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Symptômes de mildiou à Chypre, où cette maladie frappe surtout les parcelles irriguées. En France, où elle sévit partout, elle est visée par trois des produits sortis depuis deux ans. Plus quatre autres demain, peut-être. Photo : S. Duvauchelle
Panorama des nouveautés en matière de produits de protection de la pomme de terre depuis deux ans. Les fongicides (Tableau 1) figurent au premier plan, notamment contre le mildiou.
Nouveautés fongicides
Un inédit pour les plants
Le premier fongicide est un produit de traitement des plants. Proposé par Bayer, il vise à la fois la gale argentée et le rhizoctone brun, principales maladies « de qualité » des tubercules.
Son nom commence par Monceren : comme les autres spécialités de cette gamme, il contient du pencycuron. La substance était déjà autorisée sur les mêmes usages en traitement par poudrage (dans Monceren P) ou par pulvérisation ou trempage (Monceren L). Le nouveau produit se nomme Monceren Pro, « Pro » comme prothioconazole, sa seconde substance active. Celle-ci, déjà connue notamment sur céréales, était inédite sur pomme de terre.
Il s'agit d'un IBS (inhibiteur de la biosynthèse des stérols) comme l'imazalil, autorisé lui aussi pour le traitement des plants (voir « Pour en savoir plus », p. 18), mais c'est un triazole et non un imidazole. De toute façon, il représente un mode d'action différent de celui de son associé le pencycuron.
Extension pour le sol
Le deuxième produit est déjà connu dans la plaine : c'est l'Amistar de Syngenta, lancé en 1997 pour le traitement foliaire des céréales puis autorisé sur colza, maïs, pois, etc. Ce fongicide de la famille des strobilurines est désormais utilisable en traitement du sol dans la raie de plantation des pommes de terre contre les « champignons autres que les pythiacées »(1). À souligner : c'est le seul fongicide autorisé sur cet usage !
Certes, on pouvait déjà protéger les plants contre de tels champignons présents dans le sol en traitant les plants eux-mêmes – par exemple contre le rhizoctone et/ou la gale argentée. Mais il n'y avait pas de traitement du sol fongicide autorisé. L'usage, désormais, n'est plus orphelin.
Trois nouveaux contre le mildiou
Trois nouveaux fongicides visent, eux, le mildiou en traitements foliaires.
Le premier, Cymbal 45, est un produit de Belchim Crop Protection à base de cymoxanil. Cette substance, unique représentante de la famille des « amines, amides » et agissant au niveau des parois cellulaires, est elle aussi connue dans la plaine mais, jusqu'ici, associée à d'autres substances. Le nouveau produit est le seul en France à contenir du cymoxanil solo.
Du reste, Belchim le conseille en mélange avec une spécialité à action préventive. En précisant : « Le nouveau produit peut être associé, à n'importe quel moment de la saison, à la spécialité la plus adaptée en fonction du stade de la pomme de terre. »
Le second se nomme Emendo M. Ce produit de Crompton commercialisé par De Sangosse associe le mancozèbe au valifénalate, dit aussi valiphénal.
Le valifénalate est une nouvelle substance lancée sur pomme de terre et tomate, ainsi que sur vigne dans d'autres produits. Agissant sur les parois cellulaires des champignons, elle appartient à la famille des carboxylic acide amines comme le mandipropamide, autorisé aussi sur pommes de terre mais seul (dans Revus). Dans la nouvelle spécialité, le valifénalate est associé au mancozèbe qui est, on l'a vu, un multisite. C'est un atout pour la prévention des résistances de Phytophthora infestans, l'agent du mildiou. On sait qu'il évolue vite, voir l'article p. 20 !
Troisième substance inédite sur pomme de terre, la pyraclostrobine d'Optimo Tech et son jumeau Coach Plus, de BASF. Tous deux associent cette strobilurine au diméthomorphe. Ce dernier est autorisé sur pomme de terre contre le mildiou depuis une quinzaine d'années (ex. : Acrobat M DG, lui aussi de BASF et où il est associé au mancozèbe).
Le diméthomorphe agit sur la formation des parois cellulaires et la pyraclostrobine sur la chaîne respiratoire : deux modes d'action différents, donc.
Face à l'alternariose
Ces deux produits jumeaux sont également autorisés contre l'alternariose.
Due principalement à Alternaria solani, c'est devenu la deuxième maladie de la pomme de terre en cours de culture. Mais il y a peu de substances actives disponibles contre elle.
La première autorisée avait été le mancozèbe, dans les années 90. La zoxamide, une benzamide autorisée depuis fin 2002(2) sur mildiou associée au mancozèbe dans Adério, l'a été sur alternariose en octobre 2005(3). Il n'y avait donc que deux substances autorisées jusqu'en 2011 ! Sachant que la zoxamide agit sur les divisions cellulaires, le diméthomorphe et la pyraclostrobine amènent donc deux nouveaux modes d'action contre l'alternariose. En même temps, quatrième nouveauté en matière de protection du feuillage, le déjà cité Acrobat M DG a eu une extension d'emploi contre l'alternariose. Rappelons qu'il associe le diméthomorphe, donc, et le multisite mancozèbe.
Des produits futurs ?
Il faut signaler les AMM (autorisations de mise sur le marché) de deux autres fongicides de BASF qui ne semblent pas encore disponibles actuellement.
Nommés Zampro MZ et Zampro Max, tous deux, quand ils seront lancés, amèneront l'amétoctradine dans la gamme antimildiou. Cette substance affecte la chaîne respiratoire comme la pyraclostrobine, mais sur un site d'action qui semble original.
Le premier produit l'associe au mancozèbe et est autorisé aussi contre l'alternariose. Le partenaire dans le second est le diméthomorphe et le produit n'est autorisé que sur mildiou, mais aussi bien sur melon et tomate que sur pomme de terre.
Enfin, à l'heure où est écrit cet article, deux autres antimildious pourraient être autorisés rapidement. Parmi les 25 produits dont la demande d'AMM a été mise en consultation publique le 27 novembre 2013, on trouve en effet Edipro et Kunshi. Le premier, d'Agriphar, est à base de propamocarbe HCl seul. Cette substance était déjà autorisée contre le mildiou de la pomme de terre mais associée au chlorothalonil. Le second, d'IS K Biosciences, associe le cymoxanil au fluazinam : une association inédite de substances connues.
Autres produits
Défanage
Et les autres nouveautés ? La liste est moins longue (Tableau 2).
Elle commence par un produit de Philagro. Le pyraflufen-éthyl, connu notamment sur vigne et verger associé au glyphosate, est autorisé en solo pour le défanage de la pomme de terre (et l'épamprage de la vigne) sous les noms de Sorcier et Guerrier.
Il amène une quatrième substance sur ce marché du défanage (voir à ce sujet p. 26). Même s'il a le même mode d'action que l'une des trois autres (la carfentrazone-éthyl), c'est un peu plus de diversité.
Désherbage
Il y a ensuite deux herbicides. Le premier est « multiplié par trois » : trois spécialités commerciales à n° d'AMM différents mais contenant un titrage identique de la même substance active, le propaquizafop. Cette substance est un « fop ». Elle partage le même mode d'action que trois autres substances autorisées sur pomme de terre : le « fop » quizalofop-éthyl et les « dims » cléthodime et cycloxydime. À prendre en compte pour gérer son désherbage.
Proposés par Makhteshim Agan France et déjà connus sur betterave, pois, colza, etc., les nouveaux produits se nomment Agil, Ambition et Clacson.
La troisième nouveauté pour le désherbage est Arcade de Syngenta. Elle associe pour la première fois le prosulfocarbe et la métribuzine. Ces deux substances déjà connues sur pomme de terre ont des modes d'action différents et complémentaires. On le sait, ce type de mélange a un intérêt vis-à-vis des résistances (voir p. 7).
Dorpyhore, premier UAB... et pas d'AMM contre les nématodes
Dernier produit, Success 4 de Dow AS a eu une extension d'emploi contre le doryphore. À base de spinosad, ce bio-insecticide était déjà autorisé sur de nombreuses cultures, fruitières et légumières notamment.
C'est le premier insecticide UAB (utilisable en agriculture biologique) autorisé contre doryphore sur pomme de terre. Attention, le produit est bien UAB, mais il n'est pas sur la liste Nodu vert biocontrôle telle que publiée fin 2013.
En revanche, concernant les nématodes, on n'a rien vu de nouveau sauf des dérogations pour 120 jours. Mais pas d'AMM...
<p>(1) Les pythiacées sont une famille d'oomycètes (lesquels ne sont plus classés comme des champignons !) regroupant les genres <i>Pythium</i> et <i>Phytophthora</i>.</p>
Tableau 1 : Autorisations de fongicides depuis deux ans sur la pomme de terre
Tableau 2 : Autres autorisations depuis deux ans sur la pomme de terre
