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Énergie La courseau meilleur contrat

LUCIE MARNÉ - La vigne - n°303 - janvier 2017 - page 66

Le marché de l'énergie se libéralise. Les premiers viticulteurs en profitent pour faire des économies, aidés par des courtiers spécialisés dans la recherche des meilleures offres.
SUR SON SITE INTERNET, ENERBIOFLEX,Julien Delgove constitue des groupes d'agriculteurs pour leur négocier des contratsà des prix intéressants. © C. FAIMALI

SUR SON SITE INTERNET, ENERBIOFLEX,Julien Delgove constitue des groupes d'agriculteurs pour leur négocier des contratsà des prix intéressants. © C. FAIMALI

Depuis le début de l'année, les entreprises qui consomment plus de 36 kVA d'énergie sous forme de gaz ou d'électricité ne la paient plus aux tarifs réglementés de vente (RTV) fixés par l'État. Elles sont soumises à la loi du marché. Avec cette libéralisation, le nombre de fournisseurs d'énergie s'est envolé. Ils sont aujourd'hui plus d'une quarantaine à proposer des contrats de gaz et d'électricité, pour les entreprises comme pour les particuliers. Et même si se pencher sur sa facture d'énergie n'est pas toujours une partie de plaisir, cela permet parfois de réaliser de belles économies. « Le choix des fournisseurs et du type de contrat représente environ 50 % du montant de la facture. Il s'agit donc d'un levier d'action non négligeable », souligne Julien Delgove, ingénieur chez EnerBioFlex, bureau d'étude spécialisé en énergétique pour le monde agricole.

Certains domaines ont déjà pris les devants. « Lorsque le marché de l'énergie s'est ouvert, je me suis penché sur la question du prix de l'électricité, explique Éric Lescou, comptable à l'EARL Meynard, en Gironde. Et depuis fin 2016, nous avons opté pour un contrat chez Engie. » Cette exploitation d'une trentaine d'hectares de vignes et de poiriers a fait des économies significatives. « En tout, je pense que nous avons gagné environ 1 000 € en un an », se félicite le comptable.

Pour choisir son contrat, Éric Lescou a fait appel à Opéra Énergie, un courtier qui, depuis 2014, propose ses services gratuitement aux professionnels pour dénicher les meilleures offres. Sur le même créneau, UtilityWise propose également ses services de courtage aux entreprises. « Le métier de courtier est nouveau dans le domaine de l'énergie. Les consommateurs n'ont ni le temps ni l'expérience pour choisir au mieux leur contrat. Vu le nombre croissant de fournisseurs et d'offres, le choix d'un contrat au meilleur tarif nécessite des notions de trading », souligne Nicolas de Crémiers, directeur du développement chez Opéra Énergie.

Pour comparer les offres, ces courtiers suivent en permanence le cours de l'énergie. « Actuellement, nous proposons surtout des contrats longue durée de 24 ou 36 mois car le prix de l'énergie augmente. En 2016, le prix de l'électricité pour une livraison en 2017 est descendu jusqu'à 25,53 €/MWh. En 2017, le plus bas prix pour une livraison en 2018 était déjà de 33,39 €/MWh. Et pour 2021, les premiers échanges se font autour de 43 €/MWh », prévient Nicolas de Crémiers. Éric Lescou a donc bien fait d'opter dès la fin 2016 pour un contrat de 36 mois, alors que le cours de l'électricité était encore bas.

Franck Mercereau, viticulteur-céréalier en Charente, a également fait appel à Opéra Énergie. Le courtier lui a trouvé un autre fournisseur moins cher, mais uniquement pour l'irrigation de ses champs : « Pour la partie viticole, je bénéficie encore d'un vieux contrat EDF appelé EJP. Opéra Énergie n'a pas trouvé plus concurrentiel. Je reste donc chez EDF pour mon chai. »

Un dernier levier d'action peut se révéler intéressant : l'achat groupé. En achetant de gros volumes d'énergie, on peut tirer les prix vers le bas. C'est le principe même de l'offre et de la demande. Sur son site internet, EnerBioFlex offre aux agriculteurs la possibilité d'intégrer des groupements d'achat ou d'en constituer. Une fois le groupe réuni, il leur soumet des offres. « Lorsque nous montons des groupements, nous nous arrangeons pour trouver plusieurs profils d'agriculteurs de manière à avoir une consommation stable tout au long de l'année. Par exemple, il peut être intéressant de mettre ensemble un cultivateur de pommes de terre qui consomme surtout en été, avec un éleveur de porc qui consomme surtout l'hiver pour chauffer ses bâtiments d'élevage », explique Julien Delgove.

Mais Nicolas de Crémiers reste prudent sur ce type de contrat : « Les achats groupés sont surtout un moyen d'augmenter le rapport de force à l'égard du fournisseur. Cela ne permet pas forcément à chaque membre du groupe d'être gagnant à titre individuel. Si l'on regroupe une structure qui consomme beaucoup durant l'été avec une autre qui consomme surtout en hiver, le fournisseur va proposer un prix fixe en effectuant une moyenne entre les prix qui sont toujours plus hauts en hiver qu'en été. La structure qui consomme en été sera donc forcément perdante. »

Quelle que soit la stratégie adoptée pour diminuer le montant de sa facture énergétique, il faudra désormais se familiariser à ce nouveau marché fluctuant...y compris pour les petits consommateurs de moins de 36 kVA. « Les tarifs réglementés de vente de l'énergie sont amenés à disparaître, avertit Nicolas de Crémiers. L'Union européenne les considère comme contraires au droit européen de la concurrence. »

Le gaz a été le premier visé :le Conseil d'État a annoncé, le 19 juillet dernier, qu'il annulait un décret de 2013 encadrant les modalités de fixation des tarifs réglementés de vente du gaz. Une décision similaire devrait être rendue pour l'électricité. Reste à savoir quand elle sera effective.

Mieux comprendre sa facture

Chaque facture d'énergie comprend trois composantes. La première donne la consommation énergétique. Elle représente environ 50 % du montant de la facture. Apparaît ensuite le Tarif d'utilisation du réseau public d'électricité (Turpe). Il s'agit d'une redevance liée à l'acheminement de l'énergie sur le réseau public par GRDF pour le gaz et Enedis pour l'électricité.Ce montant représente environ 25 % de la facture. Il est susceptible de varier chaque année le 1er août pour l'électricité et le 1er avril pour le gaz. Le reste du montant de la facture énergétique correspond aux taxes et contributions d'acheminement locales qui peuvent varier selon les départements et les communes. « Normalement, ces trois composantes doivent apparaître clairement, mais chez certains fournisseurs, les factures sont assez opaques, comme chez EDF, par exemple. Les factures sont plus transparentes chez les petits fournisseurs comme Alterna ou Proxelia », indique Julien Delgove, ingénieur chez EnerBioFlex, bureau d'étude spécialisé en énergétique pour le monde agricole.

La FRSEA Centre prend les devants

À l'issue d'un appel d'offres, la FRSEA Centre a retenu le fournisseur Lucia Énergie pour proposer des contrats à moindre prix aux agriculteurs de la région. « Ce petit fournisseur d'électricité basé dans l'Hérault propose des offres spécialement destinée aux agriculteurs », explique Sophie Siri, en charge de ce dossier à la FDSEA du Loir-et-Cher. Ainsi, les exploitations qui consomment moins de 36 kVA bénéficient d'une réduction de 20 % sur le prix d'un abonnement chez Lucia Énergie pour un contrat de trois ans avec un prix fixe sur l'énergie convenu au moment de l'engagement. « En plus, le fournisseur garantit un prix fixe de l'acheminement et s'engage à payer la différence si les taxes liées au transport augmentent. Dans un contexte d'augmentation des prix, ces contrats longs sont très intéressants », souligne Sophie Siri. Pour les exploitations qui consomment plus de 36 kVA, Lucia Énergie offre l'abonnement. « Chez EDF, l'abonnement coûte environ 500 €/an », précise Sophie Siri. Outre les prix, un autre point a retenu l'attention de la FRSEA Centre : « Nous bénéficions d'un conseil de proximité. Une personne est disponible pour nous. Et lorsque nous les appelons, nous ne risquons pas de tomber sur une plateforme téléphonique. »

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