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ACTUS

GLYPHOSATE LES NOUVELLES RESTRICTIONS D'EMPLOI

Phytoma - n°738 - novembre 2020 - page 4

L'usage du glyphosate est désormais restreint aux situations où il n'existe pas d'alternative à court terme. Ces restrictions sont prises en compte dans les nouvelles autorisations de mise sur le marché et applicables dans un délai de six mois.
Le glyphosate est désormais interdit dans les parcelles de grandes cultures qui peuvent être labourées entre deux cycles annuels de culture. Photo : Pixabay

Le glyphosate est désormais interdit dans les parcelles de grandes cultures qui peuvent être labourées entre deux cycles annuels de culture. Photo : Pixabay

æL'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a lancé en novembre 2018 une évaluation des alternatives non chimiques au glyphosate(1), en s'appuyant sur trois rapports produits par Inrae(2), ainsi que les informations de l'Office national des forêts (ONF) et du Centre national de la propriété forestière. Les résultats ont été rendus publics le 9 octobre 2020. L'évaluation a porté sur quatre principales filières : la viticulture, l'arboriculture fruitière, les grandes cultures et la forêt. Elle conduit à des interdictions d'usage ou à des usages assortis de nouvelles conditions d'emploi (restrictions, réductions de doses par hectare).

æDans les situations où le glyphosate peut être remplacé, « sans inconvénient pratique ou économique majeur », la substance active est désormais interdite. Les cas identifiés par l'Anses sont notamment :

- les interrangs des vignes et des arbres fruitiers, qui peuvent être désherbés mécaniquement, ou enherbés ;

- la dévitalisation des souches en forêt ;

- les parcelles de grandes cultures (céréales, oléagineux, protéagineux, betteraves, pommes de terre...) qui peuvent être labourées entre deux cycles annuels de culture.

æL'agence a pris note des impasses techniques, c'est-à-dire des usages où le glyphosate n'est pas substituable. Pour ces situations, « aucune alternative d'usage courant ne permet de répondre à court terme aux besoins des professionnels, sans nécessiter une modification substantielle des pratiques, qui aurait un fort impact sur l'activité agricole » :

- les situations où le passage d'outils mécaniques est irréalisable, du fait de terrains très caillouteux, en forte pente, buttes ou terrasses ; les vignes mères de porte-greffes conduites en « tête de saule » au niveau du sol ; les cultures fruitières avec récolte mécanique des fruits au sol (noix, pommes à cidre...) ou productions de type buissonnant (noisetier, petits fruits) ;

- le désherbage sous le rang, en viticulture et en arboriculture, pour lequel il n'est pas possible d'assurer une disponibilité suffisante de matériel mécanique adapté (intercep...) ;

- la destruction d'adventices vivaces difficiles à éliminer ;

- l'agriculture de conservation, qui n'utilise pas le labour pour préserver les sols ;

- l'entretien des forêts en période d'installation du peuplement ;

- les pépinières forestières et les vergers à graines.

Par ailleurs, l'utilisation est autorisée en grandes cultures dans les situations de lutte obligatoire réglementée.

æLes doses annuelles maximales autorisées sont diminuées lorsqu'une substitution du glyphosate par des alternatives non chimiques est possible. Ainsi, en viticulture, la limitation de la zone traitée à 20 % au maximum de la surface de la parcelle doit maintenir le désherbage chimique sous le rang à une zone la plus restreinte possible. Cela conduit à limiter la quantité annuelle de glyphosate à 450 g de substance active par hectare et par an, soit une réduction de 80 % par rapport à la dose maximale actuellement autorisée. En situations non mécanisables, la dose annuelle maximale de glyphosate par hectare reste de 2 160 g.

æEn arboriculture fruitière, la dose annuelle maximale autorisée est réduite à 900 g de glyphosate par hectare, pour un désherbage sur le rang, les applications étant limitées à 40 % de la surface de la parcelle, soit une réduction de 60 % par rapport à la dose maximale actuellement autorisée. La dose maximale de glyphosate par hectare est fixée à 2 160 g en terrains non mécanisables ou en cas de récolte mécanique des fruits au sol.

Pour les grandes cultures, la restriction de la dose annuelle maximale autorisée est de 1 080 g par an et par hectare, pour l'usage « Interculture, jachères et destruction de culture » (hors situation de labour effectué avant l'implantation de la culture), soit une réduction de 60 % par rapport à la dose maximale actuellement autorisée. Cette limitation des quantités à l'hectare doit permettre le maintien des usages en agriculture de conservation. La dose maximale reste fixée à 2 880 g/ha/an dans le cadre d'une lutte réglementée.

æDans certaines zones non agricoles (sites industriels, militaires, voies ferrées, autoroutes, aéroports, réseau électrique, conservation des monuments historiques...), « les différents usages du glyphosate ne peuvent pas être totalement substitués par des alternatives non chimiques sans conséquences importantes, notamment pour la sécurité des opérateurs et des utilisateurs de ces services. La réduction de l'usage du glyphosate dans ces différentes situations ne peut donc relever d'une restriction fixée dans les autorisations de mise sur le marché, mais doit s'envisager dans le cadre d'une évolution des pratiques de désherbage. »

æLes conclusions de l'Anses s'appliquent d'ores et déjà lors du renouvellement ou la délivrance des autorisations de mise sur le marché (AMM) des produits à base de glyphosate (voir par exemple en p. 9 et 10). Pour les produits bénéficiant d'un renouvellement de leur AMM, les restrictions d'usage seront mises en application dans un délai de six mois. Les retraits d'usage s'effectueront dans un délai de grâce de 12 mois (six mois pour la vente, six mois pour l'utilisation).

Au niveau européen, la procédure de réévaluation de la substance active interviendra en 2022. La France est l'un des quatre pays membres du consortium en charge du dossier. En vue de cette réévaluation, l'Anses a conçu un dispositif d'études sur le potentiel caractère cancérogène du glyphosate. À la suite du retrait du consortium de sept laboratoires sélectionné en avril dernier pour réaliser ces études, seul le projet du Centre international de recherche sur le cancer (Circ) a été maintenu, avec des résultats attendus pour le second semestre 2021.

POUR EN SAVOIR PLUS

(1) https://www.anses.fr/fr/system/files/Rapport-arboriculture-glyphosate.pdf

https://www.anses.fr/fr/system/files/Rapport-foret-glyphosate.pdf

https://www.anses.fr/fr/system/files/Rapport-grandescultures-glyphosate.pdf

https://www.anses.fr/fr/system/files/Rapport-viticulture-glyphosate.pdf

(2) En viticulture (https://www.inrae.fr/sites/default/files/pdf/Viticulture-glypho-JUILLET%20.pdf), en grandes cultures (https://www.inrae.fr/sites/default/files/pdf/rapport_gly_2020_Final.pdf) et en arboriculture (https://tinyurl.com/y2yfb9ke)

GLOSSAIRE

AMM = autorisation de mise sur le marché

• De biocontrôle L. 253-5 = figurant sur la liste des produits de biocontrôle « établie au titre des articles L. 253-5 et L. 253-7, IV du code rural (...) »

• JORF = Journal officiel de la République française

• JOUE = Journal officiel de l'Union européenne

• MAA = ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation

• Phyto = phytopharmaceutique (qualifie un produit, une substance, un pesticide, un marché...)

• UAB = utilisable en agriculture biologique

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