Retour

imprimer l'article Imprimer

archiveXML - 2002

Orienter le vignoble suivant les débouchés

La vigne - n°131 - avril 2002 - page 0

En 2001, les 550 hl de costières-de-nîmes produits par Daniel Arnaud ont été vinifiés à part et vendus sous un nom de domaine par la coopérative de Jonquières-St-Vincent, qui segmente son offre tout en impliquant ses adhérents.

Vinifier à part des parcelles appartenant à des coopérateurs pour les vendre sous un nom de domaine peut paraître surprenant. ' Notre but n'est pas de recréer des caves particulières à l'intérieur de la coopérative, mais plutôt de segmenter l'offre en nous appuyant sur une sélection au terroir, et de montrer à tous que les efforts de qualité peuvent être payés en retour ', explique Daniel Arnaud, vigneron à Jonquières-Saint-Vincent (Gard). Les adhérents engagés dans cette démarche mettent leurs parcelles à la disposition d'une SCEA, qui est propriétaire du nom de domaine. La coopérative se charge de la vinification et de la commercialisation, chaque cuvée étant réservée à un négociant, et rémunère les producteurs au prix moyen obtenu pour l'ensemble des vins de domaine.
Cette stratégie a été initiée en 1993. A l'époque, seuls quelques vignerons avaient fait le choix de l'appellation, et les méthodes de vinification restaient les mêmes que pour les vins de table. ' Changer d'encépagement ne fait pas tout. Notre costières-de-nîmes n'était pas fameux, et nous avions du mal à le vendre. En 1991 et 1992, nous avions même dû le déclasser pour trouver un acheteur. ' L'embauche de Christian Gourjon, un jeune muni d'un BTS viti-oeno, qui est aujourd'hui devenu directeur de la cave, a permis d'introduire de nouvelles pratiques. ' Il nous a proposé de sélectionner les meilleures parcelles et de les vinifier à part. Avec cette cuvée qui sortait du lot, nous avons pu trouver un négociant qui nous l'a payée 73 euros/hl (480 F), alors que le cours moyen des génériques était à 64 euros/hl (420 F). Nous avons repris espoir ! ', raconte Daniel, qui a participé avec quelques adhérents à cette première expérience.
Depuis, d'autres ont suivi l'exemple. Sur une récolte 2000 de 30 000 hl, la coopérative a produit 13 000 hl de costières-de-nîmes. Les 3 200 hl de génériques ont été commercialisés à 84 euros/hl (550 F), et les 9 800 hl issus de dix domaines à 95 euros/hl (620 F). Un tiers des volumes est encore constitué de vins de pays du Gard et de vins de table, mais la récolte 2001 est déjà vendue à 90 %.

Pour accompagner le mouvement, l'encépagement a dû rapidement évoluer. ' Mon père avait commencé, en 1975, à planter du grenache pour produire des costières, alors classées en VDQS. Mais ce n'était pas évident de réduire les rendements de 120 hl/ha à 60 hl/ha. Pour financer nos investissements, nous avons développé en parallèle une production de pêches et de raisins de table, et nous avons dû attendre 1993 pour commencer à avoir un retour sur nos efforts ', estime Daniel. Sur 19 ha, il ne lui reste plus que 2,5 ha de carignan et 0,5 ha de cinsault, les 16 ha restant étant plantés en syrah, grenache, merlot et chardonnay. Les premières syrah installées ont déjà 25 ans. ' Je produis sur 3 ha des côtes-du-Rhône à 50 hl/ha, sur 11 ha des costières-de-Nîmes à 60 hl/ha, et sur 4 ha des vins de pays d'Oc à 80 hl/ha. Pour chacun de ces types de vin, j'ai un cahier des charges à respecter. '
La coopérative avait déjà différencié les frais de vinification, qui vont de 12 à 18 euros/hl (80 à 120 F) suivant les types de vin. En 1998, elle a introduit le paiement à la qualité et a embauché un technicien pour mieux piloter le vignoble en amont. Tous les ans, il fait en juillet une première visite des huit cents parcelles en appellation et en vin de pays d'Oc, et il vérifie la charge et l'état sanitaire. Il attribue une note technique qui sera ajustée au cours de la deuxième visite. Réalisée fin août, celle-ci permet d'établir un prévisionnel de la maturité et des volumes. ' Si je n'obtiens pas une note supérieure à 50, ma parcelle est déclassée dans la catégorie inférieure. En revanche, si je dépasse 80, je touche une prime correspondant à 10 % du produit brut, c'est-à-dire environ 450 euros/ha (3 000 F). C'est incitatif ', estime Daniel, qui a introduit, depuis cinq ans, les travaux en vert sur son exploitation.

Dans le cadre d'un CTE signé en 2001, il s'est équipé d'une effeuilleuse thermique. ' Je suis en train de palisser mes dernières parcelles et de les équiper de fils releveurs. J'investis 2 280 euros/ha (15 000 F), je compte bien progresser encore en qualité. La cave a réalisé des cuvées expérimentales avec et sans effeuillage ; la différence est très nette ! '
Daniel vient aussi d'installer un enherbement permanent du rang pour mieux maîtriser la vigueur. ' L'an dernier, le climat a été très sec et je n'ai fait que 35 hl/ha sur l'une de mes parcelles de côtes-du-rhône. Elle a été sélectionnée dans le cadre d'un partenariat avec un négociant pour une cuvée grande réserve, qui a été valorisée à 145 euros/hl (950 F). Le produit brut reste intéressant, malgré le faible rendement, et à la dégustation, c'est vraiment une satisfaction ! ', commente Daniel, qui se sent pleinement vigneron depuis que les sélections au terroir ont été mises en place. ' Nous nous retrouvons tous les ans entre coopérateurs pour déguster nos vins, c'est un moment privilégié qui nous met du baume au coeur. '
Daniel possède 6 ha de terres nues, dont 4 ha situés dans l'aire des Costières de Nîmes. ' Je les cultive en blé dur pour ne pas les laisser en friche, mais je compte bien y planter de la vigne dès que je pourrai avoir des droits. Et, dès l'an prochain, je vais arracher mon dernier hectare de vin de table. Nous devons continuer à anticiper pour adapter notre vignoble à nos débouchés. '






Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :