Oscar Stapel, directeur de la Stepp Bretagne(1), m'accueille avec une pointe d'accent, non pas breton mais venu tout droit du pays des tulipes. Tout droit, pas exactement : avant de poser ses valises à Langueux dans les Côtes-d'Armor, cet ingénieur agronome néerlandais a travaillé en Zambie, en Indonésie et aux USA. D'abord spécialisé en agriculture tropicale, il complète sa formation par une spécialisation en protection des plantes et en entomologie à l'Université de Wageningen (Pays-Bas). Puis il travaille aux USA pendant six ans sur la protection biologique intégrée (PBI) du coton.
Des essais pour les horticulteurs
Fin du programme de recherche et retour en Europe en 1999. Son épouse a trouvé un poste à Rennes et lui, armé de son expérience en PBI, postule à la direction de la Stepp Bretagne, l'une des 11 stations de l'Astredhor(2). Elle compte actuellement une trentaine d'adhérents horticulteurs et conseillers privés bretons pour lesquels elle réalise des essais. Une partie est également conduite pour l'Arexhor Pays de la Loire, autre station basée près d'Angers. De ce fait, 55 % du budget de fonctionnement provient des régions Bretagne et Pays de la Loire, et de FranceAgriMer.
40 % sur la protection des plantes
Objectifs de ces essais réalisés sous serres en verre, tunnels ou en extérieur : améliorer les techniques culturales et la qualité des produits, élargir la gamme des plantes en pots et à massif et maîtriser leur protection phytosanitaire.
Les thèmes étudiés émergent de la rencontre annuelle avec les adhérents en septembre, au cours de laquelle sont restitués les résultats des essais de l'année. S'ensuit pour les propositions un parcours de validation : conseil d'administration de la Stepp, conseils régionaux Bretagne et Pays de la Loire, et enfin l'Astredhor.
En 2012, Oscar Stapel a ainsi conduit quinze essais (dont 40 % consacrés à la protection des plantes) avec l'aide d'un deuxième ingénieur et d'un technicien.
« J'y passe moins de temps que mes collègues car 30 % de mon temps est consacré à des tâches administratives. » La station se situant au sein même de l'école d'horticulture de Saint-Ilian, qui forme de la 4e à la licence pro, des élèves viennent en travaux pratiques ou en stage sur la station. « Sans leur contribution, nous ne pourrions pas réaliser tous ces essais. »
Tester des produits... pas seulement chimiques
Les produits sont testés soit avant autorisation (essais pour les fournisseurs) soit une fois sur le marché pour vérifier leur efficacité.
« La préoccupation majeure depuis quelque temps est bien de réduire à tout prix l'utilisation de produits chimiques, notamment dans l'optique d'Ecophyto 2018. Pour cela, nous testons des programmes de traitements incluant des SDN (stimulateurs de défenses naturelles), des auxiliaires dans le cadre de la PBI, ou encore des traitements localisés si l'emploi de produits plus agressifs s'avère nécessaire. »
L'an dernier, la station a ainsi testé des huiles essentielles et végétales contre les thrips, ravageurs difficiles à éliminer. Les pucerons noirs sur chrysanthèmes et les aleurodes sont également à suivre dans la région.
Les SDN à la loupe
Quant aux SDN, sujet de prédilection d'Oscar Stapel, l'horticulture a une longueur d'avance sur les grandes cultures.
« Le nombre de matières actives phytosanitaires disponibles étant faible pour notre secteur, dès 2002 les horticulteurs nous ont demandé de les étudier. » Sur une trentaine de SDN mis en essais suite au criblage effectué par le laboratoire Vegenov, les plus efficaces (une dizaine) ont été intégrés dans des programmes fongicides. En 2012, la Stepp en a ainsi testé sur rouille blanche du chrysanthème, oïdium du rosier, mildiou du hébé (véronique arbustive) et de l'Impatiens walleriena.
Résultat : une réduction de 20 % du nombre de traitements anti-oïdium sur rosier en pots. Ou encore, un engrais à base d'algues et d'acides aminés permet de se passer de fongicides anti-mildiou sur le hébé. De quoi redonner de l'espoir aux horticulteurs bretons qui avaient vu la production fuir la région à cause de cette maladie. La station a aussi joué un rôle clé dans l'autorisation du SDN Insimmo(3) en 2012 contre la rouille blanche du chrysanthème.
L'Astredhor étant en réorganisation( 4), depuis janvier 2013 la Stepp fait partie d'une unité expérimentale inter-régionale (l'Astredhor Loire-Bretagne) regroupant quatre stations(5).
Vers de nouveaux projets
Pour Oscar Stapel, cette nouvelle organisation sera source de dynamisme et devrait donner plus de visibilité en matière de budget à l'heure où l'aide des Régions et de l'état se réduisent.
« Nous espérons ainsi avoir plus de contacts avec la recherche fondamentale pour faire émerger de grands projets, pouvoir travailler sur des projets nationaux, voire européens, et prétendre ainsi à d'autres subventions. »
Un nouvel horizon donc pour la Stepp, et de multiples raisons d'y rester pour son directeur néerlandais, plus motivé que jamais, et bien acclimaté à la Bretagne !
<p>(1) Station technique expérimentale de plantes en pots et à massifs.</p> <p>(2) Association nationale des structures d'expérimentation et de démonstration en horticulture</p> <p>(3) Autre nom de Bion 50 WG, voir p. 28.</p> <p>(4) Dans le cadre de son renouvellement de qualification en tant qu'institut technique pour l'horticulture. Voir page 6.</p> <p>(5) Les deux bretonnes Cate et Stepp, l'Arexhor Pays de la Loire et le CDHRCentre à Orléans.</p>