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VIN

L'oxygène négatif assainit cuves et barriques

Marine Balue - La vigne - n°231 - mai 2001 - page 58

Le laboratoire Vect'oeur a développé un appareil qui produit de l'oxygène négatif, pour nettoyer les récipients vinaires. Deux caves qui l'utilisent nous ont reçus pour nous donner leur avis sur ce matériel.
VECTOCLEAN. Jean-Pierre Guyon (à gauche) est le premier à avoir testé le Vectoclean en cave. Développé et breveté par le laboratoire Vect'oeur dont Gérard Michel (à droite) est le gérant, cet appareil produit de l'oxygène négatif à partir de l'air extérieur. Le vigneron l'emploie pour débarrasser ses cuves et ses fûts des germes indésirables. © M. BALUE

VECTOCLEAN. Jean-Pierre Guyon (à gauche) est le premier à avoir testé le Vectoclean en cave. Développé et breveté par le laboratoire Vect'oeur dont Gérard Michel (à droite) est le gérant, cet appareil produit de l'oxygène négatif à partir de l'air extérieur. Le vigneron l'emploie pour débarrasser ses cuves et ses fûts des germes indésirables. © M. BALUE

C'est en 2006 que Jean-Pierre Guyon, vigneron à Vosne-Romanée (Côte-d'Or), découvre l'oxygène négatif. A l'époque, il fait face à des contaminations par des Brettanomyces au niveau de ses fûts. « J'ai testé des produits anti-Brett pour les nettoyer, mais cela n'a pas marché », raconte-t-il.

En contact avec Gérard Michel, cogérant du laboratoire Vect'oeur, à Savigny-lès-Beaune, il accepte de tester une technologie encore inconnue des caves. En effet, Vect'oeur travaille depuis quelques années sur l'oxygène négatif, un composé naturellement présent dans l'air, aux effets désodorisant et antimicrobien. Il souhaite développer un appareil qui en produit, pour l'appliquer au nettoyage des cuves et des barriques. Les premiers essais de terrain se déroulent alors au domaine Guyon, pour vérifier l'efficacité de l'oxygène négatif contre les Brett.

Plus efficace que l'eau chaude

L'expérience s'avère concluante, puisque Jean-Pierre Guyon investit dans l'appareil Vectoclean et l'utilise toujours régulièrement. A chaque soutirage, après avoir nettoyé ses fûts à l'eau, il applique de l'oxygène négatif à l'intérieur pendant vingt à trente minutes. L'appareil, un boîtier métallique assez léger, est équipé de plusieurs tuyaux en plastique souple pour traiter jusqu'à quatre fûts à la fois. « Je l'emploie même si je n'ai pas de problème de Brett, en prévention, note Jean-Pierre Guyon. De plus, après un passage d'oxygène négatif, l'intérieur du fût sent la fraîcheur. » Il préfère utiliser cet appareil plutôt que de l'eau chaude, qui lui semble « éliminer un peu trop de tannins ».

Vraiment convaincu par l'intérêt de la technique, il choisit de l'appliquer aussi à ses cuves en inox. Avant les vinifications, il les passe toutes à l'oxygène négatif pendant cinq ou six heures. Ponctuellement, il l'utilise même pour assainir l'atmosphère du chai et gommer les mauvaises odeurs.

Dernière astuce : la veille d'une mise en bouteille, il fait marcher l'appareil toute la nuit. Le but est de limiter la présence de micro-organismes indésirables sur le matériel et dans le chai.

Finalement, pour Jean-Pierre Guyon, l'oxygène négatif est devenu la seule solution pour se prémunir des problèmes de Brett. Il ne regrette pas l'investissement (l'appareil est commercialisé à 1 700 euros environ). D'autant qu'il est très simple à utiliser. « Ce n'est pas un produit chimique, ce qui est en cohérence avec notre démarche bio », ajoute le viticulteur bourguignon.

Un composé inoffensif

Au domaine des Comtes Lafon, à Meursault, c'est suite à des hausses d'acidité volatile, en 2010, que l'oxygène négatif a fait son entrée. « Nous avons reçu pour la première fois des fûts complètement cloqués, sûrement à l'origine du problème », se rappelle Stéphane Thibodaux, le régisseur du domaine.

Il discute alors avec Gilles Martin, le directeur de Vectoplast, la société qui vend le matériel développé par Vect'oeur, de la possibilité d'éliminer les bactéries acétiques logées dans le bois avec l'oxygène négatif. « Ma seule réticence venait du fait qu'il n'est pas spécifique, il détruit tous les micro-organismes, avoue Stéphane Thibodaux. Mais nous l'avons tout de même essayé pour réhabiliter les fûts. »

Selon lui, le résultat sur l'acidité volatile est variable : il constate une bonne efficacité sur des fûts de qualité, mais il n'arrive pas à se débarrasser complètement du problème sur les fûts cloqués.

Ayant investi dans l'appareil Vectoclean, il décide de l'utiliser pour éviter les problèmes de Brettanomyces. « Nous n'en avons jamais eu, mais nous préférons anticiper, car les œnologues sont assez alarmistes sur ce sujet », poursuit le régisseur du domaine. Il a ainsi intégré un passage de trente minutes d'oxygène négatif au process de nettoyage des fûts.

Aujourd'hui, il estime même qu'il sous-emploie cet outil et envisage de l'appliquer aux cuves dès le prochain millésime. Et si ses cavistes étaient un peu réticents au départ, ils ont aussi adopté l'oxygène négatif : « L'appareil est facile à utiliser : il suffit de le brancher, de mettre le tuyau dans le trou de bonde et de laisser agir », confie l'un d'entre eux. En outre, il dégage une odeur plutôt agréable dans le chai et ne nécessite ni protection, ni précaution particulière. Car « l'oxygène négatif est totalement inoffensif, c'est son avantage sur l'ozone », assurent Gérard Michel et Gilles Martin.

Une sécurité pour le stockage des matières sèches

L'oxygène négatif peut aussi s'appliquer à la purification de l'air ambiant. Il y a trois ans, le négoce de matières sèches Embag Bourgogne a installé une unité dans son local de stockage de bouchons. Elle se présente sous forme d'un générateur d'oxygène négatif et d'un long tube en PVC dont les perforations permettent de diffuser le principe actif dans l'air. L'oxygène négatif supprime les micro-organismes qui synthétisent les précurseurs de TCA, à l'origine de goûts de bouchon, et désodorise l'air. « Nous n'avons plus de litige avec nos clients, indique Bruno Malessieu, directeur commercial d'Embag. Nous stockons leurs commandes en toute sécurité. » Plusieurs bouchonniers et tonneliers sont désormais équipés de ce matériel. En revanche, il n'est pas conseillé d'utiliser l'oxygène négatif dans un chai en présence de vin, car il risque d'agir aussi sur les microorganismes positifs.

D'où vient l'oxygène négatif ?

 © VECT'OEUR

© VECT'OEUR

Vect'oeur a mis au point l'appareil Vectoclean, qui produit de l'oxygène négatif de manière contrôlée. Il est constitué d'une chambre de réaction en céramique, où circule l'air, amené par un système de ventilation. A l'intérieur, des électrodes métalliques et un tube de verre génèrent des arcs électriques qui ionisent l'air. Un module de régulation de fréquence et de tension permet de limiter la création d'ozone, qui n'est pas inoffensive. La diffusion d'oxygène négatif se fait via des tubes en PVC ou en plastique souple. « Il ne faut pas utiliser de tuyau en inox, car cela ralentit l'ionisation », souligne Gérard Michel. L'appareil (voir la photo) se branche sur le secteur.

En enclenchant le bouton marche, il dégage immédiatement une odeur qui rappelle la pierre mouillée et une sensation de fraîcheur, signe que l'atmosphère se charge en oxygène négatif. Vectoclean reproduit le phénomène naturel d'ionisation de l'air. Ce dernier contient des ions négatifs, petits et réactifs, et des ions positifs, produits par l'activité humaine et considérés comme polluants. Les ions négatifs réagissent avec les positifs et les font précipiter. Parmi eux, O- et O2- forment l'oxygène négatif. Grâce à leur fort pouvoir oxydant, ils sont fongicides, bactéricides, éliminent les mauvaises odeurs et les ions polluants. Vect'oeur possède un brevet sur cette technologie pour les filières vin et biologie.

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