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Oïdium de la vigne, vers une protection mieux raisonnée

JACQUES ROUSSEAU *, DANIEL BLANC ** ET VINCENT JACUS ** - Phytoma - n°668 - novembre 2013 - page 20

Traiter avec des produits pas chers n'est pas le plus rentable. Mais on peut traiter moins souvent, en particulier en fin de saison. Et on a trouvé un critère pour savoir dans quel cas on peut arrêter de traiter à la fermeture de la grappe.
Une des 100 grappes « marquées » après nouaison dans le cadre du travail rapporté ici. Sise dans une placette non traitée depuis la fermeture de la grappe, elle a été inspectée tous les 15 jours, du stade petit pois à la récolte. Photo : ICV

Une des 100 grappes « marquées » après nouaison dans le cadre du travail rapporté ici. Sise dans une placette non traitée depuis la fermeture de la grappe, elle a été inspectée tous les 15 jours, du stade petit pois à la récolte. Photo : ICV

Oïdium sur chardonnay entre fermeture de la grappe et véraison. L'intensité d'attaque est déjà supérieure à 70 %. Cette grappe sera classée très touchée à la récolte. Photo : BASF

Oïdium sur chardonnay entre fermeture de la grappe et véraison. L'intensité d'attaque est déjà supérieure à 70 %. Cette grappe sera classée très touchée à la récolte. Photo : BASF

L'oïdium de la vigne, maladie fongique causée par Erisyphe necator, entraîne des pertes de récolte et des défauts qualitatifs sur les raisins et les vins. On sait déjà prévoir à la vendange l'incidence de l'oïdium sur la qualité du vin.

Mais que faire avant la vendange ? On cherche à réduire les traitements. Quels résultats ont les programmes mis en œuvre sur le terrain ? Existe-t-il des critères pour savoir si l'on peut arrêter un programme sans risque ou s'il faut continuer ?

Ce qu'on savait déjà

Pertes en quantité

Une précédente étude réalisée de 2006 à 2008 sur carignan et chardonnay en région méditerranéenne (Rousseau et al., 2008) avait montré que l'oïdium peut entraîner jusqu'à 62 % de pertes de récolte, du fait de la coulure des fleurs et jeunes baies, voire de la chute de bouquets entre floraison et stade petit pois et de la nanification ou de l'éclatement des baies ensuite.

Effet sur la qualité

Les vins issus de vendanges oïdiées montrent des différences significatives dans leur composition : augmentation du pH et diminution des teneurs en acide tartrique sur les vins finis, augmentation des teneurs en polyphénols totaux, développement de composés aromatiques indésirables (composés phénolés tels l'eugénol, la zingérone et l'inconnu 198, composés herbacés type hexanal, 2-hexen-1-ol trans, heptanol ou hexanol, composés responsables des odeurs de champignon tel l'1-octen-3-ol).

L'analyse sensorielle montre un impact significatif : diminution des arômes de fruit et de confiture typiques de la variété, et augmentation des arômes soufré, herbacé, moisi, champignon, animal, nette augmentation en bouche de l'intensité tannique (ou de la rugosité sur vins blancs), et de la sécheresse, de l'astringence et de l'amertume (Rousseau et al., 2008, Stummer et al., 2005).

Perte de qualité à partir d'un seuil de dégâts à la récolte

Ces modifications apparaissent à partir d'un certain seuil de dégâts à la récolte.

Les grappes faiblement touchées n'entraînent aucune incidence négative.

Mais il suffit de 5 à 10 % de grappes fortement touchées (plus de la moitié des baies recouvertes d'oïdium, certaines étant éclatées ou de taille réduite à cause des attaques d'oïdium) dans la vendange pour que ces défauts apparaissent.

Au-delà d'un certain seuil (10 % de grappes très touchées à la récolte), les défauts sont jugés rédhibitoires par les consommateurs, et il est quasi impossible de les corriger en cours de vinification (sauf à l'aide de techniques de thermovinification coûteuses en argent et en énergie).

Ces travaux confirment des observations antérieures de l'Inra montrant qu'il suffit de 2 % de baies nanifiées dans une vendange pour entraîner une dépréciation qualitative des vins (Calonnec et al., 2004).

Grille proposée

Nous avions ainsi proposé une grille simple d'évaluation de l'incidence qualitative des dégâts d'oïdium à la récolte, à partir de l'évaluation de la fréquence de grappes très touchées dans une parcelle (Tableau 1).

Une fois les seuils de tolérance de l'oïdium à la récolte définis, deux questions se posent :

– quelles sont l'efficacité et la rentabilité de divers programmes de lutte contre l'oïdium ?

– peut-on proposer une règle de décision simple permettant d'économiser des traitements sans mettre en péril la qualité de la protection ? C'est l'objet de la suite du programme expérimental, réalisé de 2009 à 2012 et présenté dans cet article.

Quatre stratégies pour du chardonnay

Parcelles choisies

Les essais ont été réalisés sur trois parcelles de chardonnay : une de 20 ans, taillée en cordon de Royat avec palissage en espalier, soumise à forte pression d'oïdium à cause du voisinage d'une parcelle de carignan abandonnée, située sur la commune d'Alignan-le-Vent (34), la seconde située à Saint-Dezery (30) et la troisième en 2012 sur la commune de Puissalicon (34).

Quatre stratégies comparées entre elles et avec un témoin

Plusieurs stratégies type ont été comparées (Tableau 2).

– Une stratégie « sécurité » respectant les recommandations de bonnes pratiques de lutte des notes nationales rédigées par l'IFV et les chambres d'agriculture (respect du nombre maximum de traitement par produit, alternance des familles chimiques). Elle a été testée de 2009 à 2012.

– Une stratégie « économie » à base d'IDM au départ suivis par des interventions dites de « rattrapage » à base de meptyldinocap seul ou associé au soufre mouillable. Soyons clairs : cette stratégie ne suit pas les recommandations de bonnes pratiques de lutte !

Mais elle se veut le reflet de la pratique régionale de certains viticulteurs privilégiant la recherche d'économies sur le coût de la protection fongicide contre l'oïdium. Nous l'avons testée jusqu'en 2011 ; vu ses résultats sans appel (voir plus loin), nous n'avons pas jugé utile de la retester en 2012.

– Une stratégie « soufre » à base exclusive de soufre (mouillable et poudrage). Elle a été testée à partir de 2010.

– Une stratégie « raisonnée » visant à réduire le nombre d'applications par rapport à la stratégie « sécurité ». Elle a été testée de 2009 à 2012.

Les essais ont été réalisés avec des répétitions de 3 placettes de 10 souches par modalité, incluant un témoin non traité, selon un dispositif en bloc (Tableau 3).

Mesures effectuées

Chaque modalité a fait l'objet d'une évaluation des dégâts d'oïdium (intensité et fréquence) tous les 15 jours de la nouaison à la récolte.

Les souches ont été vendangées à maturité, avec estimation du rendement par pied. Puis le raisin a été vinifié à la cave expérimentale du Groupe ICV, selon un process de vinification identique chaque année.

Les vins ont fait l'objet d'un suivi analytique à chaque étape de vinification (moût, fin de fermentation alcoolique, mise en bouteille). L'analyse sensorielle des vins finis a été réalisée par le jury expert du Groupe ICV, selon la méthode d'analyse sensorielle descriptive quantifiée (Granes et al., 2009).

L'analyse économique a été réalisée en prenant en compte le coût de la main-d'œuvre, l'amortissement du matériel et le coût des intrants (à partir des données du Coût des fournitures en viticulture édité par l'IFV).

Mise au point d'une règle de décision pour le raisonnement de la lutte

Les observations réalisées auparavant montraient que les grappes subissant des dégâts importants à la récolte présentaient très tôt des symptômes d'oïdium. Ceci permet d'envisager un arrêt précoce des traitements à la fermeture de la grappe dans la mesure où la situation serait saine à ce stade.

Afin de vérifier cette hypothèse, 100 grappes, situées sur des placettes non traitées à partir de la fermeture de la grappe (modalités témoin ou raisonnée), ont été repérées et marquées après nouaison (photo 1). Elles ont fait l'objet d'une notation de l'intensité des symptômes d'oïdium tous les 15 jours du stade petit pois à la récolte.

Il s'agit d'évaluer l'évolution de grappes en l'absence de traitement en fonction de leur infestation à la fermeture de la grappe, pour définir un seuil de tolérance à ce stade.

Efficacité des différentes stratégies de lutte

Évolution de la pression d'oïdium au cours de l'expérimentation

La Figure 1 représente l'évaluation des dégâts d'oïdium sur le témoin non traité à la véraison selon les années. La pression a été très forte en 2009 et 2012, et importante en 2011. En 2010, les dégâts sur le témoin non traité étaient faibles (15,6 %, voir Figure 1). Tous les programmes ont eu la même efficacité (bonne, états sanitaires statistiquement équivalents entre eux et différents du témoin) et les vinifications expérimentales n'ont pas été réalisées.

Efficacité des différentes stratégies

Les mesures d'état sanitaire à la récolte (Tableau 4) montrent des différences significatives entre les stratégies :

– La modalité sécurité, avec huit applications, a, quelle que soit l'année, de très faibles dégâts : moins de 5 % d'intensité et une efficacité par rapport au témoin de 92 à 98 %.

– La modalité économique, avec une seule application en moins mais des produits différents utilisés, présente des dégâts significatifs à la récolte : 15 à 36 % d'intensité selon l'année, efficacité de 32 à 77 %.

– La modalité raisonnée décroche légèrement en 2009, avec une intensité d'oïdium à la récolte de 11,6 % pour une efficacité de seulement 82 %. La première application au stade E n'avait pas été effectuée sur cette modalité, d'où l'apparition précoce d'oïdium, présent tout le reste de la saison.

Suite à ces observations, le début des traitements a été positionné les années suivantes en même temps que la modalité sécurité, avec suppression d'un ou deux des derniers traitements. Dans ces conditions, l'intensité d'oïdium à la récolte a toujours été comparable à légèrement supérieure à celle de la modalité sécurité (inférieure à 6 %) pour une efficacité supérieure ou égale à 89 %. Selon les stratégies, une ou deux applications ont pu ainsi être économisées par rapport au programme sécurité.

En 2011, avec la suppression des deux derniers traitements, on observe une légère augmentation des dégâts d'oïdium à la récolte par rapport à la modalité sécurité (6 % d'intensité contre 4 %). En 2012, on n'observe aucune différence significative de dégâts à la récolte, que ce soit avec un ou deux traitements en moins.

– En 2011, la modalité soufre a décroché, avec 38 % d'oïdium à la récolte, du fait de cadences de traitement trop régulières (cadences strictes de 10 jours). En 2012, une cadence plus resserrée aux stades de très grande sensibilité de la vigne à l'oïdium a permis d'obtenir un résultat proche de celui de la modalité sécurité, mais avec un total de 12 applications.

Incidence des différentes stratégies sur le rendement

Les estimations de rendement à la récolte (Tableau 5) montrent que sur le témoin, l'oïdium a entraîné en moyenne sur les 3 ans une perte de récolte de 33 %. La stratégie économique se solde par des pertes régulières, en moyenne de 24 %. Sur la modalité soufre, les pertes varient selon les années : 24 % en 2011 mais presque nulles en 2012. Les rendements de la modalité raisonnée sont très proches de ceux de la stratégie sécurité, sauf en 2011 (légère perte de récolte).

Incidence des différentes stratégies sur le profil sensoriel des vins

Les vins ont été caractérisés par le jury expert en grandes catégories : vin de qualité avec profil variétal typique ; vin de qualité avec faible typicité variétale ; vin neutre, sans défaut ; vin présentant des défauts ; vin présentant des défauts marqués.

Quel que soit le millésime, les vins issus des modalités sécurité et raisonnée présentent une bonne qualité (Tableau 6). Ils se distinguent légèrement par leur profil sensoriel :

– ceux de la modalité raisonnée sont en général jugés plus complexes et plus doux (fruits blancs, fruits exotiques, pamplemousse mûr),

– ceux de la modalité référence sont plus frais, avec des arômes intenses mais plus citronnés, comme si le raisin présentait un très léger retard de maturité.

Les vins issus du témoin non traité présentent les défauts typiques des vendanges oïdiées : absence d'arômes variétaux, odeurs de champignon et de moisi, très forte rugosité et sécheresse et amertume très élevées en bouche. Les vins issus des modalités économique et soufre en 2011 présentent de légers défauts, du type de ceux du témoin mais atténués.

Bilan économique

Pour chaque modalité, on a calculé les coûts de production en prenant en compte les prix des fongicides et le prix du passage du pulvérisateur (amortissement du matériel+ fuel+main-d'œuvre). Le revenu brut à l'hectare a été évalué sur la base des rendements mesurés et de la rémunération au producteur (base chardonnay vin de pays d'Oc de Catégorie A = 65 €/hl).

On a ainsi pu calculer et comparer la marge opérationnelle brute des différentes stratégies (Figure 2).

L'analyse des coûts de production montre des différences faibles entre les différentes modalités. En effet, le coût de la protection phytosanitaire est davantage déterminé par le nombre de passages réalisés (frais de main-d'œuvre, de mécanisation et d'amortissement du matériel) que par la valeur des produits utilisés.

Du fait des différences de rendement, les différences de marge brute opérationnelle sont en revanche très marquées. La modalité « sécurité » permet un gain net de 1 018 à 1 861 €/ha par rapport au témoin, contre 1 127 à 1 446 €/ha pour la modalité « raisonnée », et seulement 466 à 931 €/ha pour la modalité « économique » évaluée seulement en 2009 et 2011.

Autrement dit, 1 € investi en plus dans le programme « sécurité » par rapport au programme « économique » a rapporté 16 € de gain net en 2009, et 44 € en 2011.

Conclusion

En absence de traitement, l'oïdium peut entraîner des pertes de récolte supérieures à 30 %, et est à l'origine de vins présentant des défauts marqués, les rendant inaptes à la commercialisation. Le bilan économique est très déficitaire.

La mise en œuvre du programme de traitement économique entraîne une économie moyenne de 41 €/ha par rapport à la stratégie de sécurité, avec un seul traitement en moins.

Dans les conditions de l'essai, cette stratégie a entraîné une perte de récolte moyenne de 24 % et a produit des vins à défaut, ayant perdu toute typicité variétale et difficile à vendre comme chardonnay. Le bilan économique est très déficitaire.

La mise en œuvre de stratégies raisonnées permet d'économiser de 1 à 2 traitements par rapport à la stratégie sécurité selon les années. Les stratégies raisonnées efficaces sont celles qui commencent « tôt et fort » pour éviter tout développement d'oïdium, et permettre de supprimer un ou deux des derniers traitements du programme, réalisés à partir de la fermeture de la grappe.

Cette stratégie a une très faible incidence sur le rendement et est sans impact majeur sur le profil sensoriel des vins ; elle permet d'économiser de 40 à 80 €/ha.

Définition d'un seuil de tolérance à la fermeture de la grappe

L'analyse du suivi de l'évolution de l'oïdium montre que, là où l'oïdium entraîne des dégâts significatifs à la récolte, on avait observé très tôt les premiers dégâts. C'est ce que montre la Figure 3 pour l'année 2011.

Évolution des dégâts entre fermeture de la grappe et récolte en absence de traitement

Le suivi de l'évolution individuelle des dégâts sur des grappes marquées permet de mesurer l'évolution possible de l'oïdium entre fermeture de la grappe et la récolte, en absence de traitements (Figure 4).

58 % des grappes ne présentant aucun symptôme à la fermeture de la grappe n'en présenteront aucun à la récolte, et les 42 % restant présentent des dégâts très limités (de 1 à 10 % d'intensité). 20 % des grappes présentant de l'oïdium à la fermeture, mais avec moins de 15 % d'intensité, en présentent plus de 50 % à la récolte. Les grappes les plus touchées à la fermeture de la grappe (présentant 16 % ou plus d'intensité d'oïdium) évoluent en grande majorité vers des dégâts très importants à la récolte (plus de 50 % d'intensité par grappe).

Seuil de tolérance de l'oïdium à la fermeture de la grappe

La prise de risque d'arrêter les traitements à partir de la fermeture de la grappe varie en fonction du degré d'attaque individuel des grappes.

Pour des grappes saines, le risque est très faible : si l'oïdium peut se développer jusqu'à la récolte, il n'atteint en aucun cas des dégâts préjudiciables pour la qualité.

Pour des grappes faiblement touchées, le risque est modéré : 20 % de ces grappes peuvent atteindre des dégâts préjudiciables pour la qualité des vins.

Pour des grappes très touchées, le risque est très élevé : plus de la moitié des grappes est susceptible d'évoluer vers des niveaux de dégâts préjudiciables pour la qualité.

Le niveau d'oïdium qui permet de distinguer des grappes faiblement touchées de celles fortement touchées à la fermeture de la grappe correspond à une intensité de 15 % par grappe (15 % des baies d'une grappe touchées par l'oïdium).

Il est alors possible d'établir une grille d'aide à la décision pour évaluer la possibilité d'arrêter tout traitement sans risque à la fermeture de la grappe, c'est-à-dire afin de ne pas avoir à la récolte plus de 5 % de grappes très touchées susceptibles d'altérer la qualité du vin.

Le principe consiste à évaluer la fréquence de grappes significativement touchées à la fermeture de la grappe, c'est-à-dire présentant plus de 15 % de baies touchées, avant de décider de l'intérêt d''applications à ce moment et au-delà (Tableau 7).

S'il n'y a aucune grappe significativement touchée juste avant la fermeture, on peut interrompre les traitements.

S'il y a moins de 15 % de grappes significativement touchées à la fermeture de la grappe, en cas d'arrêt de traitement on risque de voir à la récolte entre 1 et 5 % de grappes fortement touchées : le risque est acceptable ou non selon les objectifs qualitatifs visés. Au-delà de 15 % de grappes significativement touchées à la fermeture de la grappe, il faut maintenir la protection jusqu'à la véraison pour contenir la maladie, tout en sachant que des dégâts qualitatifs sont possibles à la récolte.

Application aux différentes modalités testées lors de l'expérimentation

L'analyse rétrospective des notations d'état sanitaire montre que :

– les modalités « économique » en 2009 et 2011 ainsi que la modalité « soufre » en 2011 présentaient 20 à 30 % de grappes significativement touchées à la fermeture. Le maintien de la protection était nécessaire, mais n'a pas empêché une dépréciation de la qualité de la récolte (plus de 10 % de grappes très touchées) et des vins en résultant.

– Les modalités référence en 2009 et 2011 présentaient 3 à 5 % de grappes significativement touchées à la fermeture de la grappe. Un dernier traitement à la fermeture était alors recommandé, avant d'arrêter éventuellement le dernier. La stratégie testée (arrêt immédiat de tout traitement) se traduit effectivement par une légère augmentation des dégâts.

– Les modalités référence en 2010 et 2012 ne présentaient aucune grappe significativement touchée à la fermeture : il était alors possible d'arrêter immédiatement tout traitement (économie de 2 applications) sans risque. Cela a été vérifié lors de l'expérimentation.

Conclusion générale

La comparaison de différentes stratégies de lutte contre l'oïdium de la vigne entre 2009 et 2012 permet de montrer l'importance de commencer tôt et fort sur les parcelles à risque en intégrant des fongicides performants dans l'alternance des familles chimiques. Malgré un léger surcoût du programme de protection, le bilan économique est largement bénéficiaire, et la qualité des vins préservée. Des stratégies apparemment économiques (démarrage plus tardif, diminution du coût fongicide) se révèlent au final déficitaires sur le plan économique et ne permettent pas de préserver la qualité des vins.

Des stratégies raisonnées peuvent être envisagées, avec arrêt des applications à partir de la fermeture de la grappe, sans incidence quantitative ou qualitative. Une économie d'un ou deux traitements peut être réalisée selon l'état sanitaire mesuré avant la fermeture de la grappe. Une règle de décision simple, fondée sur la mesure de la fréquence des grappes touchées à ce stade, permet d'évaluer le niveau de risque et d'ajuster la fin des programmes de traitement.

Tableau 1 : Grille d'évaluation du potentiel qualitatif d'une vendange à la récolte en fonction de l'importance des dégâts d'oïdium

Tableau 2 : Stratégies de traitement comparées

Tableau 3 : Différentes stratégies de lutte contre l'oïdium testées de 2009 à 2012

Fig. 1 : Intensité des dégâts d'oïdium sur grappe à la véraison sur le témoin non traité selon les années

On voit l'importance de la maladie sur chardonnay dans la région : forte intensité des dégâts dès la nouaison, trois ans sur quatre.

Tableau 4 : Efficacités comparées des programmes contre l'oïdium

Tableau 5 : Comparaison des rendements par stratégie selon les années (base 100 = modalité sécurité)

Tableau 6 : Incidence des stratégies de traitement sur les profils sensoriels des vins (+ + + vin de qualité avec profil variétal typique ; + + vin de qualité avec faible typicité variétale ; + vin neutre, sans défaut ; – vin présentant des défauts ; – – vin présentant des défauts marqués)

Fig. 2 : Bilan économique

Moyenne de 2009 et 2011.

Ce sont les deux années où l'on a pu comparer les trois stratégies.

Fig. 3 : Évolution de l'oïdium dans les essais en 2011

Les trois modalités ayant subi des dégâts au final ont exprimé des symptômes tôt : début juillet, 40 % de grappes très touchées( 1) dans le témoin et 10 % dans les modalités économique et soufre(2).

(1) Plus de 50 % des baies touchées.

(2) NB : Cadences trop lâches en 2011, resserrées en 2012 avec succès.

Fig. 4 : Évolution des dégâts individuels des grappes entre la fermeture de la grappe et la récolte

Niveau de contamination à la récolte en fonction du niveau de contamination à la fermeture de la grappe, si on ne traite pas ensuite.

Tableau 7 : Grille d'évaluation des risques à la fermeture de la grappe

RÉSUMÉ

CONTEXTE - L'oïdium de la vigne peut affecter la quantité de raisins vendangés mais aussi la qualité des vins produits. Au-delà d'un seuil de dégâts à la vendange, la qualité est affectée. On cherche à réduire les traitements de façon raisonnée : choix de produits, dates des traitements. On avait besoin de critères pour décider la date de fin.

ÉTUDE - Une expérimentation sur chardonnay, de 2009 à 2012, a testé quatre programmes :

– « sécurité » à 8 traitements,

– « raisonné » (5 à 7 traitements, mêmes produits),

– « économique » (impasse sur le 1er traitement, produits moins chers),

– « soufre » (10 à 12 traitements),

– comparés au témoin non traité.

Des grappes marquées ont été suivies dans des parcelles non traitées après fermeture de la grappe.

RÉSULTATS - Sur les 3 années à pression notable, le programme sécurité est rentable (quantité et qualité de récolte). Le programme économique l'est bien moins (beaucoup moins de quantité, qualité moins assurée). Le programme soufre est inégal. Le programme raisonné a une rentabilité proche du programme sécurité. Ses meilleurs résultats sont pour les cas à 6 ou 7 traitements (impasse sur le ou les deux derniers).

Par ailleurs, l'absence de symptômes sur grappes à leur fermeture garantit une qualité de récolte en l'absence de tout traitement ultérieur. Une faible fréquence (moins de 15 %) de grappes touchées à plus de 15 % induit un risque acceptable selon l'objectif visé. Au-delà de 15 % de grappes touchées, le risque à la récolte est fort.

Une grille d'évaluation des risques est donc proposée. Elle permet de décider d'arrêter ou non le programme au moment de la fermeture de la grappe.

MOTS-CLÉS - Vigne, oïdium Erisyphe necator, protection raisonnée, qualité des vins, chardonnay.

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEURS : *J. ROUSSEAU, ICV, Institut coopératif du vin. **D. BLAN C, **V. JACUS, BASF Agro

CONTACTS : jrousseau@icv.fr, vincent.jacus@basf.com

BIBLIOGRAPHIE : - Calonnec A., Cartolaro P., Poupot C., Dubourdieu D., Darriet P., 2004. Effects of Uncinula necator on the yield and quality of grapes and wine. Plant Pathologie.

Darriet P., Pons M., Henry R., Dumont O., Findeling V., Cartolaro P., Calonnec A., Dubourdieu A., 2002. Impact odorants contributing to the fungus type aroma from grape berries contamined by powdery mildew ; incidence of enzymatic activities of the yeast Saccharomyces cerevisiae. Journal of agriculture and food chemistry, 50, 3277-3287.

Granes D., Pic L., Negrel J., Bonnefond C., 2009. L'Analyse sensorielle descriptive quantifiée (ASDQ) : Une méthode pour un langage commun. Revue Française d'œnologie n°238, novembre 2009

Piermattei B., Piva A., Castellarie M., Arfelli G., Amati A., 1999. The phenolic composition of red grapes and wines as influenced by oidium tuckeri development. Vitis 38 (2), 85-86.

Stummer B., Francis I.L., Zanker T., Lattey K., Scott E., 2005. Effects of powdery mildew on the sensory properties and composition of chardonnay juice and wine when grape sugar ripeness is standardised. Australian journal of grape and wine research 11, 66-76, 2005.

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