1 - La journée, un franc succès, a réuni un public de près de cent personnes essentiellement composé d'agriculteurs, d'étudiants et d'interlocuteurs de la filière agricole. Ci-dessus, l'atelier « Biodiversité et auxiliaires en vergers : Comment les favoriser ». Photo : Raison'Alpes
2 - Filets Alt'Carpo. Cette protection physique contre le carpocapse est une alternative aux insecticides.
3 - Femelle d'Aphelinus mali pondant dans un puceron. Si la population de l'auxiliaire est suffisante, pas besoin de traiter contre le puceron. Photo 2 : Bayer. Autres photos : Raison'Alpes
Le réseau de fermes Dephy « Pommiers en bassin versant de la Durance » a été créé en 2012 dans le cadre d'Ecophyto, à l'initiative de Raison'Alpes, société de prestation de services en agriculture basée à Sisteron (Alpes-de-Haute-Provence). La journée portes ouvertes du 23 mai dernier, inscrite dans une opération générale de démonstration, était sa première opération publique.
Pour situer la journée
Un réseau de 10 fermes
Le réseau comprend 10 exploitations dont la principale voie de commercialisation de la pomme est le circuit long. Les vergers engagés sont répartis le long du bassin versant de la Durance (voir carte, page suivante). Huit exploitations en production conventionnelle sont situées dans le sud des Hautes- Alpes et dans les Alpes-de-Haute-Provence. Deux producteurs en agriculture biologique enrichissent également le groupe dans un rôle démonstratif. Ces fermes sont situées autour d'Avignon.
Les exploitations sont suivies par Céline Charles de Raison'Alpes, également animatrice du réseau, avec l'appui de Lionel Romet de la CAPL pour les exploitations AB.
Les objectifs des producteurs sont une diminution de leur IFT de 30 % en moyenne.
Une session et quatre ateliers
La journée a permis de présenter les différentes actions menées sur le réseau dans le domaine de l'agroécologie. Une première session a permis d'introduire la journée en précisant le contexte et les premiers résultats du réseau : grâce aux actions mises en œuvre par les exploitations du réseau, l'IFT de 2012 a connu une baisse moyenne de 10 % (par rapport à la moyenne de 2009-2011).
Ces différentes actions ont ensuite été présentées dans quatre ateliers répartis sur l'exploitation (photo 1). Deux traitaient de thèmes liés aux traitements eux-mêmes : méthodes alternatives à l'application de produits phytosanitaires et raisonnement des traitements.
Les deux autres évoquaient l'environnement des traitements et de la conduite du verger : enjeu eau d'une part, respect de la biodiversité d'autre part.
Objectif santé végétale
Méthodes alternatives
L'atelier sur les méthodes alternatives a permis de présenter des techniques pour réduire les traitements chimiques contre les maladies, ravageurs et adventices.
Cet atelier a été l'occasion d'aborder :
– les variétés de pommier tolérantes à la tavelure (Opal et Juliet),
– les filets Alt'Carpo contre le carpocapse de la pomme (photo 2),
– le désherbage mécanique.
Ces innovations sont d'ailleurs les principaux leviers utilisés dans les exploitations bios du réseau.
Pour chaque technique, étaient mis en avant les avantages et inconvénients, résultats en termes d'IFT et limites.
Raisonnement des traitements
Un deuxième atelier abordait les actions du réseau dans le domaine du raisonnement des traitements.
Des outils sont développés ou utilisés sur le réseau afin de mieux positionner les traitements en fonction de la cible (maladies ou ravageurs) avec l'utilisation des modèles ou en fonction des auxiliaires pour vérifier leur présence, les préserver et observer leur contrôle des ravageurs.
Ce suivi est effectué notamment pour l'Aphelinus mali (photo 3), parasite du puceron lanigère. Des traitements sont donc évités si l'auxiliaire est présent pour contrôler le ravageur : dans chaque parcelle sensible du réseau, un suivi du vol du parasitoïde est réalisé afin de connaître sa présence.
L'atelier a également présenté les résultats sur l'utilisation du soufre. En effet, ce produit offre trois effets en une seule application : il permet de maitriser l'oïdium, la tavelure et la rugosité. Il est très encouragé dans les exploitations du réseau (photo 4 = carte). D'autres actions sont également menées pour supprimer l'utilisation de traitements préventifs contre l'acarien rouge. La méthode, présentée sur l'atelier, consiste à observer les œufs sur les bourgeons d'hiver (photo 5) pour estimer la pression de l'année. Cette observation, en complément des résultats de la saison précédente et de la sensibilité variétale, permet de conseiller ou non l'impasse de traitements préventifs.
Objectif environnement
Eau, limiter les pollutions
L'atelier « eau » a été l'occasion de rappeler la problématique des pollutions de l'eau notamment par les nitrates et les herbicides en région PACA et les bonnes pratiques de traitements pour les limiter ces pollutions. Grâce à une animation avec un produit phosphorescent, l'importance des protections individuelles lors des traitements a été mise en avant.
Un phytobac (photo 6) a été présenté en termes de dispositif de gestion des effluents de traitements à la ferme.
Les diagnostics Aquasite® permettant de faire le bilan des pratiques et des risques de pollutions par les produits phytosanitaires à l'échelle de l'exploitation ont été présentés.
Biodiversité, des auxiliaires aux pollinisateurs
Enfin, l'atelier sur le respect de la biodiversité proposait de nombreuses techniques mises en œuvre sur le réseau pour implanter et favoriser les auxiliaires.
Différents nichoirs à auxiliaires comme les mésanges et les forficules étaient présentés, ainsi que des techniques de transfert de populations auxiliaires d'une parcelle à l'autre (bandes de feutrines pour les acariens phytoséides, transfert de rameaux ou sarments de vignes).
Les résultats de lâchers d'acariens phytoséides effectués l'année dernière ont été exposés. Suite aux conclusions favorables obtenues, ils ont été reconduits cette saison sur d'autres parcelles.
Pour favoriser la présence d'auxiliaires, il a été rappelé certains principes de base comme l'intérêt de limiter la fauche en vergers et le choix des spécialités de traitement respectueuses de la faune auxiliaire.
Enfin, des dispositifs favorisant l'habitat des auxiliaires ont été abordés, avec la présentation de bandes fleuries semées dans deux exploitations du réseau.
Cette thématique a également été l'occasion de présenter le travail de suivi des papillons et des abeilles solitaires effectué par Raison'Alpes en coopération avec le muséum d'histoire naturelle dans le cadre de FERMEcophyto.
Du concret, un livret, du succès
La journée a donc permis de présenter les techniques balayées dans les ateliers avec l'appui de cas concrets grâce à la présence des agriculteurs du réseau les mettant en œuvre dans leur exploitation.
Un livret, Réseau de fermes Dephy Pommiers en bassin versant de la Durance : 10 exploitations, 14 actions pour réduire l'utilisation des intrants, a été édité et distribué à cette occasion.
La journée, avec ses 4 ateliers, a rencontré un franc succès. Elle a réuni un public de près de 100 personnes essentiellement composé d'agriculteurs, d'étudiants et d'interlocuteurs de la filière agricole.
Dephy, IFT, FERMEcophyto... explication de sigles
Le réseau de fermes Dephy, ou plus précisément le réseau de réseaux de fermes Dephy, a été créé dans le cadre du plan Ecophyto.
L'ensemble des réseaux regroupe près de 1 900 exploitations au niveau national. Elles représentent toutes les productions agricoles.
Ces réseaux ont pour but d'identifier des systèmes de culture à la fois économes en intrants et performants économiquement. Chaque groupe constitué d'une dizaine d'exploitations met en œuvre des techniques pour réduire l'utilisation des produits phytosanitaires.
Pour mesurer la pression en intrants phytosanitaire, l'indicateur retenu est l'IFT (indicateur de fréquence de traitements), qui correspond aux nombres de doses homologuées de produit phytosanitaire utilisé sur un hectare au cours d'une campagne.
Cet objectif allie donc réduction d'intrants et performance économique en termes de productions quantitativement et qualitativement intéressantes pour assurer la pérennité des exploitations.
FERMEcophyto est un dispositif complémentaire piloté par InVivo.
Sur certains des réseaux de fermes Dephy (dont celui du bassin de la Durance), il suit la performance environnementale des exploitations, en particulier en prenant en compte l'impact des systèmes de culture sur l'eau et la biodiversité.