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ACTUS - POUR OU CONTRE

Faut-il imposer l'AOC au détriment de l'AOP ?

Propos recueillis par Aude Lutun - La vigne - n°229 - mars 2011 - page 28

La Cnaoc le voudrait, mais la réglementation européenne permet à chacun de choisir.

Depuis le 1er août 2009, les vins d'appellation d'origine contrôlée (AOC) sont considérés sur le plan européen comme des appellations d'origine protégées (AOP). Au sein de chaque pays, les mentions jusqu'alors utilisées – AOC en France, DOC et DOCG en Italie, etc. – peuvent être remplacées par AOP. Cette possibilité ne fait pas l'unanimité. La Cnaoc (Confédération nationale des syndicats de producteurs d'AOC) regrette « qu'alors même que la valorisation du travail distinctif de l'AOC n'est pas achevée, on introduise un signe équivalent qui est totalement méconnu ». Elle souhaite faire bouger la réglementation en imposant le maintien de la mention AOC. Mais pour l'instant, le gouvernement français ne l'entend pas de cette oreille. Pour preuve, ce rappel à l'ordre lors du dernier comité national de l'Inao, le 10 février 2011 : alors que les cahiers des charges de certaines AOC imposent l'obligation d'imprimer la mention « AOC » ou « appellation d'origine contrôlée » sur les étiquettes, le représentant du gouvernement a rappelé que cette exigence n'est plus conforme au droit communautaire et qu'elle doit être retirée. De leur côté, les premiers opérateurs qui ont opté pour la mention AOP y voient un passeport pour l'export.

Le maintien de la mention AOC leur semble un combat d'arrière-garde.

Le Point de vue de

PLUTÔT

« Non, l'AOP est plus lisible. L'Italie et l'Espagne l'ont déjà adoptée »

Laurent Abba, directeur commercial et marketing de Prodiffu en Gironde

Laurent Abba, directeur commercial et marketing de Prodiffu en Gironde

« Nos étiquettes du millésime 2010 portent la mention AOP et non plus AOC. Nous nous sommes juste conformés à ce que l'Europe nous a préconisé. Pensez-vous réellement que le consommateur va repérer que nous sommes passés de la mention AOC à celle d'AOP ? Je pense que la segmentation des vins en IGP et en AOP est une aubaine pour les vins français.

Elle démocratise notre univers et facilite les ventes. Il faut absolument en tirer parti, en étant plus lisible auprès de nos consommateurs, surtout à l'export. C'est une belle occasion de mieux valoriser nos vins, sous réserve d'accompagner cette nouvelle segmentation avec une véritable stratégie en amont et en aval. Les distributeurs sont satisfaits de cette démarche.

Ils trouvent que la viticulture française est toujours longue à évoluer. L'Italie et l'Espagne ont déjà adopté l'AOP ! En interne, avec les 480 vignerons de notre groupement, il n'y a pas eu de problème non plus. Le changement fait toujours peur et je comprends que la segmentation IGP-AOP puisse susciter des questions. Mais cela fait deux ans que nous en parlons avec nos adhérents. Il faut juste présenter tranquillement le projet pour qu'il mûrisse et rassurer nos interlocuteurs. »

Le Point de vue de

POUR

« Oui, l'AOC fait partie intégrante de notre patrimoine culturel »

Christian Paly, administrateur de la Cnaoc et vigneron à Tavel (Gard)

Christian Paly, administrateur de la Cnaoc et vigneron à Tavel (Gard)

« Je suis pour le maintien de la mention AOC, car nous n'avons pas le droit de faire fi de notre histoire. Nous avons bâti depuis plus de quatre-vingt ans la notion d'AOC, qui fait partie intégrante de notre paysage culturel et viticole. Nous avons été les premiers au monde à développer les AOC et ce n'est pas à la première évolution, serait-elle communautaire, qu'il faut l'abandonner.

Il faut garder le mot AOC par respect pour ceux qui nous ont précédés et par respect pour les consommateurs auprès de qui nous communiquons sur ce sigle depuis longtemps. Les consommateurs sont attentifs à l'étiquetage, plus qu'à la taille du bouchon ou à la couleur de la capsule. Ils lisent les étiquettes et les contre-étiquettes.

Ne seront-ils pas perdus s'ils voient AOC sur certains côtes vingt ans la notion d'AOC, qui fait partie intégrante de notre paysage culturel et viticole. Nous avons été les premiers au monde à développer les AOC et ce n'est pas à la première évolution, serait-elle communautaire, qu'il faut l'abandonner. Il faut garder le mot AOC par respect pour ceux qui nous ont précédés et par respect pour les consommateurs auprès de qui nous communiquons sur ce sigle depuis longtemps. Les consommateurs sont attentifs à l'étiquetage, plus qu'à la taille du bouchon ou à la couleur de la capsule. Ils lisent les étiquettes et les contre-étiquettes. Ne seront-ils pas perdus s'ils voient AOC sur certains côtes-du-rhône et AOP sur d'autres ? La possibilité de faire apparaître soit AOC, soit AOP ne va pas concourir à la lisibilité de l'offre. Lors du comité national de l'Inao en novembre 2010, j'ai demandé aux pouvoirs publics d'avoir la possiblité de conserver uniquement la mention AOC en France. Je souhaiterais un engagement fort de leur part. Au sein de l'EFOW (European Federation of Origin Wines), nos collègues italiens et espagnols souhaitent également garder leur propre réglementation nationale. Nous sommes en train de travailler à la rédaction d'un amendement juridique pour trancher en faveur de l'AOC en France. »

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