Pour diagnostiquer certaines maladies telluriques, il faut souvent passer par la prise d'échantillon puis l'analyse au laboratoire. C'est le cas du Fusarium sp. issu d'un échantillon d'érable du Japon, ci-dessus, ou encore du Verticillium sp. sur thym, ci-contre. 10 µm
Fig. 1 : Étapes du diagnostic Selon le cas, le diagnostic terrain suffit, ou bien il sera précisé par une étape au laboratoire. Les acteurs doivent travailler en synergie.
Fig. 2 : L'observation de la parcelle, une des trois étapes du volet « démarche terrain » de tout bon diagnostic La répartition des plantes affectées dans la parcelle permet de formuler quelques hypothèses sur les causes envisageables. Schéma : D. Blancard et A. Robuchon.
Les filières de production végétale ont un rôle important dans le développement des territoires français et de leur économie. Quelques chiffres permettent de s'en convaincre.
Pourquoi le diagnostic
Importance de l'état sanitaire des filières végétales
En 2016, les productions végétales représentaient 40,3 milliards d'euros. En 2013, les grandes cultures couvraient un peu moins de 12,1 M d'hectares de SAU, la viticulture 785 000 ha, les vergers 122 000 ha. En 2014, les productions légumières hors pomme de terre couvraient 227 000 ha et la pomme de terre 131 000 ha.
De par leur poids économique et les surfaces qu'elles occupent, les filières végétales revêtent un rôle déterminant dans le développement des territoires français. La maîtrise des maladies et des ravageurs est un élément clé de la qualité sanitaire de ces productions et de leurs performances économique et environnementale.
Au point de vue sanitaire, la filière semences et plants tient une place à part. Elle pèse 2,9 milliards d'euros durant la campagne 2011-2012, dont 1,2 milliard à l'exportation ; or la qualité sanitaire doit être exemplaire pour ne pas diffuser, à l'exportation comme à l'importation, des maladies et ravageurs dans les pays tiers ou sur le territoire.
Sensibilité croissante aux attaques de maladies et ravageurs
Les changements globaux ont une grande influence sur la dynamique des populations de bioagresseurs et les dommages qu'ils provoquent. Le réchauffement climatique, l'accroissement des échanges commerciaux et la demande sociétale de diminuer l'usage des pesticides accroissent la sensibilité des productions aux attaques de maladies et ravageurs et conduisent à l'émergence ou à la réémergence d'organismes nuisibles de plus en plus nombreux.
Par exemple, en culture maraîchère et florale, l'abandon de la fumigation des sols a une incidence sur la microflore tellurique, les maladies à virus transmises par des nématodes et les champignons du sol. De même, après l'interdiction de l'arsénite de soude, une recrudescence des maladies du bois et du feuillage (black dead arm, esca, flavescence dorée et bois noir) a été observée en viticulture. Troisième exemple, l'arrêt de l'usage des huiles jaunes a conduit à une réémergence de cochenilles et pucerons lanigères en arboriculture fruitière.
Espèces exotiques envahissantes
De 2005 à 2014, les filières végétales ont dû apprendre à gérer 75 ravageurs nouveaux, introduits involontairement par les échanges commerciaux (Martinez et al., 2014).
Près de 570 organismes nuisibles sont réglementés (ONR) en tant qu'espèces nuisibles aux végétaux : virus, champignons, nématodes, arthropodes, bactéries... (source COS Anses). Face à la progression des invasions biologiques en Europe, la commission européenne vient de publier une liste de 49 espèces exotiques envahissantes au titre de la protection de la biodiversité. De plus, trois nouvelles espèces végétales viennent d'être classées nuisibles pour la santé humaine dans un décret relatif à la lutte contre les ambroisies (décret 2017-645).
Le diagnostic, première étape face à un triple défi
Les filières végétales font face à trois défis :
- gérer en permanence de nouveaux bioagresseurs ;
- réduire l'usage des pesticides ;
- augmenter les services écosystémiques rendus par ces productions végétales.
Pour y parvenir, la première étape est de bien connaître et comprendre la biodiversité, tant dommageable que bénéfique, qui est en pleine évolution dans nos agrosystèmes. Cela nécessite des outils de surveillance et de diagnostic adaptés et performants.
Mise en place d'un collectif
Afin de développer et déployer de manière plus efficace ces outils, les acteurs français de la santé végétale ont constitué un collectif pour mettre en oeuvre le réseau mixte technologique (RMT) VegDiag, sur la période 2014-2019, financé sur des fonds CasDAR.
Une protection des cultures de plus en plus complexe
Demande sociétale et politiques publiques accroissent la complexité
Les états généraux du sanitaire en 2010, visant une politique sanitaire rénovée de l'agriculture française, les plans Écophyto pour la réduction d'usage des pesticides ainsi que le déploiement de systèmes agroécologiques, récente politique de production agricole en France, entraînent une augmentation de la biodiversité des milieux cultivés et impliquent le développement de techniques de protection intégrée des cultures de plus en plus complexes.
Les nouvelles politiques phytosanitaires et la restructuration des instances qui doivent les déployer vont avoir des besoins en diagnostic plus importants et plus précis.
Au regard de la complexité des processus de régulation naturelle impliqués pour l'ensemble des filières végétales, l'efficacité de la protection intégrée des cultures ne peut passer que par une connaissance accrue des risques dus aux maladies et aux ravageurs.
Le diagnostic en santé végétale en est une étape essentielle. En effet, il intervient en amont du raisonnement de l'ensemble des techniques utilisées par les acteurs du développement agricole pour maintenir les plantes en bonne santé. Une identification précise des agents pathogènes et des ravageurs devient fondamentale lorsque les techniques de lutte font appel à des auxiliaires souvent très spécifiques ou interviennent à des étapes clés du cycle biologique. C'est le cas en agriculture biologique.
Surveillance et analyses
L'introduction et l'émergence régulière de nouveaux bioagresseurs des plantes nécessitent le renforcement de la surveillance et le recours à des outils d'analyse de plus en plus nombreux et performants. Ainsi, la surveillance biologique du territoire (SBT), le suivi sanitaire et la prévision des risques sanitaires par les nouveaux OVS (organismes à vocation sanitaire) et ASR (associations sanitaires régionales) ont été mis en oeuvre. Ces structures font appel aux laboratoires spécialisés en santé des végétaux pour la mise au point des protocoles d'analyses, des méthodologies d'observation et/ou de prélèvements sur une large gamme de bioagresseurs et d'auxiliaires potentiellement présents.
Étudier les résistances
Gérer durablement les variétés résistantes ou tolérantes aux bioagresseurs et anticiper le développement des résistances de ces bioagresseurs aux produits phytopharmaceutiques sont des enjeux majeurs.
L'optimisation des processus de diagnostic concourt à la surveillance mais aussi à la mise en place de stratégies pour s'opposer à l'émergence des résistances de bioagresseurs. Ce progrès doit être accompagné par des connaissances et des déterminations précises des bioagresseurs associés afin d'évaluer et suivre le potentiel de résistance et de tolérance, et aussi d'anticiper les phénomènes de contournement de résistance.
Plan de maîtrise phytosanitaire
Le nouveau règlement phytosanitaire européen en préparation à Bruxelles, destiné à remplacer la directive 2000/29/CE, augmentera très probablement la part d'autocontrôle des producteurs sous la forme d'un plan de maîtrise phytosanitaire (PMP). Ce dernier se traduira par une surveillance régulière des lieux de culture, et une traçabilité écrite détaillant les observations, diagnostics et résultats d'analyses phytosanitaires obtenus au sein des exploitations.
À l'appui de ce plan, les services d'inspection officiels (DRAAF-SRAL et leurs délégataires : Fredon, instituts techniques, Gnis-SOC, FranceAgriMer) superviseront l'efficience des mesures mises en oeuvre par l'entreprise pour éviter l'introduction et la dissémination d'organismes nuisibles réglementés et/ou émergents.
Enfin, la mobilisation accrue des services écosystémiques des agrosystèmes (effets des paysages, rotations, plantes de service, etc.)sur la santé des plantes entraîne des besoins importants en diagnostic pour caractériser finement la biodiversité impliquée.
Le consensus autour du diagnostic phytosanitaire est essentiel pour renforcer la fiabilité des observations disponibles, dont celles diffusées notamment dans les BSV, et pour la cohérence des préconisations qui en découlent et qui repose sur une définition du diagnostic adoptée par tous.
Définition du diagnostic
Au sens large
Différentes définitions du diagnostic ont été proposées. Au sein du RMT, le diagnostic est vu comme une démarche méthodologique visant à déterminer la cause (abiotique ou biotique) des affections d'une plante, allant, dans le cas de causes biotiques, jusqu'à l'identification et la caractérisation de la diversité génétique des bioagresseurs (races, haplotypes, résistances...).
On entend le terme diagnostic au sens large, le diagnostic généraliste, du terrain aux laboratoires dits de première intention, la détection et l'identification de bioagresseurs particuliers souvent réalisées par des laboratoires spécialisés, jusqu'à des caractérisations plus fines comme la détection de résistances, d'identification de pathovars, de biotypes, etc.
Deux premiers objectifs
Le RMT VegDiag au travers de son axe 1 (« améliorer la qualité du diagnostic en santé végétale ») s'intéresse au diagnostic nécessitant l'intervention d'un laboratoire, d'experts terrain, d'une équipe de recherche et leurs relations avec la collecte des données de terrain. Les finalités sont :
- de perfectionner le diagnostic en santé végétale en vue d'améliorer la qualité sanitaire des productions végétales afin de répondre aux enjeux technico-économiques et environnementaux actuels et futurs ;
- de développer la mise en réseau des laboratoires de diagnostic, des équipes de recherche en santé des végétaux et des observatoires de terrain pour améliorer les connaissances en épidémiologie et dynamiques des populations de bioagresseurs des cultures, et les rendre plus accessibles aux professionnels de l'agriculture.
Premier objectif : inventorier l'offre
L'objectif est de faire un état des lieux évolutif des laboratoires et compétences existants en santé des plantes. L'identification des différents compartiments du diagnostic (parasitaires/physiologiques, maladies, ravageurs, auxiliaires, etc.) et la recherche des modalités d'aiguillage des échantillons au sein des laboratoires français ont permis de fixer le contenu d'un annuaire mis en ligne sur le site du Réseau français pour la santé végétale, RFSV (voir Encadré 1).
Sur la base d'une réflexion préalable d'un groupe de travail du RFSV, les laboratoires de diagnostic ont été inventoriés sur un mode déclaratif. Cet annuaire vise à recenser les informations nécessaires pour qu'un laboratoire décrive son offre de prestations et qu'un acteur puisse trouver le prestataire adapté pour répondre à une problématique. Une révision de l'annuaire permettra d'intégrer, en 2018, les compétences de recherches et celles d'expertises en diagnostic de terrain. Une information parviendra aux acteurs concernés avec les modalités d'enregistrement.
Deuxième objectif : susciter le fonctionnement en réseau
L'objectif est de développer un mode de fonctionnement en réseau valorisant les synergies entre les laboratoires et le terrain. Sa finalité est d'améliorer la fluidité des échanges d'informations sur les analyses réalisables, les modes de prélèvement, la caractérisation et la biologie des bioagresseurs.
L'objectif recherché est d'obtenir une meilleure adéquation entre les besoins de terrain et les prestations réalisées au laboratoire. Ce partage d'information est nécessaire pour optimiser les moyens à mettre dans le cadre de la protection intégrée et de réagir en cas de crises phytosanitaires avec réactivité et efficacité.
Les étapes d'un diagnostic suivent un continuum allant des premières observations sur le terrain aux éventuelles analyses faisant appel à des technologies avancées de laboratoire telles que les méthodes biomoléculaires : premières observations sur le terrain, élaboration de la demande d'analyse laboratoire, prélèvement d'échantillons pour envoi à un laboratoire, analyses de laboratoire, interprétation des résultats tenant compte des données agronomiques.
La qualité du diagnostic repose sur la connaissance mutuelle des acteurs qui doivent travailler en synergie sur la base d'un fil conducteur consensuel (Figure 1). L'étape de vérification des hypothèses intervient tout au long de ce continuum. La bonne réalisation de chacune des étapes et leur bon enchaînement sont primordiaux pour obtenir un diagnostic de qualité.
Une centaine d'acteurs rassemblés
Cette méthodologie a été élaborée et mise en application lors du séminaire de formation au diagnostic organisé à Angers en 2015, dans le cadre du RMT VegDiag, ainsi que l'initiation d'un fonctionnement en réseau permettant l'aiguillage des demandes d'analyses à la suite d'observations de terrain, soit vers des laboratoires généralistes, soit vers des laboratoires spécialisés.
Le séminaire de 2015 a rassemblé une centaine de partenaires issus de divers organismes liés à la protection et la santé des plantes : groupements de producteurs, coopératives, entreprises agricoles, laboratoires publics et privés, recherche publique et privée, instituts techniques agricoles, services officiels, Fredon, enseignement agricole et membres du réseau national de surveillance biologique du territoire (SBT) dont bon nombre sont déjà membres du RFSV.
La démarche de diagnostic en réseau permet d'établir un schéma d'orientation optimisé pour la prise en charge des échantillons à diagnostiquer.
Les priorités
L'identification des marges de progrès du dispositif actuel doit permettre aux laboratoires et à l'ensemble des organismes concernés d'identifier les thèmes où ils pourront élargir leur champ d'investigation. Pour cela, les priorités identifiées par le RMT diagnostic en santé végétale sont :
- réaliser des études de cas à partir d'exemples jugés prioritaires du continuum terrain/laboratoire/identification par un spécialiste et faire le bilan des atouts et faiblesses des dispositifs existants ;
- mettre en réseau des compétences existantes pour pallier certains manques de spécialistes et de connaissances sur des problématiques émergentes ou des thématiques orphelines, avec des extensions à l'échelle européenne et à des pays tiers/européens connaissant des bioagresseurs exotiques risquant d'être introduits, vu le changement climatique et l'intensification des échanges internationaux de végétaux et produits végétaux ;
- diffuser de manière interactive au sein du réseau, via internet, des informations sur les compétences et les circuits de diagnostic identifiés dans les points précédents, dans le but d'améliorer la fiabilité et la réactivité du dispositif français de diagnostic en santé végétale.
Troisième objectif : un diagnostic plus performant
Le troisième objectif de ce premier axe « améliorer la performance du diagnostic en santé végétale » vise à perfectionner les capacités de diagnostic des acteurs de terrain et la détection/diagnostic des laboratoires. Pour ce faire, un guide en ligne pour le diagnostic a été établi, et des séminaires de formation organisés.
Guide du diagnostic en ligne : trois thèmes abordés
L'application Guide de diagnostic, accessible sur web Ephytia3 « Vég-Di@g » (voir « Liens utiles »), créée dans le cadre du RMT VegDiag, est accessible à toute personne en recherche d'informations sur les étapes d'un diagnostic allant du terrain au laboratoire ainsi que tous les éléments de contexte : définitions, principes généraux, causes biotiques ou abiotiques des affections des plantes, réglementation. Il aborde trois thèmes :
- le type de demande de diagnostic, qui varie selon les acteurs (producteurs ou groupements ou acteurs d'épidémiosurveillance, de surveillance réglementaire, du conseil, de l'expérimentation) ;
- la démarche sur le terrain ;
- la démarche de laboratoire.
Volet « démarche de terrain »
Les observations de terrain constituent les étapes les plus cruciales permettant de formuler les hypothèses sur les causes du problème : situation géographique, climat, espèces de plantes affectées. Trois étapes primordiales doivent être appréhendées :
- observation des plantes ;
- observation de la parcelle (Figure 2) ;
- relevé des caractéristiques de la parcelle.
La phase d'observation des plantes affectées passe par l'examen minutieux des parties aériennes et souterraines, des symptômes, des signes et des bioagressseurs. Un glossaire des symptômes détaille les types d'altérations, de déformations ou d'anomalies (voir le récapitulatif de la démarche Fiche 1 p. 12 et un exemple Fiche 2 p. 13).
La phase d'observation de la parcelle consiste à relever les stades de développement des plantes, couleur et paramètres physiologiques ainsi que la répartition des plantes affectées et à en étudier l'évolution (Figure 2).
Le relevé des caractéristiques du sol et de la topographie de la parcelle peut aider à formuler des hypothèses en particulier dans le cas de causes abiotiques.
Il faut aussi :
- observer les alentours ; retracer les interventions sur la parcelle et aux alentours (irrigation, travail du sol, traitements phytosanitaires, fertilisation, travaux de taille), l'historique sanitaire de la parcelle et les événements climatiques ;
- estimer les dégâts et la pression du bioagresseur ; ces évaluations permettent d'apprécier les dégâts à l'échelle de la plante, de la parcelle, d'un territoire.
Le recueil de ces renseignements sous forme de note en phase préalable du diagnostic terrain est nécessaire pour construire l'hypothèse en lien avec les recherches du laboratoire.
L'application « Vég-Di@g » sur le site Ephytia présente des aides sous forme de tableaux pour distinguer les causes biotiques et abiotiques, les symptômes et signes fongiques et bactériens ainsi qu'un prédiagnostic nématodes au champ, et deux exemples de diagnostic terrain (sur tomate et céleri).
Souvent, le diagnostic terrain à l'aide des seules observations est insuffisant pour conclure sur la cause exacte de l'affection. La confirmation de l'hypothèse terrain et l'identification du bioagresseur par analyse en laboratoire sont nécessaires pour mettre en oeuvre des mesures adaptées et réduire les risques de confusion (croire identifier un bioagresseur courant alors qu'il s'agit d'un organisme rare ou nouveau).
Les résultats des analyses sont tributaires de la qualité des prélèvements des échantillons, d'un conditionnement et d'un envoi adapté. Dans le cadre de VegDiag, Fredon France a édité une fiche détaillant les bonne pratiques de prélèvement (Fiche 3 p. 14).
Volet « démarche de laboratoire »
Trois types de laboratoires fonctionnent en synergie (Figure 3) :
- laboratoires généralistes, dits aussi de diagnostic ; ils identifient la cause des affections en s'appuyant sur leur expertise et sur des observations visuelles et microscopiques, ainsi que sur la bibliographie ; certains utilisent des kits portatifs ; si la cause des affections n'a pas été déterminée au champ, ces laboratoires sont sollicités dans un premier temps par les acteurs de terrain ; ils peuvent fournir un premier diagnostic et, si nécessaire, orientent l'échantillon vers un laboratoire de détection ou spécialisé ;
- laboratoires de détection ; ils utilisent surtout des techniques de détection pour vérifier la présence d'un bioagresseur supposé responsable des affections observées ou encore pour contrôler l'état sanitaire de parcelles, plants, ou lots de semence par exemple ;
- laboratoires spécialisés ; chacun a des domaines de compétence précis ; ils sont sollicités si les tests utilisés en routine ne donnent aucun résultat ou donnent des résultats peu communs ; ils ont développé des technologies de pointe ou ont accès à des plateformes technologiques.
La démarche au laboratoire se déroule selon les étapes suivantes :
- étude de la fiche de demande d'analyse et de la fiche de renseignement pour avoir une orientation du diagnostic ;
- observation visuelle des échantillons pour vérifier leur qualité et formuler/vérifier les hypothèses du terrain ;
- orientation vers une cause abiotique (voir Encadré 2) ou biotique. Si l'hypothèse d'une cause biotique est envisageable :
- si nécessaire, préparation des échantillons pour mieux observer le bioagresseur (extraction du sol, incubation, isolement), par les trois types de laboratoire ;
- pour l'identification d'un bioagresseur, observation à la loupe binoculaire ou au microscope des symptômes, signes et/ou bioagresseurs, par les trois types de laboratoire ; ce niveau d'observation est suffisant pour identifier certains bioagresseurs ; si le bioagresseur n'a pas pu être identifié à ce niveau, mise en oeuvre de techniques d'identification plus poussées par des laboratoires spécialisés ;
- pour confirmer un diagnostic, mise en oeuvre de techniques de détection selon des protocoles adaptés au bioagresseur ciblé, par des laboratoires de détection ;
- si le lien entre l'organisme vivant identifié et les affections observées n'est pas bien connu, dans la mesure du possible, application du postulat de Koch (règles devant être satisfaites pour qu'un micro-organisme soit identifié comme responsable d'une maladie).
Un retour au laboratoire généraliste peut s'avérer nécessaire pour formuler de nouvelles hypothèses de diagnostic. Les méthodes utilisées pour la détection de la présence d'un bioagresseur sur des plantes ou semences sont décrites dans des protocoles précis choisis par le laboratoire en fonction de la demande d'analyse. Dans certains cas, une étape de préparation pour isoler ou extraire ce bioagresseur de la plante ou du sol est un préalable : méthode d'extraction de nématodes, isolement de bactéries ou champignons sur milieux de culture.
Les critères de choix des techniques de détection et d'identification diffèrent selon les objectifs attendus. En effet, les différentes techniques ne sont pas équivalentes en termes de niveau de précision (genre, espèce, sous-espèce, forme spéciale, race... soit la spécificité), sensibilité (quantité minimale de bioagresseur pour qu'il soit détecté, soit la limite de détection), répétabilité (obtention d'un résultat identique au sein d'un même laboratoire lors d'essais différents) et reproductibilité (obtention de résultats identiques quels que soient les outils employés).
D'autres critères très importants sont également pris en compte, comme la simplicité de mise en oeuvre, la rapidité, la portabilité et le coût. Ainsi, la technique la plus précise ne sera pas forcément celle choisie si son coût est très élevé vis-à-vis des objectifs attendus. Le plus souvent, c'est la nature de la demande et les besoins en termes de méthodes de lutte qui orienteront vers le niveau de précision souhaité.
Le résultat des tests en laboratoire peuvent aider à décider de mesures phytosanitaires importantes. Ainsi, les protocoles officiels recommandent souvent d'utiliser plusieurs techniques différentes combinées ou par étapes selon les résultats d'une première analyse :
- techniques d'observation morphologique. Observation à la loupe binoculaire et au microscope optique, microscopie électronique ;
- techniques biologiques. Indexage biologique, plantes pièges, tests biologiques ;
- techniques biochimiques, permettant de caractériser les voies métaboliques d'un organisme telles que les galeries de tests nutritifs (API ou Biolog) ;
- techniques sérologiques. Test Elisa, immunofluorescence, méthode de flux latéral (type test de grossesse) ;
- techniques moléculaires. PCR, LAMP, séquençage partiel de génome (barcoding), pour plus de détails, voir l'article suivant ;
- techniques de spectrométrie.
Le laboratoire délivre un résultat d'analyse avec un degré de certitude suffisant pour répondre à la demande : le nom du bioagresseur à identifier ou la présence ou non du bioagresseur à détecter. Ces interprétations sont réalisées par le personnel compétent du laboratoire.
Les laboratoires d'analyses ne fournissent généralement pas de conseil, concernant les solutions pour remédier à une cause abiotique ou lutter contre un bioagresseur. Ces conseils ou aide à la décision peuvent être fournis par des experts qui s'appuieront sur les résultats d'analyses et le contexte agroécologique du problème sanitaire rencontré.
Les résultats du diagnostic sont replacés dans leur contexte sur le terrain avant de prendre une décision de lutte ou de gestion pour éradiquer ou maîtriser le problème sanitaire rencontré, en prenant en compte plusieurs éléments :
- l'importance économique et patrimoniale de la ou les plantes affectées ;
- le statut du bioagresseur (réglementé, de quarantaine...) ;
- la biologie du bioagresseur (paramètres épidémiologiques : reproduction, dissémination...) ;
- la pression du bioagresseur ;
- les dégâts et dommages actuels et à venir ;
- le contexte pédoclimatique et les potentiels événements pouvant aggraver la situation ;
- pour les ravageurs, la présence ou l'absence de prédateurs ou parasitoïdes naturels dans l'environnement (régulation biologique).
Ces éléments permettent d'évaluer les risques et ainsi la pertinence des solutions possibles. Le guide de diagnostic est une ressource pratique et utile, fil conducteur dans l'élaboration d'un diagnostic au terrain et en laboratoire, complété de nombreuses fiches et ressources sous format papier ou en application web et smartphone. L'implication des acteurs dans son amélioration et son évolution contribuera à l'amélioration de la qualité du diagnostic partagée entre tous.
REMERCIEMENTS aux contributeurs : Géraldine Anthoine (Anses), François Brun (Acta), Dominique Blancard (Inra), Maryse Merieau (chambre d'agriculture Centre-Val de Loire) et Aurélien Lepennetier (Végépolys).
RÉSUMÉ
- inventorier l'offre de diagnostic, avec la mise en accès libre sur internet de l'annuaire du RFSV ;
- susciter le fonctionnement en réseau des acteurs inventoriés, avec un séminaire de formation qui a rassemblé une centaine de partenaires en 2015 ;
- aider à améliorer la qualité du diagnostic dans ses phases « terrain » et « laboratoire » grâce à un guide du diagnostic.
1 - Annuaire du RFSV, Réseau français de la santé des végétaux
L'annuaire du réseau français de la santé des végétaux offre différentes fonctionnalités.
Les professionnels, services officiels et techniques peuvent rechercher une prestation (détection d'organismes nuisibles) ou plus large (diagnostic) à partir d'une interface de tri des informations disponibles dans l'annuaire. L'interface est accessible via le menu suivant :
- Annuaire global : informations générales et administratives (site web, contact, informations diverses, accréditations, certiphyto...) sur les services fournissant des prestations de diagnostic et/ou conseil terrain ou laboratoire, ou de recherche.
- Prestations de diagnostic pour la recherche d'une prestation donnée parmi celles proposées dans l'annuaire ; recherche mono ou pluricritère (type de bioagresseur, bioagresseur précis, matrice végétale) et approchée (orthographe approchante).
- Prestations de recherche par bioagresseur, culture, compétence et expertise, méthodes de protection des plantes ou par laboratoire.
Les services ou organismes pourvoyeurs de prestations de diagnostic au terrain ou de recherche ainsi que les laboratoires pourvoyeurs de prestations d'analyse peuvent enregistrer leurs offres via des questionnaires de saisie (mise à jour non immédiate car soumise à une validation).
Questionnaire enquête 1 : information laboratoire/service. Chaque laboratoire décline son identité, adresse, statut, type d'activité, contacts.
Questionnaire enquête 2 : prestation d'analyse offerte.
L'offre de prestations d'analyses recensée en santé des végétaux est la plus exhaustive possible. Chaque laboratoire renseigne une fiche par organisme (bioagresseur) ou à défaut par groupe d'organismes pour lesquels il détient des compétences, et précise les différentes matrices (plantes/cultures) associées.
Le niveau de précision d'offre de prestation qui pourra être recensé et consultable est fonction des éléments enregistrés.
L'interface de consultation étant amenée à évoluer et à s'améliorer, toute suggestion ou commentaires sont à adresser à annuaire@rfsv.fr.
Le service annuaire, offert par le RFSV depuis septembre 2013, a bénéficié préalablement des contributions des participants du groupe de travail 1 : création d'un annuaire des laboratoires et de leurs compétences.
Il fait l'objet d'une amélioration et d'une mise à jour dans le cadre du RMT VegDiag.
2 - Cause abiotique : marche à suivre au laboratoire
La cause abiotique est l'hypothèse envisagée si toutes les pistes de causes biotiques ont été épuisées. Après que la démarche de diagnostic de terrain (Fiche 4 p. 15) a abouti à cette hypothèse, le protocole se déroule en deux parties :
- la recherche d'explications dans l'itinéraire cultural et l'environnement des plantes (relecture de la fiche de renseignements, prise de contact avec le technicien et/ou le producteur) par le laboratoire généraliste ;
- la mise en oeuvre d'analyses de texture du sol, de composition en éléments minéraux et en oligoéléments dans le substrat, de présence de substances phytotoxiques, etc. pour confirmer une cause abiotique, par des laboratoires spécialisés.
POUR EN SAVOIR PLUS
CONTACT : andre.chabert@acta.asso.fr
LIENS UTILES : informations issues de séminaires d'information et de formations, liens vers les sources documentaires ou informatives accessibles en temps réel sur le site du RFSV : www.rfsv.fr
Guide de diagnostic : http://ephytia.inra.fr/fr/P/149/Veg_Di_g