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GÉRER - La chronique juridique

Changer la densité des vignes, c'est modifier un point majeur

Jacques Lachaud - La vigne - n°241 - avril 2012 - page 70

Lorsque des modifications majeures sont introduites dans le cahier des charges d'une AOC, elles doivent faire l'objet d'une procédure nationale d'opposition. Si les modifications sont mineures, c'est inutile.

Deux producteurs du Bergeracois sont mécontents des conditions de production imposées pour produire des AOC Bergerac, Côtes-de-Bergerac et Montravel. Pour contester les nouveaux cahiers des charges de ces appellations, ils agissent contre les décrets qui les homologuent. En effet, c'est le décret qui donne au cahier des charges sa force de loi.

Seul ce texte, signé par les ministres de l'Agriculture, de l'Économie et du Budget, est susceptible d'un recours devant la justice administrative. L'action intentée contre ces décrets d'homologation s'effectue devant le Conseil d'État qui, en la matière, est juge en premier et dernier ressort.

Dans notre affaire, trois décrets sont attaqués. Un premier producteur demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 9 octobre 2009 homologuant le cahier des charges de l'AOC Bergerac et également celui du 14 octobre 2009 relatif au cahier des charges de l'AOC Côtes-de-Bergerac. Selon ce producteur, l'Inao aurait dû soumettre ces deux cahiers des charges à une procédure nationale d'opposition, ce qu'il n'a pas fait.

Les juges vont accéder à sa demande. Ils rappellent que la demande de reconnaissance d'une appellation est soumise à une procédure d'opposition dans les deux mois, procédure organisée par le directeur de l'Inao, après avis du Comité national compétent, selon les modalités prévues par l'article R 641-13 du code rural.

Ils rappellent aussi que lorsqu'une modification du cahier des charges est envisagée, celui-ci est soumis au Comité national. Si ce dernier estime que les modifications envisagées sont majeures, il doit être procédé à une nouvelle homologation, laquelle ouvre droit à une procédure nationale d'opposition.

Après avoir rappelé les règles en vigueur, les juges analysent les textes qui leur sont soumis. Ils relèvent que les nouveaux cahiers modifient la densité des plantations et instituent des « règles nouvelles relatives à l'écartement maximal entre les rangs de vignes ». Ils en concluent qu'elles constituent « des modifications majeures imposant la mise en œuvre d'une procédure nationale d'opposition ». Comme il n'y a pas eu de telle procédure, les juges annulent les décrets des 9 et 14 octobre.

Pas d'annulation pour l'AOC Montravel

La requête du second producteur, relative à l'annulation du décret du 19 octobre 2009 homologuant le cahier des charges de l'AOC Montravel, ne va pas connaître le même sort. Il est vrai que l'argumentation n'était pas la même… À l'appui de son action, ce producteur soutenait que le décret d'homologation aurait dû être pris après la mise en place d'une commission d'enquête. Il estime que cette commission aurait dû se prononcer sur les modifications introduites dans le cahier des charges, par rapport au décret antérieur datant du 23 novembre. Le Conseil d'État ne va pas accepter ces arguments. Les juges rappellent « qu'aucune disposition n'impose la constitution d'une commission d'enquête préalablement à la reconnaissance d'une AOC ». C'est au Comité national de dire s'il estime nécessaire la constitution d'une telle commission. Les juges ont également estimé que « les modifications apportées aux règles de conduite [de l'AOC Montravel] ne peuvent pas être regardées comme majeures ».

L'Inao n'avait donc pas l'obligation de soumettre le cahier des charges à une procédure nationale d'opposition. Il n'y avait pas matière à annuler le décret homologuant le cahier des charges de Montravel.

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RÉFÉRENCE :

Conseil d'État du 23 décembre 2011 n° 334523.

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