Pour les plantations à réaliser en 2002, un nouveau système d'accès aux droits de plantation est en gestation. Il s'appuie sur la création d'une réserve nationale. Les enjeux politiques sont importants.
Depuis deux ans, la mise en place d'une réserve nationale de droits de plantation est souhaitée par la France. Ce chantier avance lentement, car il révolutionne le marché des droits de plantation. C'est l'article 5, du titre 2 du règlement n° 1 493/1999 du 17 mai 1999 portant sur l'organisation commune du marché vitivinicole (paru au Journal officiel des communautés européennes du 14 juillet 1999), qui définit les nouvelles règles du jeu. Il indique : ' En vue d'améliorer la gestion du potentiel de production à l'échelle nationale ou régionale, les Etats membres créent, suivant le cas, une réserve nationale et/ou des réserves régionales de droits de plantation. 'La France a choisi de mettre en place une réserve nationale dont le but est de régenter l'essentiel du marché des droits de plantation : elle achètera des droits détenus en portefeuille et en vendra aux possesseurs d'autorisations de plantation, en appellation comme en vin de pays. ' En fait, elle fera le marché ', indique un spécialiste. Un vrai changement d'obédience ' centralisatrice ' car, aujourd'hui, le marché est plus diffus : achats de droits entre particuliers par l'intermédiaire de courtiers ou des bourses régionales. ' Cette réserve assainira le marché hexagonal en le rendant plus transparent. Passer son temps à rechercher des droits n'est pas productif pour la filière. Maintenant, tout vigneron demandeur saura où s'adresser ', indique-t-on à l'Onivins. D'ailleurs, dans la première mouture du décret devant organiser ce système, on voulait donner à la réserve le monopole du marché ! Une solution que le conseil de la concurrence, auquel le projet de décret a été soumis, n'a pas acceptée (la décision date de février dernier). Il a également refusé que le décret fixe des prix d'achat et de vente pour les transferts. Les pouvoirs publics ont donc revu leur copie. Les transferts entre particuliers seront toujours possibles ainsi que l'activité des courtiers spécialisés. Après plus de deux ans de débats, on espère que le décret sera prêt à l'automne (il est actuellement devant le Conseil d'Etat) afin de sortir les arrêtés dans la foulée pour une application de la réforme dès les plantations 2002. Sur les plantations 2001, nous sommes sous un régime de transition. ' Même si, sur ce dossier, la tension est un peu retombée ces derniers mois, la conjoncture étant moins favorable, on plantera peut-être moins demain, ce nouveau système est au coeur de la politique viticole ', estime un responsable. A ce jour, les grandes lignes de la réforme sont connues, mais des points d'ombre demeurent. La réserve sera alimentée via trois sources. D'abord, les droits nouveaux venant de Bruxelles ; la France en a obtenu 13 565 ha en 1999, à utiliser avant 2003. Ensuite, les droits arrivés à péremption après huit ans en portefeuille chez les producteurs et qui acquièrent une ' deuxième vie ' dans la réserve ; c'est une grande nouveauté de la nouvelle OCM... loin d'être neutre : à titre d'exemple, depuis le mois d'août 2000, 4 000 ha sont arrivés à échéance en France ! Troisième source : la réserve pourra acquérir des droits sur le marché des transferts. Sachant que cette réserve, qui n'aura pas de personnalité juridique propre, sera gérée par l'Onivins, c'est-à-dire par la puissance publique, des contacts seront liés avec les douanes... qui administrent le casier viticole informatisé. On pourra donc identifier les vignerons ayant des droits en portefeuille et leur proposer de les acquérir. Ce qui n'est pas encore tranché est de savoir à quel prix seront acquis ces droits (pour la troisième source) et à quel prix seront-ils revendus (pour les trois sources), sachant qu'un droit arrivé dans la réserve aura une durée de vie maximale de cinq ans. Prix par campagne ? En fonction de la durée de vie restante au droit ? Les arrêtés donneront les réponses. Cette réserve sera-t-elle un instrument de politique viticole, c'est-à-dire n'achètera-t-elle que ce dont elle a besoin ou ira-t-elle plus loin pour orienter le marché ? Autre question pour l'instant sans réponse : les bourses régionales continueront-elles à prospecter ou sont-elles vouées à disparaître si tout chercheur de droits s'adresse par réflexe à la réserve nationale ? Normalement, cette structure fournira tout le monde à travers l'examen des tableaux de bords, pour les AOC comme pour les vins de pays. ' Nous apprendrons en marchant ', philosophe un responsable.