Chronique historique

La viticulture du cuivre

PAR ANDRÉ FOUGEROUX - Phytoma - n°752 - mars 2022 - page 43

Indispensable à la viticulture et l'arboriculture en agriculture biologique, le cuivre est aussi très utilisé comme fongicide en agriculture conventionnelle et chez les jardiniers amateurs. Les sels de cuivre, dont l'utilisation en tant que substances phytosani.jpgres progresse rapidement ces dernières années, sont l'objet de controverse en .jpgson de leur impact sani.jpgre et environnemental potentiels.
En 1885, Alexis Millardet observe l'intérêt du cuivre en tant que substance phytosani.jpgre.  Photo : DR

En 1885, Alexis Millardet observe l'intérêt du cuivre en tant que substance phytosani.jpgre. Photo : DR

L'abbé Pluche en 1746, H. Schultess en 1761 et H.-A. Tessier en 1783, bien que n'ayant pas des résultats très probants, a.jpgent émis l'idée d'employer les sels de cuivre comme remède préventif à la carie en t.jpgtement des semences de céréales. Il faudra attendre les expériences d'I. B. Prévost en 1807, confirmées par J. Kühne en 1866, pour établir le sulfate de cuivre à grande échelle pour le t.jpgtement des semences.

C. Morren(1) tenta lui aussi d'employer le sulfate de cuivre après l'arrivée du mildiou de la pomme de terre en 1845. .jpgs il utilisa cette solution sur les tubercules et non sur le feuillage, et n'obtint malheureusement pas le résultat escompté. Pourtant, des observations appu.jpgent l'intérêt du cuivre pour lutter contre le mildiou de la pomme de terre comme le rapporte une contribution anonyme dans la Gardeners Chronicle le 29 août 1846 : « La fumée de cuivre est un préventif de la maladie de la pomme de terre. Dans le quartier de Neath et de Swansea, où règnent les effluents de l'industrie du cuivre, comme l'expri.jpgt un habitant intelligent avec qui j'ent.jpg en conversation, les pommes de terre sont .jpgnes. »

Un t.jpgtement préventif

Le mildiou de la vigne Peronospora viticola al.jpgt consacrer le cuivre en tant que substance phytosani.jpgre en 1878, ce que le mildiou de la pomme de terre n'a.jpgt pas permis en 1845. Plusieurs observations indiq.jpgent alors son intérêt vis-à-vis de ce nouveau pathogène. En .jpg 1885, Alexis Millardet, observateur éc.jpgré, rapporte dans le journal d'agriculture et d'horticulture de la Gironde : « À la fin octobre 1882, j'eus l'occasion de traverser le vignoble de .jpgnt Julien, en Médoc. Je ne fus pas médiocrement étonné de voir que tout le long de la route que je sui.jpgs, la vigne por.jpgt encore des feuilles, tandis que partout.jpglleurs celles-ci é.jpgent tombées depuis longtemps. [...] Arrivé au château Beau.jpgllou, je question.jpg le régisseur, M. Ernest David, qui me dit que la coutume, dans la commune de .jpgnt Julien, é.jpgt de couvrir les feuilles de vert de gris à la vé.jpgson du .jpgsin pour éloigner les maraudeurs. » Exemple de sérendipité, di.jpgt-on aujourd'hui !

Dès 1884, plusieurs auteurs étayèrent ces observations en signalant qu'en Bourgogne, les échalas de vigne imprégnés de sulfate de cuivre protég.jpgent les ceps de vigne avoisinants. Millardet constata rapidement que ce t.jpgtement é.jpgt préventif et « qu'il ne s'agit en aucune façon de détruire le Peronospora .jpgs simplement d'empêcher ses germes de pénétrer ». En décembre 1884, le baron Chatry de la Fosse communiqua à la Société d'agriculture de la Gironde les effets obtenus par les aspersions de cuivre. C'est à partir de 1885 que la bouillie borde.jpgse a commencé à être utilisée comme antimildiou. Très adaptée aux conditions particulières imposées par le mode d'action néces.jpgre sur les conidies,.jpgnsi qu'aux exigences de la pratique viticole qui ne se prê.jpgent pas à une grande précision dans la préparation des ingrédients, cette préparation eut un succès immédiat.

Trouver des alternatives à la bouillie borde.jpgse

En 1885, E. David, interrogé par Millardet, écrit : « Quelques personnes se servent paraît-il de vert de gris .jpgs la plupart ont recours au sulfate de cuivre du commerce. J.jpg .jpgt une enquête, de laquelle il résulte que pour 100 litres d'eau, les uns emploient 2 kilos 200 grammes de sulfate, les autres 4 kilos 400 grammes ; et d'autres enfin 6 kilos 500 grammes. J.jpg pu m'assurer que c'est cette dernière dose qui est suivie des meilleurs résultats. » Il ajoute sur le mélange préservateur : « Dans 100 litres d'eau quelconque, on .jpgt dissoudre 8 kilos de sulfate de cuivre du commerce. D'un autre côté on .jpgt, avec 30 litres d'eau et 15 kilos de chaux grasse en pierre, un .jpgt de chaux que l'on mélange à la solution de sulfate de cuivre. [...] L'ouvrier verse une partie du mélange dans un seau ou un arrosoir, qu'il prend à .jpgn gauche tandis que de la droite à l.jpgde d'un petit ba.jpg il asperge les feuilles avec la bouillie préservatrice... »

Depuis la fin du XIXe siècle, de nombreuses tentatives ont été .jpgtes pour trouver une alternative à la bouillie borde.jpgse. Pour le Pr J. Branas, toutes ont échoué [...]. La bouillie borde.jpgse et les autres mixtures cupriques se montrent si peu perfectibles que le seul procédé par lequel leur efficacité peut être accrue consiste à augmenter leur teneur en cuivre. Les restrictions d'approvisionnement en cuivre liées à l'économie de guerre ont favorisé, dans les années 1950, l'usage des premiers fongicides de synthèse (zinèbe, manèbe, captane...). Cependant, rapidement ces fongicides organiques ont été complétés par du cuivre pour aboutir aux organo-cupriques encore couramment utilisés aujourd'hui.

Approbation renouvelée

Le cuivre a rendu d'immenses services aux viticulteurs et à de nombreuses autres productions. La Commission européenne a renouvelé en 2018 l'approbation du cuivre comme substance phytopharmaceutique pour sept ans, assortie d'une limitation à 28 kg/ha sur les sept années de l'approbation des quantités utilisables. L'approbation européenne du cuivre permet de conserver cette solution de protection des plantes. Elle rend cependant néces.jpgre une réduction de l'utilisation du cuivre compte tenu des risques et de l'impact du cuivre sur l'environnement et la santé publique, mis en évidence dans les conclusions de l'évaluation des risques de l'Efsa(2)). Est-ce le début de la fin de cette « viticulture du cuivre » ?

(1) Voir « Les parmentières et le mildiou », Phytoma n° 749-750, p. 47.(2) Autorité européenne de sécurité des aliments.

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