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Quand les vignerons font salon

AUDE LUTUN - La vigne - n°301 - octobre 2017 - page 62

Moins chers, les salons organisés chez un exploitant et accueillant plusieurs exposants ont de plus en plus la cote.
LE CHÂTEAU FONTVERT, dans le Vaucluse, organise une soirée chaque été avec les vignerons de l'association BioDynDinguesDonc. © CHÂTEAU FONTVERT

LE CHÂTEAU FONTVERT, dans le Vaucluse, organise une soirée chaque été avec les vignerons de l'association BioDynDinguesDonc. © CHÂTEAU FONTVERT

Les salons entre vignerons de différentes régions, qui se tiennent chez l'un des participants, se développent avec succès. Isabelle et Alexandre Rat, viticulteurs à Sermiers, dans la Marne, en organisent un le temps d'un week-end de début mai depuis 2008. L'idée de ce rendez-vous est venue en discutant avec des collègues lors d'un salon de vente auquel ils se rendent chaque année.

« En novembre 2007, un confrère du Muscadet nous a invités à participer à sa journée portes ouvertes, témoigne Alexandre Rat. Nous y sommes allés et avons décidé d'en organiser une à notre tour. »

Outre la Champagne, six régions viticoles sont représentées : Alsace, Muscadet, Bourgogne, côtes du Rhône, Bordeaux, Armagnac et Gascogne. Sont également conviés un producteur de foie gras, un autre d'asperges et un ancien cuisinier qui élabore des conserves. Ouvert le samedi et le dimanche de 8 heures à 18 heures, il accueille environ 1 000 personnes.

Chaque vigneron invite ses clients qui habitent à moins de deux heures de Sermiers. Le couple envoie 700 à 800 invitations, dépose une carte postale dans toutes les boîtes aux lettres du village et installe des panneaux dans les endroits fréquentés aux alentours de Sermiers.

« Organiser un salon demande du travail, surtout la semaine qui précède », précise Alexandre Rat. Le jeudi après-midi est ainsi consacré à l'installation d'un chapiteau, avec l'aide d'amis. Les autres vignerons arrivent le vendredi après-midi et participent à la mise en place des stands.

« Il faut compter trois années pour qu'un tel rendez-vous s'installe, note Alexandre Rat. Au fil des ans, les clients prennent confiance dans les vins présentés. Pour que la manifestation perdure, il faut être en phase avec les autres exposants et apprécier leurs produits. Les vignerons sont logés chez nous ou chez des amis. Cela renforce la convivialité et limite les coûts. » Et pour que leurs visiteurs restent plus longtemps, les Rat font venir une friterie tenue par un professionnel.

En moyenne, chaque vigneron vend de 400 à 600 bouteilles au cours des deux jours, soit autant que sur un salon mais avec moins de frais. En outre, le couple s'ouvre de nouveaux marchés par le jeu de la réciprocité. Leurs confrères du Muscadet et d'Alsace organisent eux aussi des portes ouvertes auxquelles ils sont conviés. Quant à l'exploitant des côtes du Rhône, il regroupe des commandes de champagne et se fait livrer avant les fêtes plusieurs palettes qu'il se charge de redistribuer.

Les salons organisés par des producteurs bio ou en biodynamie se développent aussi. Étienne Loew, vigneron bio alsacien, accueille une manifestation destinée aux professionnels (voir témoignage). Le Château Fontvert, à Lourmarin, dans le Luberon, fait partie de l'association BioDynDinguesDonc qui réunit huit vignerons du Sud-Est et quatre du Languedoc-Roussillon certifiés Demeter (biodynamie).

Depuis deux ans, ce domaine organise une soirée le troisième samedi de juillet de 17 à 20 heures. « Nous avons choisi de faire un salon chez nous car nos installations s'y prêtent et que nous sommes dans une région touristique, précise Yoann Malandain, directeur d'exploitation du château. Nous installons douze stands dans notre cuverie et chaque vigneron envoie des invitations à ses clients proches géographiquement. »

Le château communique localement sur son opération avec des affiches et flyers distribués aux offices du tourisme, relayés sur Internet. La soirée se termine par un méchoui gratuit auquel sont conviés les vignerons, des amis et les meilleurs clients.

« Nous allons peut-être accueillir d'autres vignerons en biodynamie situés en Ardèche, dans les côtes de Provence ou dans les côtes du Rhône septentrionales, précise Yoann Malandain. Nous envisageons aussi de convier tous nos visiteurs au méchoui moyennant une petite participation. »

Les vignerons arrivent dès le samedi matin pour préparer leur stand et repartent le dimanche. En moyenne, ils vendent entre 400 et 600 bouteilles. Reste au Château de Fontvert une grande journée de rangement et de préparation des abords avant l'événement et la gestion de la communication. 250 visiteurs se sont rendus aux deux premières éditions et les exposants ont enregistré un chiffre d'affaires compris entre 800 et 1 000 € de vin en trois heures de vente. « Ce salon a plusieurs atouts, apprécie Yoann Malandain. Tout en étant commercial, il fait connaître notre association et nous permet de nous rencontrer et d'échanger sur nos pratiques culturales et nos essais. »

Les vignerons de l'association BioDynDinguesDonc se retrouvent également aux salons Millésime Bio et Demeter à Angers pour de nouvelles occasions d'échanges !

ÉTIENNE LOEW, VIGNERON SUR 10 HA À WESTHOFFEN, DANS LE BAS-RHIN (50 000 COLS) « Un salon pour les cavistes et restaurateurs »

« Cela fait deux ans que nous organisons en avril un salon dans notre domaine. Nous travaillons avec un agent en France qui représente une quarantaine de vignerons. Il nous a mis en contact avec une quinzaine d'entre eux que nous invitons à venir chez nous présenter leurs vins. Notre salon cible uniquement les cavistes et les restaurateurs. Nous ne réalisons aucune vente lors de cette manifestation. Le but est qu'il y ait des prises de contact et des dégustations. C'est l'occasion de rencontrer nos clients gérés en direct par notre agent. La présence d'autres vignerons, essentiellement bio comme nous, attire les professionnels. D'une édition à l'autre, nous essayons de changer une partie des exposants pour que les acheteurs - environ une centaine - aient un intérêt à revenir. Certains clients viennent de loin et font l'aller-retour dans la journée. Ce salon, c'est un très bon moment. Pour moi, il contribue aussi à changer l'image des vins d'Alsace, pas toujours très moderne, auprès des cavistes et restaurateurs... »

PAUL AUTARD, VIGNERON SUR 26 HA À CHÂTEAUNEUF-DU-PAPE, DANS LE VAUCLUSE « Plus de temps pour les clients »

 © O. GUERRIN

© O. GUERRIN

« J'ai participé pour la première fois cette année à un salon organisé par les Champagnes Auguste Huiban, à Jonquery (Marne), le dernier week-end de mars. Chaque vigneron invitant ses clients, on bénéficie des contacts des autres participants. Par ailleurs, les coûts sont inférieurs à ceux d'un salon classique, puisqu'il n'y a que les frais de déplacement et d'hébergement. Enfin, l'ambiance est conviviale entre la dizaine de vignerons présents. Nos clients, lassés des grands salons de plus en plus impersonnels, sont ravis de rencontrer une dizaine de domaines de toute la France dans une petite cave. Les coûts étant moins élevés, nous n'avons pas besoin de "faire du rendement". Nous consacrons ainsi plus de temps à chaque client. Notre domaine participe à une vingtaine de salons classiques par an. Cela reste un bon vecteur de ventes, mais c'est cher et on n'est pas toujours bien placé. Le salon chez le vigneron est une formule intéressante et conviviale. »

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