DOSSIER - Maladies des plantes

Mycotoxines dans les céréales : situation selon les pays

MARC DÉLOS* ET ISABELLE OSWALD**, D'APRÈS LEUR COMMUNICATION À LA 11E CIMA, CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LES MALADIES DES PLANTES DE L'AFPP, À TOURS, DU 7 AU 9 DÉCEMBRE 2015 - Phytoma - n°689 - décembre 2015 - page 12

Présentation des mycotoxines estimées les plus préoccupantes ainsi qu'une approche historique et un point de situation dans le monde actualisé à fin 2014.
Ergot sur épi de blé. Il renferme des spores de Claviceps purpurea, l'agent de la maladie. Ces spores contiennent des mycotoxines, précisément des alcaloïdes. Leur toxicité est connue depuis longtemps. Les cultures concernées sont le seigle, la plus sensible, puis le triticale et enfin les autres céréales à paille dont le blé.  Photo : E. Courbet

Ergot sur épi de blé. Il renferme des spores de Claviceps purpurea, l'agent de la maladie. Ces spores contiennent des mycotoxines, précisément des alcaloïdes. Leur toxicité est connue depuis longtemps. Les cultures concernées sont le seigle, la plus sensible, puis le triticale et enfin les autres céréales à paille dont le blé. Photo : E. Courbet

Le maïs peut être contaminé par des fusariotoxines produites par des champignons du genre Fusarium (DON, zéaralénone et fumonisines), mais aussi, en conditions très chaudes, par des aflatoxines produites par des champignons du genre Aspergillus.  Photo : M. Délos

Le maïs peut être contaminé par des fusariotoxines produites par des champignons du genre Fusarium (DON, zéaralénone et fumonisines), mais aussi, en conditions très chaudes, par des aflatoxines produites par des champignons du genre Aspergillus. Photo : M. Délos

Les fusarioses du blé dues à des champignons du genre Fusarium produisent notamment, mais pas seulement, du DON. Photo : M. Délos

Les fusarioses du blé dues à des champignons du genre Fusarium produisent notamment, mais pas seulement, du DON. Photo : M. Délos

Vue au microscope d'un tueur de masse : Aspergillus flavus, principale espèce productrice d'aflatoxines responsable de plus de 200 000 cancers du foie mortels chaque année dans les pays du sud.  Photo : S. Bailly

Vue au microscope d'un tueur de masse : Aspergillus flavus, principale espèce productrice d'aflatoxines responsable de plus de 200 000 cancers du foie mortels chaque année dans les pays du sud. Photo : S. Bailly

 Photo : S. Bailly

Photo : S. Bailly

Le même, in vitro, à l'oeil nu. Photo : S. Bailly

Le même, in vitro, à l'oeil nu. Photo : S. Bailly

Parmi les facteurs pouvant affecter la sécurité sanitaire de l'alimentation, une catégorie de contaminants préoccupants est rarement évoquée dans la presse. Il s'agit des mycotoxines, contaminants naturellement produits par des champignons.

Les céréales (céréales à paille, maïs, sorgho, riz) sont concernées à la sortie du champ, durant leur stockage ou le processus industriel, notamment pour la fabrication de la bière.

Éclairage historique

Toxines d'ergot, une longue histoire

Les mycotoxines sont considérées comme des menaces sérieuses par la communauté internationale (Clarke, 2014). L'identification de leur dangerosité dans l'alimentation est un phénomène récent. L'ergot du seigle, dont les ravages sur les populations humaines sont connus depuis le haut Moyen Âge vu sa toxicité aiguë, fait partiellement exception à cette règle.

La démonstration de la dangerosité pratique des sclérotes de l'ergot du seigle due au champignon Claviceps purpurea dans l'aliment remonte à 1670 avec les travaux de Thuillier. Mais il faudra attendre la fin du XVIIIe siècle et surtout le XIXe siècle pour que les impacts sur les populations régressent et qu'une gestion vraiment efficace soit mise en place (Matossian, 1989). La sécurité sanitaire de l'aliment était alors conditionnée par la sécurité alimentaire prépondérante en temps de disette. La toxicité de l'ergot est toutefois citée dès la haute Antiquité et utilisée comme arme biologique par les Assyriens (Dragacci et al., 2011).

Autres mycotoxines : une prise en compte récente

Concernant les autres mycotoxines, il faudra attendre les mortalités de masse dans les élevages de dindes en 1960 en Angleterre, à la suite de l'ingestion de tourteaux d'arachides contaminés par des aflatoxines (Dragacci et al., 2011) pour identifier et commencer à prendre en compte ce risque ancien. Ces aflatoxines sont produites par des champignons du genre Aspergillus.

La première mention de l'ochratoxine A sur le végétal, un échantillon de maïs aux États-Unis, remonte à 1969 (Anses, 2009). La substance avait été identifiée au Danemark en 1965 comme agent de néphrites chez le porc.

D'autres champignons, notamment des genres Penicillium et Fusarium, ont attendu les années 1970 pour voir une prise en compte de leur dangerosité et pour identifier leurs mycotoxines, des trichothécènes : premier isolement du déoxynivalénol ou DON en 1972 sur de l'orge attaquée par Fusarium graminearum. Les syndromes de vomissements chez les cochons ont valu au DON le surnom de « vomitoxine » en 1973, aux États-Unis (Ueno, 1988).

Les effets de l'ingestion de zéaralénone (ZEA) ont été identifiés à la fin des années 1970 avec sa mise en cause dans des phénomènes de puberté précoce à Puerto-Rico, entre 1978 et 1981 (Saenz de Rodriguez, 1984). Toutefois, si la zéaralènone est avérée comme induisant des troubles de la reproduction chez les rongeurs et des animaux domestiques et considérée comme un perturbateur endocrinien, ce lien, pour le cas précis des phénomènes de puberté précoce à la fin des années 1970, paraît désormais moins évident, d'autres causes pouvant l'expliquer (Anses, 2009).

Parmi les dernières mycotoxines identifiées comme très dangereuses et réglementées, on notera les fumonisines. Elles sont également produites par des champignons du genre Fusarium : leurs effets en termes de toxicité chronique ont été démontrés à la fin des années 1980.

La fumonisine B1 a été identifiée après le constat d'une forte prévalence de certains cancers dans la province du Transkei, en Afrique du Sud (Gelderblom et al., 1988) et, par ailleurs, une mortalité fulgurante de chevaux ayant consommé des maïs contaminés (Marasas et al., 1988).

D'autres régions du monde verront ensuite la mise en évidence de diverses pathologies liées aux fumonisines dans les années 1990, principalement dans des pays tropicaux cultivant le maïs (Afssa, 2009).

Difficultés pour identifier et financer les études de toxicité

La principale difficulté pour détecter et caractériser les risques liés à ces contaminants a été technologique. En effet, la mise au point d'outils de quantification suffisamment précis pour pratiquer des analyses à des coûts acceptables a été tardive.

Il a aussi fallu attendre la réalisation d'études de la toxicité de ces substances naturelles. Or ces travaux ne disposent que de financements publics, au contraire des médicaments et des pesticides à usage domestique ou agricole qui sont évalués a priori, avant leur mise sur le marché, aux frais du pétitionnaire.

Les effets chroniques des mycotoxines et leur existence même n'ont été établis qu'à la suite du constat de taux de prévalence de maladies particulières chez les humains (pour les fumonisines) ou les animaux (pour les aflatoxines).

La réglementation évolue

Des aflatoxines aux fusariotoxines

Si les aflatoxines, mycotoxines parmi les plus dangereuses, ont été réglementées au plan européen dès 1997 avec le règlement (CE) nº 194/97, suivies par l'ochratoxine A avec le règlement (CE) n° 472/2002, il faudra attendre 2006 pour voir les fusariotoxines (zéaralénone, déoxynivalénol et fumonisines) faire l'objet d'une réglementation contraignante en Europe.

Le règlement européen 1881/2006 pour les produits bruts et les produits finis à destination humaine a fixé les premières valeurs seuil en Europe après d'autres pays développés (États-Unis depuis 2003).

Ce règlement a été modifié par le règlement 1126/2007, les valeurs fixées pour la zéaralénone et les fumonisines n'étant pas « tenables » vu les niveaux constatés dans l'aliment produit en Europe.

Comme pour d'autres contaminants naturels (éléments trace métallique, notamment), les valeurs seuils pour les mycotoxines tiennent compte de la réalité de la contamination des aliments et tolèrent dans certains cas des facteurs de sécurité plus faibles (moins exigeants) que dans le cas de contaminants volontaires type pesticides.

Du nouveau pour l'ergot

Pour l'ergot du seigle, des modifications sont intervenues récemment, la directive européenne 32/2002 ayant fixé la présence de sclérotes dans les lots de céréales destinées à la consommation animale, valeur reprise par le règlement 574/2011.

Historiquement, le Codex (Codex Stan 199-1995) fixait les teneurs dans les céréales brutes. La Commission européenne a modifié en avril 2015 le règlement 1881/2006 en instaurant une limite maximale de teneur en sclérotes d'ergot à 0,5 g/kg sur les céréales brutes pour l'alimentation humaine. Le règlement, daté du 28 octobre 2015, a été publié le 29 au Journal officiel européen.

Enfin, la Directive européenne 66/402 fixe un seuil pour la production de semences (Orlando et al., 2015).

Selon Bruno Barrier-Guillot (Barrier-Guillot, 2015), il est prévu des limites maximales pour la somme des douze alcaloïdes issus de l'ergot, dans un délai espéré de deux à trois ans. L'Efsa avait émis un avis en 2012. Une évolution de la réglementation est attendue, en principe pour 2017.

Des mycotoxines pas encore réglementées

Il reste encore des mycotoxines pour lesquelles aucune limite n'est fixée dans l'aliment, faute d'études permettant d'établir une dose toxique.

Tout d'abord, les toxines T2 et HT2, à la dangerosité établie, ne font toujours l'objet que de recommandations.

De même, l'ergot du seigle est surveillé par le biais du poids de sclérotes sur le grain mais pas par les taux d'alcaloïdes dans la farine et les produits alimentaires.

Les cocktails de mycotoxines, fréquents dans les aliments contaminés, ne font pas l'objet d'études poussées même si des phénomènes de potentialisations sont observés entre substances. Les doses journalières tolérables établies restent ainsi fixées pour des mycotoxines isolées (Streit et al., 2012 ; Oswald, 2014).

Il existe d'autres mycotoxines présentes dans les plantes, présentant un danger intrinsèque pour les animaux et/ou potentialisant les mycotoxines associées mais pour lesquelles il n'y a pas étude toxicologique suffisante menée (Scudamore et al., 1998 ; EFSAc, 2014). Elles sont dans l'immédiat quasiment ignorées.

Enfin des incertitudes se sont fait jour récemment sur la capacité des tests à détecter la totalité des mycotoxines présentes dans les produits céréaliers, en raison de conjugaisons, notamment avec des sucres, qui empêchent de détecter une part des contaminants.

Ces formes de mycotoxines non détectables par les analyses classiques mais rendues biodisponibles lors de la digestion sont dites « mycotoxines masquées » (Berthiller et al., 2013 ; EFSAb, 2014).

Les aflatoxines : évolution récente

Des toxines carcinogènes

L'aflatoxine B1 est la principale mycotoxine excrétée par le champignon Aspergillus flavus et de façon moindre par Aspergillus parasiticus. On la retrouve en mélange avec les aflatoxines B2, G1 et G2 excrétées par les mêmes champignons.

L'aflatoxine B1 ou AFB1 est le plus puissant carcinogène et hépatocarcinogène chez les animaux. Le Circ, Centre international de recherche sur le cancer, l'a classée carcinogène humain de classe 1 en 1993. L'aflatoxine B1 ingérée par les vaches laitières est métabolisée en aflatoxine M1, cancérigène possible trouvé en quantité significative dans le lait de vaches alimentées par des tourteaux ou des céréales contaminés.

Des toxines autrefois exotiques

Les aflatoxines sont, ou plutôt étaient, considérées en Europe comme exotiques. Elles polluaient les tourteaux d'arachide stockés à l'humidité jusqu'au milieu des années 1970, puis des céréales (maïs, sorgho, riz, céréales paille, mil...) et fruits à coques (pistache, amande, noix...) contaminés, dans les pays « du sud », notamment si des insectes se développaient dans les silos.

Aspergillus flavus est un bioagresseur majeur de l'épi du maïs si les températures nocturnes sont élevées et la plante soumise au stress hydrique en cours de floraison (Payne, 1998 ; OMS, 2005 ; Battilani et Camardo Leggieri, 2015). Cette activité sur l'épi de maïs explique des accidents réguliers jusque dans les années 1980 devenus ponctuels depuis 1990 aux États-Unis.

En Europe, seul le nord de l'Italie avait subi, sur du maïs et du lait de vaches l'ayant consommé, une contamination significative en 2003 puis ponctuelle les années suivantes (Battilani et al., 2008).

Maïs : que s'est-il passé en 2012 ?

L'année 2012 a constitué une rupture. Une forte progression de la contamination du maïs par les Aspergillus spp. a été notée en zones plus septentrionales avec un niveau d'aflatoxines aux États-Unis qui n'avait plus été observé depuis 1990.

En Europe, il a été noté une forte présence de ces mycotoxines dans les maïs en Italie du Nord, davantage qu'en 2003, mais aussi de la Slovénie à l'Ukraine en incluant les Balkans et la Grèce. Des contaminations du lait par les aflatoxines M1 ont été enregistrées début 2013 dans les pays dont les laitières avaient consommé ces maïs.

En Europe de l'Ouest, les maïs ont bénéficié de pluies régulières et ont été épargnés par le phénomène (Délos et al., 2014).

L'Europe de l'Ouest en général et la France en particulier resteraient à l'abri d'un tel risque, malgré les prévisions pessimistes d'un rapport de l'Efsa (Efsa, 2012), grâce à la pratique assez répandue de l'irrigation sous réserve que celle-ci reste possible. À noter : le rapport de l'Efsa rédigé en 2011 n'anticipait pas la situation de l'été 2012 qui a à la fois confirmé le risque et modifié le poids des paramètres de la modélisation proposée par le groupe de travail de l'Efsa.

Le risque aflatoxines, pour l'Europe en général et l'Europe de l'Est et l'Italie en particulier, n'est pas un risque futur lié au réchauffement climatique mais un risque actuel, même s'il est plus exceptionnel que dans la plupart des autres régions du monde, en particulier les États-Unis.

Aucun événement d'une telle ampleur n'a été observé depuis 2013, même si les pays d'Afrique subsaharienne et d'Asie du Sud-Est sont structurellement touchés par la présence d'aflatoxines dans les récoltes.

Autres toxines du maïs : risque variable

En Europe, amélioration globale de 2000 à 2012 inclus

Du début des années 2000 à 2006, et surtout de 2003 à 2006, la contamination des maïs par les fusariotoxines (DON, ZEA et fumonisines) a été assez régulière en Europe en général et en France en particulier.

Ces contaminations s'expliquent par des conditions climatiques favorables au champignon, et aussi aux foreurs de l'épi qui amplifient l'effet du climat. L'incidence de ces ravageurs sur la contamination a été parfaitement établie (Weisssenberger et al., 2006 ; Délos et al., 2014). Dans ce contexte, le DON et la ZEA sont majoritairement détectés dans le nord de l'Europe et les fumonisines dans les pays bordant la Méditerranée.

En revanche, une plus faible contamination du maïs grain par les fusariotoxines a été observée en France de 2007 à 2012. La contamination par les fumonisines était plus limitée, le déoxynivalénol (DON) et la zéaralénone (ZEA) étaient en général mieux contrôlés avec des fluctuations selon les zones et années. Seule une présence de DON et de ZEA dans l'ensilage de troupeaux laitiers, révélée notamment via une augmentation significative des mammites, a inquiété quant à l'état sanitaire des animaux.

2013 et 2014 : le retour de DON et ZEA ?

En 2013, un retour spectaculaire du DON et de la ZEA a été observé lors des analyses du maïs, après des récoltes tardives dans des conditions très humides dans le sud de l'Europe, sur une zone allant des bords de l'Atlantique à la mer Adriatique.

En France, avec des surfaces en maïs bien réparties sur le territoire dont une moitié non touchée, une affectation appropriée des récoltes a permis de respecter les seuils réglementaires.

En 2014, c'est dans le nord et le centre de l'Europe, sur une zone allant de la frontière est de la France à la Pologne, que des contaminations du maïs par ces mêmes mycotoxines ont posé problème. Elles sont liées aux conditions climatiques estivales très fraîches et humides en juillet et août.

L'utilisation des maïs français 2014 n'a pas posé problème. La contamination n'ayant touché qu'une faible part du territoire, elle n'a entraîné de baisse sensible de la valeur de la production que pour les lots les plus contaminés des régions de l'est concernées. D'autres régions en Europe, en particulier dans le sud de l'Allemagne, l'Autriche et la Pologne ont été bien plus impactées.

Ainsi, deux zones différentes d'Europe ont été concernées, les champignons en cause étant dans les deux cas des producteurs de déoxynivalénol et de zéaralénone.

Ailleurs dans le monde

L'Europe n'était pas seule touchée par ces accidents sanitaires. La consultation des recommandations aux maïsiculteurs et éleveurs des grandes régions céréalières du continent nord-américain montre, en 2013 et 2014, une situation comparable, voire plus grave. Les raisons sont a priori identiques avec en sus, en 2014, de difficiles conditions de récolte. Le climat des principales régions productrices des États-Unis a été proche de celui des zones les plus touchées d'Europe. Elles ont vu des rendements records mais aussi, à cause de récoltes retardées par la pluie et sous la pluie ou d'un été frais et humide, des contaminations du maïs comparables à celles des zones touchées d'Europe.

Quels atouts pour le maïs français ?

Ces deux exemples montrent que, malgré les progrès considérables accomplis en matière de choix variétaux et de méthodes agronomiques dont les dates de récolte, les niveaux de contamination très faibles observés de 2007 à 2012 en France ne sont pas systématiquement reproductibles partout. Un aléa climatique doit conduire à utiliser absolument tous les leviers permettant de réduire le risque de contamination.

La France, grâce à la diversité de ses climats, son abondante ressource en eau, la maîtrise de l'irrigation si nécessaire et la bonne répartition du maïs sur son territoire, apparaît comme privilégiée en Europe et dans le monde pour produire, même en année difficile, un maïs de très bonne qualité pour l'alimentation humaine, seule encadrée par le règlement 1126/2007.

Nous n'aborderons pas la formation dans l'ensilage de patuline, mycotoxine connue chez la pomme et ses dérivés (jus, cidre, etc.). Nous n'aborderons pas non plus les champignons producteurs d'ochratoxine A présents au champ sur des maïs récoltés en novembre, cas devenus anecdotiques, ou dans les silos si les insectes n'y sont pas contrôlés, situations un peu plus fréquentes.

Nous constatons une réduction du niveau de contamination par les fusariotoxines du maïs grain par rapport au début des années 2000 et une dégradation pour l'ensilage. La vigilance reste de rigueur pour le grain, vu notamment les contaminations localisées mais notables par DON et ZEA en 2013 puis 2014.

Céréales à paille : la situation

Fusariotoxines en Europe

Les céréales à paille, principalement le blé, ont connu des épisodes de forte contamination par les fusarioses de l'épi en Europe, en France en particulier, surtout en 2007, 2008, 2012 et 2013 avec une forte présence de DON et ZEA dans le grain à la récolte.

En France, l'ergot dressé quatre fois

Une présence anormale d'ergot du seigle en 2006, 2009, 2012 et plus encore 2013 (Délos et al., 2014) a été observée dans le blé, l'orge et surtout le seigle et le triticale (plus sensibles que le blé). Alors que les épisodes précédents n'avaient touché qu'une ou deux régions, tout le territoire national a été affecté en 2012 et 2013 à l'exception des régions proches de la Méditerranée.

Après la récolte de céréales de 2012, des cas d'agalactie ont été observés sur plusieurs dizaines d'élevages ovins en Lorraine et Alsace, liés à la présence d'alcaloïdes d'ergot dans l'alimentation des brebis (Anderbourg et al., 2014). Des observations comparables ont été faites dans la Creuse et en Normandie (taux de mortalité des agneaux plus forts sur les naissances de février à mars 2013, brebis sans lait à la mise bas) mais sans enquête réalisée sur la cause du phénomène.

L'ergot en Europe

La contamination par l'ergot est répandue en Europe. En atteste la communication à l'initiative de l'Efsa sur la détection d'alcaloïdes d'ergot dans les farines de blé et de seigle, menée pourtant sur une récolte, 2010, a priori peu contaminée. Elle signale, sur 86 % des farines à base de blé et 96 % de celles à base de seigle, une contamination par au moins 1 microgramme d'alcaloïde par kilo (LOQ : limit of quantification). Il s'agissait en général de traces sans effets connus sur la santé du consommateur. Mais les doses moyennes, dans certains pays, dépassaient 10 microgrammes par kilo de farine de blé et 100 microgrammes par kilo sur le seigle (Diana Di Mavungu et al., 2011).

Ce champignon a pu toucher aussi les graminées prairiales avec des effets ponctuels sur l'état sanitaire des troupeaux.

2014 et 2015 : situation plus calme

En revanche, depuis 2013, les conditions climatiques sèches du printemps ont évité de revoir ces fortes contaminations.

L'orge est moins contaminée par l'ergot du seigle et le DON. En revanche, l'orge de printemps, indispensable pour élaborer la bière, a pu être contaminée par des agents de fusarioses spécifiques qui, réactivés lors du maltage, produisent les redoutables toxines T2-HT2. Ces toxines sont trouvées sur blé dur en Italie mais pas en France.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - La sécurité sanitaire de l'aliment impose de réduire autant que possible les contaminants naturels produits par certains champignons naturellement présents dans les récoltes.

Sur céréales, ces contaminants sont principalement excrétés ou produits par des champignons des genres Aspergillus, Penicillium, Fusarium, Claviceps. Les substances toxiques correspondantes principales sont les aflatoxines, ochratoxines, fusariotoxines et alcaloïdes de l'ergot.

SITUATION - La connaissance de ces contaminants est relativement récente ; son évolution est rappelée, ainsi que celle de la réglementation.

Cet article fait le point également des situations épidémiologiques (maladies) et des contaminations (mycotoxines) en France, dans les autres pays d'Europe et du monde, notamment aux États-Unis jusqu'en 2014 inclus, sur céréales à paille et maïs.

MOTS-CLÉS - Maladies, céréales à paille, maïs, mycotoxines, fusarioses, ergot, aflatoxines, trichothécènes, déoxynivalénol, zéaralénone, fumonisines, alcaloïdes, sécurité sanitaire de l'aliment.

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEURS : *M. DÉLOS, SRAL-Draaf Midi-Pyrénées, bât. E, Bd Armand-Duportal 31074 Toulouse..

**I. OSWALD, Inra-UMR 1331 Toxalim, 180, chemin de Tournefeuille, BP 93173 31074 Toulouse Cedex 03.

CONTACTS : marc.delos@agriculture.gouv.fr

ioswald@toulouse.inra.fr

LIEN UTILE : afpp@afpp.net

BIBLIOGRAPHIE : La communication dont sont extraits cet article et le suivant, avec sa bibliographie (41 références en tout) est disponible dans les actes de la 11e Cima de l'AFPP (lien utile ci-dessus).

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