En 2005, quand Céline Tardy entre à la coopérative Pardi, adhérente à Rougeline, cela fait sept ans que ce groupe est certifié pour sa démarche PBI, protection biologique intégrée. En effet, Rougeline avait obtenu en 1998 sa certification de type CCP (certification conformité produit) sur la lutte biologique avec un cahier des charges strict. Les producteurs impliqués se sont engagés et leur accompagnement a débuté avec la mise en place de sessions de formation pour le personnel et les dirigeants, des réunions techniques, des groupes de travail et de réflexion afin de péréniser le projet.
En 2007, le groupe passe de la certification CCP à la certification « Global Gap ». Rougeline représente aujourd'hui 160 exploitations, avec 300 ha de serres dans trois bassins de production, en Provence, dans le Sud-Ouest et à Perpignan. Le groupe a un service technique de deux personnes et six techniciens au sein des OP. Ce département technique organise des réunions mensuelles avec les conseillers extérieurs, pour faire le point sur les situations sanitaires et les nouvelles solutions disponibles en favorisant celles de biocontrôle. Les techniciens et producteurs cherchent à baisser les IFT, et répondre ainsi à la demande des consommateurs « zéro résidus », au-delà de la demande réglementaire.
Un réseau de techniciens
Depuis 2005, Céline Tardy contrôle et suit l'état sanitaire de cultures de tomate et de fraise sol et hors-sol sous abri. « Je réalise des observations hebdomadaires (chacune d'environ deux heures par exploitation, voire plus si elles ont une surface importante), des relevés et suivis, de la plantation à la fin de culture. Je préconise et conseille la protection biologique intégrée, notamment par la mise en oeuvre des lâchers d'auxiliaires. » Céline Tardy travaille en concertation avec les producteurs et les techniciens conseils agronomes indépendants pour prendre les meilleures décisions en commun. Par ailleurs, elle est en relation étroite avec les stations d'expérimentation qui réalisent des essais « baisse des IFT » dans le cadre de Dephy Expé sur certaines des parcelles qu'elle suit. Ce réseau de techniciens aide à atteindre les objectifs et les échanges permettent la performance.
L'exemple de l'aleurode
Pourquoi faire appel à une technicienne pour effectuer les observations ? « C'est tout simplement un appui technique aux producteurs. » Mais elle forme également les salariés à la reconnaissance des bioagresseurs et auxiliaires.
« Ensuite, ces salariés pourront faire remonter les informations et repérer les zones à risque et à surveiller de près. » Grâce au maillage des techniciens de Rougeline et des extérieurs, elle apporte la meilleure réponse aux problématiques qui surviennent. Par exemple, la maîtrise du principal ravageur des tomates, l'aleurode, pour lequel l'objectif peut être atteint avec les moyens actuels de biocontrôle si les préconisations et le suivi sont rigoureux. Cependant, les équilibres peuvent être précaires...
« Mon rôle est d'alerter sur les possibles débordements des populations de ces bioagresseurs et de proposer les mesures adaptées. » Ce seront par exemple la prophylaxie, la détection précoce, le diagnostic, la mise en place des méthodes de lutte mécanique, physique, etc. qui permettent également d'atteindre les objectifs fixés.
Parfois des surcoûts
Elle est en veille sur les nouvelles solutions phytosanitaires, l'innovation et la règlementation, et en alerte sur les bioagresseurs émergents ou secondaires qui deviennent des ravageurs principaux, tel Nesidiocoris tenuis. Cette petite miride phytophage occasionne d'importants dégâts dans les cultures de tomate.
Cependant, les nouvelles solutions alternatives représentent parfois un surcoût pour le producteur. Par exemple, dans le cas de Nesidiocoris, c'est le passage quotidien à l'aide d'un aspirateur pour éliminer le ravageur qui permet de limiter les populations de façon significative.
Clubs de progrès
« En 2012, une marque de confiance de la direction s'est traduite par une évolution de mes missions. » En effet, après onze années d'expérience, elle était capable de mesurer les équilibres des populations d'insectes et d'anticiper les conseils sans faire de comptage.
« Ceci m'a donné du temps pour approfondir mes connaissances. Ainsi, mes missions ont naturellement évolué. »
Sa direction lui a alors confié l'animation des clubs de progrès (groupe de travail de producteurs, se réunissant environ une fois par mois) appelés « Tomate ». « Dans ce cadre-là, j'ai pour mission d'organiser des visites sur les exploitations : les cultures sont observées et les producteurs échangent sur leurs pratiques et leurs problématiques. Ces témoignages apportent à tous les solutions adaptables à chacun. » Mais ce n'est pas tout.
Au travers ces clubs, elle fait appel à des scientifiques et des techniciens pour aborder des sujets plus précis. « Par exemple, lors du dernier club de progrès, j'ai fait intervenir Philippe Nicot, de l'Inra de Montfavet, sur le botrytis. Ceci a permis de mieux comprendre les facteurs de développement et de dispersion de la maladie, et de mettre les savoirs acquis en pratique. »
Elle organise également des visites sur les exploitations des autres bassins en partenariat avec les collègues techniciens du groupe « et même sur des exploitations extérieures au groupe Rougeline, dans les Pays-Bas, notamment ».
Un savoir partagé
Et concernant la fraise ? « Il existe le même système d'échanges entre bassins de production. » De façon générale, Céline Tardy insiste : « Partager les connaissances est la pierre angulaire de mon métier.
Je remercie mes collègues techniciens de Rougeline avec qui j'acquiers au quotidien de nouveaux savoirs grâce aux échanges que nous avons. Dimitri Athanassiou, directeur technique de Rougeline à la retraite, partage ses connaissances sans compter et m'aide à parfaire mes compétences pour animer des clubs de progrès. Je m'épanouis dans mon travail, et contribue modestement à la production de tomates et de fraises de qualité dans le respect de l'environnement et de la réglementation. »