DOSSIER - Méthodes alternatives

Évolutions de la réglementation des méthodes alternatives

MARIANNE DECOIN, Phytoma. - Phytoma - n°702 - mars 2017 - page 16

Autorisations d'entrée d'auxiliaires, mesures favorisant les produits alternatifs face aux conventionnels, autorisations de nouveaux produits alternatifs : les douze derniers mois ont été riches en événements. Le point.
Torymus sinensis. Cet hyménoptère est un des six macro-organismes utiles a avoir bénéficié d'AET et AIE en 2016. Photo : J.-C. Malausa - Inra

Torymus sinensis. Cet hyménoptère est un des six macro-organismes utiles a avoir bénéficié d'AET et AIE en 2016. Photo : J.-C. Malausa - Inra

Tableau 1 : produits de biocontrôle antimaladies (fongicides/bactéricides/virucides) introduisant des substances actives (SA) inédites sur le marché phytopharmaceutiques français

Tableau 1 : produits de biocontrôle antimaladies (fongicides/bactéricides/virucides) introduisant des substances actives (SA) inédites sur le marché phytopharmaceutiques français

Tableau 2 : Produits de biocontrôle antiravageurs (deux insecticides, un nématicide) introduisant des substances actives (SA) inédites sur le marché phyto français

Tableau 2 : Produits de biocontrôle antiravageurs (deux insecticides, un nématicide) introduisant des substances actives (SA) inédites sur le marché phyto français

Tableau 3 : produits de biocontrôle antimaladies (trois fongicides, un SDP(1)) à base de substances actives (SA) inédites sur leurs usages, mais déjà connues par ailleurs sur le marché phyto français

Tableau 3 : produits de biocontrôle antimaladies (trois fongicides, un SDP(1)) à base de substances actives (SA) inédites sur leurs usages, mais déjà connues par ailleurs sur le marché phyto français

Tableau 4 : produits de biocontrôle antiravageurs (confusion sexuelle/nématicide) et herbicide à base de substances actives (SA) inédites sur leurs usages, mais déjà connues par ailleurs sur le marché phytopharmaceutique français

Tableau 4 : produits de biocontrôle antiravageurs (confusion sexuelle/nématicide) et herbicide à base de substances actives (SA) inédites sur leurs usages, mais déjà connues par ailleurs sur le marché phytopharmaceutique français

Récapitulons ici les nouveautés en matière de cadre légal des méthodes alternatives réglementées, à savoir l'utilisation d'auxiliaires, de substances de base et de produits phyto(1) autres que conventionnels.

Auxiliaires

Des « non indigènes » peuvent entrer

Les macro-organismes auxiliaires ne sont pas soumis à la réglementation des produits phyto. Par exemple, ces auxiliaires peuvent être vendus sans AMM(2), être épandus depuis un aéronef (hélicoptère, drone, etc.), Aucun frein n'empêche leur usage en espaces verts, près des cours d'eau, etc.

Ils sont réglementés par un décret du 30 janvier 2012 appliquant la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2010. Un auxiliaire non indigène d'un territoire (= qui n'y est pas déjà établi) ne peut y entrer que doté d'une AET, autorisation d'entrée sur le territoire, et y être lâché qu'avec une AIE, autorisation d'introduction dans l'environnement.

Quatre auxiliaires parasitoïdes

Une liste de près de 400 souches appartenant à 95 espèces d'acariens, insectes ou nématodes dispensés d'AET et AEI, avait été publiée en avril 2015. En 2016, six macro-organismes non indigènes ont obtenu leurs AET et AIE. Ce sont :

- deux pollinisateurs, les abeilles Osmia cornuta et Megachile rotundata, autorisées respectivement en mars et juin ;

- l'auxiliaire Allotropa burrelli parasitoïde de la cochenille Pseudococcus comstocki, autorisé en juin ;

- trois auxiliaires autorisés en décembre, à savoir Holepyris sylvanidis et Cephalonomia tarsalis, parasitoïdes de ravageurs des grains, et Torymus sinensis, parasitoïde du cynips du châtaignier.

Substances de base

Réglementation européenne

Une autre alternative aux phytos conventionnels est l'usage des substances de base. Connues et utilisées hors de la phytopharmacie mais ayant des effets phyto, elles doivent être approuvées par l'Union européenne. Douze substances le sont : trois de plus qu'il y a un an (voir Encadré 1).

Déclinaison française : la loi Potier

En France, les produits « composés exclusivement de substances de base » bénéficient d'un nouveau cadre réglementaire. Ils pourront être appliqués en prestation de service par des entreprises non agréées pour appliquer des produits phyto, et le certiphyto ne sera pas nécessaire pour les personnes les appliquant (en prestation ou non). Ainsi en a décidé la loi « relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle », dite loi Potier, adoptée les 14 et 15 février 2017. Elle n'est pas encore publiée à l'heure où nous mettons sous presse.

Il faut savoir que, selon l'article 50 de la loi d'avenir agricole du 13 octobre 2014, ces produits « 100 % substances de base » font partie des PNPP, préparations naturelles peu préoccupantes. Celles-ci (qui comprennent aussi les « substances naturelles à usage biostimulant », donc sans usage phyto, encadrées par un décret et un arrêté du 27 avril 2016(3)) sont, dans l'état actuel de la réglementation française, utilisables sans AMM phyto. Elles font partie des produits qui, depuis le 1er janvier 2017, restent en vente libre aux amateurs(4).

Depuis le 1er janvier dernier, en effet, les produits phyto conventionnels destinés aux amateurs ne sont plus en vente libre ; ils doivent être délivrés par un vendeur.

Produits phyto alternatifs

Biocontrôle : catégories précisées

D'autres produits que les PNPP restent aussi en vente libre. Parmi eux, c'était prévu, les produits phyto de biocontrôle « L. 253-5 ». De quoi s'agit-il ? Des produits de biocontrôle au titre des articles L. 253-5 et L. 253-7 du code rural, soit une partie des produits de biocontrôle définis par l'article 50 de la loi d'avenir et l'article L. 253-6 du code rural.

Il y a un an, le principe était posé des deux catégories de produits, l'une (les « L. 253-6 ») englobant l'autre (les « L. 253-5 »). Il était clair que tous doivent être conseillés en tant que méthodes alternatives et bénéficier de procédures accélérées pour obtenir leurs AMM. Mais la liste des produits « L. 253-5 » était incertaine. C'est fini.

En effet, une note de service du ministère chargé de l'Agriculture (n° 2016-853 du 3 novembre) donne la liste des produits phyto « L. 253-5 » parmi ceux autorisés à cette date et, surtout, leurs critères d'éligibilité. Désormais, dès qu'un produit obtient son AMM, il est possible de savoir s'il est éligible ou non sur la liste « L. 253-5 ».

Parmi les avantages réglementaires accordés à ces produits, la majorité perdure :

- ils ne sont taxés qu'à demi-tarif au titre de la taxe phytopharmacovigilance ;

- la publicité commerciale à leur propos est autorisée sur tous supports ;

- il n'y a pas à diminuer leur usage dans le cadre d'Écophyto, donc ils ne comptent pas pour le calcul des IFT et Nodu(5) à faire baisser de façon générale et pour les CEPP, certificats d'économie de produits phyto ;

- ceux d'entre eux qui sont destinés aux amateurs restent vendables en libre-service en 2017 et resteront en vente en 2019 ;

- ils font partie des produits qui, depuis le 1er janvier 2017, restent utilisables sur voirie et dans les espaces verts, forêts et promenades accessibles au public et relevant du domaine public.

Biocontrôle : autre catégorie créée

En revanche, c'est dans la loi Potier et c'est nouveau, le droit d'être appliqué par le personnel d'entreprises sans agrément phyto est désormais réservé aux produits dispensés de classement (toxicologique et écotoxicologique) parmi les produits « L. 253-6 » (en plus des substances de base).

Une troisième catégorie de produits de biocontrôle est ainsi créée ! Sera-t-elle, ou non, un sous-ensemble de la catégorie « L. 253-5 » ? Il y aurait alors trois cercles concentriques. À suivre.

Quant aux applicateurs, le certiphyto sera tout de même nécessaire... Sauf s'il s'agit de médiateurs chimiques ! En effet, la loi Potier dispense de certiphyto les applicateurs :

- de substances de base (voir plus haut) ;

- mais aussi de médiateurs chimiques ; il s'agit de ne pas entraver les chantiers de pose de diffuseurs de confusion sexuelle.

N'oublions pas les UAB et les CEPP

Une autre nouveauté date de l'été dernier, de par l'article 125 de loi biodiversité du 8 août 2016. Les produits UAB (utilisables en agriculture biologique), dont beaucoup, mais pas tous, sont aussi de biocontrôle « L. 253-5 », sont restés en vente libre aux amateurs après le 1er janvier 2017.

À noter : la liste des produits UAB a été réactualisée. Sa dernière mouture est en ligne depuis le 15 décembre.

Enfin, signalons que la loi Potier rétablit les CEPP, et que l'arrêté du 12 septembre 2016 listant vingt actions standardisées donnant droit à des CEPP fait la part belle aux méthodes alternatives :

- sept actions portent sur l'usage de produits de biocontrôle ; ce sont le virus de la granulose et la confusion sexuelle en verger, les trichogrammes sur maïs, les SDP (stimulateurs de défense des plantes) et le soufre sur diverses cultures, la confusion sexuelle en vigne et l'acide pélargonique sur pomme de terre et vigne ;

- quatre déclinent d'autres méthodes alternatives ; ce sont les filets Alt'Carpo, les plantes-compagnes et les plantes-pièges sur colza et les variétés de pomme de terre tolérantes au mildiou.

Substances inédites

Une période riche en innovations

Enfin, les AMM de produits de biocontrôle sont des décisions réglementaires favorables aux méthodes alternatives. À ce titre, la période mars 2016-février 2017 est plutôt riche en innovations. Du moins pour les cultures spécialisées.

En un an, neuf nouveaux produits ont fait arriver douze substances actives inédites sur le marché français. Alors que, de mars 2015 à février 2016, seuls cinq nouveaux produits avaient introduit sept substances inédites(6) après douze nouveautés pour treize substances les douze mois précédents(7).

Six de ces produits à base de substances inédites visent des maladies.

Face aux maladies

Quatre Trichoderma, trois produits

Trois sont à base de micro-organismes du genre Trichoderma. Mais « du même genre » ne signifie pas « équivalent » ! Les espèces diffèrent à l'intérieur d'un genre, et les souches à l'intérieur d'une espèce.

D'abord, Tusal, de Certis Europe, à base de la souche T11 de Trichoderma atroviride et la souche T25 de Trichoderma asperellum (voir Tableau 1), a obtenu son AMM au printemps 2016 sur fraisier, concombre, laitue, melon, tomate(8), poivron, arbres et arbustes d'ornement, cultures florales et plantes vertes. Ceci en plein air et sous abri, via l'irrigation localisée, contre pythiacées et non pythiacées.

La seconde autorisation de Trichoderma, advenue l'été dernier, est celle de T34 Biocontrol, dit aussi Asperello T34 Biocontrol, de Biobest (Tableau 1). Il contient la souche T34 de T. asperellum, différente de la souche T25 et approuvée séparément par l'Europe. Il est autorisé sur tomate, poivron et cultures ornementales, le tout sous abri, via l'irrigation localisée, en traitement du sol par pulvérisation ou incorporation ou, sur cultures ornementales, en trempage des plants. Il cible les pythiacées sur tomate et poivron (selon l'AMM, il est efficace contre Pythium aphanidermatum) et les trachéomycoses sur cultures ornementales (Fusarium oxysporum f. sp. dianthi sur oeillet).

Le troisième produit est arrivé en février 2017. Vintec, de Belchim, à base de Trichoderma atroviride, est autorisé contre les maladies du bois (MDB) sur vigne en place et en pépinière (Tableau 1) après une dérogation en pépinière en 2016. Nous l'avions présenté en novembre dernier(9). Un autre produit anti-MDB à base de T. atroviride est autorisé sur vigne, mais pas en pépinière. Surtout, la nouvelle spécialité utilise une autre souche, codée SC1. C'est une des sept substances « à faible risque » approuvées.

L'utiliser ne dispense pas de tailler la vigne en douceur(10) ! Les MDV sont complexes et les mesures préventives indispensables. Mais un biofongicide les complète utilement.

Bactérie à large spectre et virus à cible précise

Autre biofongicide original, Amylo X WG, de Certis Europe, est à base d'une bactérie : Bacillus amyloliquefaciens sous-espèce plantarum, souche D747 (Tableau 1).

Autorisé en janvier 2017, le produit est polyvalent. Il est autorisé sur vigne, pommier et cultures rattachées (poirier, etc.), cerisier, prunier, pêcher, abricotier, kiwi, cultures maraîchères (concombre, fraisier, laitue, melon, poivron, tomate, en plein air et sous abri) et substrat de culture de champignons. Il vise le feu bactérien, la bactériose du kiwi, la pourriture grise sur vigne et légumes, les monilioses sur fleurs et rameaux en vergers de fruits à noyau, les sclérotionioses sur légumes, la stemphyliose et les maladies de conservation sur pommier.

Le cinquième produit, PMV-01, de DCM, est, lui, spécifique. Il est autorisé sur tomate (mais pas sur aubergine) sous abri, contre le virus de la mosaïque du pépino, alias PepMV ou PMV, Pepino mosaic virus (Tableau 1). Point surprenant a priori, la substance active est une souche de... PepMV ! Ce n'est pas de l'homéopathie. La « souche CH2, isolat 1 906 » est naturelle et hypovirulente. Appliquée sur tomate, elle prend la place des souches virulentes et, elle, ne fait pas de dégâts. Elle a été approuvée en juin 2015 comme « substance à faible risque ».

Trois terpènes associés

Le sixième nouveau fongicide, Mevalone, de Sumi Agro, a obtenu son AMM début 2017, sur vigne, contre le botrytis. Il avait été présenté en décembre 2015 à la Cima (Conférence sur les maladies des plantes) de l'AFPP, à Tours(11), sous le nom de code 3AEY. Il est à base d'eugénol, de géraniol et de thymol. L'eugénol, un des arômes du clou de girofle, s'utilise notamment en pharmacie et dentisterie. Le géraniol, fleuron de l'huile de géranium et de rose, est apprécié entre autres en cosmétique, parfumerie et dans l'alimentation. Le thymol, constituant de l'huile de thym, s'utilise en particulier en pharmacie et contre le varroa des abeilles.

Ces terpènes, aromatiques (odorants), sont très volatils. Des micro-capsules brevetées à base de levure les relâchent progressivement. Ainsi, ils protégent efficacement le végétal de plein air qu'est la vigne.

Les trois terpènes répondent à la définition des substances naturelles. Deux sont extraits de végétaux. Le troisième est une copie car son extraction est trop onéreuse ; le produit ne sera donc pas UAB alors que les cinq produits à base de micro-organismes cités plus haut le sont. Mais il est de biocontrôle selon la réglementation française.

Substances inédites contre des ravageurs

Un virus là encore très précis

Trois substances actives arrivent contre des ravageurs. D'abord un virus, le Spodoptera littoralis nucleopolyhedrovirus, vise la noctuelle méditerranéenne Spodoptera littoralis (dite « ver du cotonnier » car ravageur du coton mais qui attaque aussi d'autres cultures). Il est le principe de Littovir, d'Andermatt France.

Le produit, UAB et de biocontrôle, est autorisé sur fraisier, laitue, poivron, tomate, épinard, cresson alenois, « fines herbes »(12), arbres et arbustes d'ornement, cultures florales et de plantes vertes, en plein air et sous abri (Tableau 2). Il est issu de la société suisse Andermatt Bicontrol, qui maîtrise la production des virus entomopathogènes. Rappelons que :

- les virus étant des parasites obligatoires, il est nécessaire, pour les produire, de leur donner des organismes vivants à parasiter ;

- les hôtes des virus entomopathogènes sont des insectes, qu'il faut donc élever ;

- normalement, les virus sont trop spécifiques pour pouvoir les produire sur des hôtes de substitution faciles à élever(13).

Lors d'une visite d'Andermatt Biocontrol en septembre 2016, l'auteur de ces lignes a ainsi découvert les subtilités de l'élevage de lignées de carpocapse des pommes « dressées » (en fait sélectionnées, c'est tout un art) à pondre (pour les adultes) puis se développer (pour les chenilles) ailleurs qu'à l'intérieur de fruits. Ceci pour produire des chenilles puis deux des virus cités dans l'article p. 47. De même, le virus de S. littoralis est fabriqué sur des souches de laboratoire de S. littoralis spécialement sélectionnées.

Extrait d'amidon sous abri et d'ail en traitement du sol

Le second insecticide, Eradicoat, de Certis Europe (Tableau 2), autorisé au printemps 2016, est à base de maltodextrine. Ce dérivé d'amidon de maïs est utilisé dans l'industrie agroalimentaire.

Le produit est autorisé sous abri, sur toutes les « cultures légumières », les arbres et arbustes d'ornement, rosier, cultures florales et de plantes vertes. Il agit par contact sur les aleurodes, pucerons, acariens (alias tétranyques) et phytoptes (qui sont aussi des acariens). Classé « biocontrôle L. 253-5 » et en attente de reconnaissance UAB, il a eu un Sival d'argent au salon Sival 2017.

Enfin, la douzième substance inédite est l'extrait d'ail à la base de NemGuard Granulés, de Certis Europe. Ce nématicide, autorisé au printemps 2016, s'utilise en traitement du sol, au semis ou à la plantation, sur carotte, laitue, melon, poivron et tomate, en plein air et sous abri. Classé biocontrôle « L. 253-5 », il attend sa reconnaissance UAB.

Usages inédits contre des maladies

Souche connue de Trichoderma

L'innovation en biocontrôle, c'est aussi l'arrivée, sur des usages nouveaux, de substances autorisées ailleurs (Tableau 3). La période mars 2016-février 2017 a vu dix de ces nouveautés. Quatre visent des maladies.

D'abord, Tri-Soil WP, d'Agrauxine, est à base de la souche I-1237 de Trichoderma atroviride. C'est la matière active du premier produit UAB et de biocontrôle autorisé sur vigne contre les MDB, à savoir Esquive WP, de marque Agrauxine et distribué par Bayer. Le nouveau produit est autorisé sur carotte, laitue, pomme de terre et cultures florales, en plein air comme sous abri, en traitement des parties aériennes ou traitement du sol selon les cas, pour lutte contre des maladies dites du sol (Pythium sp. Rhizoctonia sp.). Un de ses atouts est qu'il est actif même par temps frais : la souche se développe dès 5 °C.

Extension pour le COS-OGA

Vient ensuite l'extension d'emploi de Messager, de Jouffray-Drillaud. Il est à base de COS-OGA, association, brevetée, de deux composés naturels. Le COS (abréviation de chito-oligosaccharide) est extrait de carapace de crustacés et l'OGA (oligogalacturonane) de la pectine de fruits.

Le COS-OGA n'a pas d'effet fongicide direct, c'est un SDP, stimulateur de défense des plantes. Le produit ne se diffuse pas dans la plante mais lui envoie un message, d'où son nom de marque. Or ce message est émis très rapidement après l'application. De ce fait, le lessivage ne pose aucun problème ! Détails page 60 à 62 de ce numéro.

Le produit, autorisé depuis fin 2015 contre l'oïdium sur des cultures légumières, s'est vu octroyer fin 2016 une extension d'usage sur vigne, à la fois contre le mildiou et l'oïdium. Inscrit sur la liste « biocontrôle L. 253-5 », il permet de faire diminuer l'IFT en agriculture conventionnelle, et attend sa reconnaissance UAB. Sur vigne, il ne s'utilise pas seul mais en programme avec d'autres fongicides dont il permet de diminuer les IFT.

Levure étendue sur banane

Retour aux micro-organismes. Nexy, d'Agrauxine, produit de post-récolte à base de la levure Candida oleophila autorisé depuis fin 2008 sur pommes et poires contre les maladies de conservation, a reçu début 2017 une extension d'usage sur banane. Sur cette culture, il sera distribué par Syngenta.

Bactérie élargie sur colza

La dernière extension d'usage de fongicide touche une grande culture : le colza. Mais le produit, Ballad, de DuPont, à base de la souche QST209 de B. pumilus... était déjà autorisé sur colza ! Une extension d'usage obtenue début 2017 lui reconnaît une efficacité sur maladies des siliques. Rappel : ce biofongicide UAB et de biocontrôle « L. 253-5 » n'est pas commercialisé seul mais associé à un fongicide conventionnel dont il permet de diviser par deux la dose, donc l'IFT.

Autres usages inédits

Confusion sexuelle : l'anneau pour la châtaigne

Trois nouveautés touchent la confusion sexuelle en verger (Tableau 4). Elles sont ou seront UAB et de biocontrôle « L. 253-5 ».

La première est l'AMM de Ginko Ring, de Sumi Agro. Ses phéromones sont connues. Mais son diffuseur, un tube souple, est bien plus long que celui des autres Ginko. Un exploit car les phéromones, présentes dans le tube, doivent diffuser régulièrement alors que le niveau de remplissage dudit tube diminue. Plus ce tube est long, plus l'opération est délicate. Le nouveau système permet de placer moins de diffuseurs à l'hectare. Le temps de pose diminue donc.

Malgré l'intérêt du gain de temps, le produit, s'il ne permettait que cela, serait hors sujet dans cet article. Mais ce diffuseur permet de protéger les châtaigniers par confusion sexuelle (voir Encadré 2).

En verger, cette méthode ne fonctionne que si les diffuseurs sont placés dans le tiers supérieur des arbres. Or les châtaigniers sont hauts. Difficile de réaliser la pose à la main ni même à la perche. Mais les nouveaux diffuseurs peuvent tomber du ciel : ils forment des anneaux assez grands pour rester dans la canopée. Le système Biopose (diffuseur largué par drone), testé avec InVenio, a reçu un prix spécial du jury au Vinitech-Sifel fin 2016 et un Sival d'argent en janvier 2017.

Le nouveau produit est autorisé aussi sur pommier, poirier et noyer. Mais, même sur noyer, il n'est pas le premier.

Pour la noix contre la TOP sur pomme

En effet, Checkmate Puffer CM-O, de De Sangosse, déjà autorisé sur pommier et poirier (présenté dans Phytoma l'an dernier(14)) a bénéficié d'une extension d'usage sur noyer. Là encore, il s'agit de protéger de grands arbres à l'aide d'un nombre réduit de diffuseurs.

Enfin Rak 5, de BASF, autorisé depuis plus de vingt ans sur pêcher et abricotier contre la tordeuse orientale du pêcher alias TOP, a reçu une extension d'usage contre cette tordeuse sur pommier et prunier. On le sait, la TOP est un ravageur émergent de ces vergers. Des diffuseurs associant les phéromones de carpocapse et de TOP existaient déjà, mais désormais il est possible de viser spécifiquement la TOP.

Répulsif, nématicide, herbicide

Trois autres extensions sont à signaler :

- celle de Sokalciarbo WP, d'Agri Synergie, répulsif anti-insectes UAB et de biocontrôle « L. 253-5 » à base de kaolin (alias silicate d'aluminium), sur pommier contre les psylles et sur vigne contre cicadelles ;

- celle de Flocter, nématicide de Bayer, UAB et de biocontrôle « L. 253-5 », à base de Bacillus firmus, sur laitue, en traitement du sol ;

- celle de Beloukha, de Belchim, à base d'acide pélargonique végétal, pour désherber la banane. Ce produit est de biocontrôle « L. 253-5 » mais pas UAB.

(1) Dans tout cet article, phyto = phytopharmaceutique. (2) Autorisation de mise sur le marché. (3) Plantes ou parties de plantes inscrites dans la pharmacopée humaine comme en vente libre. (4) Mesure créée par la loi Labbé du 6 février 2014 , date d'application avancée par la LTE, loi de transition énergétique du 17 août 2015. (5) Indice de fréquence de traitement (pour l'utilisation) ; nombre de doses unité (pour les ventes). (6) « Produits phyto de biocontrôle : un ralentissement... provisoire ? », Phytoma n° 692, mars 2015, p. 5 à 56. (7) « Produits de biocontrôle : quoi de neuf à la gamme ? », Phytoma n° 682, mars 2015, p. 48 à 52. (8) Sauf indication contraire, un produit autorisé sur tomate l'est aussi sur aubergine (culture rattachée). (9) G. d'Enjoy et J.-P. Boulon, 2016, « Qu'est-ce que la souche SC1 de T. atroviride ? », Phytoma n° 698, novembre 2016, p. 45. (10) Voir p. 38 de ce numéro. (11) « Substances actives : trois nouveautés à découvrir », Phytoma n° 689, décembre 2015, p. 30 à 33. (12) Cet intitulé recouvre une liste de plantes condimentaires plus large que celle des recettes de cuisine. (13) Alors que les trichogrammes (voir p. 32) s'élèvent sur la teigne de la farine Ephestia kuehniella, bien plus facile à gérer que les tordeuses de la vigne et... du cotonnier. (14) Sigel J., 2016, « Un nouveau mode d'application de la confusion sexuelle en verger », Phytoma n° 692, mars 2016, p. 44-45.

1 - Substances « de base » et « à faible risque »

Trois nouvelles substances de base ont été approuvées par l'Europe depuis le pointage établi dans notre dossier biocontrôle publié en mars 2016. Ce sont :

- le phosphate di-ammonique de qualité oeonologique ;

- le lactoserum (petit lait) ;

- l'huile de tournesol de qualité alimentaire.

Les neuf autres sont :

- la prêle, le chlorhydrate de chitosan et le saccharose de qualité alimentaire approuvés tous les trois en 2014 ;

- l'hydroxyde de calcium (ou chaux éteinte), la lécithine, l'écorce de saule, le vinaigre de qualité alimentaire, le fructose de qualité alimentaire et l'hydrogénocarbonate de sodium (ou bicarbonate de sodium) approuvés en 2015.

Deux nouvelles substances à faible risque ont été approuvées sur la même période :

- la souche SC1 de Trichoderma atroviride ;

- la souche LASO2 de Saccharomyces cerevisiae.

Cinq autres substances étaient déjà approuvées comme « à faible risque », ce sont :

- le COS-OGA, l'isolat 1906 de la souche CH2 du PepMV, ainsi que la cerevisane, nouvelles substances approuvées en 2015 ;

- le phosphate ferrique et la souche Apopka 97 d'Isaria fumosorosea (anciennement Paecilomyces fumosoroseus) reconnues à faible risque lors du renouvellement de leur approbation en 2015.

2 - La confusion sexuelle aide la lutte biologique

Pourquoi développer la confusion sexuelle contre le carpocapse de la châtaigne ? Pour permettre la lutte biologique contre un autre ravageur, le cynips du châtaignier Dryocosmus kuriphilus ! Cet insecte exotique, quasi impossible à maîtriser par insecticides conventionnels, est combattu par son parasitoïde, l'hyménoptère Torymus sinensis.

Mais des lâchers inondatifs répétés de cet auxiliaire ne sont pas réalisables. Il faut l'introduire et lui permettre de s'installer durablement, ce que les insecticides chimiques rendent difficile. Or, la confusion sexuelle ne vise que des lépidoptères (carpocapses), donc épargne Torymus sinensis.

Et voilà pourquoi des drones pourraient survoler les châtaigneraies si la réglementation des épandages aériens le permettait. Le fera-t-elle un jour ?

RÉSUMÉ

CONTEXTE - La réglementation encadrant les méthodes alternatives a évolué entre mars 2016 et février 2017. Voici un récapitulatif.

ÉTAT DES LIEUX - Quatre des six premiers macro-organismes utiles non indigènes à avoir reçu des autorisations d'entrée sur le territoire et d'introduction dans l'environnement sont des auxiliaires de lutte biologique. La réglementation des substances de base a évolué en Europe (approbations) et en France (loi Potier). La liste des produits phyto de biocontrôle au sens de l'article L. 253-5 du code rural est publiée. La loi Potier a créé une nouvelle catégorie de produits. Onze actions standardisées donnant droit à des CEPP mettent en oeuvre des méthodes alternatives. Neuf AMM de produits phyto de biocontrôle ont introduit douze substances actives inédites sur le marché, et d'autres produits ont eu de notables extensions d'usage.

MOTS-CLÉS - Méthodes alternatives, réglementation, auxiliaires, substances de base, produits phytopharmaceutiques, produits phyto, biocontrôle, UAB (utilisable en agriculture biologique), CEPP (certificat d'économie de produits phytopharmaceutiques).

POUR EN SAVOIR PLUS

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BIBLIOGRAPHIE : pour lire les articles de Phytoma cités, les abonnés à la revue peuvent désormais consulter les archives (lien ci-dessus).

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