S'il y a un ouvrage que tout acteur de la protection des végétaux connaît bien pour y avoir cherché le nom d'une substance active, l'usage d'une spécialité commerciale ou encore un point de réglementation, c'est bien l'Index phytosanitaire. Mais ce que l'on connaît moins, voire pas du tout, c'est tout le travail réalisé dans l'ombre pour qu'il sorte, actualisé, chaque année en décembre, et surtout celle qui en est le chef d'orchestre : Alice Baudet-Couteux.
Pourtant, sa formation en œnologie-ampélologie (étude de la vigne) ne la prédestinait pas à cette mission. À la sortie de l'université, elle reste dans le monde des sens en intégrant l'Itepmai, l'Institut technique interprofessionnel des plantes à parfum, médicinales et aromatiques. Sa mission est alors de mettre en place une base de données pour les homologations des produits phytosanitaires destinés à ce secteur.
Chargée de mission puis responsable
C'est ce premier pas dans le monde des instituts techniques, des produits de santé végétale et des bases de données qui la conduit, en 2001, tout droit au service valorisation- édition-diffusion de l'Acta, association qui fédère quinze instituts en élevage et cultures.
Au départ chargée de mission pour aider à la mise à jour de l'Index, au bout d'un an Alice Baudet-Couteux en devient responsable et y consacre 70 % de son temps.
Travail de fourmi colossal
« Ma mission est d'actualiser chaque année les données relatives aux produits phytosanitaires et aux moyens alternatifs dans une base de données, explique Alice. De là en découle l'édition annuelle de l'Index phyto. Un travail de fourmi colossal ! En effet, tiré à 23 000 exemplaires environ, l'Index qui en est à sa 50e édition, est un quinquagénaire bien portant : non que le nombre de spécialités progresse (2 500 répertoriées), mais bien parce que la partie réglementaire prend de plus en plus d'ampleur !
Bientôt en direct et en continu
Le compte à rebours démarre dès avril. Un formulaire de mise à jour est envoyé à près de 135 sociétés ou correspondants, à retourner pour le 15 juin. Avec l'aide de Violaine Lejeune, une collègue affectée un tiers de son temps à l'Index, Alice saisit et vérifie les nouvelles données en s'appuyant sur e-phy, Agritox(1) et The Pesticides Manual, publié au Royaume-Uni.
« S'il y a divergence, je contacte la firme pour éclaircir la question. »
Mais les étapes d'envoi de formulaire papier et double saisie seront bientôt du passé, car à l'occasion de la 50e édition, cette procédure de mise à jour se modernise.
« Nous nous sommes dotés d'une application qui va permettre aux firmes de se connecter à la base de données pour nous communiquer directement les changements concernant leurs produits, au fur et à mesure de leur apparition. » Une fois validée par Alice et/ou sa collègue, la nouvelle fiche remplacera automatiquement l'ancienne. On imagine le soulagement que cela va apporter. Pour l'Index 2014, Alice a testé la nouvelle procédure avec deux sociétés qu'elle a auparavant formées. « L'objectif est de ne plus avoir de formulaires papier d'ici trois à quatre ans. Les sociétés vont être formées au fur et à mesure. »
Pour éviter les oublis, elles recevront toujours un courrier en avril leur demandant si elles ont des modifications à communiquer.
Veille réglementaire
Deuxième partie de l'Index : la réglementation. Tout au long de l'année, Alice réalise une veille réglementaire en parcourant les journaux officiels de la République française et de la Communauté européenne, les bulletins officiels du ministère de l'Agriculture, ainsi qu'Agrilegis (site internet qui reprend les documents précédents) afin de recouper les informations. Deux collègues lui prêtent main-forte pour la réglementation en matière de transport, stockage et utilisation des produits phytosanitaires ainsi qu'Adivalor sur la gestion des EVPP et des PPNU. Une fois toutes les informations « produit » et « réglementation » saisies, Alice procède à trois relectures de septembre à mi-octobre avant de lancer l'impression des 23 000 exemplaires.
La vie hors de l'Index
Alice renseigne également par téléphone les usagers de l'Index sur la façon de l'utiliser, sur un produit qu'ils ne trouvent pas, des questions de réglementation…
Mais il y a une vie hors de l'Index. Membre du bureau de l'AFPP, Alice participe au groupe de travail sur les méthodes alternatives. Elle représente l'Acta au comité technique opérationnel usages orphelins de la DGAL.
« L'objectif est de les anticiper et trouver des solutions pour y pallier. » Depuis deux ans, elle participe au comité de rédaction de Phytoma. Dernière mission, à l'Acta cette fois-ci : le suivi éditorial d'ouvrages édités par l'association.
Offrir d'autres services
Pour l'avenir, Alice espère que la nouvelle application permettra d'offrir de nouveaux services web à partir des données entrées pour l'Index. L'Acta prépare une étude afin de mieux connaître les attentes du terrain.
« Car l'avenir pour l'Index, c'est d'évoluer en phase avec les besoins et les moyens de communication de son temps », conclut Alice, ravie de rester aux commandes de l'ouvrage pour entamer ce deuxième demi-siècle avec plein de projets dans les cartons.
<p>(1) Base de données sur les propriétés physiques et chimiques, la toxicité, l'écotoxicité, les données réglementaires des matières actives.</p>