L'innovation en matière de préservation de l'environnement marque le pas au salon Intervitis de Stuttgart (Allemagne). Les constructeurs s'intéressent davantage à la sécurité des vignerons ou aux performances de leurs machines. Et c'est dans le secteur du marketing que l'on a découvert les idées les plus originales.
De deux choses l'une : soit la protection de l'environnement n'est plus la priorité des Allemands, soit ils estiment n'avoir plus de progrès à faire en la matière. On n'a rien vu de neuf sur ce sujet lors du dernier salon Intervitis. Les précédentes éditions avaient été l'occasion de découvrir des appareils surprenants : des tunnels de pulvérisation, d'où ne sort aucun embrun, ou ce pulvérisateur doté de cellules photoélectriques, qui repèrent la végétation et ordonnent la fermeture des buses lorsqu'il n'y a pas de feuillage en face d'elles. Cette fois, rien de plus, même pas des copies de ces matériels. Leurs inventeurs n'ont pas été suivis, preuve que les solutions qu'ils proposent ne suscitent pas un énorme intérêt.Rien à signaler, sinon une station d'épuration végétale. Le syndicat des vignerons allemands (DWV), organisateur du salon, ne l'a pas retenue dans son palmarès parce qu'il ne s'agit pas d'une nouveauté. De telles stations fonctionnent déjà en Allemagne, la première depuis 1974. Elles retraitent des effluents domestiques ou agroalimentaires. Les eaux usées sont déversées dans de grands bacs plantés de roseaux, dont les racines instaurent des conditions propices à une vie microbienne intense. Ce sont ces microbes qui dégradent la pollution. INFU (37249 Neu-Eichenberg) qui conçoit ces installations, s'est rendue à Stuttgart car elle cherche à se développer sur le marché viticole.Ero était également là. Cette société est connue pour ses releveuses. Ce ne sont pas ses seules fabrications. Elle s'était déplacée avec quantité de nouveautés dont la plupart ont été primées, comme sa prétailleuse pour vigne à long bois ou son avertisseur sonore, que l'on installe dans les cuves et qui hurle dès qu'il est recouvert de vin.La plus prometteuse de toutes pourrait être la machine à vendanger Grapeliner (médaille d'argent) qui relève encore du prototype. Elle élimine les feuilles en trois endroits. Au point le plus bas, on trouve un venturi qui souffle un important courant d'air à faible pression.Comme sur le nouveau système de Pellenc, les secoueurs sont actionnés par des vérins hydrauliques asservis par l'électronique. Ceci autorise une variété de réglages adaptés à chaque cépage. La tête de récolte se déplace à l'intérieur de la machine. On l'avance au maximum lorsqu'on peut récolter à vive allure ou lorsqu'on grimpe des pentes. On la recule lorsqu'on a affaire à un cépage qui perd très facilement ses baies ou lorsqu'on descend un coteau. Les quatre roues sont motrices. Chacune est actionnée par un moteur hydraulique indépendant des autres. Grâce au déplacement de la tête et à l'indépendance des roues, Ero annonce franchir jusqu'à 43 % de pente sans perte de récolte. De plus, cette nouvelle automotrice se déplace à 40 km/h sur route. Les Français devront patienter pour la voir de près : elle ne sera pas en vente chez nous avant deux ans, un délai que l'on peut mettre à profit pour faire des économies car elle coûtera au moins 300 000 DM.Plus primés que cette machine, un pulvérisateur de Holder et une remorque ont obtenu une médaille d'or. La remorque, fabriquée par Striegel (79341 Hecklingen), est un porte-conteneurs. Elle dépose puis récupère à la force d'un vérin des bennes à vendange ou des trémies à engrais. Comme les bennes sont posées au sol, on les remplit sans avoir à monter à l'échelle. Peter Schmidt, un vigneron mosellan (54439 Palzem), est venu présenter une autre remorque à vendange. Bricoleur averti, il l'a faite à ses heures perdues car il ne trouvait pas chaussure à son pied. Il la voulait basse pour qu'on la remplisse facilement : elle mesure 1,52 m de haut. Il l'a dotée d'un vérin qui la relève à 2,07 m de haut avant de la vider dans un conquet ou un pressoir. Le principe de levage, nous a-t-il expliqué, est plus sûr que celui couramment utilisé en France (ciseaux) et qui est interdit en Allemagne, où il est jugé trop dangereux.La sécurité, Avidor (1029 Villars-Sainte-Croix) l'a améliorée sur ses chenillettes. Le fabricant suisse a réussi le tour de force de leur attribuer une voie variable de 67 à 98 cm. Arrivé en bout de rang, on élargit la voie au maximum pour augmenter la stabilité de l'engin pendant que l'on fait demi-tour. Lorsqu'un outil est déporté, on élargit la voie du côté où il se trouve pour compenser le déport. On ne touche pas au côté opposé. Cette chenillette possède une réserve d'huile supérieure aux précédentes. Le refroidissement du circuit hydraulique en est amélioré.Côté matériel de cave, il n'y avait pas de grande découverte à y faire. Signalons simplement les deux médailles d'or : Strassburger (67593 Westhoffen), l'autre pour Helmut Becker GmbH (55239 Gau-Odernheim). La première est la plus justifiée. Elle récompense un filtre à plaque pour bourbes et lies, totalement étanche et donc très hygiénique. Les membranes sont cerclées d'un joint en caoutchouc, qui s'insère dans une gorge taillée dans les plaques et qui assure l'étanchéité lors de la fermeture de ce filtre alimenté par une pompe péristaltique. La seconde médaille ressemble à un encouragement tant le matériel primé paraît banal dans son principe : il s'agit d'un échangeur de chaleur destiné à réchauffer la vendange.Dans le domaine du marketing, Intervitis nous a donné l'occasion de faire des découvertes bien plus intéressantes. Ce n'est pourtant pas là que l'on attendait les Allemands. Ils sont davantage réputés pour leur rigueur que pour leur imagination. Mais ils n'en manquent pas. Souvent, l'inspiration est écologique. Les exposants font appel aux matériaux bruts ou d'apparence brute. Famulus (63450 Hanau) présentait un coffret pour une bouteille, fait d'une mince feuille de bois, rigide dans le sens des fibres et souple dans le sens opposé. On peut ainsi enrouler la feuille en tube. C'est la forme qu'a donnée Famulus à son coffret. On l'ouvre sur toute sa hauteur, comme un cartable, en dégrafant un rabat et non en levant un bouchon à l'une des deux extrémités. C'était l'une de ses nouveautés. Les autres sont des fuseaux pour recouvrir les bouteilles et des coffrets de section rectangulaire de couleur sable, ocre ou bleu nuit et faits dans du carton ondulé aux ondulations apparentes. Les fuseaux sont soit dans le même matériau, soit en paille de blé. Dans ce dernier cas, les brins sont reliés entre eux par une mince ficelle élastique pour que l'ensemble fasse corps avec la bouteille. L'effet est surprenant, très écolo tendance primitive.Tout n'était pas de ce goût-là. Plusieurs agences de marketing, spécialisées dans la promotion des propriétés viticoles, présentaient des services plus sophistiqués. Elles conçoivent des chartes graphiques, souvent très belles, qui introduisent une grande cohérence dans tous les documents (lettres, tarifs, fiches de dégustation, étiquettes...) émis par un producteur. Si leur client le désire, elles choisissent l'imprimeur et le déchargent de toute relation avec lui. Elles préparent également des stratégies commerciales incluant la participation à des salons ou des plans de communication avec les médias.Autre particularité : des sociétés spécialisées dans la conception et la fabrication de caveaux de dégustation. Elles dessinent des meubles originaux pour chacun de leurs clients. Souvent, le style est rustique mais le contemporain fait une percée. Les deux exposants présents sur le salon prétendaient avoir un carnet de commandes très rempli. Les vignerons allemands font actuellement de gros efforts pour retrouver leur clientèle. Ils améliorent leurs lieux d'accueil et portent une grande attention à la qualité et à l'originalité de la présentation de leurs bouteilles. Quand on voit la pauvreté de certains caveaux français, on se dit que ces architectes d'intérieurs auraient du travail chez nous.