Début décembre, les distributeurs préparaient des programmes sans Surflan, ni Mission/Katana. Le premier était indisponible. La vente du second était stoppée. Il fallait trouver d'autres herbicides pour le tiers des vignes désherbées en prélevée.
Coopératives et négociants n'ont jamais eu autant de mal à faire leurs programmes de désherbage. Début décembre, ils savaient qu'ils devaient composer sans le Surflan, le Dirimal et le Quintet, à moins d'avoir des stocks. Ils se préparaient aussi à se passer de Mission/Katana. Fin août, Zeneca Sopra en suspendait la vente, en attendant que les experts désignés par le tribunal de Châlons-en-Champagne se prononcent sur le rôle de ce produit dans la survenue de violents symptômes de chlorose en Champagne. Des jaunissements, apparus à Chablis et à Cognac, ont aussi été imputés au Mission/Katana. La décision de Zeneca Sopra n'a pas été du goût de tout le monde. Dans le Midi et à Bordeaux, on ne signale aucun incident. Les utilisateurs sont satisfaits, voire enchantés de l'herbicide. ' Une telle persistance et un spectre aussi complet, c'est une révolution ', constate-t-on, même au sein de la concurrence. Aussi, malgré les échos des incidents survenus ailleurs, de nombreux vignerons étaient prêts à repasser commande. A la faveur de cette demande insatisfaite, des négociations s'engageaient entre ISK, détenteur du flazasulfuron, la matière active de l'herbicide, et d'autres firmes. Plusieurs noms circulaient, mais aucune ne voulait confirmer.Par ailleurs, les experts judiciaires soulignaient qu'ils ne pourraient probablement pas conclure avant la fin de l'année. Début décembre, on ne savait pas si l'herbicide serait disponible, auprès de qui, ni en quelles quantités. S'il devait être remis en vente, la saison était trop avancée pour que sa distribution n'en soit pas affectée. De plus, les attaques avaient été trop violentes et convaincantes pour qu'il n'en résulte pas un minimum de méfiance à son égard. Pour les coopératives et les négociants, il était temps d'envisager d'autres solutions car le Surflan et le Mission/Katana étaient loin d'occuper des niches commerciales. En 2000, le premier fut appliqué sur plus de 100 000 ha et le second sur une surface à peine inférieure. Le tiers des surfaces désherbées en prélevée l'ont été avec ces produits. Alors que faire ? Jeter le désherbage de prélevée aux orties, comme le suggéraient certains ? C'est, en effet, le moment ou jamais de se débarrasser de ses réticences, car les herbicides restants sont plus chers, moins efficaces, ou plus susceptibles de migrer dans les eaux. La plupart ne franchiront pas le pas, considérant qu'il n'y a qu'une année difficile à passer. La majorité des vignerons n'abandonnera pas une technique qui tient les vignes propres à peu de frais. Ceux de Champagne et de Côte-d'Or seront les plus embarrassés car, pour préserver leurs sources, ils ont décidé de se passer des triazines et du diuron. Il est probable que beaucoup d'entre eux se tourneront vers les foliaires. Ailleurs, les anciens produits reprendront du service mais avec des recommandations remises au goût du jour. Une dernière formule consiste à renoncer aux herbicides pour revenir à la charrue, mais rares sont ceux qui le feront.