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Maladies des plantes : la Cima fait le point sur les évolutions

LAUDINE ALEM, CHARLOTTE ARBONA, ALEXIA BARRIER, SAFA BEN KRIMA, ALEXANDRE BENOIST, LAURA BOISSINOT, AURÉLINE BURC, SANDRINE CHAILLOUT, MARGUERITE CHARTOIS, MARIE CORDONNIER, JEANNE DELOR, MARION GENIAUX, ANNE-MARIE JOLIET, CLAIRE-MARIE MAILHAN, JULIEN MAR - Phytoma - n°691 - février 2016 - page 35

Synthèse des communications de la 11e Conférence internationale sur les maladies des plantes de l'AFPP, à Tours, du 7 au 9 décembre 2015.
Le 7 décembre 2015, séquence « Diagnostic-biovigilance » de la première session de la Cima. Au pupitre : Renaud Ioos (Anses). Assise :Valérie Grimault (Geves). Photo : M. Decoin

Le 7 décembre 2015, séquence « Diagnostic-biovigilance » de la première session de la Cima. Au pupitre : Renaud Ioos (Anses). Assise :Valérie Grimault (Geves). Photo : M. Decoin

À la tribune, De gauche à droite. Séquence « impact sanitaire » de la première session, le 7 décembre : Isabelle Oswald (Inra), Béatrice Orlando (Arvalis) et Emmanuelle Gourdain (Arvalis).

À la tribune, De gauche à droite. Séquence « impact sanitaire » de la première session, le 7 décembre : Isabelle Oswald (Inra), Béatrice Orlando (Arvalis) et Emmanuelle Gourdain (Arvalis).

À la tribune, Séquence « résistance aux fongicides » de la sous-session portant sur les résistances des maladies des grandes cultures, le 8 décembre :  Anne-Sophie Walker (Inra) et Annette Penaud (Terres Inovia).

À la tribune, Séquence « résistance aux fongicides » de la sous-session portant sur les résistances des maladies des grandes cultures, le 8 décembre : Anne-Sophie Walker (Inra) et Annette Penaud (Terres Inovia).

Le 9 décembre, séquence biocontrôle. Au pupitre Jérôme Muchembled (Isa Lille). Assis, Mireille Piron (Staphyt) et Marc Bardin (Inra).

Le 9 décembre, séquence biocontrôle. Au pupitre Jérôme Muchembled (Isa Lille). Assis, Mireille Piron (Staphyt) et Marc Bardin (Inra).

Le 9 décembre, Daniel Caron, président de la commission Maladies de l'AFPP, clôture la Cima.

Le 9 décembre, Daniel Caron, président de la commission Maladies de l'AFPP, clôture la Cima.

Trois sessions, une par jour, c'est ainsi qu'était construit le programme de la 11e Cima, conférence internationale sur les maladies des plantes, qui a réuni 380 participants au centre des congrès Vinci de Tours en décembre dernier.

Connaître les bioagresseurs fongiques et évaluer les dégâts

Connaître pour protéger

La première session traitait des bioagresseurs : évolution des connaissances à leur sujet et des outils nécessaires à cette connaissance.

En effet, un des moyens pour répondre au défi de l'agriculture moderne qu'est la réduction de son impact sur l'environnement en maintenant une production en quantité et qualité suffisante est d'optimiser les interventions phytosanitaires.

Qu'il s'agisse d'appliquer des produits conventionnels ou biologiques ou d'utiliser d'autres techniques, il faut choisir le moment opportun, le produit ou la technique adéquate, les doses adaptées... Pour cela, il est utile de connaître les bioagresseurs et de prévoir leurs dégâts :

- connaissance de la biologie et de la dynamique de leurs populations ;

- amélioration des techniques de diagnostic ;

- prédiction des épidémies et des dégâts occasionnés.

Biologie des populations et épidémies

Quelles connaissances sont nécessaires pour choisir les variétés cultivées ? Quelles informations apportent les modèles mathématiques et statistiques ?

Les connaissances recherchées sur l'agent pathogène sont : ses mécanismes d'entrée dans la plante, son épidémiologie, sa transmission (Gombert et al.), sa conservation (Gombert et al. et Bamme et al.) et son mode de reproduction (Bamme et al.).

Dans le cas de maladies à complexe d'espèces, on cherche à comprendre les proportions, interactions et distribution de ces espèces (Valade et al.). Enfin, la variabilité des races d'agents pathogènes, leur distribution sur le territoire (Merzoug et al.) et leur spécificité d'hôte (Valade et al.) sont étudiées.

D'autre part, le stade et les organes sensibles de la culture sont identifiés (Gombert et al.) ainsi que la nature et les mécanismes de résistance variétale (Pope ; Valade et al., Pierre et al., Merzoug et al.) et la sensibilité des espèces et variétés aux races d'agents pathogènes (Valade et al., Merzoug et al.).

La construction de modèles mathématiques et statistiques à la base d'outils d'aide à la décision (OAD) permet de modéliser les épidémies et prédire l'ampleur et la vitesse de développement de la maladie (prévision du risque). Ces OAD peuvent, par exemple, proposer le traitement optimal en fonction du stade de la culture et des données climatiques (Gombert et al.).

Un suivi des proportions des différents types de résistance variétale déployés peut aider à leur gestion (Pope). Le choix des variétés repose sur la connaissance de leurs profils de résistance aux races et souches d'agents pathogènes (Gombert et al.).

Par ailleurs, l'association des résistances qualitatives et quantitatives avec des QTL(1) à effets diversifiés permet de combiner des modes d'action différents. Le raisonnement dans le temps et l'espace (parcelles, régions) de ces associations de résistance donne la possibilité de maintenir un bas niveau d'inoculum.

La lutte contre les maladies utilise ainsi la connaissance de la biologie de l'agent pathogène d'une part, et la modélisation de son interaction avec la culture d'autre part. Cela permet de gérer de façon adaptée le choix des variétés, la répartition des résistances à l'échelle parcellaire et régionale, le choix du traitement et la date optimale d'application des traitements

Diagnostic-biovigilance

Comment optimiser le diagnostic afin qu'il soit efficace pour la gestion des maladies ? Comment améliorer la prédiction des risques d'apparition de ces maladies ? Quels OAD (outils d'aide à la décision) existent ? Quelles sont les pistes d'amélioration ? Face à l'évolution rapide de la diversité des agents pathogènes et à l'augmentation des échanges de végétaux, l'établissement d'un diagnostic rapide, fiable et précis est une nécessité. Identifier les agents pathogènes est indispensable pour prendre des décisions pertinentes d'application de méthodes de lutte adaptées.

De nouvelles techniques de diagnostic se développent : PCR(2), code-barres génétique (barcoding), spectrométrie de masse MaldiTof, séquençage haut débit (HTS, NGS(3)). Mais l'interprétation d'un taxonomiste et d'un pathologiste reste indispensable (Ioos).

La justesse et la précocité du diagnostic sont déterminantes pour l'efficacité d'intervention sur l'agent pathogène et, le plus souvent, sur la limitation des pertes de rendement de la culture concernée (Durante et al.).

Bien connaître l'évolution des agents phytopathogènes suppose la mise en place de réseaux d'observation au champ. Les données qu'ils collectent doivent être valorisées afin de faciliter leur diffusion et d'en extraire des connaissances sur les maladies au cas par cas (Penaud ; Paumier et al.).

Les instituts techniques innovent pour proposer des outils facilitant le traitement des données (Brun et al.) : modélisation d'un système agent pathogène/plante-hôte ou encore automatisation de la chaîne d'analyse de base de données.

Ces informations servent de support au diagnostic précoce et à la création d'OAD (Chatot et al.). L'objectif est que ces OAD soient faciles d'accès pour les producteurs et que les interventions sur la culture s'inscrivent dans le cadre d'une lutte de précision (Gouache et al.).

Impact sanitaire : les mycotoxines

Qu'est-ce que les toxines fongiques, quel impact ont-elles sur la production agricole et que risque-t-on en les consommant ? Quels facteurs agronomiques influencent leur production?

Les bioagresseurs fongiques sont nuisibles en termes de quantité et de qualité des récoltes. Ils peuvent avoir un impact sanitaire sur les aliments notamment par la production de mycotoxines, composés issus du métabolisme secondaire.

Parmi les mycotoxines sécrétées par les champignons des genres Alternaria, Fusarium, Aspergillus et Penicillium, les aflatoxines, l'ochratoxine A, la zéaralénone, le déoxynivalénol (DON) et les fumonisines sont soumises à règlementation européenne en alimentation humaine. Elles peuvent contaminer de nombreuses denrées alimentaires (céréales, fruits divers, vins, etc.) et des fourrages. De natures chimiques variées, elles engendrent des effets sur divers organes du corps humain (Oswald).

L'aflatoxine, classée comme un puissant cancérogène naturel, est la mycotoxine la plus étudiée (Oswald). Concernant la production du DON, les modèles agronomiques ne prévoient pas de hausse liée au réchauffement climatique (Gourdain et al.)

Les co-contaminations issues d'interactions de mycotoxines entre elles ou avec d'autres contaminants sont fréquentes et problématiques pour la sécurité alimentaire (Oswald).

Les alcaloïdes produits sur céréales par le champignon Claviceps purpurea (ergot du seigle) sont responsables d'intoxication humaines et animales (Orlando et al.). Douze de ces alcaloïdes sont sous surveillance, notamment l'ergotamine, l'ergosine et l'ergocritine (Orlando et al.).

Certaines pratiques culturales ont été identifiées comme favorisant la production d'alcaloïdes (Orlando et al.). Le choix de l'espèce cultivée est le facteur le plus influent (le seigle étant la plus sensible), suivi de la présence d'adventices graminées, du précédent cultural et enfin du travail du sol. La connaissance des causes permet d'optimiser les moyens de gestion de l'ergot (Orlando et al.).

Favoriser la durabilité des moyens de lutte

Résistance aux fongicides, contournement de résistances variétales

Depuis les années 1970, le recours fréquent aux fongicides et l'absence de stratégies spatio-temporelles dans l'usage des variétés résistantes ont conduit à augmenter la pression de sélection sur les agents pathogènes.

De plus, le contexte réglementaire européen a entraîné une réduction du nombre de substances actives sur le marché. Le but était de limiter leurs impacts non intentionnels sur la santé humaine et sur l'environnement mais, ce faisant, la diversité des solutions fongicides a diminué, ce qui augmente les risques de sélection de résistance des bioagresseurs.

Les solutions futures doivent donc répondre à une double exigence : d'une part limiter à la fois les contournements des résistances variétales (pour conserver l'efficacité des variétés) et les résistances aux fongicides (pour conserver l'efficacité des produits), d'autre part répondre à des exigences environnementales toujours plus fortes.

Il est primordial de surveiller les résistances aux fongicides et les contournements de résistance variétale, et de caractériser les mécanismes mis en jeu pour promouvoir des stratégies de lutte durables.

Actionner le levier variétal pour faire baisser les pressions de maladies

Quels sont les principes de la sélection variétale pour la protection contre les maladies fongiques ? Comment en faire un levier d'action fiable et durable ? Comment articuler manipulations en laboratoire et diagnostic de plein champ ? Face à ces questions, J. Stragliati (Limagrain Europe), M. Leflon (Terres Inovia) et M.H. Bernicot (Geves) ont apporté des éléments de réflexion.

Alors que la demande mondiale en produits végétaux s'accroît de front avec la volonté de préserver les ressources naturelles, l'amélioration variétale peut répondre à l'objectif de maximiser les rendements en intégrant les composantes sanitaire et environnementale aux itinéraires techniques.

Vis-à-vis d'un agent pathogène une variété peut être :

- totalement résistante (résistance qualitative mono ou oligogénique) ; la résistance est alors due à un ou deux gènes de résistance majeurs (R) ;

- partiellement résistante (résistance quantitative plurigénique) ; la résistance est liée à des QTL.

Différentes méthodes ont été mises au point afin d'obtenir des blés résistants : parents dits « Elite », recours à des haploïdes doublés, phénotypage au champ (recherche de la réponse hypersensible), obtention de blés synthétiques.

L'amélioration génétique peut permettre de diminuer significativement l'usage de fongicides en Europe. Mais avec quelle durabilité ? De nombreuses études en plein champ suggèrent que les résistances quantitatives, plus complexes à obtenir, sont plus durables que les résistances totales souvent contournées en peu d'années, c'est le cas de la résistance Rlm7 au phoma chez le colza.

Mais, souligne J. Stragliati, une résistance totale peut s'avérer efficace et durable sur des populations de pathogènes stables dans l'espace et le temps. Un travail à l'échelle de la parcelle (associations de plusieurs variétés, rotations...) peut être un complément efficace pour la gestion des virulences.

La séquence s'achève par une question : la résistance variétale, à quel niveau et quel prix pour la plante ? auxquelles d'autres aussi pertinentes s'ajouteront : comment conserver et affiner ces résistances en protégeant d'autres caractères phénotypiques ? Comment choisir la stratégie optimale en fonction du pathogène ? Ces interrogations montrent que les expertises des sélectionneurs et des pathologistes ont sans doute de beaux jours devant elles.

La session « poster » a fourni des compléments sur les techniques de phénotypage employées (imageries réelle et multispectrale) afin de détecter rapidement et efficacement des variétés de blé résistantes à des maladies fongiques telles que la fusariose.

Connaître et gérer la résistance aux fongicides

À la suite des applications répétées de fongicides, différents mécanismes moléculaires de résistance aux fongicides peuvent se manifester : mutation de la cible, surexpression de la cible, modification du transport... (Couleaud et al.). Actuellement, deux mécanismes émergent : résistances multidrogues (plusieurs phénotypes, phénomène qualitatif) et accumulation progressive de résistances quantitatives.

Les mécanismes et niveaux de résistance diffèrent selon les cultures et régions. Une fois les niveaux de résistance déterminés, il s'agit d'évaluer leur dispersion géographique et la relier avec le nombre et la nature des traitements.

Comment ralentir la sélection des résistances ? Il faut diversifier les moyens de lutte :

- dans le temps ; alternance pour « tuer les descendants et parents » avec un mode d'action différent ;

- dans l'espace ; mosaïque de modes d'action ;

- en mélangeant les fongicides pour « tuer un individu plusieurs fois ».

Mais également :

- préférer des variétés peu sensibles aux maladies ;

- diversifier les variétés d'une année à l'autre ;

- associer les pratiques culturales qui permettent de limiter le risque agents pathogènes.

Optimiser les stratégies de lutte en s'appuyant sur les OAD

Comment les OAD et les outils numériques répondront-ils demain aux besoins de l'agriculture ?

Celle-ci doit explorer et valoriser les formidables perspectives qu'offrent les technologies de la révolution numérique. Cela passe par des applications (GPS, drones, systèmes embarqués, capteurs, images satellites, robots, etc.) intégrées à des OAD.

Cependant, si demain capter et récolter de grandes quantités de données de tous types sera aisé, il faut réfléchir à la valorisation de ces informations.

C'est ici que les OAD entrent en jeu, et ils restent à développer. Ils doivent répondre à un objectif d'amélioration des performances (économique, environnementale, sociale) au service des producteurs, donc être pertinents, utilisables et accessibles. Mais sont-ils efficaces pour améliorer la gestion des bioagresseurs et limiter les risques environnementaux ? La présentation introductive a mis en évidence l'essor et l'intérêt des nouvelles technologies pour la production et la recherche agricole. L'accent a été mis sur la valorisation des données obtenues afin d'améliorer le conseil agricole et la gestion phytosanitaire (Regnault-Roger et al.).

Le deuxième exposé a présenté l'intérêt d'un OAD pour améliorer le conseil de gestion de la tavelure du pommier. Après deux ans d'essais, les conseils ont été améliorés en augmentant le seuil d'intervention pour le premier traitement (Curti et Charles).

Le troisième exposé a mis en avant un site internet permettant aux producteurs de gérer le risque de mildiou du tournesol en choisissant une variété adaptée au contexte pédoclimatique et aux antécédents culturaux de la parcelle (Mestries et Penaud).

Les communications affichées présentaient soit des résultats visant à l'amélioration des conseils, soit des outils ou modèles permettant indirectement l'individualisation des conseils aux agriculteurs.

Ces travaux montrent la nécessité d'interactions entre acteurs. La recherche fondamentale et appliquée est indispensable pour approfondir la connaissance des mécanismes biologiques nécessaire à l'élaboration de modèles et OAD pertinents. Les instituts techniques valident ces outils sur le terrain.

Proposer de nouveaux outils et concepts en protection des plantes

Le cadre réglementaire évolue, contraignant la recherche publique et privée à proposer des outils et concepts innovants. Pour répondre aux enjeux d'une agriculture durable, les outils de la protection des plantes doivent présenter certaines qualités : durabilité de l'efficacité vis-à-vis du bioagresseur, innocuité envers l'homme et l'environnement, sélectivité vis-à-vis des organismes non-cibles.

Le défi est donc de trouver de nouvelles molécules innovantes. Les produits de biocontrôle pourraient aussi correspondre à ces attentes ; afin d'encourager la recherche et l'innovation dans ce sens, une simplification des procédures de leurs autorisations de mise sur le marché (AMM) est en cours.

Évolutions réglementaires

Quelles sont les dispositions réglementaires spécifiques aux produits de biocontrôle ? Comment le nouveau dispositif de gestion des AMM permettra-t-il de simplifier les procédures ? Comment gérer l'émergence d'organismes nuisibles ? La réglementation doit évoluer pour favoriser les pratiques innovantes respectueuses de l'environnement. Face à cet enjeu, la réglementation européenne encourage les solutions non chimiques et limite le recours aux produits phytosanitaires.

En France, le MAAF(4) a engagé en 2015 le plan Écophyto 2 visant à réduire de moitié l'usage des produits phytosanitaires d'ici 2025.

Il est en cohérence avec la LAAAF(5) de 2014. Cette loi définit les méthodes alternatives dont le biocontrôle. Elle encourage l'évolution des pratiques en prévoyant des allégements réglementaires pour les produits de biocontrôle : taxes minorées et procédures accélérées pour obtenir des AMM (Molin et Di Bari).

Par ailleurs, elle a transféré la fonction de délivrance des AMM à l'Anses (de Guenin). Cette mission s'ajoute à celles d'évaluation des produits phyto et matières fertilisantes en vue des AMM, de phytopharmacovigilance (suivi des produits autorisés) et d'inspection (contrôle de l'import et des contrefaçons).

L'Anses travaille aussi avec le MAAF afin de prévenir et gérer les bioagresseurs émergents (Auricoste et al.). Dans ce contexte, de nouvelles molécules et formulations sont proposées par les entreprises phytosanitaires et les laboratoires de recherche.

Nouvelles molécules et formulations

Les nouveaux produits phytosanitaires doivent répondre aux exigences d'une agriculture durable au plan social, environnemental et économique.

Les produits disponibles sur le marché présentent une faible diversité de modes d'action. Les fabricants en recherchent de nouveaux. C'est le cas de Dupont de Nemours avec la molécule oxathiapiproline, présentée sous le nom de marque ZorvecTM comme première représentante d'une nouvelle classe de fongicides (Perotin et al.).

Cependant, le nombre d'études demandées pour l'AMM (écotoxicité, toxicologie, sur les molécules mais aussi leurs produits de dégradation) a fortement augmenté. Ceci contribue à allonger le délai préalable à la mise sur le marché d'un produit (de 10 à 12 ans). Les études portent aussi sur l'impact des produits sur l'environnement, peu présenté lors des communications orales.

Biocontrôle et méthodes alternatives

Que sont les agents de biocontrôle, leurs modes d'action et facteurs d'efficacité ? Peut-on détecter l'activation des mécanismes de défense ?

Selon la législation, ces agents se répartissent en quatre catégories : micro-organismes, macro-organismes, médiateurs chimiques et substances naturelles d'origine biologique (végétale, animale ou microbienne) ou minérale.

Malgré la facilitation des AMM de ces produits, il reste des freins à leur déploiement : manque d'efficacité en plein champ et/ou absence de protocoles standardisés pour mesurer l'efficacité. L'Inra est un des acteurs qui cherchent à lever ces freins en étudiant les facteurs à l'origine de la perte d'efficacité lors du passage du laboratoire vers la parcelle (Bardin).

D'abord, les variations de conditions environnementales (physiques, biochimiques et microbiennes) influent sur la viabilité des micro-organismes et leur efficacité. Des outils de modélisation (OAD) prenant en compte ces facteurs aident à mieux utiliser ces agents. Ensuite, les caractéristiques intrinsèques de l'agent pathogène et de l'agent de biocontrôle (mode d'action, tolérance au stress) sont aussi responsables de pertes d'efficacité au champ.

Par ailleurs, l'efficacité des stimulateurs de défense des plantes (SDP) et des huiles essentielles est difficile à prouver. Staphyt propose les tests standardisés Gustave et Elicitest, utilisés respectivement en laboratoire et sur le terrain, de mise en évidence de l'activation des défenses de la plante suite à l'application d'un SDP (Verly et al.). Des essais normalisés réalisés à l'ISA Lille montrent un effet fongicide de l'huile essentielle de girofle du même niveau que celui du sulfate de cuivre (Muchembled et al).

(1) QTL = Quantitative Trait Loci = locus de caractères quantitatifs = région du chromosome regroupant plusieurs gènes à effet quantitatif. (2) PCR = Polymerase chain reaction = réaction de polymérisation en chaîne de l'ADN. Elle permet de l'amplifier pour le détecter et l'identifier même s'il est en faible quantité. (3) HTS = hight-throughput screening = criblage (ou tri) à haut débit (ou haute capacité de traitement). NGS = new generation sequencing (souvent écrit new generation ADN sequencing) = (techniques de) nouvelle génération pour le séquençage (de l'ADN). (4) MAAF = ministère de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt. (5) LAAAF = Loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.

1 - Diagnostic d'une maladie du lin

Nous avons choisi comme poster le plus représentatif de la première session celui de D. Paumier, G. Gazeau, C. Pierrepack et R. Valade, intitulé « Développement d'une méthode de PCR en temps réel afin de détecter et de quantifier Verticillium dahliae dans le sol ». Ce travail est particulièrement intéressant car il tente d'apporter une solution à un verrou technique de la production de lin en France.

Plusieurs notions clés de la session y sont abordées :

- connaissance du bioagresseur, notamment son cycle de développement (symptômes tardifs, conservation dans le sol) et son génome (amorces et sondes, similitudes avec d'autres espèces de Verticillium) ;

- importance d'un diagnostic précoce et spécifique pour l'évaluation en amont du risque.

Les résultats montrent que la méthode est spécifique et reproductible. L'utilisation au champ n'est pas encore réalisable à grande échelle, mais les résultats sont prometteurs.

La suite du travail consistera à évaluer l'utilité et la mise en oeuvre de la méthode par préconisation en fonction du risque infectieux des sols.

Nous avons trouvé ce poster bien construit, ses rubriques lisibles, et donc sa lecture globale facile.

2 - La résistance variétale du blé tendre

À propos de durabilité des outils, le poster le plus représentatif est celui de S. Lefevre, M. Pourcelot, P. Beriot et D. Tailliez-Lefebvre, intitulé « Valoriser la résistance variétale aux maladies foliaires en apportant un conseil parcellaire : exemple du blé tendre ».

C'est la combinaison de deux leviers, conseil technique et utilisation d'OAD, qui permet de réduire l'usage des fongicides sans compromettre la production ni la rentabilité.

Preuve est faite : l'utilisation par les agriculteurs d'OAD adaptés est un levier efficace pour relever l'enjeu de réduction d'usage des produits phytosanitaires promu par le plan Écophyto. Le cas d'étude est particulièrement intéressant vu l'actualité du sujet.

Ce poster est construit de façon très lisible : mise en forme attractive, aérée et colorée, avec des couleurs vives accrochant le regard. Des figures claires et adaptées permettent une meilleure compréhension du sujet.

3 - Un nouveau biofongicide antibotrytis

Nous avons retenu le poster de Sumi Agro (J. Maries et J.-L. Kleinhans) sur le 3AEY. Ce produit de biocontrôle repose sur trois substances connues pour être produites par des végétaux.

Une de ses innovations repose sur l'encapsidation des substances actives qui les rend moins volatiles. Elles répondent aux enjeux actuels de la protection des plantes d'un point de vue efficacité, innocuité et spécificité de la cible. La flexibilité proposée pour les modes d'application permet de l'intégrer ou non à un programme de traitement.

Il ne se place pas comme un produit révolutionnaire mais apporte des solutions alternatives et complémentaires aux traitements conventionnels.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - Du 7 au 9 décembre 2015, la 11e Cima de l'AFPP a permis de faire le point des connaissances sur les maladies des plantes et la protection contre elles.

BIOAGRESSEURS - La première session a traité de connaissance des bioagresseurs : biologie, épidémiologie, diagnostic, biovigilance, impact sanitaire (mycotoxines dont les alcaloïdes).

DURABILITÉ - La deuxième journée a porté sur le thème de la durabilité : celle de la résistance variétale et celle des fongicides face à la résistance des agents pathogènes, avec l'usage des OAD outils d'aide à la décision.

INNOVATION - La troisième session a évoqué les nouveautés du côté de la réglementation et les innovations en matière de fongicides et de biocontrôle.

MOTS-CLÉS - Cima (Conférence internationale sur les maladies des plantes), AFPP (Association française de protection des plantes), bioagresseurs, durabilité, innovation.

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEURS : SESSION 1. L. ALEM, C. ARBONA, A. BARRIER, S. BEN KRIMA, A. BENOIST, L. BOISSINOT, A. BURC, S. CHAILLOUT ET M. CHARTOIS.

SESSION 2. M. CORDONNIER, J. DELOR, M. GENIAUX, A-M. JOLIET, C-M. MAILHAN, J. MARIES, M. KANTE, I. OHOUSSOU ET H. FERIEL SAHKI.

SESSION 3. G. CABALLERO, R. GARBOUJ, M. MICHEL, A. MOREAU, M. OLLIVIER, B. POLTURAT, E. POSTIC, J. SCHAFHAUSER ET M. VINCENT.

Ces 27 auteurs sont tous étudiants option PPE (protection des plantes et environnement (AgroCampus Ouest, MontpellierSupAgro, AgroParisTech).

CONTACTS : afpp@afpp.net

florence.val@agrocampus-ouest.fr

LIEN UTILE : www.afpp.net

BIBLIOGRAPHIE : la bibliographie de cet article est incluse dans les annales de la 11e Conférence internationale sur les maladies des plantes, à Tours, du 7 au 9 décembre 2015. Lien et mail ci-dessus.

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