Un mot d'ordre, un service commercial efficace, des paiements différenciés aux viticulteurs et du matériel automatisé : voilà les recettes de José Daniel, de la cave de Sigoulès en Bergeracois, pour aller de l'avant.
'Ne parlons pas de succès, prévient d'emblée José Daniel, directeur de la cave coopérative de Sigoulès (Dordogne). Disons qu'on résiste comme on peut. ' La cave, forte de 1 200 ha et 200 viticulteurs, surtout polyculteurs, subit de plein fouet les fluctuations du marché du vrac, qui constitue la majorité de ses ventes (40 000 hl sur 70 000 hl). ' Le prix n'est pas lissé comme pour les ventes en bouteilles. '
Et de fait, à 1 145 euros en 1998-1999, le tonneau de 900 l de bergerac rouge s'est effondré à 713 euros en 2001-2002, pour remonter à 737 euros (moyenne) durant la dernière campagne.
' On joue les vins d'appoint pour l'AOC Bordeaux , déplore José Daniel. Ce n'est pas au négoce bordelais, mais à nous de commercialiser nos vins sur la place de Bergerac. C'est à nous de construire des unités de vente pour écouler nos produits et garder la valeur ajoutée. ' Cette profession de foi, José Daniel la défend bec et ongles et n'a de cesse de la mettre en oeuvre. ' L'important, c'est de gagner des consommateurs, d'être à leur écoute et d'augmenter les ventes en bouteilles grâce à un service commercial efficace. '
En 2003, la cave prévoit la commercialisation de 3,5 millions de cols, dont 2 M vers l'Europe du Nord (Angleterre, Belgique et Pays-Bas), 1,2 M en grande distribution et 300 000 dans le circuit traditionnel ou dans le magasin. Les prix vont de 1,50 à 5,50 euros/col.
La cave détient deux filiales de commercialisation : la SA Vins fins du Périgord, opérationnelle depuis 1995, et la SARL Domaines et châteaux du Périgord, un négoce racheté en 2002. Ce dernier vend notamment des vins de particuliers.
Au total, six commerciaux arpentent le terrain et remontent les informations du marché. ' Notre réactivité est plus grande ', explique José Daniel. En Angleterre, où l'une des premières demandes du consommateur est de connaître le cépage, la cave écoule des vins de pays du Périgord ou de Dordogne. Les étiquettes sont modernes, les vins fruités avec des arômes flatteurs.
En 2001, Sigoulès a investi 100 000 euros dans la création d'une marque de vins de Bergerac, destinée à la grande distribution française. Cette somme a financé une étude sur les consommateurs, qui a mis en évidence les forces et les faiblesses de l'appellation. Le bergerac est perçu comme un vin de caractère, mais manquant de notoriété. Elle a fixé un prix à ne pas dépasser : 3,80 euros. La moyenne en grande distribution, à mi-juin 2003, était de 3,07 euros.
La marque Chêne Peyraille est née à l'issue de cette enquête. Son prix de vente est calé juste au-dessus des marques distributeurs, à 3,50 euros/col. Le chêne évoque la force de l'arbre, et Peyraille sonne bien. Les millésimes 2000 et 2001 sont cités dans le Guide Hachette. Depuis début 2003, la cave a déjà vendu 250 000 cols de ce vin. Tous les ans, elle reconduit un budget de 100 000 euros pour soutenir sa marque (animations, référencement, affichage).
En 1994, déjà à l'écoute de ses clients, la cave obtenait la certification Iso 9002. Cette année, elle compte obtenir l'Iso 9001 pour l'ensemble de ses activités.
' L'idée était de mieux répondre à nos clients, de remonter à la source en cas d'erreurs, de rassurer nos acheteurs. Par la suite, cela a facilité le passage aux 35 heures ', dit José Daniel. Une certification sur laquelle la cave communique, même si, pour l'instant, l'amont n'est pas validé. Gilles Vernhes, conseiller viticole, souligne que le processus est en route. Un tiers des vignerons adhèrent à des cahiers des charges internes, rédigés selon deux axes : la qualité et la conduite raisonnée. 200 ha sont suivis grâce à un logiciel de traçabilité sur internet.
' Nous avons consolidé nos fonds propres les années où tout allait bien. Cela nous sert maintenant ', commente Michel Le Nouar, président de la cave. Forte de ses réserves, en 1999, elle met en place un chai ' qualitatif ' (1,5 Meuros investis) qui permet l'élevage sur lie et en fûts, la macération à froid, la micro-oxygénation et le pigeage... L'objectif est d'atteindre rapidement 10 % de vins haut de gamme. Pour y parvenir, la cave rétribue les apports selon leur destination : premier prix ou haut de gamme. Les mauvaises années (2000 et 2001), elle a versé entre 2 750 et 4 570 euros/ha HT aux viticulteurs. Les années fastes (1998 et 1999), les paiements s'échelonnaient entre 3 820 et 6 100 euros. Des écarts suffisants pour encourager les bonnes volontés !