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LES QUATRE OBTENTIONS DE VCR, de gauche à droite : M1, M2, M3 et M4
Le marché des porte-greffes bouge. Alors que l'offre s'est très peu renouvelée depuis la fin du XIXe siècle, le pépiniériste italien VCR étoffe sa gamme avec quatre nouvelles obtentions issues de l'Université de Milan :
. M1, présenté par les chercheurs italiens comme très résistant à la chlorose ferrique et doté d'une bonne résistance à la sécheresse,
. M2, un peu moins résistant à la sécheresse mais très productif,
. M3 et M4, très résistants à la sécheresse et au calcaire, qui pourraient s'avérer intéressants face au réchauffement climatique.
Les chercheurs milanais comparent leurs quatre obtentions à six autres porte-greffes parmi les plus répandus depuis 2003 : 1103 Paulsen, 110 Richter, 140 Ruggeri, 41B, 420A et SO4. Les résultats indiquent que le M2 confère vigueur et productivité. Durant la période 2007-2012, le cabernet-sauvignon greffé sur ce cépage a produit une moyenne de 2,1 kg par pied avec un poids moyen des grappes de 120 g. Ces résultats le situent au-dessus du 41B et du 140 Ru (1,9 kg/pied). Le M4 est, lui, légèrement moins productif avec 1,8 kg par pied. Les M1 et le M3 sont les moins productifs avec 1,5 kg par pied.
Concernant la maturité technologique, ces porte-greffes n'ont aucune influence sur la teneur en sucre, le pH et l'acidité totale des cépages qu'ils portent. Il en va tout autrement de la maturité phénolique. Sans surprise, les porte-greffes les plus vigoureux (M2, 1103P, 140 Ru) affichent les teneurs les plus faibles en anthocyanes et polyphénols totaux. M4 se situe à un niveau intermédiaire, avec des résultats voisins de ceux de SO4, 41B et 420 A. M1 et M3 se placent au-dessus du lot, apportant 20 % d'anthocyanes et 17 % de polyphénols totaux de plus que les porte-greffes les moins performants vis-à-vis de ces critères.
Qu'en est-il de la résistance à la sécheresse de M3 et M4 ? Les résultats dont nous avons pu avoir connaissance ne nous permettent pas de trancher. Qui plus est, les premiers éléments obtenus par VCR avec ses propres essais dans les Pouilles en Italie ne concordent pas avec les affirmations de l'Université de Milan. Le pépiniériste italien considère que M2 et M4 sont les plus résistants des quatre nouveaux venus à la sécheresse et non M3 et M4. La question mérite d'être creusée.
Ces nouveaux porte-greffes sont inscrits au catalogue italien, ils sont donc autorisés dans toute l'Europe. Reste à savoir comment ils vont se comporter en France où les expérimentations commencent tout juste. À l'Inra de Bordeaux, le M4 est implanté dans le dispositif Greffadapt qui comporte 55 porte-greffes. Mais il n'en est qu'au stade troisième feuille, bien trop tôt pour conclure, estime Elisa Marguerit, en charge de ce programme.
Vitis berlandieri comme géniteur
Originaire des régions calcaires et sèches du Texas, Vitis berlandieri est connu pour sa tolérance aux conditions difficiles. Il fait partie des ascendants des quatre nouveaux porte-greffes italiens.
. M1 : croisement entre 106/8 (V. riparia x (V. cordifolia x V. rupestris)) et V. berlandieri.
. M2 : Teleki 8B (V. berlandieri x V. riparia) x 333 E. (V. vinifera x V. berlandieri).
. M3 : R27 (V. berlandieri x V. riparia) x 5C Teleki (V. vinifera x V. berlandieri).
. M4 : 41B (V. vinifera x V. berlandieri) et V. berlandieri.
THIERRY BARTOLI, VITICULTEUR SUR 6 HA, À LA CADIÈRE-D'AZUR (VAR), EN APPELLATION BANDOL « Il faut des solutions contre la sécheresse »
Thierry Bartoli a pris le taureau par les cornes. Déplorant qu'aucune initiative collective n'ait été prise pour lutter contre la sécheresse, au printemps 2016, il a planté une parcelle expérimentale de 2 000 m2 pour comparer les quatre porte-greffes italiens aux 41B, Rupestris du Lot et R110. Chaque porte-greffe porte du mourvèdre.
« Nous sommes dans une zone particulièrement sujette à la sécheresse, explique ce coopérateur. Depuis les années 2000, la pluviométrie ne cesse de décroître. Cette année, sur douze mois à partir de septembre 2016, nous n'avons reçu que 350 mm d'eau. L'an dernier, c'était encore pire avec seulement 150 mm. C'est très inquiétant. Nos rouges deviennent déséquilibrés en alcool et trop tanniques. L'appellation fait de plus en plus de rosé, mais je ne pense pas que ce soit une solution d'avenir pour notre vignoble. J'ai fait cet essai parce que rien ne bouge. Mais c'est déjà trop tard. Il faut attendre encore deux ou trois ans pour tirer des conclusions sur ces porte-greffes. Il aurait fallu les tester dès les années 2000. »
