Le remplissage du siphon doseur est l'un des postes à risque identifiés par la MSA. L'entonnage des vins en fût vide méché est également un moment d'exposition au SO gazeux. Différents fabricants de matériels ont imaginé des systèmes pour renforcer la sécurité.
La MSA l'a constaté : l'un des principaux risques d'exposition des opérateurs au dioxyde de soufre se situe lors du remplissage du siphon doseur. Pour pallier ce problème, René Puig a conçu l'Ecosulfi, qui recycle les vapeurs de soufre dégagées au cours du remplissage. L'appareil se branche entre la bouteille de SO 2 et le siphon. Il neutralise les émanations de SO 2 dans une solution aqueuse de potasse caustique. Le Matériel Péra, à Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault), en assure la commercialisation depuis cet été. L'Ecosulfi coûte environ 4 500 euros HT pour un modèle entièrement manuel.
Julien Kremer, conseiller prévention à la MSA grand Sud (Aude et Pyrénées- Orientales), a participé à des démonstrations. Il constate que ' les cavistes apprécient les raccords et flexibles sécurisés '. Il attire néanmoins l'attention sur les risques liés à la manipulation de la solution caustique de potasse. François Rigaill, de chez Gazechim, à Béziers (Hérault), a également suivi le dossier de près et trouve ce matériel intéressant. ' Nous testons cette année une version définitive de l'Ecosulfi ', annonce Xavier Péra, de la société du même nom.
La société Avantec, dans le Rhône, s'est aussi intéressée au remplissage du siphon doseur. Elle propose de supprimer cette étape en utilisant directement les contenants de la gamme Sulfine. Celle-ci se compose de cartouches à usage unique de 50, 100, 200 ou 500 g de SO 2 prêtes à l'emploi pour les petites cuves, et d'une bouteille de 24 kg. Alliée au chariot de dosage Sulfine DOS1, cette bouteille remplace le siphon doseur. Le chariot permet de la déplacer de cuve en cuve. Il emporte une balance, précise à 15 g près, qui mesure la perte de poids de la bouteille au cours du sulfitage, et donc la quantité de gaz injectée. Un boîtier de programmation arrête l'injection automatiquement lorsque la quantité souhaitée est atteinte. Le chariot coûte 2 650 euros. Cette bouteille a un autre avantage : elle est dotée d'un robinet qui permet d'obtenir du SO 2 liquide ou gazeux, sans la retourner. Cela limite les risques de chute et donc de fuites. Enfin, elle ne pèse que 30 kg, car elle est en aluminium.
David Dulysse, responsable du chai de Prodis, à Nîmes (Gard), a participé à la conception de la forme définitive du chariot. ' Nous voulions un système plus sûr que le siphon doseur ', explique-t-il. Il souhaitait continuer à utiliser du gaz, qui donne plus de garanties quant à la quantité de SO 2 réellement apportée. Il est tout à fait ravi du chariot dont il dispose depuis juillet. Les vannes, situées sur la bouteille et sur la canne d'injection, ainsi que les raccords rapides permettent de débrancher le système en toute sécurité. ' De plus, le dosage est précis, pour des cuves de 50 à 500 hl. Nous l'avons vérifié par des contrôles de SO 2. ' Ce responsable de chai a choisi un modèle doté d'une batterie pour éviter de faire suivre un fil électrique dans des allées encombrées de tuyaux. ' Les roues du chariot sont assez hautes pour franchir facilement les obstacles, et l'ensemble chariot et bouteille n'est pas très lourd. La balance est d'ailleurs très stable : les franchissements ne l'abîment pas. '
Philippe Faure, maître de chai à la cave coopérative des Vignerons de Gigondas, a choisi d'utiliser la bouteille Sulfine, en remplacement des bouteilles de SO 2 classiques, pour remplir ses siphons doseurs. Il apprécie sa légèreté et donc sa facilité de manipulation. ' De plus, il n'y a pas besoin de la retourner pour la vidange totale. Grâce aux raccords rapides, il y a un peu moins d'émanations de SO 2 lorsqu'on débranche le siphon doseur... mais cela ne dispense pas d'utiliser un masque. ' Le chariot doseur n'a pas encore fait beaucoup d'adeptes, car les maîtres de chai craignent qu'il soit difficile à manipuler, dans les caves à étage notamment.
La Littorale, en collaboration avec le gazier Gazechim, a également renforcé la sécurité de la bouteille, ainsi que celle du transfert dans le siphon. La bouteille de SO 2 Kiwi, commercialisée depuis les dernières vendanges, contient 25 kg de SO 2. Elle est munie de poignées, qui facilitent sa manipulation. Elle délivre du SO 2 liquide, quand elle est placée debout et peut être vidée intégralement sans être retournée. Des clapets antiretour renforcent sa sécurité. Alliée au flexible Flexibip, elle permet de remplir le siphon doseur sans émanations de gaz. En Téflon et Inox tressé, Flexibip est muni d'un clapet antiretour, du côté de la bouteille, et d'un raccord rapide muni d'une vanne, du côté du siphon doseur. Quand on veut débrancher ce dernier, il suffit de fermer la vanne. Le SO 2 contenu dans le flexible ne peut pas s'échapper. Ce flexible coûte 400 euros.
A la cave coopérative de Sigoulès (Dordogne), les cavistes utilisent la Kiwi et le Flexibip depuis le mois de mai. ' La première qualité de cet équipement, c'est la sécurité, témoigne le responsable de chai, Lionel Condeau. Quand on débranche le siphon doseur, on ne prend plus un jet de SO2. Avant, il fallait fermer le robinet à fond et si on le faisait mal, on laissait échapper du soufre. Avec les clapets antiretour, ce n'est plus un problème. '
Tous les éléments se clipsent, ce qui est très pratique pour les utilisateurs.
Au Cellier des Demoiselles, dans l'Hérault, Christophe Combes utilise la Kiwi en remplacement des grosses bouteilles qu'il achetait auparavant . ' On ne pouvait pas les manipuler facilement et il fallait pourtant les retourner ', témoigne-t-il. Maintenant, il dispose de bouteilles faciles à manier et qu'il bouge pourtant moins : ' Comme il y a moins de fuites, je peux les stocker à l'intérieur. Après réception, je ne les bouge plus, puisqu'il n'y a même pas besoin de les retourner. Elles se vident entièrement et, au prix du SO 2, c'est un avantage. '
En 2001, Paetzold constructeur lançait son absorbeur de SO 2, qui recycle les émanations de soufre se produisant lors du remplissage des fûts. Il est composé d'une coupelle perforée, qui se pose sur le trou de bonde et à travers laquelle on insère le tuyau d'entonnage. Le côté de la coupelle tourné vers la barrique comporte des trous par où pénètrent les vapeurs de SO 2 au fur et à mesure de l'entonnage. Ces dernières sont neutralisées dans la colonne de captage. Quand la solution est saturée, on sent le SO 2 qui est évacué vers l'extérieur. Il faut alors la renouveler. Cette opération doit être réalisée après deux cents à quatre cents remplissages. La solution saturée se jette à l'égout. L'appareil coûte 4 000 euros et contient 4 l de solution à 3,95 euros/l.
Jean-Louis Lafourcade, maître de chai des châteaux d'Armailhac, Clerc Milon et la Fleur Milon, à Pauillac (Gironde), a acheté un appareil pour ses trois chais. Il est très satisfait de la sécurité de ce matériel. De plus, l'absorbeur de SO 2 est silencieux et facile à déplacer, car monté sur roulettes. ' L'inconvénient, c'est qu'il doit se brancher sur une prise électrique. Ce qui veut dire, dans un chai, qu'il faut se promener avec des grandes longueurs de fils. ' Il aimerait que l'appareil soit branché sur une batterie rechargeable.
Au château Chasse-Spleen, à Moulis-en-Médoc (Gironde), les cavistes utilisent deux appareils depuis deux ou trois campagnes d'entonnage. L'un fonctionne en poste fixe, l'autre est mobile. ' Ce serait mieux sur batterie, concède Jean-François Eizaguirre . Mais les cavistes préfèrent tirer un fil dans les allées que respirer les vapeurs de soufre. Quand ils sont tombés en rupture de solution plusieurs jours cet été, j'ai bien vu qu'ils ne pouvaient plus s'en passer ! '