Le système des droits de plantation a vécu. L'an prochain, il n'y aura plus besoin de « droit » pour planter une vigne, mais d'une « autorisation ». Ceux qui possèdent des droits devront les convertir en autorisations. Contrairement aux droits, ces autorisations seront incessibles : seul l'exploitant qui en bénéficie pourra les utiliser. Il aura trois ans pour le faire, faute de quoi il s'exposera à une amende pouvant aller jusqu'à 6 000 €/ha.
Autre différence avec les droits : les autorisations sont gratuites. Enfin, elles n'existeront que sous forme numérique sur le compte Vitiplantation de chaque exploitant.
Ouverture le 18 mai
Vitiplantation, c'est le nom du site de téléprocédure que FranceAgriMer met en place pour gérer ce nouveau système. Il ouvrira le 18 mai - en principe à midi -, et sera accessible sur la page internet « franceagrimer.fr/professionnels/teleprocedures ».
À partir de l'an prochain, chaque viticulteur devra passer par là pour obtenir une autorisation de plantation, quelle qu'elle soit : pour des vignes AOC, IGP ou sans IG ; pour toute replantation, pour un accroissement de son vignoble ou pour convertir des droits en portefeuille en vue de les utiliser. En 2016, il n'y aura plus de formulaire en papier de demande d'autorisation de plantation. Il ne sera plus nécessaire de s'adresser à FranceAgriMer ou à l'Inao selon que l'on souhaite planter en IGP ou AOC. Tout passera par le nouveau site Vitiplantation. Et on ne pourra plus replanter de vigne sans autorisation, comme c'est le cas aujourd'hui dans certaines zones IGP.
Enregistrez-vous cette année pour pouvoir planter l'an prochain
Compte tenu de l'importance du changement, l'administration invite les viticulteurs à s'enregistrer dès que possible sur le nouveau site. Dans un premier temps, il s'agira d'y ouvrir un compte. FranceAgriMer adressera alors par courrier, à chaque exploitant inscrit, son code d'accès. Dès lors, chacun pourra se connecter au site afin de consulter son compte, dans l'immédiat, et, à partir de l'an prochain, de demander des autorisations de plantation. Pour pouvoir planter en 2016, il faudra s'être enregistré sur le site avant le 30 novembre 2015. Caves coopératives et ODG viendront en aide à ceux qui n'ont pas d'accès à internet.
Mettez votre CVI à jour
Parallèlement à l'inscription sur le nouveau site, l'administration invite les viticulteurs à mettre à jour leur casier viticole informatisé (CVI) car les informations qui s'y trouvent seront communiquées automatiquement à Vitiplantation. C'est ainsi que les droits en portefeuille, issus du système actuel, y apparaîtront à partir du 4 janvier 2016, date de l'entrée en service opérationnel du site. Encore faut-il que chaque exploitant inscrive bien au CVI les droits qu'il possède au plus tard avant le 31 décembre 2015 !
De même, il faut déposer auprès des Douanes les déclarations d'achèvement de travaux (DAT) d'arrachage réalisés cette année avant le 30 novembre. Ceci fera apparaître un crédit de plantation pour une surface équivalente sur Vitiplantation, crédit dont l'exploitant devra demander la transformation en autorisation s'il veut replanter. « Certains nous apportent leurs DAT d'arrachage seulement lors de la campagne suivante. Désormais, ils ne pourront plus le faire », prévient-on aux Douanes.
Autre changement : « Aujourd'hui, les viticulteurs nous disent quel droit ils veulent utiliser au moment où ils déposent leur déclaration d'intention de plantation. L'an prochain, ce ne sera plus possible. Les viticulteurs devront disposer d'une autorisation sur le site Vitiplantation », explique-t-on aux Douanes.
Plantations nouvelles : de nombreuses conditions
Pour agrandir son vignoble par une plantation en AOC, IGP ou VSIG, un exploitant devra demander une autorisation de plantation nouvelle sur le site Vitiplantation entre le 1er mars et le 30 avril de chaque année. Il obtiendra une réponse au plus tard le 1er août et pourra planter l'année suivante.
La surface qui lui sera attribuée dépendra des contingents autorisés pour sa région et pour le ou les segments sur lesquels il veut planter. Elle dépendra également des demandes des autres viticulteurs. En effet, si la somme des demandes dépasse les contingents, les viticulteurs prioritaires seront servis les premiers - en principe, les jeunes -, les autres se verront tous appliquer le même taux de réfaction. Au total, chaque pays de l'Union européenne pourra distribuer au maximum 1 % de sa superficie en autorisations de plantations nouvelles, soit 7 500 ha pour la France.
Les autorisations seront valables trois ans, à partir de leur date de délivrance. Passé ce délai, les demandeurs qui ne les auraient pas utilisées seront sanctionnés, certainement du montant maximal de l'amende, soit 6 000 €/ha, sauf en cas de force majeure.
Les contingents de plantations nouvelles par région et par segment seront définis dans un arrêté annuel qui paraîtra au plus tard le 1er mars. Celui-ci fixera aussi les critères d'éligibilité des dossiers et les critères de priorité pour l'attribution des autorisations de plantations nouvelles au cas où la somme des demandes dépasserait les contingents fixés.
À ce stade, profession et administration ont retenu un critère d'éligibilité des dossiers de plantation de vins sans IG au sein des aires d'appellation ou d'IGP : les demandeurs devront s'engager à produire du vin sans IG sur leur nouvelle parcelle jusqu'en 2030. Ceci pour empêcher les détournements de notoriété. Ce critère s'appliquera dans les appellations et les IGP qui en feront la demande. Il ne pourra pas s'appliquer aux plantations dans les aires de proximité immédiate.
Replantations : une instruction rapide
L'an prochain, après réception par les Douanes d'une DAT d'arrachage, la surface correspondante apparaîtra comme « arrachée » dans Vitiplantation. Le viticulteur pourra demander une autorisation de plantation pour la même superficie dès qu'il le souhaitera et au plus tard le 31 juillet de la campagne n+2 après l'arrachage. Ainsi, pour un arrachage réalisé début 2016, on pourra demander l'autorisation de replantation jusqu'au 31 juillet 2018. Passé ce délai, impossible de replanter, excepté si l'on demande une autorisation de plantation nouvelle. Quant aux autorisations de replantation :
- elles seront valables trois ans ;
- ceux qui ne les utilisent pas seront passibles d'amendes ;
- FranceAgriMer devra les délivrer dans les trois mois suivant la demande mais promet que, dans la plupart des cas, les choses iront bien plus rapidement.
Par ailleurs, les ODG pourront imposer que les replantations dans leur aire soient conformes au cahier des charges de la parcelle d'origine. Ils pourront aussi exiger que les viticulteurs qui veulent replanter en VSIG soient obligés de rester dans cette catégorie jusqu'en 2030.
Droits en portefeuille : à convertir avant 2020
À partir de janvier 2016, le compte Vitiplantation de chaque vigneron fera apparaître la liste de ses droits en portefeuille, avec leur date de péremption. Ils pourront être convertis en autorisation jusqu'à cette date et, au plus tard, jusqu'au 31 décembre 2020. Passé ces délais, ils seront perdus, sans sanction. Pour les convertir, il suffit d'en faire la demande. FranceAgriMer aura trois mois, au maximum, pour s'exécuter. Les autorisations auront la durée de vie qu'il restait au droit correspondant. Ceux qui ne les utiliseront pas dans ce délai risqueront une amende.
Trois choses à savoir
Vérifiez que vous avez utilisé des droits éligibles à l'aide à la restructuration pour vos dossiers en cours. Aujourd'hui, si ce n'est pas le cas, vous pouvez retourner aux Douanes pour changer de droit. L'an prochain, ce ne sera plus possible. Si des modifications doivent être faites, c'est avant le 30 novembre de cette année.
Ceux qui veulent acheter des droits peuvent le faire auprès de la réserve nationale jusqu'au 30 novembre (300 euros/ha) et d'un tiers jusqu'au 31 décembre.
Côté déclarations douanières, rien ne change : l'an prochain, il faudra toujours remplir les déclarations d'intention d'arrachage et de plantation ainsi que les déclarations d'achèvement des travaux (DAT). Mais les informations correspondantes seront transmises à Vitiplantation. Ainsi, une surface arrachée apparaîtra quelques jours après le dépôt de la DAT d'arrachage correspondante aux Douanes.
Pas d'IGP à Sancerre
Les Sancerrois ont une nouvelle fois manifesté leur opposition à la perspective de voir des plantations nouvelles de sauvignon ou de pinot noir en IGP aux portes de leur vignoble, le 23 avril, lors du congrès de la Cnaoc qu'ils accueillaient chez eux. Ils ont réuni un impressionnant alignement de tracteurs équipés de charrues le long du chemin qui menait au congrès. C'était leur manière d'avertir qu'ils n'hésiteront pas à aller arracher de telles plantations. « La réglementation nous permet d'empêcher les plantations d'IGP à l'intérieur de nos aires pour éviter le risque de détournement de notoriété. Ce n'est pas suffisant, souligne Alain Cailbourdin, président de la Fédération des unions viticoles du Centre-Loire*. Nous voulons également empêcher de telles plantations à proximité de nos aires pour les cépages qui nous concernent, à savoir le sauvignon et le pinot noir. » « Il ne faut pas se voiler la face, renchérit Denis Vacheron, vigneron à Sancerre. Le risque, c'est aussi de voir les vins produits en IGP remplir les cuves d'appellation. Autoriser des plantations d'IGP à proximité des aires d'appellation, c'est encourager la fraude. » Début mai, le ministère de l'Agriculture a été très clair. Il sera très difficile, sinon impossible, d'empêcher de telles plantations, avec la nouvelle réglementation qui entre en vigueur le 1er janvier prochain.
* La FUVC regroupe les AOP Châteaumeillant, Coteaux du Giennois, Pouilly-Fumé, Pouilly-sur-Loire, Menetou-Salon, Sancerre, Quincy et Reuilly.