Les représentants des villages défilent avec leur bannière et la maquettes de leur clocher. Ils sont suivis d'une soixantaine de vignerons.
En 2007, c'est le village d'Alet-les-Bains (Aude) et son clocher qui ont accueilli la manifestation.
« Les premières années, j'ai cru qu'on allait renoncer. Quand on a demandé aux coopérateurs de défiler en portant la bannière du clocher de leur village, ils se cachaient tous derrière. Aujourd'hui, il faut voir comme ils sont fiers de le faire », raconte Jean Ribes, responsable du protocole de l'opération Toques et Clochers.
L'aventure a démarré il y a 21 ans sous l'impulsion de Pierre Mir, l'entreprenant président de Sieur d'Arques, à Limoux, dans l'Aude. Son idée était de mettre en avant les vins de sa coopérative en collectant des fonds pour la restauration du clocher de l'église d'un des villages du Limouxin. A chaque année, un nouveau village. Et le clocher si souvent synonyme de querelle, deviendrait le trait d'union entre les vignerons de toute la région.
Depuis le début, Toques et Clochers a collecté près de deux millions d'euros pour la restauration de vingt-et-un clochers. L'opération se déroule toujours le week-end des rameaux. Le samedi, les deux cents coopérateurs font déguster les vins de l'année dans la commune candidate pour la rénovation de son clocher. Une dizaine de caveaux de fortune s'installent dans le village. Une quinzaine de sites de restauration sont improvisés. Les routes d'accès sont coupées…
Point d'orgue de la journée : un défilé haut en couleurs, long de plus de 300 mètres qui attire aujourd'hui des dizaines de milliers de personnes. D'abord apparaissent les bannières du village à l'honneur, puis les maquettes des clochers déjà rénovés et enfin la soixantaine de vignerons, dont les parcelles ont été choisies pour la vente aux enchères du lendemain. « Le public est prêt à attendre une heure pour voir passer ce défilé, remarque Jean-Claude Taillan, administrateur de la cave. Cette journée du samedi est entièrement organisée par les habitants du village mis à l'honneur. Certaines communes ont 300 à 400 habitants. Pour elles, c'est un an de préparation ».
Des chefs étoilés à l'honneur
Dimanche après-midi a lieu la vente aux enchères. En mars dernier, elle a rapporté 476 900 €, dont le quart a été versé pour le clocher de Couiza. Des acheteurs du monde entier se sont disputés une centaine de barriques de chardonnay issues d'une soixantaine de parcelles minutieusement sélectionnées. En 1990, la première édition avait rapporté 204 774 €, dont 5 000 pour le clocher de Malras.
Un repas de gala concocté par un grand chef clôt les festivités. Jusqu'à mille invités triés sur le volet s'y pressent. « La renommée des chefs étoilés a fortement contribué au succès de Toques et Clochers et à la notoriété des chardonnays de Limoux », affirme Jean Ribes. En particulier Pierre Troisgros et Paul Bocuse qui furent les deux premiers à relever ce challenge. « Ici, j'ai trouvé le vin des chefs », déclarait Paul Bocuse dès 1991, en parlant des chardonnays de Limoux.
« L'initiative des vignerons a déclenché tout un programme de rénovation du patrimoine, s'enthousiasme Jean Ribes. Les collectivités locales et l'Etat se sont eux aussi engagés sur certains dossiers. »
Au-delà des paillettes et du prestige, toute une région se retrouve pour fêter ses vignerons. « Il n'y a pas si longtemps, on voyait les salariés licenciés de cette vallée autrefois industrielle défiler dans des cortèges de désolation. Toques et Clochers a redonné fierté et espoir à toute une population ». Sacrée trajectoire !