Jusqu'alors préservés grâce à leur régime protectionniste, les vignerons suisses souffrent depuis l'ouverture de leurs frontières. Parce qu'ils étaient les plus protégés, les blancs indigènes - et surtout ceux issus du cépage chasselas - sont les plus touchés. Leur poids dans la production reste encore majoritaire (604 000 hl lors des vendanges 2001) mais diminue d'année en année. ' Depuis les accords passés avec l'Organisation mondiale du commerce en 1995, on savait à quoi s'attendre , explique Robert Crüll, vice-président de l'Office de promotion des vins suisses, mais l'ouverture avait beau être programmée, tant que le protectionnisme demeure, on vit dans un cocon. '
D'abord progressive entre 1996 et 2000, l'ouverture des frontières a connu un coup d'accélérateur au 1 er janvier 2001 avec l'unification des contingents de rouges et de blancs. C'est désormais à l'importateur de choisir, dans le cadre du quota global de 1,7 million d'hectolitres, le type de vin qu'il va importer. C'est la procédure dite du ' lévrier ' - premier venu, premier servi - qui s'applique.
Les vignerons suisses s'ouvrent à la concurrence, mais dans un contexte de baisse de la consommation intérieure de vins. Seule celle de blancs progresse, et seuls les blancs étrangers profitent de cet essor ! Les débouchés extérieurs représentent moins de 7 000 hl. ' Nous avons un problème d'image ', reconnaît Thierry Walz, président de l'interprofession suisse du vin. Sur ce point, la libéralisation a joué un rôle de révélateur. ' Le rapport qualité/prix ne nous est pas favorable en raison d'importants coûts de production. Comme le prix de la matière première reste élevé, les opérateurs serrent leur marge et ont du mal à dégager de quoi investir dans la communication , explique ce responsable. Les vins français ont le même type de problème. '
Le contexte est d'autant plus défavorable aux vins suisses que certains opérateurs notent, sur le marché intérieur, ' un esprit revanchard de la part de certains distributeurs qui veulent faire payer la période de protectionnisme, en jouant la carte des vins du Nouveau Monde '.
L'Office fédéral de l'agriculture estime qu'il y a entre 50 000 et 100 000 hl d'excédents de blancs. Ce déséquilibre pousse le secteur viticole à faire sa révolution culturelle. Trois moyens sont à l'étude : reconvertir le vignoble au travers des aides à l'arrachage et à la replantation, développer l'exportation et combler le déficit de communication du temps du protectionnisme.