 25 %.

Une « du maïs » trouvée sur rosier, cyclamen et chrysanthème

Zyginidia scutellaris (photo en médaillon p. 17) est souvent nommée en France « cicadelle du maïs » car elle peut être nuisible sur cette culture : dégâts directs avec pertes de rendement (Naïbo & al., 1991). La fréquence du maïs dans le Sud-Ouest n'est sans doute pas étrangère à sa détection dans nos parcelles.

Zyginidia scutellaris est réputée comme plutôt inféodée à diverses poacées (= graminées, dont le maïs) mais capable de survivre sur certaines dicotylédones (Della Giustina, 2002 a). Dans notre étude, on l'a trouvée sur rosier, cyclamen et chrysanthème.

Une « italienne de la vigne » trouvée sur laurier palme

Revenons sur trois autres typhlocybines. Zygina (Erythroneura) rhamni Ferrari est une cicadelle de 2-3 mm aux ailes antérieures tachetées d'orange et de jaune (photo 1). Elle est présente de la France à la Bulgarie. Polyphage, elle est principalement citée sur espèces ligneuses : aulne, érable, tilleul, chêne (Ribaut, 1936). Elle se nourrit du mésophylle et est connue principalement comme ravageur de la vigne (Mazzoni et al., 2008). Sa biologie implique une succession d'hôtes qui peut l'amener en cours de saison végétative à séjourner sur plantes ornementales, notamment sur feuilles des lauriers palmes. Sa présence dans cet environnement n'est pas surprenante vu la prédominance de la viticulture autour des parcelles ornementales.

On peut s'attendre à piéger aussi une autre typhlocybine de la vigne, Empoasca vitis Göethe, qui, du fait de sa polyphagie, colonise les plantes de l'environnement limitrophe de la vigne (Van Helden, 2000). De fait, une cicadelle du genre Empoasca a été trouvée sur rosier, sans que l'espèce ait pu être identifiée (seules des femelles ont été capturées).

Une liste de parasitoïdes de ces deux espèces a été dressée en Italie et pourrait servir de base à la mise en place d'un programme de contrôle biologique (Arzone et al., 1987).

Une espèce connue et trouvée sur lamiacées : sauge, romarin, etc.

Eupteryx zelleri (Kirschbaum) mesure moins de 3 mm (photo 2) et se nourrit principalement de lamiacées, notamment romarin (Rosmarinus officinalis), lavande (Lavandula spp.) et menthes (Mentha spp., Ribaut, 1936). Sa distribution est large, depuis la zone méditerranéenne jusqu'à la zone Sud-Ouest de la France. Elle se rencontre aussi sur sauge en Italie (Corsi et al., 1999).

À Villenave-d'Ornon, elle a occasionné dès le mois de mai des dégâts sur diverses lamiacées : sauge (S. officinalis), mélisse (Melissa officinalis), menthes (Mentha piperita, M. suaveolens), origan (Origanum vulgare), romarin (R. officinalis) et thym (Thymus vulgaris).

Il a été montré en Toscane sur la menthe, que cette cicadelle peut être soumise au parasitisme oophage d'Anagrus ustulatus Haliday (Hymenoptera, Mymaridae) alors qu'A. atomus Haliday n'avait aucun impact (Matteucig, 2007).

Une connue sur amandier et citrus, mais trouvée sur laurier palme

Asymmetrasca (Empoasca) decedens (Paoli) est une cicadelle de 3 à 3,5 mm (photo 3). Elle était placée auparavant dans le genre Empoasca mais la forme de son pénis asymétrique a conduit en 1958 le taxonomiste Dlabola à créer un genre spécifique. D'un point de vue inventaire, il est intéressant de l'avoir capturée dans le Sud-Ouest car elle n'a été citée en France (et seulement à Montpellier) qu'à partir de 1965 (Della Giustina, 1986).

Elle a déjà été capturée lors d'un inventaire en 2000 sur Abelia, Euonymus, Lagerstrœmia et Photinia en Dordogne et sur Myrtus en Lot-et-Garonne (GIE FPSO, 2000). Cette espèce semble donc plus commune.

Cette typhlocybine est bien connue comme ravageur de nombreuses cultures. Dans cette étude, nous l'avons capturée sur P. laurocerasus et Euonymus europeanus (fusain d'Europe), mais elle est citée sur l'amandier en Espagne (Jacas et al., 1998), sur coton en Turquie (Ekrem, 2009), sur Citrus au Liban (Abdul-Nour, 1985), pour ne citer qu'eux. Dans les amanderaies, elle représente 85 % des captures par pièges jaunes englués (Jacas et al., 1998).

Symptômes et dégâts occasionnés

Feuilles ponctuées inesthétiques, jaunissements affaiblissants

Les dégâts constatés sont liés à la prise de nourriture via les pièces buccales. De petites ponctuations blanc argenté d'environ 1 mm apparaissent sur la face supérieure des feuilles, traduisant un effondrement des cellules vidées. Ce simple niveau d'attaque suffit à déprécier l'esthétique du produit final, sur primevère par exemple (photo 4), entraînant une moinsvalue à la commercialisation. A contrario, l'impact économique est moindre sur chrysanthème, car à la vente la couronne florale recouvre le feuillage et masque les dégâts.

En cas de forte attaque, des jaunissements importants des feuilles surviennent par confluence des taches (photo 5). Les piqûres s'avèrent alors néfastes à la fois par blocage de la photosynthèse et par les pertes hydriques affectant la production végétale.

Les attaques sont a priori plus graves en période de sécheresse car les cicadelles se reportent massivement dans les cultures irriguées.

Visibles et/ou vecteurs

Les espèces, comme E. zelleri, qui réalisent leur prélèvement de sève dans le mésophylle, occasionnent des dégâts plus visibles. Elles injectent des toxines salivaires pouvant provoquer des brunissements ou des brûlures (toxémiases) comme c'est le cas sur romarin (photo 6).

A contrario, les cicadelles qui se nourrissent dans les vaisseaux conducteurs provoquent des symptômes plus discrets car il n'y a pas de destruction tissulaire, mais le risque de vection d'agents phytopathogènes est alors plus grand et la production de miellat plus importante (Della Giustina, 2002b). Dans ce cas, on observe plutôt des déformations de feuilles sur jeunes pousses ; les symptômes peuvent être confondus avec des dégâts de pucerons (photo 7).

Outre la possibilité de vection, les piqûres peuvent servir de portes d'entrées à divers champignons pathogènes type phoma sur origan ou anthracnose sur mélisse (Nusillard, 2001).

Impacts commerciaux en pépinière

Comme pour tous les hémiptères ravageurs, même de simples piqûres sont peu tolérées en cultures ornementales car la plante perd de son potentiel esthétique.

En pépinières, dans lesquelles les plantes persistantes sont vendues pour l'aspect de leur feuillage, les cicadelles commencent à poser des problèmes fin mai vers le 4e mois de production (mi-culture). Elles impactent l'aspect de la plante et aussi parfois la croissance. Or, les plantes étant vendues par catégorie de hauteur à l'automne, les dégâts peuvent engendrer une dévaluation de catégorie donc de prix.

Impacts sur plantes en pot

En plantes en pots, notamment sur lamiacées aromatiques, la commercialisation a lieu plus tôt, vers mai-juin, et coïncide avec les pullulations d'E. zelleri. Les dégâts occasionnés rendent certaines plantes impropres à la vente.

En juin, la mise en production des cultures d'automne (chrysanthème, cyclamen, primevère) démarre au moment où les populations de cicadelles sont déjà bien développées. Des piqûres nutritionnelles en trop grand nombre peuvent alors engendrer un blocage des jeunes plants. Les populations de ravageurs peuvent ensuite se multiplier sous serre et se conserver relativement tard en saison, infestant les séries de plantes produites en suivant.

À ce jour, les matières actives utilisées lors des traitements chimiques insecticides à large spectre limitent assez bien les pullulations. Néanmoins, à la faveur de la réalisation d'une lutte plus raisonnée, donc plus ciblée, les effectifs de cicadelles ont tendance à augmenter.

Conclusions

Diversité, dont trois à étudier

Cette étude préliminaire a permis de collecter quinze espèces de cicadelles différentes en moins de quatre mois. Elle met en avant la grande diversité de cette famille au sein des cultures ornementales.

Parmi ces cicadelles, huit espèces sont des typhlocibines dont plusieurs connues et étudiées comme des ravageurs pour d'autres cultures, en Espagne notamment. Il paraît intéressant d'avoir une démarche pro-active, de les étudier et d'anticiper leurs pullulations dans le but de limiter leur impact potentiel dans les cultures.

Évolution de la lutte chimique

À ce jour, la pression insecticide exercée en production semble suffisante pour maintenir une culture commercialisable. Mais la production ornementale, plus qu'une autre, exige un produit 'zéro défaut' à esthétisme irréprochable. Les seules piqûres de nutrition peuvent donc poser des problèmes.

C'est le cas pour Eupteryx zelleri qui a occasionné des dégâts considérables sur romarin et sauge au moment de la commercialisation en 2011.

Une intervention insecticide ciblée sur les larves aurait probablement pu limiter les dégâts, en positionnant de façon opportune le traitement. Néanmoins, les essais conduits en lutte chimique semblent montrer qu'il est très difficile de limiter une pullulation de cicadelles. Leur grande mobilité leur permet la recolonisation rapide de la parcelle traitée par des populations présentes aux abords (Nusillard, 2001).

Et la lutte biologique ?

Pour le moment il n'existe aucune méthode de lutte biologique applicable.

Des ennemis naturels existent comme le parasitoïde d'œuf Anagrus atomus, et certaines espèces de Dryinidae (hyménoptères) qui forment des poches kystiques caractéristiques sur les adultes de cicadelles parasités (Bouillant et al., 2004). La difficulté est de trouver les auxiliaires adaptés aux espèces de cicadelles présentes, qui semblent nombreuses : déjà 15 différentes identifiées en une seule étude préliminaire de 4 mois sur une région. L'importance de prédateurs comme certaines punaises mirides, araignées ou chrysopes est moins bien comprise (Van Helden, 2000). Toutefois, à ce jour, aucune observation de ce type n'a été réalisée.

L'étude a été conduite durant une saison en 2011 et pourrait être maintenue sur un plus long terme si des financements et une volonté de la filière voyaient le jour.

<p>* Institut technique ASTREDHOR - GIE Fleurs et Plantes du Sud-Ouest. 71, avenue E.-Bourlaux. BP 81. 33883 Villenave-d'Ornon. emilie.maugin@astredhor.fr,</p> <p>** USDA-ARS-European Biological Control Laboratory (EBCL). Campus international de Baillarguet. CS 90013 Montferrier-sur-Lez. 34988 Saint-Gély-du-Fesc. rsforza@ars-ebcl.org</p>

Cultures ornementales, quelle place en France

La filière horticole française occupe 70 000 ha (0,27 % de la SAU (1)) dont 8 000 à 9 000 ha de productions florales(2), mais représente 6 % de la production végétale nationale en valeur. Le chiffre des productions horticoles en France est estimé à 2,2 milliards d'euros en 2010, ce qui place la France au 4e rang de l'Union européenne pour cette activité. Les zones de production sont majoritairement localisées dans les régions Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Pays-de-la-Loire, Rhône-Alpes, Ile-de-France, Centre et Aquitaine (Val'hor, 2011).

Une gamme très diversifiée d'espèces végétales est produite. On distingue d'ailleurs les secteurs des fleurs et feuillages coupés, plantes en pot fleuries et plantes vertes, plantes à massif et plantes vivaces, bulbes, jeunes plants horticoles et pépinière ornementale.

(1) Surface agricole utile estimée à 25,95 millions d'ha (source : recensement agricole 2010).

(2) 9 000 ha selon le recensement agricole 2010 (ndlr).

Bibliographie

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• Della Giustina W., 1989 - Faune de France 73, Homoptères Cicadellidae, volume 3 compléments. Editions FFSSN INRA, 350 pp.

• Della Giustina W., 2002 a - Les cicadelles nuisibles à l'agriculture, 1re partie. Insectes, 126, 3-6.

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• Jacas J., Hermoso de Mendoza A., Cambra M., Balduque R., 1998 - Asymmetrasca decedens (Homoptera : Cicadellidae), a new pest of almond trees in Spain. EPPO Bull./Bull œPP, 27, 523-524.

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Résumé

Les cicadelles, ravageurs jusqu'ici secondaires des cultures ornementales, se développent depuis 2007 dans le Sud-Ouest de la France. La gamme de plantes-hôtes s'élargit avec des attaques répétées en horticulture sous abri notamment sur Chrysanthemum sp., Primula acaulis, Cyclamen persicum, Rosmarinus officinalis et Salvia officinalis, ainsi qu'en pépinières sur Prunus laurocerasus notamment. Les pertes économiques sont liées à la baisse de qualité esthétique des plantes provoquée par les piqûres nutritionnelles et leurs conséquences (miellat, fumagine, grillure, gaufrage, etc.). Indirectement, la question de la transmission de virus phytopathogène se pose.

Une campagne de piégeage a été conduite en 2011. Quinze espèces de cicadomorphes capturées entre mai et août 2011 ont été identifiées. Parmi les 8 espèces appartenant à la sous-famille des Typhlocybinae, Zyginidia scutellaris représente 15 % des captures et les espèces du genre Eupteryx 25 % des captures.

Trois typhlocybines, Zygina rhamni, Eupterix zelleri et Asymmetrasca decedens sont présentées au niveau de leur biologie, leur impact sur les cultures ornementales, ainsi que de possibles mesures de contrôle.

Mots-clés : cicadelle, culture ornementale, plante-hôte, vection, Lamiaceae.

Summary

LEAFHOPPERS BECOME TROUBLE MAKERS IN ORNAMENTAL CROPS 2nd SEASON

Leafhoppers, secondary pests of ornamental crops, grow permanently since 2007 in the South West of France. The range of host plants in greenhouse horticulture widens with repeated at tacks on Chrysanthemum sp., Primula acaulis, Cyclamen persicum, Rosmarinus officinalis and Salvia officinalis ; Photinia and Prunus laurocerasus in nursery. The economic losses are related to the decrease in the aesthetic quality of plants, caused by feeding spots and their consequences Indirectly, the issue of transmission of phytopathogenic viruse arises. A trapping campaign was conducted in 2011. Fifteen species of cicadomorphes represent the total catch in 2011. The Typhlocybinae like Zygina rhamni, Eupterix zelleri and Asymmetrasca decedens will be presented in details regarding their biology, their impact on ornamental crops, as well as possible control measures.

Key words : Leafhopper, ornamental crops, host plant, vection, Lamiaceae.

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