Visite commentée du site internet du réseau européen ENDURE, au service de la protection intégrée des plantes

C'est il y a bientôt quatre ans, en février 2007, que le réseau ENDURE a été créé(1). Il est temps d'aller sur son site internet pour voir ses réalisations, que l'on puisse ou pas se rendre à Paris à la fin de ce mois de novembre pour une présentation en direct. Cet article revient sur ce site où l'on trouve des outils pour s'informer (dont des articles parus dans Phytoma !), pour échanger, chercher et former les agriculteurs. À quel propos tout cela ? À celui de la protection intégrée des cultures : ENDURE est un réseau européen pour une gestion durable des stratégies de protection des cultures. En route pour la visite guidée.

Après avoir reposé pendant près d'un demisiècle sur l'emploi de pesticides, l'agriculture européenne et, a fortiori, française évoluent dans le cadre d'un contexte réglementaire visant à réduire les impacts de l'utilisation des produits phytosanitaires. Cela encourage la mise en œuvre de stratégies de lutte intégrée agissant à la fois sur la réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques quand cela est possible et sur la préconisation de méthodes préventives, biologiques, physiques et biotechniques.

Ce qu'est ENDURE

C'est dans ce contexte qu'a été créé ENDURE, réseau d'excellence européen pour l'utilisation durable des stratégies de protection des cultures (European Network for DURable Exploitation of Strategies of Crop Protection en anglais).

La Commission européenne finance, dans le cadre du sixième programme-cadre sur la Qualité et la sécurité de l'alimentation, le fonctionnement de ce réseau qui réunit plus de 300 chercheurs de 16 institutions de 10 pays européens : organismes de recherche, universités, services de vulgarisation agricole et fédération de l'industrie productrice de moyens biologiques.

Depuis sa création en 2007, l'objectif global du réseau a été d'aider à développer des systèmes agricoles moins dépendants des pesticides, tout en maintenant les profits et les rendements. Cette ambition est partagée par la Commission européenne qui, l'an dernier, a introduit un ensemble de nouvelles lois organisant à la fois la disponibilité des pesticides et la façon dont ils sont utilisés dans l'agriculture européenne.

Sur trois piliers

Le réseau a abouti à la constitution d'une communauté pan-européenne permanente de la recherche agricole. Son ambition est de jouer un rôle clef dans la réponse à ces défis par des programmes de travail visant à fournir des solutions pour les agriculteurs sur le court et le long terme. Cette communauté aidera les décideurs à mettre en œuvre la nouvelle législation et facilitera la circulation de l'information et le transfert des résultats auprès des conseillers agricoles et des agriculteurs.

Pour cela, le réseau fait appel à une communauté scientifique couvrant les domaines des sciences de la vie, de l'économie et de la sociologie – les trois piliers de l'agriculture durable.

Il interagit avec de nombreux partenaires organisés au sein d'un comité (External Advisory Board) et d'un club d'intérêt qui peuvent apporter aide et conseil par leur vision externe.

La valeur ajoutée du réseau provient de la combinaison de multiples savoir-faire et de l'exploitation de comparaisons transnationales qui lui permettent d'identifier les solutions les plus prometteuses prêtes à l'emploi, ou à venir.

Documents en anglais et français

Un des objectifs majeurs d'ENDURE était de produire, à l'issue de ses quatre premières années de fonctionnement, des outils utilisables par les différents acteurs de la protection des plantes qu'ils soient conseillers, décideurs politiques, chercheurs ou formateurs. La page d'accueil (figure 1) est étudiée pour cela.

L'ensemble des productions d'ENDURE sont désormais disponibles en anglais sur le site internet du réseau. Un grand nombre de documents sont également disponibles en français. Il nous a paru judicieux de fournir quelques clefs pour faciliter la découverte de ce site.

Il est organisé autour de quatre thèmes pour lesquels le réseau propose des outils : chercher, échanger, informer, former.

Chercher : un laboratoire virtuel pour les chercheurs

Le laboratoire virtuel propose un accès à la communauté scientifique du réseau ainsi qu'à des bases de données.

Parmi les outils originaux développés, on peut trouver des bases d'information sur les maladies du blé (Eurowheat) et du mildiou de la pomme de terre (Euroblight), de quantification des dommages des ravageurs (Quantipest), de la résistance des ennemis aux pesticides (Euresist) et des modèles pour la gestion des mauvaises herbes (Weed trait database).

Toutes ces bases sont accessibles à partir de la page d'accueil du laboratoire virtuel en cliquant sur la case « Plateforme » (Figure 2).

Par exemple QuantiPest (Figure 3) vise à aider à définir les protocoles pour caractériser les dégâts et les populations de ravageurs en procurant les sources d'informations, méthodes et protocoles les plus pertinents. Il n'a pas pour but de lister tous les protocoles disponibles pour caractériser les populations et dégâts des ravageurs, mais plutôt de procurer des références, méthodes et outils pour aider à développer des protocoles adaptés à des objectifs spécifiques. Il rend ainsi plus facile le partage des méthodes et protocoles entre les membres d'ENDURE.

La plateforme est conçue pour faciliter le partage de données et la mise en place d'un réseau d'expérimentation à travers les infrastructures variées des partenaires participant au laboratoire virtuel. Intéressant surtout les techniciens et chercheurs, elle peut être utilisée pour inclure des informations sur les cultures et ravageurs étudiés par les partenaires d'ENDURE.

Échanger : un lieu pour cela, du champ au laboratoire

Le réseau se veut un lieu où le flux d'information descend depuis le laboratoire jusqu'au champ, mais remonte également.

C'est dans cet esprit qu'il a produit un certain nombre d'avis et de rapports accessibles sur le site, et notamment l'étude prospective sur les scénarios possibles d'évolution de la protection des cultures dans les vingt prochaines années (ENDURE's Foresight Study : European Crop Protection in 2030 : http://www.endurenetwork.eu/endure_publications/endure_publications2).

Le réseau des conseillers (ENDURE Network of Advisers) a été particulièrement conçu pour permettre aux acteurs de terrain de réagir, donner leur avis et peut-être influer sur la recherche. Il suffit de s'inscrire en ligne !

Une lettre d'information spécialement dédiée aux conseillers et un certain nombre de questionnaires seront diffusés régulièrement (http://www.endure-network.eu/what_is_endure/endure_network_of_advisers).

Informer, un centre accessible

Le réseau a produit et rassemblé un certain nombre de documents. Ceux-ci sont organisés autour du centre d'information d'ENDURE (ENDURE Information Centre), et aussi accessibles directement sur le site (Figure 4).

Le centre d'information d'ENDURE (ENDURE IC) est une base de données, constituée actuellement de près de 1 000 documents, qui a pour vocation de diffuser de l'information sur la protection des cultures afin de construire une vision globale des moyens utilisés dans ce domaine, à l'échelle européenne.

Il est organisé selon quatre entrées, les cultures, les organismes nuisibles, les méthodes (de lutte) et les pays ; mais une recherche rapide est également disponible en haut de l'écran à droite. Le centre d'information ENDURE permet aux techniciens d'avoir accès à des articles provenant de toute l'Europe sur des techniques appliquées à ce jour, ou à venir.

En ce qui concerne les articles en langue française, les documents proviennent des instituts techniques partenaires (ACTA, Arvalis Institut du végétal, CETIOM, IFV), de l'INRA mais également de Phytoma, de communications issues des colloques AFPP et enfin de partenaires belges et suisses après accord de leurs auteurs.

Le centre d'information propose un accès direct aux livres, rapports, prises de position produits par le réseau. L'ensemble de ces documents sont inclus dans le centre d'information grâce à une équipe multi nationale.

Ce centre est ouvert pour introduire vos documents. Il vous suffit de prendre contact avec le référent national. Philippe Delval (ACTA) est le référent pour l'Europe francophone.

Sur la page d'accueil du site du réseau, vous avez accès à l'ensemble des derniers résultats du réseau, mais aussi à des documents, dossiers et publications, sous forme de plaquettes téléchargeables (http://www.endure-network.eu/endure_publications2) ou à des prises de position (http://www.endure-network.eu/about_crop_protection/endure_position_papers).

Enfin des outils sur le blé et la pomme de terre sont directement accessibles (Figures 5a et 5b, page 13).

Former : le guide du formateur en lutte intégrée, astuces et méthodes pour l'action

étant donné la complexité de la protection intégrée, il n'est pas toujours aisé d'établir ce qui peut être fait pour améliorer la formation et l'éducation des conseillers et agriculteurs afin d'en étendre et d'en intensifier la pratique. C'est pourquoi une équipe de chercheurs a travaillé à l'élaboration d'un guide de formation.

Ce guide n'est pas destiné à produire une formation « clef-en-main », notamment à cause de la diversité des systèmes de production présents en Europe. Il fournit plutôt des pistes aux formateurs pour les aider à créer leurs propres modules d'enseignement.

Le guide de formation (Figure 6) comprend non seulement des informations sur les matériaux techniques, outils de lutte contre les ennemis des cultures, outils de gestion et options applicables en protection intégrée, mais aussi un matériel de méthodologie d'action de formation. Celui-ci permet d'accroître la composante participative lors de ces activités en salle mais aussi sur le terrain. En effet, l'intégration de la démarche de lutte intégrée dans les pratiques nécessite une approche participative, propice aux processus d'apprentissage.

Le guide est composé de différents éléments, incluant fiches d'information, dépliants, recommandations et liens, selon 4 points principaux demandés par les formateurs :

– arguments pour convaincre des avantages de la protection intégrée, ce qui peut aider au changement initial à travers des discussions et réflexions, aider à établir un groupe ou permettre au continuum de progrès de la protection intégrée de se maintenir ;

– méthodes de formation ; la nécessité d'une plus grande approche participative est une demande commune des formateurs mais aussi des participants ; ENDURE en a l'expérience et peut aussi se baser sur l'expertise d'une équipe de sociologues ; l'approche participative permet l'échange entre intervenants et participants et, fait important, entre les participants eux-mêmes. Elle permet également de faciliter l'apprentissage à travers le partage des expériences et l'expérimentation ;

– outils de formation : une information de post-apprentissage pourra être employée par les formateurs, incluant les sources d'information à la fois nationales et de l'Union européenne et les études de cas des programmes participatifs de protection intégrée ;

– exemples de modules de formation et introduction aux principes généraux de la lutte intégrée.

Novembre 2010 et après

L'ensemble de ces outils sera présenté à Paris les 24, 25 novembre 2010 (en anglais) et le 26 novembre 2010 (en français) dans le cadre d'une conférence internationale (voir p. 8).

Après cette conférence, le réseau se poursuivra sous la forme d'un ERG (European Research Group) qui restera l'interlocuteur privilégié, dans ce domaine, des acteurs politiques, économiques et techniques de la protection des plantes. Dans l'avenir, son ambition est de devenir une ressource clef pour ses trois publics cibles – les conseillers, les décideurs et les chercheurs – qui sont mobilisés dans les 27 états membres par le contexte politique actuel.

Les principaux objectifs de cet ERG sont d'ores et déjà clairement définis :

– aider à coordonner la recherche scientifique et appliquée européenne en protection des cultures,

– promouvoir les priorités de la recherche dans les programmes nationaux et européens et, à long terme dans les programmes stratégiques de la Commission européenne,

– renforcer et mettre à jour nos capacités de recherche,

– soutenir le développement et la mise en œuvre des politiques concernant la protection des cultures,

– soutenir les services de vulgarisation par des outils de diffusion actualisés.

Sur ce dernier point, le Centre d'information ENDURE poursuivra son développement pour devenir la principale source d'information sur les pratiques de protection des cultures. De nouveaux matériels de formation seront produits afin d'aider les agriculteurs dans leur transition vers la lutte intégrée. Le réseau des conseillers agricoles poursuivra les échanges autour de diverses expériences nationales et de savoir-faire et discutera des nouveaux défis posés par les nouvelles exigences réglementaires.

L'avenir de ce réseau est également d'engager un certain nombre de programmes de recherche et de développement sur le thème de la protection intégrée des cultures.

C'est ainsi que le programme PURE (Pesticide Use-and-risk Reduction in European Farming Systems with Integrated Pest Management), financé par la Commission européenne dans le cadre du septième programme-cadre, sur la qualité et la sécurité de l'alimentation, démarrera en 2011.

Ce programme, présenté brièvement lors de la conférence de Paris, sera détaillé dans un futur numéro de Phytoma ainsi que lors de la 4e Conférence internationale AFPP sur les « Méthodes alternatives en protection des cultures », à Lille, en mars 2011. notes

<p>(1) Voir « L'INRA et ENDURE », dans <i>Phytoma</i> n° 603, avril 2007, p. 4 et « Écouter Pierre Ricci et Marco Barzman, coordinateurs scientifiques du réseau ENDURE », dans <i>Phytoma</i> n° 607, septembre 2007, p. 6.</p> <p>* ACTA,** CIRAD et *** INRA.</p>