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VENDRE - Observatoire des marchés

Le vin tisse sa toile sur le net

ÉMILIE-ANNE JODIER - La vigne - n°268 - octobre 2014 - page 66

Les ventes de vins sur internet progressent rapidement. De plus en plus de consommateurs se laissent tenter par les offres d'abonnement ou par les ventes privées pour s'initier au vin ou réaliser de bonnes affaires.

Les Français se fient de plus en plus à internet pour leurs achats. Et pas seulement pour l'acte en lui-même. En amont, ils cherchent, se renseignent, recueillent des avis avant de cliquer sur l'icône « Payer ». Une habitude qui s'applique aussi aux vins.

La progression des ventes de vin sur internet laisse rêveur : elles représentaient, en France, 534 millions d'euros en 2012 et atteignent 705 millions en 2013. Soit 7,8 % du chiffre d'affaires des ventes de vin à la consommation en France et une croissance de 32 %.

Certes, les ventes de bouteilles en ligne sont parties de zéro ou presque au début des années 2000, mais les estimations restent très optimistes pour l'avenir. Le baromètre e-Performance de l'école de management de Bordeaux BEM Kedge, en 2013, estime qu'elles atteindront 1,125 milliard d'euros en 2015 ce qui représente 12 % du chiffre d'affaires des ventes de vin.

350 e-commerçants dénombrés. Plusieurs sites ont bien compris l'intérêt de vendre du vin sur internet. Sans parler des nombreux viticulteurs qui offrent ce service. « Nous avons dénombré environ 350 e-commerçants de vin, hors sites de viticulteurs, rappelle Grégory Bressolles, professeur de marketing à la Kedge Business School, auteur d'une étude internationale sur l'e-commerce du vin publiée en juin 2013. « Même s'il est toujours difficile de compter de manière précise, des sites apparaissent et d'autres peuvent disparaître tout aussi vite. »

C'est le cas d'un acteur majeur du marché, le site 1855.com et son satellite châteauonline.com, placés en redressement judiciaire, et en difficulté depuis de longs mois. Mais d'autres réussissent et un nouveau paysage prend forme.

« Au départ, le marché du vin sur internet était réservé aux spécialistes, détaille Grégory Bressolles. Désormais, des sites généralistes comme Cdiscount y ont fait leur apparition. Et la grande nouveauté de ces dernières années concerne les sites de ventes privées. »

Ces derniers (venteprivée.com, leader en la matière avec 2,5 millions de cols vendus en 2012, mais aussi lechaiprivé.com ou grandsvinsprivés.com) réservent des offres privilégiées à leurs membres. Ils mettent en vente des lots à prix cassé pendant un temps assez court. « Ils misent sur l'acte d'achat impulsif, l'achat plaisir », explique Grégory Bressolles. Amplifié par la peur de ne pas saisir la bonne affaire au bon moment.

L'autre grande nouveauté concerne les abonnements : de plus en plus de sites (troisfoisvin.com, myvitibox.com ou chaisdoeuvre.fr, parmi tant d'autres) proposent de faire découvrir à leurs clients des bouteilles sur le modèle des « box ». Ces sites présélectionnent les vins à envoyer aux consommateurs qui paient un abonnement mensuel. « Ces nouvelles formules permettent de recruter un public qui n'achetait pas forcément de vin, remarque Grégory Bressolles. Elles touchent un public jeune et curieux. »

« Une nouvelle façon de vendre le vin. » Les sites pionniers ont suivi cette tendance. Ils se sont modernisés en proposant de plus en plus de ventes privées pour clients privilégiés, des abonnements, etc. L'idée est de ne pas rater le coche dans un secteur très concurrentiel.

Le site généraliste Cdiscount, appartenant au groupe Casino, s'est imposé depuis dix ans. Il assure avoir vendu 3 millions de bouteilles en 2013. « Nous proposons une nouvelle façon de vendre le vin, observe Dominique Rey, le responsable des achats de vin de Cdiscount. Et nous apportons une innovation de taille : les informations sur le produit. » Fiches techniques, vidéos, notes, avis de consommateurs sont autant de références impossibles à donner en grande distribution par exemple. « Sur internet, l'acheteur est à la recherche de signes rassurants comme les labels, les médailles et différents avis », confirme Grégory Bressolles.

2 600 références sur Cdiscount. Pour trouver des bouteilles à vendre, plus besoin d'appâter les négociants ou les domaines. « Les professionnels sont de plus en plus attirés par notre mode de distribution, observe Dominique Rey. Les craintes liées à la qualité du stockage chez les vendeurs ou aux possibles problèmes de livraison ont été levées. »

Cdiscount dispose d'un catalogue de 2 600 références, des bouteilles allant de 3,49 euros pour un vin du Sud-Ouest vendu sous la marque Cdiscount à 450 euros ou plus pour un Château Cheval Blanc. Côté prix, les négociations se font « en bonne entente avec les viticulteurs ». Cdiscount fait ainsi usage de sa notoriété pour discuter au plus serré, offrant en échange une visibilité à la hauteur de ses 16 millions de clients.

« Dans l'avenir, le marché sur internet va se structurer autour de quelques acteurs principaux, anticipe Grégory Bressolles. Des sites plus petits vont trouver des marchés de niche pour se développer. » Mais si les ventes de vin sur internet n'en sont déjà plus à leurs balbutiements, il reste encore tout un marché à consolider.

Les sites de producteurs en première ligne

Selon une étude SoWine de 2012, 57 % des Français qui achètent du vin sur internet se fournissent via les sites de producteurs. Mais si les sites de caviste tendent à perdre des fréquentations (40 % en 2010, 37 % en 2011, 30 % en 2012), les sites de ventes privées prennent de plus en plus de place (40 % en 2010, 45 % en 2011, 50 % en 2012). « Nous observons des regroupements de viticulteurs sur le net », note Grégory Bressolles. Difficile en effet de rivaliser seul avec les délais et les frais de livraison assurés par les géants du net. Dominique Rey, de Cdiscount, estime quant à lui qu'il y a de la place pour tout le monde sur le web : « J'encourage les viticulteurs à lancer leurs propres sites ! Il faudrait presque que les chambres d'agriculture forment les producteurs à ce type de vente. »

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