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DOSSIER - Marché foncier : le tour des vignobles

BEAUJOLAIS Des acheteurs sélectifs

JULIETTE CASSAGNES - La vigne - n°293 - janvier 2017 - page 40

Après avoir longtemps chuté, le prix des vignes semble stabilisé. Seules les meilleures parcelles et les plus faciles à travailler intéressent les acheteurs. Les autres ne trouvent pas preneur.
Les secteurs des crus, comme ici celui de Brouilly, conservent un grand attrait. © C. THIRIET

Les secteurs des crus, comme ici celui de Brouilly, conservent un grand attrait. © C. THIRIET

Le Beaujolais connaît une crise profonde depuis une quinzaine d'années. Cette situation s'est traduite par des arrachages massifs et un effondrement du prix des vignes. Alors que le vignoble couvrait près de 23 000 ha jusqu'en 2004, il est tombé à 17 500 ha. Quant au prix des vignes, il n'a cessé de chuter pour descendre autour de 11 000 €/hectare de Beaujolais ou de Beaujolais villages.

Ce recul paraît désormais enrayé. « Pour les personnes en recherche de nouvelles surfaces, c'est le moment d'acheter », indique Damien Ardiet, directeur de la Safer du Rhône. Certains l'ont bien compris. Depuis trois ans, négociants, particuliers et fonds d'investissement sont plus nombreux à vouloir acheter. Comme ils n'ont que l'embarras du choix, ces acheteurs sont exigeants. Ils sélectionnent les meilleurs terroirs, les vignes les plus faciles à travailler et en bon état. C'est ainsi que les surfaces trop pentues sont peu à peu délaissées ; le coût de production y est trop élevé. « Le marché fait le tri », résume Jean-Claude Vanel, responsable conseil au CER du Rhône.

Les vignerons acheteurs sont « impliqués, dynamiques, à la recherche de qualité et moins de volume. Ils cherchent les meilleurs terrains pour la rentabilité de leur activité viticole », complète Damien Ardiet.

En appellation Beaujolais, le marché tourne au ralenti. Quelques rares transactions ont lieu. En 2015, seuls 43 hectares de vignes se sont vendus, le plus bas niveau depuis dix ans. En Beaujolais-villages, le marché a été plus actif, avec 88 ha qui ont fait l'objet de transactions en 2015, soit 23 ha de plus qu'en 2014.

L'attrait pour les crus reste supérieur, mais toujours très variable selon les secteurs. Ceux qui rencontrent le plus de succès sont Fleurie, Morgon, Brouilly, Côte-de-Brouilly et Moulin-à-Vent, dont la cote est passée de 87 000 à 95 000 €/ha entre 2013 et 2015. En 2015, 85 hectares de crus ont été vendus, un chiffre dans la moyenne pour Damien Ardiet. Les prix restent soutenus. Globalement, le prix moyen d'un hectare de vigne a gagné 5 % en 2015. Les terroirs les plus qualitatifs intéressent les producteurs de Beaujolais ou de Bourgogne, qui souhaitent compléter leur gamme de vins ou diversifier leur patrimoine. Sous l'effet de toutes ces transactions, les domaines viticoles changent progressivement de main, passant des descendants des vieilles familles industrielles de la région, à des vignerons, des négociants ou de nouveaux bailleurs intéressés par la vigne.

ET VOUS, PENSEZ-VOUS QU'IL FAUT ACHETER ? Frédéric Berne, château des Vergers, 5,76 ha à Lantignié (Rhône)

« Oui. Le Beaujolais a été une chance pour moi. J'ai 31 ans. J'ai pu m'y installer grâce à la crise : les vignes sont moins convoitées qu'ailleurs. Cela laisse la place à des jeunes comme moi, qui ont peu de moyens. C'est un vignoble très accessible dont il est facile de démontrer la qualité des terroirs si l'on est motivé. Ces derniers restent souvent sous-évalués. C'est le cas à Lantignié où le potentiel est énorme. Je suis en train d'y acheter 1,4 ha. Ce vignoble bénéficie d'un des meilleurs rapports qualité/prix de France... Je suis convaincu que sa valeur remontera bientôt. »

ET VOUS, PENSEZ-VOUS QU'IL FAUT ACHETER ? Jean-Gilles Chasselay, 12 ha à Châtillon-d'Azergues (Rhône)

« Cela vaut la peine d'acheter des vignes à condition de pouvoir en vendre la production. Quand on trouve une belle vigne et qu'on a besoin de vin, c'est judicieux d'acheter ! Quatre critères doivent être réunis pour que j'achète : un terroir de qualité, des vignes bien exposées, en bon état et mécanisables. Acheter des vignes nous permet aussi de sécuriser nos approvisionnements et de compléter notre gamme. Nous sommes d'ailleurs en train d'acheter 1 ha dans un cru du Beaujolais. »

L'essentiel de l'offre

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