dossier - Bonnes pratiques phytos

Traitement des effluents phytos : un seizième procédé et d'autres nouveautés

MARIANNE DECOIN* - Phytoma - n°673 - avril 2014 - page 28

Un nouveau procédé a été reconnu, les autres voient des évolutions, et l'utilisation avance sur le terrain.
1. Ecobang tel que reconnu : GRV (blanc), aérateur associé, tuyau souple pour la sortie d'air. Noter la rétention (bac vert), l'affiche informative et la boîte à gants. Photo : Vento Sol

1. Ecobang tel que reconnu : GRV (blanc), aérateur associé, tuyau souple pour la sortie d'air. Noter la rétention (bac vert), l'affiche informative et la boîte à gants. Photo : Vento Sol

2. Prototype d'une future version d'Ecobang. Le principe est là (caisse palette, bâche, couvercle avec le dispositif) mais pas les finitions (arrivée et sortie d'air, indispensable rétention).      3. Station collective à Puligny-Montrachet (Côte-d'Or) : trois des cinq phytobacs Hermex à filet de protection latéral et toit translucide.      4. Efflubac de Vitaconsult.      5. Phytobac de Biotisa.      Photos 3, 4 et 5 : ces dispositifs sont des phytobacs agréés Bayer. Photos : Vento-Sol, Hermex, A. Gilet-Vitaconsult et Biotisa

2. Prototype d'une future version d'Ecobang. Le principe est là (caisse palette, bâche, couvercle avec le dispositif) mais pas les finitions (arrivée et sortie d'air, indispensable rétention). 3. Station collective à Puligny-Montrachet (Côte-d'Or) : trois des cinq phytobacs Hermex à filet de protection latéral et toit translucide. 4. Efflubac de Vitaconsult. 5. Phytobac de Biotisa. Photos 3, 4 et 5 : ces dispositifs sont des phytobacs agréés Bayer. Photos : Vento-Sol, Hermex, A. Gilet-Vitaconsult et Biotisa

6. Deux dispositifs Osmofilm dans une exploitation/station individuelle. Photo : Axe Environnement

6. Deux dispositifs Osmofilm dans une exploitation/station individuelle. Photo : Axe Environnement

7. Station collective : batterie de huit dispositifs Osmofilm pour les effluents de six agriculteurs. Photo : Axe Environnement

7. Station collective : batterie de huit dispositifs Osmofilm pour les effluents de six agriculteurs. Photo : Axe Environnement

8. Posant devant un Héliosec, une sache remplie d'une bâche Héliosec usagée, dûment fermée, étiquetée et prête à être stockée en sécurité avec les PPNU avant collecte Adivalor. Photo : Syngenta

8. Posant devant un Héliosec, une sache remplie d'une bâche Héliosec usagée, dûment fermée, étiquetée et prête à être stockée en sécurité avec les PPNU avant collecte Adivalor. Photo : Syngenta

9. Journée de présentation d'une station : le BF Bulles travaille (pendant que les participants écoutent un orateur). L'eau sortant de son filtre à charbon actif, reconnue épurée, est rejetable dans le milieu. Photo : Jade / Vitivista

9. Journée de présentation d'une station : le BF Bulles travaille (pendant que les participants écoutent un orateur). L'eau sortant de son filtre à charbon actif, reconnue épurée, est rejetable dans le milieu. Photo : Jade / Vitivista

Nos lecteurs fidèles le savent : les agriculteurs et gestionnaires d'espaces non agricoles peuvent traiter leurs effluents de traitements phytosanitaires, dits « effluents phytos », à l'aide de procédés officiellement reconnus par le ministère chargé de l'environnement(1). Lors de la sortie du dossier « Bonnes pratiques » de 2013(2), quinze procédés étaient reconnus. Un seizième a enrichi la liste en juin dernier.

Le seizième procédé

Ecobang, nouveau séparateur

Nommé Ecobang et reconnu pour l'instant sur vigne (voir Tableau 1), il a été élaboré par la société Vento-Sol avec l'aide de BASF pour les tests d'efficacité versés au dossier de demande de reconnaissance.

C'est un procédé dit « séparateur » ou « concentreur ». Comme huit des quinze procédés reconnus avant lui (voir Tableau 2 p. 35), il sépare l'eau des substances actives et coformulants.

Le reliquat est ainsi un résidu concentré. Son poids et son volume minimisés permettent de le gérer à moindre coût en filière DD (déchets dangereux au sens de la réglementation des transports) : transport et destruction par des sociétés agréées pour cela. Dans ce procédé, l'eau est éliminée à l'état de vapeur ; on parle de procédé « déshydrateur ». Le processus est une évaporation semi-forcée à température ambiante. L'air sec entre dans une cuve par ailleurs fermée grâce à un ventilateur qui l'insuffle à la surface des effluents. Il ressort chargé de vapeur d'eau par une gaine souple (photo 1).

Avantage : à surface de contact air/eau égale, l'eau s'évapore plus vite qu'à ciel ouvert. Elle ne risque pas de sortir de la cuve à l'état liquide et rien n'entre dans la cuve, sauf l'air et l'effluent quand on le remplit. Exigence : il faut une alimentation électrique donc une consommation d'énergie quand il fonctionne et un choix d'emplacement « branchable ». Mais il est bien moins cher à l'achat et en frais de fonctionnement que des procédés plus sophistiqués.

En pratique

Le procédé est actuellement reconnu pour les effluents viticoles (voir Tableau 1) dans sa version dite « E cobang GRV » : dispositif fourni avec un GRV de 1 m3. Les GRV (grands réservoirs vrac) sont les containers permettant le stockage et le transport notamment des DD.

Que devient le reliquat sec obtenu ? Le réservoir le conserve en toute étanchéité plusieurs années. Ces GRV sont obligatoirement tracés.

Pourquoi cette contrainte ? Parce que, au contraire de ceux utilisés pour le stockage d'effluents avant traitement par d'autres dispositifs, ils stockent du résidu concentré et pas seulement de l'effluent brut, et ceci d'une année sur l'autre.

Le GRV chargé de reliquat devra être éliminé comme un DD. Il y a obligation de le faire au bout de cinq ans maximum même si, techniquement, ce matériel résiste plus longtemps. Cela dit, le poids final de résidu ne devrait pas dépasser 25 à 50 kg (5 à 10 kg/générés par an). Il y aurait donc un déchet final de 1 m3 de volume et d'une centaine de kg soit 65 kg de cuve plus le résidu, ceci pour quelques tonnes ou mètres cubes d'effluents traités.

La société s'engage à rappeler l'échéance à ses clients car la traçabilité le permet, et à les orienter vers les entreprises agréées pour la collecte et la destruction de DD : aujourd'hui Véolia, Labo Services, etc. Dans cinq ans nous verrons.

Démarrage des ventes effectué, nouvelles versions prévues

Vento-Sol a livré une petite vingtaine de dispositifs en viticulture. Il prépare de nouvelles versions du procédé.

L'une serait techniquement au point, c'est l'Ecobang en kit : dispositif fourni sans GRV mais avec un procédé de vissage direct sur le dessus d'un tel réservoir. Le client déjà possesseur de GRV pourrait donc n'acheter qu'un dispositif. Autre intérêt : un viticulteur qui pense générer à un moment donné une quantité d'effluents supérieure à 1 m3 pourrait acheter plusieurs GRV et un seul dispositif en kit. Mais il y a un os. C'est la question de la traçabilité des GRV.

De ce fait, cette version n'est pas officiellement reconnue et donc pas vendue pour traiter les effluents phytos.

L'autre version est à l'étude. Elle est conçue pour utiliser une caisse palette standard de 500 l. Un sac souple d'une matière convenant au stockage des produits phytos, y compris les résidus concentrés, récupérable tous les ans par Vento-Sol, s'ajuste d'une part à la caisse palette et d'autre part au dispositif proprement dit grâce à un couvercle spécialement adapté pour ce type de caisse (photo 2).

La caisse palette pourrait être fournie si le viticulteur n'en possède pas, mais ce ne serait pas obligé car elle ne serait pas tracée : ce ne serait pas elle qui serait en contact avec l'effluent brut puis ensuite le résidu sec, mais principalement le sac étanche et amovible et un peu le couvercle réutilisable – tracés, eux. Le procédé est en cours de mise au point pour les détails (accessoires aux entrées et sorties d'air, etc.) mais le principe est arrêté. C'est une sorte de combiné du système d'aération de l'Ecobang initial et de deux autres procédés dits rustiques : Osmofilm pour la caisse et Héliosec pour la bâche. À suivre.

Nouvelles des trois rustiques

Phytobac rest en tête

À propos, que deviennent les trois procédés dits rustiques ? Rappel : il s'agit de ceux jouant sur des processus naturels sans apport d'énergie fossile ni prétraitement. Ils sont actuellement les plus utilisés dans les exploitations.

Le plus répandu est probablement le Phytobac, procédé non pas séparateur mais « biodégradeur ».

Les effluents y sont dégradés par les micro-organismes contenus dans de la terre prélevée sur place et stimulés par un apport de paille hachée. Le tout est confiné dans un bac à fond et parois étanches pour éviter les fuites dans le milieu.

Le substrat est épandable dans le milieu, sous conditions. Il faut avoir laissé le dispositif travailler au minimum cinq mois depuis le dernier apport d'effluent. Il ne faut pas faire cet épandage plus d'une fois par an sur une même parcelle (condition facile à remplir : un Phytobac ne se vidange pas tous les ans sauf grave incident !) Enfin, il faut choisir le lieu d'épandage : à au moins 50 m de tout cours ou point d'eau et au moins 100 m de tout lieu de baignade, plage, pisciculture, point de prélèvement d'eau pour la consommation humaine...

Bayer a œuvré à la mise au point du procédé (avec l'aide de l'Inra au départ), réalisé les tests, obtenu en 2007 la reconnaissance et fin 2012 son renouvellement. La société forme les « experts phytobacs » conseillant les clients : dimensionnement, choix et implantation du type adapté à la situation de chacun. Au 15 mars 2014, 520 « experts Phytobac » étaient formés et agréés (contre 450 un an avant).

Elle a également agréé quatre sociétés fournisseuses de phytobacs, deux au plan national (Hermex et Biotisa) et deux à l'échelle régionale (Eclart Cerena basé dans l'Aisne et Vitaconsult basé en Loire-Atlantique). Elle annonce 3 500 de ces dispositifs en place en France, 500 de plus que l'an dernier à pareille époque. Plus un déploiement en Europe et Amérique du Sud.

Ils sont majoritairement dans des exploitations individuelles, mais on en trouve aussi en stations collectives. C'est le cas à Puligny-Montrachet (Côte-d'Or) : 5 Phytobacs Hermex Evolution y traitent 40 à 50 m3 d'effluents par an pour 30 viticulteurs (photo 3). Par ailleurs, des imitations fleurissent un peu partout dans les campagnes : un bac étanche, un mélange de paille et de terre... Souvent, leurs dimensions et leur gestion de l'eau peuvent poser problème.

Rappelons qu'un lit biologique(3) peut supporter le dessèchement : les microorganismes du sol se mettent en veilleuse, et leur activité repartira après qu'on ait ajouté l'eau d'un nouvel effluent. Mais un ennoiement (eau affleurant à la surface du substrat voire la dépassant) les asphyxie irrémédiablement s'il se prolonge. Les lits sans couverture antipluie sont à proscrire, et gare aux bacs sous-dimensionnés en cas d'apport brutal accidentel... Quoi qu'il en soit, on peut estimer le nombre de ces lits biologiques sauvages au moins égal à celui des phytobacs agréés.

À noter aussi : les Phytobacs agréés doivent être accompagnés de cuves tampon stockant les effluents bruts pour éviter les « pics » d'apports (grande quantité arrivant brutalement) générant des risques d'ennoiement.Pour ceux dits « optimisés » chez Hermex (photo 3), Vitaconsult (photo 4), Biotisa (photo 5) et Eclart Cerena, s'y ajoutent des systèmes d'apport à rythme judicieux et/ou de drainage avec récupération et recyclage dans la cuve tampon ; tout cela exige des branchements, on est moins dans le « rustique », mais cela renforce la sécurité d'appréciable manière.

Procédés déshydrateurs, leurs six points communs

Les deux autres procédés rustiques, nommés Osmofilm et Heliosec, ont six points communs. Premier point : ils ont été reconnus pour la première fois en 2008.

Deuxième point commun : ce sont des séparateurs, précisément des déshydrateurs, agissant par déshydratation naturelle sans apport d'énergie fossile.

Troisième point : leurs unités de base ont une capacité de 1 et 2,5 m3 d'effluent respectivement, adaptée aux exploitations individuelles. Mais on peut en grouper plusieurs par site sur une station collective.

Quatrième point commun, entre eux et avec le Phytobac : il faut raisonner leur implantation, dimensionnement, etc. en fonction de la réalité de chaque site, faute d'aller à l'échec. Aussi ces procédés sont commercialisés par des partenaires formés, avec prestation de conseil/diagnostic d'exploitation/évaluation des besoins/adaptation de l'installation.

Cinquième point : en viticulture, ils sont mieux adaptés aux exploitations biologiques que les lits biologiques. Pourquoi ? À cause du cuivre. Seul antimildiou efficace utilisable en AB aujourd'hui, c'est un métal donc non biodégradé par les micro-organismes. Il s'accumule dans le substrat du lit biologique, qu'il stérilise à terme (plusieurs années tout de même) si on ne le renouvelle pas, et apporte le cuivre au sol si on épand le substrat pour le renouveler. Dans un procédé séparateur, le cuivre restera dans le résidu sec et filera en centre agréé.

Sixième point : dans les deux cas, le reliquat sec est stocké sur l'exploitation en un lieu sécurisé : local dédié ou local de stockage des produits phytos dans la zone réservée aux PPNU (produits phytosanitaires non utilisables). Il sera ensuite collecté pour destruction via Adivalor dans la filière PPNU.

Osmofilm et ses saches de séchage spécifiques

Voyons les spécificités de chaque procédé. D'abord l'Osmofilm. Ce procédé de déshydratation naturelle enferme l'effluent dans des « saches Osmofilm » formées d'une matière translucide (c'est-à-dire laissant passer la lumière, d'où effet de serre interne) et perméable à la vapeur d'eau (d'où évacuation de la vapeur d'eau formée mais pas celle des substances complexes).

Sa mise au point avait été encadrée par BASF. C'est Axe Environnement qui le commercialise et avec environ 300 unités vendues en un an, comme l'année précédente, soit 1 300 unités vendues au total.

Cela représente un peu moins de sites équipés car un même site peut accueillir plusieurs unités. Mais, si certains sites regroupant plusieurs « osmobacs » où reposent les saches sont des exploitations individuelles (souvent avec deux bacs, photo 6, même s'il n'y a aucune limitation de nombre chez les exploitants individuels), d'autres sont des stations collectives (ex. : photo 7, station traitant les effluents de 1 000 ha de grandes cultures pour six agriculteurs d'une Cuma des Deux-Sèvres).

Une fois l'eau évaporée, les saches chargées de résidu sont stockées dans des saches Adivalor plus solides. Celles-ci, fournies par le vendeur, peuvent être stockées en sécurité avant leur collecte.

Les saches translucides sont très spécifiques, donc les imitations plus difficiles à implanter que celles des phytobacs. Mais Axe Environnement encadre néanmoins les installations : vente par des distributeurs identifiés et formés, diagnostic de dimensionnement (nombre de bacs) à l'aide de Touch & Diag, exigence que les bacs soient sur rétention, lesquelles peuvent être vendues par la société ou être issues d'une autre origine.

Héliosec, jusqu'à huit unités sur chaque site

Le troisième procédé rustique autorisé est l'Héliosec. Élaboré par Syngenta, ce procédé de déshydratation à l'air libre sous toit translucide est vendu par Solhead. Depuis son lancement, environ 800 unités ont été livrées ou sont en commande au 1er mars 2014 contre environ 600 l'an dernier.

Nouveau : jusqu'ici un même site pouvait accueillir jusqu'à trois unités, soit au maximum un stockage de 7,5 m3 d'effluents simultanément et un traitement sur l'année de 7,5 à 13 m3 selon le climat local. Désormais il est possible d'accueillir jusqu'à 8 unités soit 20 m3 de stockage simultané et de 20 à 35 m3 d'effluents traités par an.

Les bâches Heliosec sont remplacées tous les ans : la première est fournie avec le dispositif et l'utilisateur achète ensuite les suivantes à son distributeur en rapportant ses bâches usagées.

En fait, il lui est fourni un « kit bâche » : une bâche, un autocollant et une sache de stockage, plus une notice explicative.

En effet, l'utilisateur peut avoir à stocker ses bâches usagées et chargées de résidu concentré : il ne videra pas forcément un Héliosec le jour même de l'achat de la bâche neuve. Il stockera le reliquat dans la sache (le tout pèse environ 10 kg pour 2,5 à 4,4 m3 d'effluents), fermée et identifiée par l'autocollant (photo 8) puis collectée via Adivalor. Pour l'accompagnement des installations, Syngenta a référencé des structures pouvant vendre ces dispositifs de façon éclairée : environ 200 personnes d'une centaine de structures différentes.

Six autres séparateurs, alias concentreurs

L'évaporateur Evapophyt

Parmi les douze procédés restants, six sont des séparateurs. L'un d'eux rejette de l'air purifié. C'est l'Evapophyt reconnu depuis 2008 mais mis en œuvre par Résolution depuis 2012.

Il agit par évaporation avec chauffage. L'air et la vapeur d'eau sont purifiés avant rejet à l'extérieur via un passage forcé sur filtre à charbon actif. Il traite ainsi 50 litres d'effluents par jour. Une quarantaine d'appareils sont en service, chacun traitant des volumes de 5 à 18 m3 par an : on les trouve en ETA (entreprises de travaux agricoles), aires collectives, post-récolte, grands domaines, semenciers, 4e gamme, maraîchers diversifiés, etc.

La maintenance, le renouvellement des consommables et la collecte des déchets sont assurés par Résolution. À noter : le dispositif de la plateforme collective de Decouzon (voir l'article p. 38) est un Evapophyt.

BF Bulles, Sentinel et Carola Epumobil rejettent l'eau épurée sur charbon

Les cinq autres séparateurs rejettent dans le milieu de l'eau épurée.

Pour trois d'entre eux, c'est après coagulation/floculation suivie de filtration sur charbon actif. L'épuration obtenue est reconnue suffisante. Ils se nomment BF Bulles, Sentinel et Carola Epumobil. Tous sont adaptés à d'importants volumes d'effluents : grosses unités individuelles (post-récolte, grands domaines...), stations collectives ou prestation de service. Le nombre d'exploitations qu'ils servent est donc bien supérieur au nombre d'unités qu'ils représentent.

Ainsi, il y a actuellement 13 BF Bulles, le procédé de Jade (du groupe Alidad Invest). Cinq ont été vendus à des domaines viticoles et huit tournent en prestation de services (photo 9 p. 37). Chacun traite environ 100 m3 d'effluents par an.

Huit partenaires de Jade forment le réseau BF Bulles : la coopérative Axereal, les négoces Vitivista (filiale d'Alidad Invest) et Racine (filiale du groupe Perret/AgroSud), les trois sociétés de prestation Eco-Fox, Phytoger et S2E, le consultant Vitaconsult via son Effluservice et le contrôleur de pulvérisateurs Europulvé qui diversifie ses activités. Nouveau : désormais Adivalor collecte les déchets de ce procédé.

Pour Sentinel de Neve Environnement (auparavant Alba environnement), la douzaine d'installations fonctionnant l'an dernier en France continuent à le faire. Des projets sont en cours pour des installations à poste fixe sur des aires collectives.

Rappel : il y a 5 modèles de capacités différentes allant jusqu'à 1,5 m3 (1 500 l) traités à l'heure, mais même la plus petite (100 l/heure) convient déjà à de grosses unités ou à l'usage en prestation de service – les acheteurs de Sentinel sont soit des gestionnaires d'aires collectives soit des prestataires.

Enfin le dispositif Carola Epumobil, procédé relancé par Résolution et « re-reconnu » en 2012, est implanté historiquement en Suisse (500 viticulteurs dans trois stations) et dans l'Aude (une station pour 270 viticulteurs de trois communes). Il est disponible en prestation ou acquisition (syndicats de producteurs, etc.).

Phytopur filtre l'eau par l'osmose inverse

Phytopur de Michael Paetzold fonctionne lui aussi par coagulation/floculation suivie d'une filtration, mais il se distingue par la technique utilisée pour cette dernière : il s'agit d'osmose inverse.

Trois unités tournent en France, dont deux, gérées directement par la société, traitent les effluents de plus de 200 clients. La troisième est possédée par une coopérative viticole et implantée sur une station collective (à Tain-l'Hermitage dans la Drôme).

Hydrocampe adsorbe d'abord et coagule ensuite

Le dernier procédé « séparateur » est l'Hydrocampe de Véolia Eau Sud-Ouest. Autorisé depuis début 2013, il fonctionne par adsorbtion sur charbon actif avant coagulation/filtration.

Un appareil est mis en œuvre par Véolia Sud-Ouest en prestation de service (cette unité mobile peut traiter 6 m3 par jour).

Deux types de prestation sont aujourd'hui proposés aux exploitants :

– soit l'appareil se déplace chez eux pour y traiter leurs effluents (cas en 2013 chez un important producteur de pommes du Tarn qui a retenu la prestation) ;

– soit un véhicule adapté vient collecter les effluents au sein de chaque exploitation pour les rapatrier sur un site proche pouvant accueillir une installation.

Il faut bien sûr aménager des lieux – par exemple des stations de traitement des eaux gérées par Véolia Eau – pour accueillir d'une part le stockage d'effluents bruts et d'autre part le dispositif.

Cette organisation est en cours de mise en place pour 2014 en région bordelaise. D'autres projets similaires sont prévus en Midi-Pyrénées et, à terme, dans d'autres régions que le Sud-Ouest.

Six « dégradeurs »

Phytocat, photodégradeur

Passons maintenant à six procédés dégradant les substances phytos et leurs coformulants.

L'un d'entre eux fonctionne par photodégradation, alias photocatalyse. C'est le Phytocat, proposé par Résolution depuis 2007.

Une quarantaine d'appareils fonctionnent en France, en majorité à poste fixe dans le secteur viticole et celui des espaces verts/zones non agricoles. Ils permettent, selon le modèle, de traiter 5 à 20 m3 d'effluents par an. Résolution assure le renouvellement des consommables et la gestion des déchets (consommables usagés).

Phytocompo, biodégradeur sur substrat solide

Un autre procédé agit par biodégradation sur un substrat solide de sarments de vigne broyés. Il s'agit du Phytocompo de Souslikoff. L'activité des micro-organismes naturellement présents est stimulée par l'apport d'effluents de cave, ainsi traités eux aussi, et par un brassage périodique du substrat selon un procédé nommé Vignalex.

Le substrat devient à terme un compost épandable sur l'exploitation car les substances sont dégradées (c'est officiellement reconnu) – et les pathogènes éventuels éliminés par le processus de compostage (montée en chaleur). Il faut attendre quatre mois après tout apport d'effluents et, comme pour le Phytobac, n'épandre ce substrat qu'à au moins 50 m de tout point d'eau et 100 m des lieux de baignade, etc.

UTP, Aderbio STBR2, biodégradeurs en cuve avec bactéries

Trois autres procédés ont en commun de fonctionner par biodégradation aérobie dans une cuve fermée munie d'un aérateur (souvent qualifiée de réacteur) et d'être reconnus pour pouvoir rejeter leur eau épurée dans le milieu.

Ce sont l'UTP, l'Aderbio STBR2 et le Vitimax. L'UTP de Serv'Environnement (filiale du groupe LFP, autrement dit Le Floch Dépollution) équipe actuellement cinq golfs (deux de plus que l'an dernier) et est en projet pour trois autres.

Par ailleurs, deux dispositifs fonctionnent en stations de semences sans sortie de résidus donc sans besoin de reconnaissance.

La société assure une visite annuelle pour maintenance, vérification et fourniture de consommables.

À souligner : ce procédé ne génère ni DD ni boues ou résidus secs épandables. Les bactéries apportées dans le dispositif se nourrissent des substances, ce qui empêche le développement de boues. Pas de collecte à prévoir ni de plan d'épandage !

Le STBR2 d'Aderbio, qui fonctionne lui aussi avec des bactéries apportées dans le dispositif, peut traiter à la fois les effluents phytos et les effluents de cave.

C'est d'ailleurs dans les installations vitivinicoles mixtes traitant les deux types d'effluents qu'il rencontre le plus de succès. Ainsi, la société a équipé l'aire de lavage du syndicat de Fleurie dans le Rhône. Ouverte en 2013, cette station pourra traiter 200 m3 d'effluents phytos dès 2014.

Les boues générées par le traitement doivent être détruites en DD, mais il n'y a pas besoin de le faire souvent. En effet, leur volume est réduit grâce à leur consommation par les bactéries. La société recommande de ne pas attendre plus de quatre ou cinq ans entre deux vidanges.

Vitimax, biodégradeur en cuve sur boues activées

Quant au Vitimax d'Agro-Environnement, il permet de traiter les effluents phytos dans un système de traitement des effluents de chai grâce à des boues vinicoles contenant des micro-organismes naturels activés par oxygénation.

Les boues issues du traitement vinicole peuvent être gérées par lit planté de roseaux. Par ailleurs, un prétraitement des effluents phytos est réalisé en amont pour retenir les éléments minéraux (notamment cuivre et traces de métaux lourds). Ces boues de prétraitement seront à éliminer en filière DD, mais elles représentent en moyenne 2 % du volume d'effluent brut. Leur fréquence de vidange et d'envoi est donc faible.

L'opération reste à la charge du viticulteur, mais Agro-Environnement coordonne les collectes groupées des boues de plusieurs viticulteurs d'un même secteur pour leur permettre de maîtriser les coûts.

Une dizaine de dispositifs ayant été vendus depuis un an, il y a 55 unités sur le terrain.

Cascade Twin, biodégradeur à l'air libre sur boues activées

Enfin Cascade Twin, lui aussi d'Agro-Environnement, permet également de traiter les effluents phytos par biodégradation sur boues activées vinicoles dans un système de traitement des effluents de chai. Là encore, les boues de traitement vinicoles passent par un lit planté de roseaux et les boues de prétraitement d'effluents phytos, d'un volume réduit, vont en filière DD.

La différence est que le système de traitement proprement dit est de type stockage aéré, avec un dimensionnement basé sur le volume annuel de production d'effluents de chai. C'est un lagunage des effluents vitivinicoles dans lequel on introduit les effluents phytos selon un protocole spécifique.

Une quinzaine de ces dispositifs bien adaptés aux stations collectives sont actuellement implantés, contre dix l'an dernier.

<p>(1) MEDDE, ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie.</p> <p>(2) « Traiter les effluents, la panoplie s'enrichit », <i>Phytoma</i> n° 663, avril 2013, p. 44 à 49.</p> <p>(3) Le terme de Phytobac est une marque déposée ! Un lit biologique pour effluents phytos non agréé Bayer est donc un lit biologique et pas un phytobac, tout comme un réfrigérateur d'une autre marque que frigidaire est un réfrigérateur... à la rigueur un frigo.</p>

1 - Comment choisir dans la panoplie ?

Pas facile de choisir entre les 16 procédés de traitement des effluents officiellement reconnus ? Il faut le faire en fonction de sa propre situation.

Cet article éclaire directement sur deux des critères utilisables :

– le champ de reconnaissance d'abord. Récapitulatif dans le Tableau 1. Les viticulteurs ont le choix le plus large (15 procédés sur 16), l'horticulture ornementale le plus étroit (5 procédés).

– le mode de fonctionnement ensuite. Récapitulatif Tableau 2 p. 35. Si les produits phytos utilisés comportent une proportion notable de substances minérales (ex. : cuivre en viticulture), on préférera un procédé « séparateur » ou un procédé « dégradeur » avec prétraitement séparateur des minéraux. En effet, les procédés dégradeurs ne dégradent pas les minéraux... Explications des termes « séparateurs » et « dégradeurs » dans l'article.

Mais il y a d'autres critères ! Cet article évoque la rusticité des procédés, leur capacité (plus ou moins de mètres cubes traités par an), le devenir des reliquats et la façon dont il est organisé...

Tous ces critères ainsi que l'aspect financier sont à prendre en compte au vu de la situation de chacun. Y compris un choix de départ : s'équiper individuellement ou faire appel à une station collective.

Mais dans tous les cas, une bonne pratique s'impose...

Faire un diagnostic précis de la situation et des besoins : types d'effluents générés, volume annuel et pics éventuels, configuration des lieux, intégration dans une station phyto, etc.

Il y a des outils d'autodiagnostic. Certains aident à dimensionner le dispositif (ex. : Touch & Diag d'Axe Environnement évalue le volume annuel d'effluents). D'autres se centrent sur un procédé précis (ex. : Phytobac Online de Bayer).

Ensuite, il y a le diagnostic effectué par une personne physique. Plusieurs procédés sont annoncés n'être vendus qu'après un tel diagnostic. Mais on peut aussi le demander avant de choisir son procédé ! Le « diagnostiqueur » utilisera lui aussi des outils, notamment l'Aquasite d'Arvalis qui permet l'état des lieux en sept points des installations à la ferme, dispositif effluents compris.

À noter : cet outil conçu au départ pour les grandes cultures est adaptable ailleurs (ex. : Vitaconsult réalise des Aquasites chez des céréaliers mais aussi viticulteurs, arboriculteurs, maraîchers, etc., pour proposer des aménagements et, pour le volet effluents phytos, orienter le choix dans sa gamme dite Efflu'Service : Phytobac agréés dits Efflubacs, Héliosec, BF Bulles et, désormais, Ecobang). De toute façon, il faut réfléchir avant d'investir.

2 - Rappel légal, reconnu ou pas, que dit le droit ?

A-t-on le droit d'utiliser un procédé de traitement des effluents phytos non officiellement reconnu, voire reconnu mais pour d'autres domaines que le sien (ex. : pour un céréalier, un dispositif reconnu seulement en viticulture) ?

La réponse est : « Oui, mais... »

Oui...

Car une reconnaissance officielle n'est pas une AMM(1) comme celles des produits phytos (pour ces derniers, c'est clair : tout ce qui n'a pas d'AMM est strictement interdit). Pour le traitement des effluents phytos, les deux exigences légales(2) sont :

– jamais aucune fuite d'effluent brut ni traité dans le milieu ;

– il faut tout détruire à terme en DD(3) sauf, sous conditions, ce qui est officiellement reconnu épuré à l'issue du traitement : on peut épandre le substrat solide d'un Phytobac ou d'un Phytocompo (après le temps exigé sans nouvel apport d'effluent, etc.), on peut rejeter l'eau épurée sortant d'un procédé séparateur ou dégradeur reconnu...

Ainsi, on peut stocker un effluent brut et le traiter à l'aide d'un procédé même non officiellement reconnu si « rien n'en sort ».

Mais...

... En revanche, on sera responsable en cas de fuite accidentelle. Si une cuve de stockage d'effluents ou un dispositif de traitement non reconnu (lit biologique sauvage ou autre) se met à fuir, son propriétaire est en infraction (N. B. : les procédés reconnus utilisent des contenants éprouvés et placés sur rétention, cf. les photos de cet article).

De plus, aucun reliquat solide ne peut être répandu s'il n'est pas issu d'un procédé reconnu avec autorisation d'un tel épandage, et il faut en respecter les conditions (mise en œuvre et délais) ; tout autre solide doit être stocké, transporté et détruit comme un DD, en respectant la réglementation en la matière.

Aucun liquide, même si on estime qu'il est épuré, ne peut être rejeté dans le milieu si le procédé n'est pas reconnu pour cela (s'il l'est, c'est au vu de tests garantissant que la dégradation ou la séparation sont efficaces ; s'il n'est pas reconnu, ce n'est pas garanti) ; tout autre liquide restera sur place (recyclage sans fuite) ou sera détruit comme DD.

Aucune vapeur de produit phyto ne peut être rejetée volontairement dans le milieu. L'évaporation d'eau à température ambiante est possible, pas la ventilation forcée avec chauffage sans filtration d'air.

(1) AMM = autorisation de mise sur le marché (ici, de produit phytopharmaceutique).

(2) De par l'arrêté du 12 septembre 2006.

(3) DD = déchet dangereux au sens de la réglementation des transports, elle-même appliquant l'ADR (« Accord for dangerous goods by road », soit : « Accord pour le transport des marchandises dangereuses par la route ») européen.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - Les effluents phytos peuvent être traités en stations individuelles ou collectives locales. Mais toutes les matières sortant des processus de traitement doivent être traitées en filière DD, sauf celles reconnues épurées par des procédés de traitement de ces effluents officiellement reconnus.

PANORAMA - Cet article fait le point sur les 16 procédés officiellement reconnus au 15 mars 2014. Il présente le nouveau procédé reconnu depuis juin 2013 et nommé Ecobang.

Puis il précise, pour l'ensemble des 16 procédés (tableaux récapitulatifs), les champs de reconnaissance, les principes de fonctionnement et le mode de gestion des matières issues du traitement (selon le cas : eau épurée, vapeur d'eau, substrat solide, résidus concentrés en boues, consommables usagés...).

Il évoque également leur dimensionnement (quantités d'effluents traités), le type d'utilisation possible et leur développement sur le terrain.

MOTS-CLÉS - Bonnes pratiques phytosanitaires, effluents phytos (effluents chargés en résidus de produits phytopharmaceutiques), DD (déchets dangereux), traitement des effluents phytos, procédés reconnus, réglementation.

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEUR : *M. DECOIN, Phytoma.

CONTACT : m.decoin@gfa.fr

RÉFÉRENCE LÉGALE : Arrêté du 12 septembre 2006, paru au Jorf le 21 septembre 2006. Le traitement des effluents phytos est évoqué dans son article 8.

ÉPISODE PRÉCÉDENT : « Traiter les effluents, la panoplie s'enrichit ». Phytoma n° 663, avril 2013, p. 44 à 49.

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