Le 25 mai, à Nîmes (Gard), 11 000 vignerons se sont retrouvés. La manifestation s'est déroulée dans le calme, mais de violentes actions ont été menées dans la soirée.
Après Montpellier (Hérault), le 9 mars, et Narbonne (Aude), le 20 avril, le Syndicat régional des vignerons du Languedoc-Roussillon appelait à manifester pour la troisième fois le 25 mai, à Nîmes. ' Monsieur le ministre, vous misiez sur l'essoufflement de la mobilisation, vous avez perdu ', a lancé Philippe Vergnes, le porte-parole de ce syndicat, lorsqu'il s'est adressé aux 11 000 vignerons. L'ampleur du rassemblement donne une mesure de la gravité de la crise. Venus du Languedoc-Roussillon, de Provence, des Côtes du Rhône et même du Beaujolais, les vignerons présents partageaient un même constat : les cours sont au plus bas, les trésoreries s'enfoncent dans le rouge. A trois mois des vendanges, une bonne partie des vins reste encore dans les caves.
' Certains négociants retardent leurs achats. Ils spéculent à la baisse. D'autres ont choisi de s'approvisionner en Espagne, où ils trouvent des vins de table à 28 euros/hl, contre 40 euros ici ', dénonce un vigneron de l'Hérault. Les contrats ne sont pas toujours respectés. Pour voir leurs vins retirés, certains acceptent un prix plus bas que celui qui avait été négocié. Cela alimente la spirale à la baisse.
' Les courtiers nous proposent actuellement des prix de 61 euros/hl, bien inférieurs à nos coûts. Ceux qui n'ont plus de trésorerie sont obligés d'accepter ', raconte un vigneron des Côtes du Rhône. ' Les cours ont été divisés par deux et les acomptes de la coopérative aussi. Si rien ne bouge, nous ne pourrons pas tenir au-delà de la fin de l'année ', ajoute l'un de ses collègues. ' Les cours des côtes-du-ventoux ont baissé de 30 euros/hl. Notre marge a disparu. Au caveau, nous tenons les prix, mais les consommateurs qui prenaient un carton ne veulent plus que trois bouteilles. Nous arrivons encore à payer nos permanents, mais pour combien de temps ? ', s'interroge un producteur du Vaucluse.
De nombreux vignerons ont fortement réduit leurs prélèvements privés. D'autres ne peuvent carrément plus se payer. Dans l'Hérault, c'est le cas de 63 % des jeunes installés depuis moins de dix ans, d'après une enquête réalisée par le Syndicat des jeunes agriculteurs. Dans les Pyrénées-Orientales, certains, poussés par leur banque, ont pris un emploi salarié, en plus de leurs vignes, pour ramener de l'argent frais.
Au 20 mai, sur l'ensemble du Languedoc-Roussillon, plus de 3 000 dossiers de demandes d'aides d'urgence avaient été déposés. Dans l'Aude, 30 % des 600 premiers demandeurs d'aides ont subi une perte de chiffre d'affaires de 40 % et plus. Les enveloppes prévues ne suffiront pas. Les montants attribués seront dérisoires, d'environ 1 000 euros par exploitation pour les aides directes à la trésorerie.
L'urgence est de compléter ce dispositif pour redonner un peu d'oxygène aux exploitations, et éviter la faillite d'une partie de la filière régionale. ' Nous demandons une exonération de l'impôt foncier et une prise en charge des cotisations sociales ', affirme Philippe Vergnes à la tribune. Pour rétablir l'équilibre entre l'offre et la demande, le syndicat réclame également l'ouverture rapide, pour les vins de table et de pays, d'une distillation de 2,5 Mhl, à 3,35 euros/°hl. Pour cette campagne, il sera peut-être un peu tard pour voir les cours remonter, mais il faut au moins assainir la situation avant la prochaine.