Retour

imprimer l'article Imprimer

gérer

Vigne, mildiou, oïdium, résistances, il y a du nouveau

D'après la « Note nationale gestion de la résistance du mildiou et de l'oïdium de la vigne en 2011 »* - Phytoma - n°643 - avril 2011 - page 10

En 2010, les résistances à certains fongicides ont évolué et de nouveaux produits sont arrivés : les conseils pour 2011 en tiennent compte

Nous vous présentons ici de larges extraits de la « Note nationale gestion de la résistance du mildiou et de l'oïdium de la vigne en 2011 ». Elle décrit la situation de la résistance des agents de ces deux maladies vis-à-vis des fongicides dans le vignoble français et précise les conditions d'emploi des produits concernés. Elle doit aider les viticulteurs et leurs prescripteurs à gérer les situations de résistance générées par l'utilisation répétée de certaines substances actives et permettre ainsi de maintenir l'efficacité de la protection dans un objectif de réduction des traitements. En 2010, il y a eu du nouveau du côté des résistances, certaines ayant évolué, et aussi du côté des produits avec des nouveautés arrivant sur le marché. De ce fait, les préconisations pour 2011 évoluent elles aussi.

L'approche raisonnée de la protection du vignoble, laquelle ajuste chaque année la stratégie de protection aux risques, doit prendre en compte la gestion des phénomènes de résistance.

Cette gestion repose en particulier sur la limitation annuelle des applications des fongicides d'un même groupe chimique et l'alternance sur la campagne des fongicides appartenant à des groupes différents.

Ces mesures ont pour objectif d'une part de prévenir ou contenir les phénomènes de résistance et, d'autre part, de garantir l'efficacité des spécialités déjà touchées par la résistance. Le but est d'éviter les échecs de traitement obligeant à re-traiter « en rattrapage » sous peine de perte de quantité et de qualité du vin. Cette gestion raisonnée contribue ainsi à l'objectif de limitation des traitements phytosanitaires du plan Ecophyto 2018.

Un plan de surveillance de la résistance aux produits phytosanitaires est organisé chaque année par la DGAl-SDQPV.

Ses résultats, présentés ici, permettent d'adapter les préconisations.

Les analyses sont réalisées par le laboratoire de l'Unité de Résistance aux produits phytosanitaires de l'Anses de Lyon en collaboration avec l'INRA. Certaines données ont été communiquées par des sociétés phytosanitaires.

Mildiou, trois groupes suivis trois substances introduites

En 2010, le plan de surveillance de la résistance a concerné trois groupes d'anti-mildiou : les CAA (regroupant diméthomorphe, iprovalicarbe, benthiavalicarbe, mandipropamid et valifénalate), les benzamides (zoxamide) et les QiI (cyazofamide), nouveau groupe chimique utilisé pour la première fois en 2010.

CAA, la résistance s'incruste

En 2009, la situation de la résistance aux CAA s'était assez fortement dégradée et les sites résistants étaient devenus majoritaires dans la plupart des vignobles. En 2010, avec une pression du mildiou généralement faible à moyenne accompagnée d'une utilisation moindre des fongicides à base de CAA, la situation de la résistance vis-à-vis de ce groupe ne s'est pas améliorée. La résistance reste installée dans tous les vignobles. Au niveau national (71 populations testées), la fréquence des sites sensibles est à peine supérieure à 10 % (Tableau 1).

Dans ces conditions, la restriction à une application par an, éventuellement deux au maximum non consécutives, est souhaitable. De plus, les spécialités à base de CAA doivent être utilisées préventivement et ne pas être appliquées en situation d'attaques déclarées (Tableau 1).

Ces recommandations doivent permettre de sécuriser l'efficacité de ces spécialités dans toutes les situations ; les résultats des monitorings des années prochaines diront si elles suffisent pour faire reculer la résistance.

QiI, prudence en 2011

En 2010, la cyazofamide était le seul représentant de la famille des QiI (Quinone inside Inhibitors). La sensibilité de 59 populations de mildiou a été testée vis-à-vis de cette substance active. Dans 4 populations provenant de 4 vignobles différents, la présence de souches résistantes a été identifiée (Tableau 1). Cette présence devra être confirmée.

L'expression au vignoble de la résistance aux QiI après seulement un an d'emploi de cette famille est inquiétante et impose une attitude de prudence pour prévenir l'extension du phénomène. En l'attente de résultats en 2011 et connaissant le risque potentiellement élevé du développement de la résistance inhérent à cette famille et à ce champignon, il est conseillé pour 2011 de ne pas dépasser 2 applications annuelles, de préférence non consécutives.

Benzamides, aucune résistance en 2010

Enfin, aucune résistance à la zoxamide n'a été décelée en 2010 dans le vignoble français, sur les 33 populations testées vis-à-vis de cette benzamide (Tableau 1).

Pour toutes les familles affectées par la résistance, il faudra intensifier les études pour s'assurer que les substances actives concernées participent encore à l'efficacité des spécialités qui les contiennent. Considérant les orientations du plan écophyto 2018, cette connaissance s'avère indispensable.

Trois substances nouvelles en 2010

Courant 2010, trois nouvelles substances actives ont obtenu une AMM(1).

Le fluopicolide appartient à une nouvelle famille chimique (les acylpicolides) pour laquelle aucune résistance spécifique n'est connue à ce jour (Tableau 1).

Il est associé au fosétyl Al. La notification d'autorisation de mise sur le marché précise de ne pas dépasser 1 application tous les 2 ans. Même si cette restriction n'est pas liée à la résistance, son respect devrait prévenir efficacement le développement éventuel de ce phénomène.

L'amétoctradine appartient à la famille chimique des pyrimidylamines. Elle est actuellement associée au métirame. Son mode d'action n'est pas totalement identifié, mais il pourrait s'apparenter à celui des QiI. Une résistance croisée positive avec la cyazofamide n'est donc pas à exclure.

Dans ces conditions, la restriction d'emploi à deux applications annuelles édictée plus haut s'applique globalement à toutes les spécialités contenant l'une ou l'autre de ces substances actives.

Enfin, la troisième molécule autorisée est le phosphonate de potassium. La notification d'autorisation limite son utilisation à 5 applications par an maximum.

Neuf groupes disponibles

Dans le tableau 1, les fongicides anti-mildiou sont classés par groupe chimique ne présentant pas de résistance croisée entre eux, au nombre actuellement de 9. Dans ces conditions, l'alternance des fongicides à modes d'action différents est une règle facile à appliquer.

Oïdium, deux familles suivies

En 2010, le plan de surveillance a porté sur deux familles de fongicides : les QoI (strobilurines = azoxystrobine, krésoxim-méthyl, pyraclostrobine et trifloxystrobine) et les IDM (IBS du groupe I, voir tableau 2).

QoI, évolution

La résistance aux QoI, détectée pour la première fois en France en 2008 dans le vignoble d'Armagnac, avait progressé en 2009 mais était restée cantonnée à cette zone viticole. En 2010, la situation s'est détériorée puisque des populations contenant des souches résistantes ont été découvertes dans sept autres régions viticoles.

Cependant, la résistance n'est pas généralisée. Sur les 54 parcelles échantillonnées, seules 12 populations (22 %) contiennent des souches résistantes (présentant la mutation G143A) ; cependant, dans 1 cas sur 2, la fréquence de cette mutation est supérieure à 50 %.

IDM, 2010 confirme 2009

Le suivi de la résistance aux IDM a été réalisé sur 54 échantillons provenant de 10 régions. Les résultats de 2010 confirment ceux de 2009 ; ils montrent que 30 à 40 % des populations analysées contiennent des souches résistantes aux IDM (mutation Y136F).

Huit groupes disponibles

Dans le tableau 2, les fongicides anti-oïdium sont classés par groupe chimique ne présentant pas de résistance croisée entre eux, au nombre actuellement de 8(2).

Dans ces conditions, la pratique de l'alternance des fongicides à modes d'action différents est une règle facile à appliquer. En plus des restrictions propres à chaque famille chimique, l'utilisation de ces produits ne devrait pas dépasser 50 %, par groupe chimique et par saison, du nombre total d'applications anti-oïdium.

Face aux deux maladies, penser prophylaxie

Les conditions de réussite de la lutte chimique vis-à-vis de ces deux maladies sont d'autant plus favorables que sa mise en œuvre est accompagnée de mesures prophylactiques venant limiter le développement des champignons. Citons :

– maîtriser la vigueur des souches (choix du porte-greffe, fertilisation adaptée, enherbement, etc.),

– éviter la formation de mouillères en réalisant un drainage du sol (contre le mildiou),

– éliminer tous les rejets (pampres à la base des souches, plantules issues de la germination de pépins...) qui favorisent l'installation des foyers primaires de mildiou et participent au démarrage précoce de l'épidémie,

– aérer la zone des grappes (palissage, effeuillage, etc.),

– réaliser des rognages réguliers de la jeune végétation très sensible au mildiou.

En outre, tous ces travaux en vert, en permettant une meilleure pénétration de la pulvérisation, améliorent l'efficacité de la protection.

<p>* Voir l'encadré.</p> <p>(1) Autorisation de mise sur le marché de spécialité commerciale contenant la substance.</p> <p>(2) Sans compter l'existence d'un stimulateur des défenses naturelles (SDN).</p>

Groupe de travail pour une Note commune

 Photos : M. Doumergue

Photos : M. Doumergue

Cette note a été rédigée par un groupe de travail réunissant des représentants de la Direction générale de l'alimentation-Sous-direction de la qualité et de la protection des végétaux (DGAl-SdQPV), de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), de l'Institut national de la recherche agronomique (Inra), du Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC), de l'Institut français de la vigne et du vin (IFV) et des Chambres d'agriculture.

Les intertitres, le résumé et une partie du chapeau ci-contre sont de la rédaction de Phytoma. En revanche, le « texte courant » ainsi que les tableaux sont extraits sans modifi cation de la note telle que mise en ligne sur le site de l'AFPP : www.afpp.net

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

Résumé

La DGAl-SdQPV du MAAPRAT, l'Anses, l'INRA, le CIVC, l'IFV et les Chambres d'agriculture ont publié en 2011 une note commune : « Note nationale gestion de la résistance du mildiou et de l'oïdium de la vigne en 2011 ». Elle s'appuie sur le travail de 2010 :

– pour le mildiou, suivi des résistances aux CAA (qui persiste), aux QiI (qui apparaît) et aux benzamides (non décelée) ;

– pour l'oïdium, suivi des résistances aux QoI (qui progresse) et aux IDM (qui subsiste).

Les conseils pour 2011 tiennent compte de ces données et de l'arrivée de nouveaux produits anti-mildiou en 2010 (dont une nouvelle famille). Ils soulignent l'intérêt de la prophylaxie.

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :