Lâcher de chrysopes : ci-dessus, pose des œufs, invisibles car protégés à l'intérieur du carton.à gauche, on voit la perche (téléscopique) permettant d'accrocher les œufs assez haut pour que les larves de chrysopes, sitôt écloses, commencent à manger du tigre. Photos : IfTech
Application de nématodes en pulvérisation foliaire. À noter : ce n'est pas un produit phytopharmaceutique mais un auxiliaire (les nématodes sont des macro-organismes). De ce fait : – il n'y a pas lieu de baliser le chantier ni l'interdire au public. – il faut des conditions d'application favorables, par exemple une température tempérée (entre 14 °C et 35 °C). ph. M. Cornillon, CETU INNOPHYT
Après plus de trois ans de travaux de recherche, le programme PETAAL, coordonné par le centre technique national Plante & Cité et porté par la société Koppert livre ses résultats : il propose une stratégie combinant l'utilisation de deux auxiliaires pour réguler les populations de tigre du platane.
Vers une stratégie combinée de bio-contrôle du tigre du platane
Expérimentations 2008 à 2010
Les essais menés de 2008 à 2010 inclus ont permis de définir les éléments d'une stratégie globale de bio-contrôle du tigre du platane (Corythucha ciliata) en espaces verts, faisant appel à l'utilisation combinée d'auxiliaires entomopathogènes et prédateurs. Ces résultats ont été publiés à la CIR A de Montpellier en octobre 2011, et retranscrits dans Phytoma (n °648, novembre 2011, 32:36).
Les résultats des expérimentations ont mis en évidence l'efficacité des nématodes entomopathogènes du genre Steinernema (produits commercialisés : Tigranem® ou Nemador®) et de l'insecte prédateur indigène Chrysoperla lucasina (produits commercialisés : Chrysolys® ou Tigrador®) à des doses spécifiques.
Test de stratégie globable en 2011
En 2011, une stratégie globale à quatre traitements combinant ces auxiliaires a été testée (Fig. 1):
1- Pulvérisation de nématodes sur tronc et charpentières en fin d'hiver ciblant les adultes hivernants de tigre du platane sous rhytidomes avant leur migration vers le feuillage ;
2- Pulvérisation foliaire de nématodes au printemps après migration des adultes hivernants ;
3- Lâcher d'œufs de chrysopes sur le feuillage six semaines après la migration du tigre, soit début juin environ, ciblant les larves de tigres de première génération ;
4- Pulvérisation foliaire de nématodes en été sur le feuillage au moment du pic de nuisances.
Principaux éléments techniques de la stratégie globale
Maîtrise technique des applications
L'efficacité de cette stratégie de bio-contrôle du tigre du platane associant quatre traitements (un sur tronc et charpentières, trois foliaires) et deux types d'organismes biologiques (nématodes entomopathogènes du genre Steinernema et insecte prédateur Chrysoperla lucasina) a été démontrée, avec des résultats d'efficacité variables selon les traitements (Fig. 2 et 3 page suivante).
Ces travaux ont fait ressortir la nécessité d'une maîtrise technique des applications et lâchers d'auxiliaires pour obtenir une efficacité optimale. En particulier, la date précise des applications.
Ceci implique la connaissance du cycle biologique du tigre du platane, un suivi rigoureux de sa dynamique spatio-temporelle, notamment la période clé qu'est la migration du tronc vers le houppier, et des conditions d'applications favorables aux auxiliaires (paramètres climatiques, conditions et périodes d'application, etc.)
Analyse des résultats phase par phase
1- Phase d'hivernation de Corythucha ciliata : traitement sur tronc et charpentières. Le traitement 1 à base de nématodes entomopathogènes sur tronc et charpentières a été effectué dans la majorité des villes partenaires à la fin de mars, avant la migration des tigres vers le houppier.
Une semaine après traitement, on note une réduction moyenne significative des populations hivernantes de tigre du platane dans la modalité traitée de l'ordre de 60 % (Fig. 2), variant de 33 % à 75 % selon les sites.
2- Phase d'activité de Corythucha ciliata : traitements foliaires.
La pression parasitaire du tigre du platane était plutôt faible en 2011 (figure 3), avec une chute des populations au moment du pic normalement observé fin juillet-début août. Le traitement 2 (Steinernema spp.) ne manifeste pas d'efficacité à J+7 mais trois semaines environ après l'intervention (comptage avant le traitement 3), avec une réduction significative moyenne des populations de l'ordre de 50 %.
Le traitement 3, consistant en un lâcher d'œufs de C. lucasina, n'a pas démontré d'efficacité significative de manière globale 15 jours après traitement, mais a permis une réduction de l'ordre de 50 % des populations de tigre du platane sur le site de la ville d'Antony.
Le traitement 4 (Steinernema spp.) a permis une réduction significative des populations de tigre du platane de l'ordre de 50 %, mais l'effet choc escompté n'a pu être mis en évidence de façon aussi nette que lors des essais des années précédentes car nous avons observé une chute des populations de C. ciliata lors du pic normalement observé à cette période (T4 + 7 j).
Malgré deux « biais expérimentaux »
À noter que deux facteurs de l'expérimentation 2011 ont limité l'efficacité :
– d'une part, on l'a lu, la faible pression du tigre du platane, vu les conditions climatiques défavorables lors du traitement 4, ont « aplati » la différence entre modalités traitées et témoin.
– d'autre part, vu la taille des modalités traitées et témoin (6 arbres objets de comptage par répétition) et leur proximité (seulement 4 « rangs de garde » de séparation) on a noté des problèmes d'infestation de la modalité Traitée par les adultes de tigre du platane de la modalité Témoin, ce qui a pu limiter l'efficacité des auxiliaires et/ou biaiser les résultats.
Proposition 2012
La stratégie combinée de bio-contrôle du tigre du platane testée en 2011, associant plusieurs organismes biologiques, a permis de réduire significativement les populations de C. ciliata de 50 % dans les conditions expérimentales de l'essai.
Les produits sont d'ores et déjà commercialisés par les deux entreprises partenaires, Tigranem/Chrysolys, de Koppert, et Nemador/ Tigrador, d'If Tech, et sont les seuls à être issus du programme PETAAL.
<p><b>Remerciements :</b> Le programme PETAAL, labellisé par le pôle de compétitivité Végépolys, est financé par le Fonds unique interministériel et le Conseil régional des Pays-de-la-Loire.</p> <p>Les partenaires de PETAAL tiennent à remercier les financeurs et l'ensemble des acteurs ayant pris part aux essais de la stratégie combinée testée en 2011 : les villes d'Antony (92), Bordeaux (33), Marseille (13), Paris (75), Saint-Chamond (42) et Tours (37), le CETU Innophyt ainsi que les prestataires ayant appliqué les agents de lutte biologique et effectué les observations expérimentales.</p>
Fig. 2 : Effet du premier traitement
Efficacité moyenne sur 4 sites du premier traitement à base de nématodes entomopathogènes, sur tronc et charpentières en fin d'hiver.
Fig. 1 : PETAAL, Stratégie combinée de lutte biologique contre le tigre du platane.
Cette stratégie a été testée et validée en 2011, elle est proposée pour 2012.