Le syndicat de l'AOC Tavel, dans le Gard, et le rosiériste Reuter, dans l'Isère, se sont associés pour lancer la rose de Tavel, dont les couleurs évoquent ce vin.
Jamais, de mémoire de fleur, on avait vu une rose porter le nom d'une appellation viticole. Avec la rose de Tavel, c'est chose faite. Certes, il y a bien eu quelques vagues antécédents avec les roses Louise Pommery ou Baronne de Rothschild, mais elles ont été créées pour rendre hommage à ces dames. Signalons aussi le rosier Saint-Vincent, commercialisé depuis 1993 par l'obtenteur Delbard, créé pour orner chaque fin de rang des vignobles champenois.
Mais la rose de Tavel est une première. Officiellement baptisée le 30 mai 2002, cette fleur est devenue un emblème du célèbre rosé. ' L'idée de départ du syndicat était d'embellir l'appellation par des rosiers en bout de vignes et d'ennoblir la route du vignoble en création ', explique Maryline Garnier, en charge de la communication au syndicat.
Le second objectif était de pouvoir offrir aux clients, importateurs et journalistes, autre chose qu'une bouteille de vin, un symbole pérenne qu'ils puissent planter et garder chez eux, leur rappellant l'appellation. Enfin, il s'agissait de toucher le consommateur lambda dans les jardineries.
Sitôt la décision entérinée, en 1999, le syndicat entre en contact avec Edirose, une société d'édition, de sélection et de diffusion de nouvelles variétés. Au mois de juin de cette année-là, Franck, Régis et Pascal Reuter, de la roseraie Reuter à Saint-Georges-d'Espéranche (Isère), partenaire d'Edirose, soumettent au syndicat leurs nouvelles variétés, issues de sept années d'expérimentation.
Bouteille de Tavel à la main, Maryline Garnier arpente les carrés d'essai de la roseraie où sont présentées les nouvelles variétés en dernière phase de sélection. Elle compare les couleurs, recherchant les nuances les plus proches du tavel : un rose intense, avec des tons rubis clair et ambrés. ' Une opération délicate , se souvient Franck Reuter, car le vin change de couleur au fil du temps : de rose pâle dans ses débuts, il fonce au fur et à mesure des millésimes . '
Il a fallu trouver le meilleur compromis et un plant robuste, s'adaptant facilement au sol et s'intègrant dans le paysage. Reubis l'emporte, c'est un rosier-buisson à fleurs groupées, destiné aux massifs. Un gros bouton avec soixante pétales dentelés lui confère son originalité, la couleur d'un fuchsia peu commun évoque la pivoine.
L'entreprise termine ses essais et ses notations (résistance aux maladies, floraison, forme des fleurs, tenue de la couleur...) avant de multiplier la rose Reubis. A l'automne 2002, le premier millier de plants est commercialisé, dont 500 pour les vignerons de l'appellation Tavel, très fortement incités à les planter en bout de leurs vignes, en réminiscence du temps où les rosiers alertaient les vignerons de l'arrivée de l'oïdium.
A l'automne suivant, ils pourront passer la vitesse supérieure, Edirose annonçant 13 000 rosiers en production. Le plant est livré racines nues pour des plantations automnales. En jardinerie, on le trouve conditionné dans des pochettes (dans une motte roulée à l'intérieur d'un sac avec une grande photo) ou en pots carrés de 2 l, au tarif indicatif de 10 à 13 euros. ' C'est vraiment une superbe rose qui, je pense, fera carrière ', conclut Franck Reuter. Tout fier, l'obtenteur voit déjà sa progéniture ' faire un carton ' dans les jardineries.