DOSSIER - Méthodes alternatives

Des fleurs dans les vergers pour lutter contre le puceron cendré

KARINE LELEU*, LUDOVIC TOURNANT* ET SANDRINE OSTE*, D'APRÈS LEUR COMMUNICATION À LA 6E COMAPPI DE L'AFPP, À LILLE, DU 21 AU 23 MARS 2017 - Phytoma - n°702 - mars 2017 - page 42

Améliorer la biodiversité fonctionnelle des auxiliaires en verger de pommier est une méthode de protection contre le puceron Dysaphis plantaginea.
1. Dispositif du volet 1 de l'étude menée ici : modalité avec moustiquaire en permanence. Photo : Fredon Nord Pas-de-Calais

1. Dispositif du volet 1 de l'étude menée ici : modalité avec moustiquaire en permanence. Photo : Fredon Nord Pas-de-Calais

2. Dispositif du volet 1 de l'étude menée ici : modalité avec moustiquaire la nuit. Photo : Fredon Nord Pas-de-Calais

2. Dispositif du volet 1 de l'étude menée ici : modalité avec moustiquaire la nuit. Photo : Fredon Nord Pas-de-Calais

3. Dispositif du volet 1 de l'étude menée ici : modalité sans moustiquaire. Photo : Fredon Nord Pas-de-Calais

3. Dispositif du volet 1 de l'étude menée ici : modalité sans moustiquaire. Photo : Fredon Nord Pas-de-Calais

Tableau 1 : classes de recouvrement

Tableau 1 : classes de recouvrement

Tableau 2 : recouvrement des espèces végétales dans la bande fleurie de Loos-en-Gohelle (Pas-de-Calais)

Tableau 2 : recouvrement des espèces végétales dans la bande fleurie de Loos-en-Gohelle (Pas-de-Calais)

Le puceron cendré du pommier Dysaphis plantaginea (Passerini) peut occasionner de sérieux dégâts. C'est l'un des principaux ravageurs des pommiers du bassin transfrontalier franco-wallon. Les arboriculteurs du bassin ont sollicité des recherches de moyens alternatifs de lutte contre ce ravageur.

Favoriser les auxiliaires

Parmi les moyens alternatifs de lutte contre D. plantaginea, les zones de compensation écologique (bandes fleuries, haies, fauches tardives...) semblent offrir un écosystème favorable aux auxiliaires contribuant à la maîtrise des populations du ravageur (Delgado, 2009 ; Garcin et Vandrot, 2003). Cependant, peu de travaux avaient démontré l'effet direct d'une bande fleurie sur le contrôle du puceron (Bostanian et al., 2004). Ce point est étudié dans le cadre du projet TransBioFruit depuis 2009 :

- volet 1. Évaluation de l'effet de l'implantation d'une bande fleurie sur le contrôle du puceron cendré avec détermination de la distance d'efficacité de la bande fleurie et identification du type d'auxiliaires responsables du contrôle du bioagresseur ;

- volet 2. Comparaison d'efficacité de divers mélanges végétaux en verger par la quantification des auxiliaires présents au cours du temps sur chaque type de mélange.

Étude de l'efficacité d'une bande fleurie

Mélange de quinze espèces florales et plantation de jeunes pommiers

Le dispositif du volet 1 a été mis en place en 2009 sur le site de la Fredon Nord Pas-de-Calais, à Loos-en-Gohelle (Pas-de-Calais). Une bande fleurie (mélange « verger intégré » de la firme Ecosem) a été semée le 10 juin, sur 30 mètres de longueur et 1 mètre de largeur. Les quinze espèces la composant sont : Achillea ptarmica, Centaurea cyanus, Centaurea thuillieri, Chrysanthemum segetum, Daucus carota, Echium vulgare, Geranium pyrenaicum, Hypericum perforatum, Leontodon hispidus, Leucanthemum vulgare, Malva moschata, Origanum vulgare, Papaver rhoeas, Silene latifolia alba et Tragopogon pratensis.

Trois rangs de sept pommiers de la variété Topaz ont été implantés perpendiculairement à la bande fleurie, à l'automne 2009. Ces rangs étaient espacés de 4 mètres et les pommiers suivis situés à différentes distances de la bande fleurie : sur la bande, à 2, 4, 8, 16, 32 et 44 mètres.

Chaque rang a été « aménagé » en modalité le 3 juin 2010 : arbres couverts d'une moustiquaire en permanence, arbres couverts seulement la nuit (structure ouverte le jour), arbres sans moustiquaire (photos 1, 2 et 3). Le but était d'isoler périodiquement ou en permanence les arbres des auxiliaires venant de la bande fleurie afin d'évaluer l'effet de cette dernière sur les populations de pucerons. L'ouverture des moustiquaires le jour vise à distinguer l'activité diurne des auxiliaires de leur activité nocturne.

Les 20 et 27 mai 2010, les pommiers ont été infestés par des pucerons cendrés prélevés en vergers du Nord-Pas-de-Calais.

Observations et notations

Les bandes fleuries ont été observées intégralement afin d'évaluer le recouvrement de chaque espèce végétale (spontanée ou semée) : notations tous les quinze jours de début juillet à début septembre en 2009, et de mi-juin à début août en 2010 et 2011 (périodes différentes mais stades végétatifs identiques), selon l'échelle de recouvrement de Van Der Maarel (Tableau 1).

Tous les dix jours, de mi-juillet à mi-septembre en 2009 et de mi-juin à mi-août en 2010 et 2011 (stades végétatifs identiques), un prélèvement des insectes présents au sein de la bande fleurie a été effectué. Il a été réalisé à l'aide d'un aspirateur à insectes de type « D-VAC » (aspirateur à feuilles équipé d'un manchon inséré dans son tube d'aspiration, retenant tous les insectes prélevés) passé durant 2 minutes sur la bande fleurie.

Les échantillons ont été identifiés jusqu'à l'ordre : diptères (tachinaires et syrphes), névroptères (hémérobes et chrysopes), dermaptères (forficules), coléoptères (coccinelles, cantharides, staphylins, etc.), thysanoptères (aéolothrips), hyménoptères (ichneumons, chalcidiens, braconidés), hétéroptères (mirides, anthocorides) et aranéïdes (Chouinard, 2010).

Sur chaque pommier, les pucerons cendrés (population totale, taux de pousses infestées) et les auxiliaires ont été dénombrés sur dix pousses par arbre chaque semaine de fin mai (introduction des pucerons) à mi-août en 2010, et de mi-juin à mi-août en 2011.

Résultats sur la végétation

Recouvrement la première année

En 2009, la floraison de la bande fleurie a débuté mi-juillet et s'est prolongée jusque mi-septembre avec un pic mi-août.

Parmi les vingt-trois espèces identifiées dans la bande fleurie en 2009 (Tableau 2, page suivante), douze sont spontanées, c'est-à-dire non issues du mélange « verger intégré ». Seules onze espèces du mélange se sont développées : Achillea ptarmica, Centaurea cyanus, Centaurea thuillieri, Chrysanthemum segetum, Daucus carota, Geranium pyrenaicum, Leontodon hispidus, Leucanthemum vulgare, Malva moschata, Papaver rhoeas et Silene latifolia alba.

Sept espèces ont connu un développement important (indice de Van Der Maarel supérieur ou égal à 5 à une période donnée) : deux « spontanées » (Sonchus sp. et Senecio vulgaris) et cinq issues du mélange semé (Centaurea cyanus, Centaurea thuillieri, Daucus carota, Malva moschata et Papaver rhoeas). Trois d'entre elles (C. cyanus, P. rhoeas et Senecio vulgaris) ont vu leur indice atteindre ou dépasser 7.

Les espèces les plus précoces (Brassica napus, Centaurea cyanus, Lamium purpureum, Senecio vulgaris, Silene latifolia alba, Silene vulgaris, Solanum nigrum et Veronica persica) ont commencé à fleurir vers mi-juillet. Certaines (Brassica napus, Centaurea cyanus, Senecio vulgaris et Silene vulgaris) ont eu une floraison longue : au moins six semaines.

Deuxième année, après ressemis

En 2010, la bande fleurie a été ressemée. Malgré cela, six des espèces semées étaient absentes. Il s'agit de Chrysanthemum segetum, Echium vulgare, Geranium pyrenaicum, Leontodon hispidus, Origanum vulgare et Tragopogon pratensis (Tableau 2).

Sept espèces ont atteint ou dépassé un indice de recouvrement de 5 : Achillea ptarmica, Centaurea thuillieri, Daucus carota, Glechoma hederacea, Leucanthemum vulgare, Malva moschata et Potentilla repens.

Des adventices spontanées visibles en 2009 ont disparu en 2010 : Brassica napus, Capsella bursa-pastoris, Chenopodium sp., Cirsium sp., Euphorbia helioscopa, Lamium purpureum, Matricaria sp., Senecio vulgaris, Silene vulgaris, Solanum nigrum, Sonchus sp. et Veronica persica. D'autres sont apparues : Cichorium intybus, Convolvulus arvensis, Glechoma hederacea, Plantago lanceolata, Potentilla repens, Prunella vulgaris, Ranunculus repens, Trifolium dubium et Trifolium repens.

La floraison a débuté début juin avec Leucanthemum vulgare, et s'est poursuivie jusque début septembre. Le pic moyen de floraison s'est situé fin juin/début juillet.

Troisième année, le « semé » domine

En 2011, la bande fleurie n'abritait plus que seize espèces différentes. Dix étaient issues du mélange semé, dont cinq ayant atteint ou dépassé le niveau 5 : Achillea ptarmica, Centaurea thuillieri, Daucus carota, Hypericum perforatum et Leucanthemum vulgare. Les six espèces spontanées étaient Brassica napus, Capsella bursa pastoris, Cichorium intybus, Cirsium sp., Prunella vulgaris et Silene vulgaris. La floraison a duré de début juin à fin août avec un pic de mi à fin juillet.

En trois ans, les espèces du mélange semé ont pris le pas sur les adventices spontanées jusqu'à recouvrir 90 % de la zone d'étude en 2011 (67 % en 2009 et 85 % en 2010).

Résultats sur les auxiliaires et le ravageur

Auxiliaires : années contrastées

Selon les prélèvements effectués sur les bandes fleuries (Figure 1), les pics de population de l'ensemble des auxiliaires sont intervenus mi-août en 2009, début juillet et mi-août en 2010 et fin juillet en 2011, soit pendant les pics de floraison de la bande fleurie. Des variations quantitatives et qualitatives importantes ont été observées.

En 2009, les sept ordres d'insectes cités ci-avant ainsi que des aranéides (Figure 2)ont été recherchés à la Clinique du végétal® (laboratoire d'entomologie de la Fredon Nord Pas-de-Calais). Le nombre d'hyménoptères capturés (41 à 113 par semaine) a largement dépassé celui des autres arthropodes (0 à 48 selon la semaine, aucun dermaptère).

En 2010, les populations d'hyménoptères (chalcidiens surtout) ont été très largement supérieures (70 à 450 individus par semaine) à celles des autres arthropodes (une à 34 par semaine) avec deux pics d'activité, les 9 juillet et 9 août.

En 2011, leur présence a été moins importante (9 à 82 selon les semaines) tandis que les diptères ont été davantage présents notamment en août (65 captures). Les niveaux de population de la plupart des arthropodes sont restés bas à moyens (0 à 29 captures par semaine).

L'influence du climat sur les populations d'arthropodes est probable. En 2010, le printemps froid et sec suivi d'un été chaud et sec a pu favoriser les insectes. En 2011, le printemps chaud et sec puis l'été froid et pluvieux expliquent en partie la plus faible dynamique des populations.

Populations sur pommiers

Une forte corrélation a été notée entre les niveaux d'auxiliaires et le pourcentage de pousses infestées par le puceron cendré sur pommiers. Plus les auxiliaires étaient nombreux et moins le nombre de pousses infestées de pucerons était important.

En 2010 et 2011, l'évolution des populations du puceron a présenté le même schéma : un fort accroissement sur la modalité « moustiquaire en permanence » puis une baisse progressive, une légère hausse sur la modalité « sans moustiquaire » avant une rapide diminution et une baisse continue sur la modalité « moustiquaire la nuit » (voir Figure 3). Chez les auxiliaires, il existe de fortes différences entre la modalité « moustiquaire en permanence » (4 % des effectifs toutes modalités confondues) et les modalités « moustiquaire la nuit » (47 %) ou « sans moustiquaire » (49 %).

En parallèle, les niveaux de population de pucerons cendrés tendent à augmenter avec l'éloignement de la bande fleurie. En 2010, la corrélation a été constatée jusqu'à 16 m de la bande et en 2011, jusqu'à 4 m. Les comptages d'auxiliaires sur les pommiers montrent une tendance à la baisse avec l'éloignement de la bande fleurie.

Ce constat est à relativiser. En effet, les populations d'auxiliaires ont pu augmenter et celles de pucerons cendrés diminuer sur les arbres les plus éloignés (figure non montrée). Ceci peut s'expliquer par la présence d'une haie, potentiel réservoir d'auxiliaires.

Comparaison de couverts

Deux mélanges semés et deux modes de gestion de la flore spontanée

Pour le volet 2 de l'étude, quatre couverts ont été comparés chez un arboriculteur en production biologique, à Rumegies, dans le Nord. Chacun représentait une modalité :

- le mélange « verger intégré » d'Ecosem ;

- le mélange « couleurs » de la société Phytosem avec 80 % de graminées (fétuques ovine, rouge semi-traçante et rouge traçante) et 20 % de florales (Achillea millefolium, Hypericum perforatum, Adonis aestivalis, Lathyrus odoratus, Alyssum maritimum/Lobularia, Leucanthemum vulgare, Anthemis tinctoria, Linum perenne, Anthyllis vulneraria, Linum grandiflorum, Antirrhinum majus, Lupinus perennis, Bellis perennis, Malva moschata, Calendula officinalis, Nigella sativa, Centaurea cyanus, Papaver rhoeas, Cerastium tomentosum, Ranunculus acris, Cheiranthus cheiri, Salvia pratensis, Chrysanthemum segetum et Saponaria ocymoïdes) ;

- flore spontanée non tondue (fauche) ;

- flore spontanée tondue.

Le dispositif a été mis en place le 7 mai 2010 avec trois répétitions par modalité. Chaque couvert végétal, de 25 m de long sur 1 m de large, était situé en bord du verger, à 4 mètres des pommiers.

Observations et notations

Les couverts ont été comparés selon leurs niveaux de recouvrement (espèces du mélange originel et adventices) et leur attractivité vis-à-vis des auxiliaires. Les notations (recouvrement sur la totalité du couvert selon l'échelle de Van Der Mareel) et prélèvements au D-VAC ont été effectués tous les dix jours de mi-juin à début août en 2010 et de début juillet à mi-août en 2011.

Résultats obtenus

Végétation : il a fallu ressemer

Les bandes fleuries semées en 2010 se sont mal développées. Malgré des faux semis, les adventices ont occupé 90 % des aménagements. Les espèces semées les plus développées étaient Centaurea cyanus, Papaver rhoeas et Linum grandiflorum mais avec un recouvrement maximum de 2 à 5 %.

En 2011, malgré un ressemis, les adventices sont restées présentes, notamment Chenopodium sp. et Galinsoga parviflora. Toutefois :

- dans le mélange « couleurs », les fétuques et neuf espèces florales semées (Calendula officinalis, Centaurea cyanus, Linum rubrum, Bellis perennis, Malva moschata, Anthemis tinctoria, Hypericum perforatum, Alyssum maritimum et Papaver rhoeas) se sont développées avec des indices de recouvrement allant jusqu'à 5 ; elles occupaient globalement 60 % de la bande fleurie ;

- dans le mélange « verger intégré », huit des espèces semées ont été observées (Daucus carota, Centaurea cyanus, Centaurea thuillieri, Achillea millefolium, Silene latifolia alba, Malva moschata, Chrysanthemum segetum et Papaver rhoeas), leurs indices de recouvrement allant jusqu'à 5 ; leur recouvrement global dépassait 50 %.

Auxiliaires : rôle des bandes fleuries

Les prélèvements d'auxiliaires réalisés sur les couverts végétaux ont montré, en 2010, des proportions sensiblement identiques d'une modalité à l'autre (moins de 5 % de variation entre modalités) (Figure 4). Les hyménoptères représentaient 64 % des effectifs d'auxiliaires toutes modalités confondues, les coléoptères 20 % et les aranéides 7 %. Les dermaptères (4 %), diptères et névroptères (1 %) étaient rares.

En 2011, à la faveur d'une meilleure implantation des espèces semées, des distinctions sont apparues (Figure 4) :

- sur flore spontanée tondue, la proportion d'auxiliaires (14 % des effectifs toutes modalités confondues) n'a cessé de diminuer ; s'y trouvaient des hyménoptères (70 %) et hétéroptères (7 %), plus quelques névroptères, orthoptères, aranéides et diptères ;

- sur la flore spontanée non tondue, les auxiliaires, plus présents (22 %), étaient en majorité des hétéroptères (44 %) et hyménoptères (35 %), plus des orthoptères, diptères, aranéides et quelques névroptères ;

- sur la modalité « couleurs », les auxiliaires étaient plus nombreux (28 %) et diversifiés ; hyménoptères (65 %), hétéroptères (10 %), coléoptères (coccinelles) (14 %), diptères (syrphes) (5 %), névroptères (hémérobes, chrysopes) (2 %), rares aranéides ;

- la modalité « verger intégré » avait le plus grand nombre d'auxiliaires (36 %) ; hyménoptères (51 %), diptères (15 %), coléoptères (14 %), hétéroptères (13 %) et quelques névroptères et aranéides.

Globalement, les auxiliaires étaient plus nombreux et diversifiés sur les modalités « bandes fleuries » que sur celles « flore spontanée », celle tondue toutes les trois semaines abritant très peu d'insectes utiles.

Conséquences

Attractivité de la bande fleurie

Dans le volet 1 de l'étude, au bout de trois ans, la bande fleurie comprenait trois strates : couvre-sol avec Potentilla repens ou Glechoma hederacea, strate moyenne avec Leucanthemum vulgare ou Centaurea thuillieri et strate haute (plus de 50 cm) avec Daucus carota ou Cichorium intybus. Elle était devenue autonome sur le plan hydrique et de moins en moins constituée d'adventices. La floraison s'est étalée, permettant aux auxiliaires floricoles de disposer de nourriture plus tôt et plus tard. Les relevés d'entomofaune ont montré l'attractivité de cet aménagement pour les auxiliaires, notamment hyménoptères. Une concordance entre la présence de ces derniers et le pic de floraison de la bande fleurie a été observée chaque année.

Pommiers : la nuit des forficules

De plus, le suivi des pommiers a révélé des différences entre les arbres avec et sans moustiquaire, suggérant l'influence des auxiliaires sur l'évolution des populations de pucerons cendrés. Sous moustiquaire, les populations de pucerons cendrés ont systématiquement été bien plus élevées, et celles d'auxiliaires plus basses, que sur les arbres sans moustiquaire ou avec moustiquaire la nuit.

Par ailleurs, la baisse plus rapide des populations de pucerons cendrés sur la modalité « moustiquaire la nuit », alors qu'elle présentait des niveaux d'auxiliaires proches de ceux de la modalité « sans moustiquaire » lors des comptages réalisés le jour, suggère l'effet d'auxiliaires présents le jour et retenus la nuit par la moustiquaire.

Ce pourrait être les forficules. En effet, sur la modalité « moustiquaire la nuit », ils étaient souvent présents au lever des voiles le matin. Selon Dib et al. (2010), les forficules seraient des insectes très aptes à contrôler le développement de Dysaphis plantaginea. Leur activité nocturne semble, dans nos conditions, avoir contribué à réduire les populations de pucerons cendrés.

Distance et rôle global, à confirmer

Une possible variation des niveaux de population d'auxiliaires en fonction de la distance séparant les arbres de la bande fleurie a été décelée. Plus les arbres étaient proches de la bande fleurie, plus ils accueillaient d'auxiliaires. Mais, au-delà de 8 mètres, l'effet semblait dilué. Deux années de travail n'ont pas suffi pour prouver l'influence de la bande fleurie sur les niveaux de populations d'auxiliaires à ses alentours et le contrôle du puceron cendré.

Bandes fleuries vs flore spontanée

Concernant le volet 2 de l'étude, aucune différence significative n'est observée entre modalités en 2010, les bandes fleuries étant envahies d'adventices. Mais en 2011, les bandes fleuries sont plus efficaces que la flore spontanée. Cet impact positif est d'autant plus net que la bande fleurie contient beaucoup d'espèces florales odorifères et nectarifères et peu de graminées.

Toutefois, si elle n'est pas tondue et la végétation assez développée, la flore spontanée peut abriter un nombre non négligeable d'insectes utiles, cependant moins diversifiés que sur une bande fleurie.

Conclusion

S'il est admis que les insectes utiles, notamment les syrphes, coccinelles et forficules, contribuent à réguler les populations de pucerons cendrés et que les bandes fleuries favorisent ces auxiliaires, il reste difficile d'établir un lien direct entre aménagement et contrôle du ravageur.

Par ailleurs, il semble que, même peu développée, une bande fleurie se montre plus attractive que la flore spontanée pour les auxiliaires. Mais compte tenu des freins à son installation (coût, risques d'échec), la flore spontanée pourrait être une alternative. Il serait intéressant d'évaluer plusieurs conduites de flore naturelle associées au raisonnement des interventions contre le puceron cendré.

*Fredon Nord Pas-de-Calais.

Fig. 1 : Volet 1 de l'étude, quantité d'auxiliaires sur les bandes fleuries

Populations d'auxiliaires prélevées sur la bande fleurie en 2009, 2010 et 2011 à Loos-en-Gohelle.

Fig. 2 : Auxiliaires dans le volet 1, les hyménoptères dominent, sauf en 2011

Répartition des différents ordres d'auxiliaires (sept d'insectes et les aranéides) prélevés sur la bande fleurie sur le site de Loos-en-Gohelle, année par année.

Fig. 3 : Volet 1, population de puceron cendré sur les pommiers

 Fredon Nord Pas-de-Calais

Fredon Nord Pas-de-Calais

Populations prélevées en 2010 (A) et 2011 (B) à Loos-en-Gohelle par modalité (10 pousses/arbre × 7 arbres).

Fig. 4 : Volet 2 de l'étude, effet du type de couvert végétal à Rumegies (Nord)

Populations d'auxiliaires sur chaque modalité en 2010 (A) et 2011 (B), chez le producteur accueillant le « volet 2 ».

RÉSUMÉ

CONTEXTE - La recherche de moyens alternatifs de protection du pommier contre le puceron cendré Dysaphis plantaginea (Passerini) est une priorité fixée par les arboriculteurs du bassin transfrontalier du nord de la France et de Wallonie.

TRAVAIL - Une étude a été menée sur ce thème par la Fredon Nord Pas-de-Calais en partenariat avec le CRA-W dans le cadre du projet Interreg TransBioFruit.

Deux axes ont été étudiés en vergers :

- l'effet de l'implantation d'une bande fleurie sur le contrôle du puceron cendré à travers une détermination de la distance d'efficacité de la bande fleurie et l'identification des prédateurs potentiels du bioagresseur sur les pommiers et sur la bande fleurie ;

- la comparaison de quatre couverts végétaux (deux bandes fleuries, deux bandes enherbées spontanées) sur les auxiliaires présents au cours du temps.

RÉSULTATS - Plusieurs constats en ont été tirés :

- les bandes fleuries conservent durant plusieurs années une capacité à attirer des auxiliaires ;

- les niveaux de population d'auxiliaires sur les pommiers varient avec la distance séparant les arbres de la bande fleurie ;

- la flore spontanée peut présenter un intérêt vis-à-vis des auxiliaires si elle n'est pas tondue trop fréquemment ; cependant, son attractivité reste inférieure à celle d'une bande fleurie.

MOTS-CLÉS - Verger, pommier, méthodes alternatives, protection intégrée, biodiversité, auxiliaires, bandes fleuries, lutte biologique par conservation, puceron, Dysaphis plantaginea (Passerini).

POUR EN SAVOIR PLUS

CONTACT : karine.wateau@fredon-npdc.com

LIEN UTILE : www.afpp.net

BIBLIOGRAPHIE : la bibliographie de cet article (cinq références) est disponible auprès de ses auteurs (contact ci-dessus) et dans la communication à la Comappi dont il est tiré (lien ci-dessus).

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